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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_165/2012 
 
Arrêt du 27 août 2012 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux Klett, présidente, Corboz, Rottenberg Liatowitsch, Kolly et Kiss. 
Greffier: M. Ramelet. 
 
Participants à la procédure 
1. X.________, 
2. Y.________, tous deux représentés par Me Paul Marville, 
recourants, 
 
contre 
 
Z.________ SA, représentée par Me Philippe Mercier, 
intimée. 
 
Objet 
prescription, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile, du 14 décembre 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
En signant le 30 juillet 1996 une formule à l'en-tête de Z.________ SA, à ... (VD), remplie à la main par un employé de cette société, X.________ et Y.________, agriculteurs à ... (VD), lui ont commandé la fourniture et la pose d'une installation complète de traite des bovins de marque "V.________" pour le prix de 112'945 fr., dont à déduire 15'000 fr. de reprise, soit un total arrondi à 95'000 fr. net. Le prix se décomposait en un certain nombre de postes, dont le montage et le transport pour 6'200 fr. 
 
Le 14 août 1996, Z.________ SA a établi une confirmation de commande, qui n'a pas été contresignée par X.________ et Y.________, laquelle mentionne notamment une garantie d'un an selon normes SIA. 
 
Le 10 septembre 1996, le chef de vente de Z.________ SA a établi un plan de l'installation. X.________ et Y.________ ont eux-mêmes transformé, selon les instructions reçues, une ancienne étable en amont de la route xxx, à ..., pour y accueillir l'appareillage. Z.________ SA a livré et monté l'installation en l'adaptant pour tenir compte des dimensions du local. La mise en service a eu lieu le 30 juillet 1997. Z.________ SA a envoyé sa facture finale le 9 septembre 1997 en mentionnant une mise en service le 30 juillet 1997 et en rappelant que le délai de garantie était d'un an. 
 
Le 28 janvier 1998, le Service régional d'inspection et de consultation en matière d'économie laitière a considéré que l'installation était « en ordre ». 
 
Par la suite, Z.________ SA est intervenue à plusieurs reprises pour des contrôles, des services d'entretien et des réparations, en dernier lieu le 15 décembre 2001. 
 
En mars 2001, un conseiller en production laitière a constaté que les vaches de X.________ et Y.________ présentaient une "mammite subclinique". Il a été relevé que l'hygiène du bétail était insatisfaisante. Dans un rapport du 3 avril 2002, le conseiller a mis en cause la machine à traire. 
Par lettre du 8 avril 2002, Y.________, agissant également au nom de X.________, s'est plaint auprès de Z.________ SA de l'installation de traite. 
 
Sur mandat de Y.________ donné ce même 8 avril 2002, B.________, conseillère chez T.________, a établi le 23 juillet 2002 un rapport évaluant à 135'589 fr. la perte économique subie par les agriculteurs. 
 
Toujours à la demande de Y.________, A.________, employé de l'entreprise W.________ SA, a écrit un rapport le 26 juin 2002 au sujet de l'installation de traite. 
 
Le 27 juillet 2002, Y.________ a adressé un pli recommandé à Z.________ SA pour se plaindre principalement de l'installation non conforme des pulsateurs et faire valoir des pertes se montant à un total de 318'764 fr. 
 
Sur requête téléphonique de Y.________ du 18 mars 2003, le Juge de paix du cercle de Mézières a ordonné, le 19 mars 2003, un constat d'urgence. 
 
En 2003, X.________ et Y.________ ont vendu l'installation de traite à C.________, domicilié à ... (NE); l'installation fait depuis lors partie des équipements de cette exploitation agricole et fonctionne à satisfaction. 
 
Le 14 juin 2004, X.________ et Y.________ ont adressé à l'Office des poursuites d'Yverdon-les-Bains une réquisition de poursuite à l'encontre de Z.________ SA pour un montant de 318'764 fr. avec intérêts. Z.________ SA a fait opposition totale au commandement de payer qui lui a été notifié le 4 août 2004. Dans le délai d'une année, le 25 juillet 2005, X.________ et Y.________ ont adressé une nouvelle réquisition de poursuite au même office des poursuites, qui a conduit à la notification d'un commandement de payer le 10 août 2005, auquel la poursuivie a fait opposition totale. 
 
B. 
Par demande du 1er mars 2007 adressée à la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois, X.________ et Y.________ ont conclu à ce que Z.________ SA soit condamnée à leur verser, solidairement entre eux, la somme de 135'189 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 27 août 2002. 
La défenderesse a conclu à sa libération. 
 
L'expert judiciaire a conclu que l'installation de traite ne fonctionnait pas correctement, mais que les règles d'hygiène jouaient un rôle encore plus important; en ne les ayant pas respectées, les demandeurs avaient accentué une situation déjà précaire. 
 
Par jugement du 14 juin 2011, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les conclusions prises par X.________ et Y.________. Elle a considéré que le contrat conclu entre les parties devait être qualifié de contrat de vente avec obligation de montage. Elle a jugé que les conclusions prises devaient être rejetées tant en raison de la tardiveté de l'avis des défauts qu'en raison de la prescription des actions découlant de la garantie. 
 
Saisie d'un appel formé par les demandeurs, la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal vaudois, par arrêt du 14 décembre 2011, a rejeté l'appel et confirmé le jugement attaqué. 
 
C. 
X.________ et Y.________ exercent un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Invoquant une violation des art. 184 ss, 363 ss et 394 ss CO, ils concluent à la réforme du jugement attaqué, subsidiairement à son annulation, et reprennent leurs conclusions sur le fond, demandant que leur partie adverse soit condamnée à leur verser, solidairement entre eux, la somme de 135'189 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 27 août 2002. 
 
L'intimée propose le rejet du recours 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 Interjeté par les parties demanderesses qui ont succombé dans leurs conclusions en paiement et qui ont donc qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF), dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière civile (art. 72 al. 1 LTF) par un tribunal supérieur statuant sur recours en dernière instance cantonale (art. 75 LTF) dans une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est en principe recevable, puisqu'il a été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. 
Il faut observer que l'arrêt attaqué est fondé sur une double motivation: la tardiveté de l'avis des défauts et la prescription. Se conformant à l'exigence de recevabilité posée par la jurisprudence (ATF 138 I 97 consid. 4.1.4 p. 100), les recourants ont attaqué chacune de ces deux motivations alternatives. 
 
1.2 Le recours peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF
 
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est pas limité par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut donc admettre un recours pour d'autres motifs que ceux qui ont été articulés ou, à l'inverse, rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 137 II 313 consid. 1.4 p. 317 s.; 135 III 397 consid. 1.4 et l'arrêt cité). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 137 III 580 consid. 1.3 p. 584; 135 II 384 consid. 2.2.1 p. 389; 135 III 397 consid. 1.4). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine). 
 
1.3 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les constatations factuelles de l'autorité cantonale ont été établies de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 137 I 58 consid. 4.1.2 p. 62; 137 II 353 consid. 5.1 p. 356) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356; 136 I 184 consid. 1.2 p. 187). Une rectification de l'état de fait ne peut être demandée que si elle est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF). 
En l'espèce, les recourants présentent leur propre version des faits, mais sans se référer de manière précise à l'une des exceptions prévues par l'art. 105 al. 2 LTF, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'en tenir compte. 
 
1.4 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Toute conclusion nouvelle est irrecevable (art. 99 al. 2 LTF). 
 
2. 
La Cour d'appel civile, à l'instar de la Cour civile, a retenu que les parties ont été liées par un contrat de vente avec obligation de montage. Selon la doctrine, il s'agit d'une convention qui prévoit, d'une part, la livraison et le transfert de propriété d'une chose ou des parties composantes d'une chose, et, d'autre part, l'activité nécessaire pour mettre cette chose vendue, mais non encore utilisable, en état de servir et de fonctionner conformément à sa destination, le tout en échange d'un prix que l'autre partie s'engage à payer (JEAN-SAMUEL LEUBA, Le contrat de vente avec obligation de montage, Lausanne 1995, p. 29). 
 
Les recourants auraient souhaité que le contrat soit qualifié de contrat d'entreprise (art. 363 CO) ayant pour objet une construction immobilière afin de bénéficier du délai quinquennal de prescription instauré par l'art. 371 al. 2 CO
 
Toutefois, il n'est nul besoin de procéder à une qualification contractuelle, dès l'instant où cette dernière n'a pas d'influence sur le sort du litige. 
 
En effet, le délai de prescription de cinq ans de l'art. 371 al. 2 CO - qui vaut également pour l'ensemble des prétentions en garantie découlant d'un contrat de vente immobilière (art. 219 al. 3 CO) - est échu en l'espèce. 
 
2.1 Le délai quinquennal de prescription en question courait à compter de la livraison de l'ouvrage. 
 
La cour cantonale a constaté en fait - d'une manière qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - que l'installation a été mise en service le 30 juillet 1997 et que l'intimée a envoyé sa facture finale le 9 septembre 1997. Il suit de là que les recourants sont entrés en possession exclusive de l'installation le 30 juillet 1997, sans protestation, alors que l'intimée montrait qu'elle considérait son intervention comme terminée. Il faut donc conclure, d'un point de vue juridique, que la livraison a eu lieu le 30 juillet 1997. 
 
Selon la jurisprudence, les droits de garantie pour les défauts qui n'ont pas été signalés avant l'échéance du délai de prescription sont périmés; autrement dit, il est sans importance que le maître de l'ouvrage ou l'acheteur n'ait appris l'existence du défaut que passé le délai de prescription (ATF 130 III 362 consid. 4). 
 
La dette n'ayant jamais été reconnue (art. 135 ch. 1 CO), la prescription ne pouvait être interrompue - selon la formulation de ladite norme en vigueur au moment des faits - que lorsque le créancier faisait valoir ses droits par des poursuites, par une action ou une exception devant un tribunal ou des arbitres, par une intervention dans une faillite ou par une citation en conciliation (art. 135 ch. 2 aCO). Une requête de preuve à futur, notamment de constat, n'interrompt pas la prescription (ATF 93 II 498 consid. 2 p. 503 en bas). 
 
Il résulte de l'état de fait cantonal déterminant que le premier acte interruptif de prescription est une réquisition de poursuite intervenue le 14 juin 2004. En conséquence, à considérer le dies a quo du délai de prescription, fixé au 30 juillet 1997, six ans, dix mois et quatorze jours se sont écoulés avant que les recourants n'adressent cette réquisition de poursuite. Le délai de prescription quinquennal était alors échu, ce qui entraînait la déchéance de tous les droits résultant de la garantie des défauts, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres conditions d'une action fondée sur cette garantie. La déchéance s'appliquait également à une action en dommages-intérêts qui pourrait être intentée en invoquant une mauvaise exécution contractuelle au sens de l'art. 97 CO (ATF 133 III 335 consid. 2.4.4 p. 341). 
 
2.2 Il est vrai que l'intimée est encore intervenue ponctuellement, après la livraison, pour des contrôles, des services d'entretien et des réparations, cela jusqu'au 15 décembre 2001. 
 
En l'absence d'une obligation durable, chaque intervention d'entretien donne lieu à un contrat d'entreprise si elle aboutit à un résultat objectivement constatable garanti par l'intervenant (ATF 130 III 458 consid. 4 p. 461; cf. aussi: TERCIER/FAVRE, Les contrats spéciaux, 4e éd. 2009, n° 4254 p. 639). 
 
On pourrait donc à nouveau se demander si ces contrats d'entreprise portent sur une construction immobilière, ce qui entraînerait l'application du délai quinquennal de l'art. 371 al. 2 CO
 
Il ne ressort cependant pas de l'état de fait contenu dans l'arrêt attaqué - qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF) - qu'un défaut dont se plaignent les recourants serait né d'une telle intervention et n'existait pas auparavant. Certes, les recourants tentent de soutenir le contraire en évoquant le déplacement du régulateur de vide. Le déplacement de cette pièce était un problème déjà connu des recourants à la suite du rapport A.________ du 26 juin 2002. Pourtant, ils n'en ont pas fait état dans leur lettre détaillée à l'intimée du 27 juillet 2002, ce qui tend à montrer qu'ils n'y attachaient pas d'importance. L'expert judiciaire a traité la question, mais il a observé que le déplacement était intervenu après l'apparition des troubles de santé ayant affecté les vaches. On doit en déduire qu'aucun rapport de causalité naturelle n'a pu être établi entre le déplacement du régulateur et le dommage invoqué. En l'absence d'un défaut dommageable né des interventions postérieures à la livraison, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant si les droits des recourants en relation avec ces interventions seraient ou non prescrits. 
 
2.3 Les frais judiciaires et les dépens doivent être mis solidairement à la charge des recourants qui succombent (art. 66 al. 1 et 5 et art. 68 al. 1, 2 et 4 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis solidairement à la charge des recourants. 
 
3. 
Les recourants, débiteurs solidaires, verseront à l'intimée une indemnité de 6'000 fr. à titre de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour d'appel civile. 
 
Lausanne, le 27 août 2012 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: Klett 
 
Le Greffier: Ramelet