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[AZA 0/2] 
5C.311/2001 
 
IIe COUR CIVILE 
************************** 
 
6 mars 2002 
 
Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann 
et Mme Hohl, juges. Greffier: M. Abrecht. 
 
_________ 
 
Dans la cause civile pendante 
entre 
A.________, demanderesse et recourante, représentée par Me Blaise Stucker, avocat à Neuchâtel, 
 
et 
X.________, défendeur et intimé, représenté par Me Gérard Bosshart, avocat à La Chaux-de-Fonds; 
 
(exécuteur testamentaire) 
Vu les pièces du dossier d'où ressortent 
les f a i t s suivants: 
 
A.- Par contrat de mariage et pacte successoral du 18 janvier 1990, conclu avec son épouse, D.________ a notamment ordonné le rapport des avances faites par parts égales à leurs trois enfants, A.________, B.________ et C.________. S'agissant des actions de l'entreprise familiale D.________ SA, vendues dans l'intervalle à des tiers, il a fixé leur valeur de rapport à 15'000'000 fr. globalement (5'000'000 fr. par enfant) et imposé à ses enfants A.________ et C.________ la charge de restituer à leur frère B.________ sa part au bénéfice réalisé sur la vente des actions rachetées à ce dernier. En relation avec la charge, D.________ précisait que le montant à verser par chacun serait la différence entre le tiers du prix de vente qu'il aurait effectivement perçu et la somme de 2'500'000 fr. payée à B.________ pour le rachat de ses actions, et qu'il s'y ajouterait des intérêts simples au taux de 5% l'an entre le moment où le prix de vente des actions aurait été perçu et celui où la charge serait exécutée. 
 
D.________, qui avait désigné comme exécuteur testamentaire le notaire X.________, est décédé le 29 octobre 1991. 
 
B.- Le 5 juillet 1994, l'exécuteur testamentaire a établi un décompte de la charge due par A.________ à son frère B.________, qui se soldait par un montant net de 1'822'821 fr. en faveur de ce dernier. Le 13 juillet 1994, il a transmis ce décompte à B.________, en l'invitant à donner à A.________, sous réserve de bonne réception de la somme de 1'822'821 fr., pleine et entière décharge de toutes les obligations qu'elle avait à son égard selon le pacte successoral. 
B.________ ayant refusé le décompte le 23 juillet 1994, l'exécuteur testamentaire lui a adressé le 9 août 1994 ce même décompte, complété des intérêts courus dans l'intervalle sur le capital de la charge, en précisant qu'il tiendrait cette somme à disposition, d'ordre de A.________, pour autant que lui soit retournée la décharge jointe à sa lettre du 13 juillet 1994. 
 
En l'absence de la réaction attendue à sa lettre du 9 août 1994, l'exécuteur testamentaire a établi le 12 septembre 1994 un document dans lequel il attestait, à la demande de A.________, avoir reçu de celle-ci, valeur 11 août 1994, pour "consignation" en faveur de son frère B.________, la somme de 1'824'900 fr. Cette somme a été déposée sur deux comptes bancaires à vue, au nom de l'étude X.________, sous rubrique "A. capital" et "A. intérêts". 
 
La "consignation" en question a été proposée à A.________ par l'exécuteur testamentaire: le 21 avril 1994 déjà, alors qu'il préparait le projet de décompte de la charge, celui-ci avait en effet écrit à A.________ que dans son esprit, il conviendrait qu'il propose de la part de cette dernière à B.________ de régler la somme indiquée dans un délai très court, ajoutant que si B.________ devait refuser, A.________ pourrait consigner le montant reconnu. 
 
Le 12 septembre 1994, le mandataire de B.________ a écrit à l'exécuteur testamentaire que son client n'acceptait pas de donner quittance aux conditions posées par A.________ et considérait que les intérêts continuaient à courir sur le montant à payer par celle-ci. L'exécuteur testamentaire s'est contenté de transmettre cette lettre à A.________, sans aucun conseil ou commentaire. 
 
C.- A.________ et B.________ ne parvenant pas à s'entendre sur le montant de la charge, l'exécuteur testamentaire a adressé le 2 avril 1997 au Tribunal civil du district de Neuchâtel une requête tendant à la constatation que les fonds qu'il avait déposés en banque pour A.________ étaient "dûment consignés au sens de la loi". Cette requête a été rejetée le 12 mai 1997. 
 
Le 13 juin 1997, l'exécuteur testamentaire a déposé devant le même tribunal une seconde requête, dirigée cette fois contre A.________, par laquelle il invitait le tribunal à décider où devait s'opérer la consignation des montants qu'il avait déposés sur les comptes bancaires et que A.________ se refusait à reprendre. Par décision du 11 juillet 1997, l'exécuteur testamentaire a été autorisé à consigner les montants à disposition de A.________. 
 
Le 19 août 1997, l'exécuteur testamentaire a répudié son mandat et adressé à la veuve et aux trois enfants de D.________ un relevé de compte présentant un solde d'honoraires et débours en sa faveur de 30'780 fr. 
 
Le 17 septembre 1997, la veuve et les trois enfants de D.________ont signé une convention de partage. Le même jour, et moyennant un versement complémentaire de 355'754 fr. 
65, B.________ a donné à A.________ quittance définitive pour l'exécution complète de la charge imposée par D.________. 
 
D.- Le 26 août 1998, A.________ a actionné X.________ en paiement de la somme de 142'930 fr. 90 avec intérêts à 5% l'an dès le 25 juillet 1997. Elle lui reprochait en substance d'avoir manqué à son obligation de fidélité et de diligence en sa qualité d'exécuteur testamentaire en disposant sous sa seule signature du capital de 1'824'900 fr. qu'elle lui avait versé en croyant avoir ainsi valablement consigné cette somme; or la consignation était invalide et les intérêts avaient continué à courir en faveur de B.________, de sorte que A.________ avait finalement subi de ce fait un dommage de 142'930 fr. 90. Dans ses conclusions en cause, la demanderesse a chiffré plus précisément son préjudice à 140'660 fr. 55; cette somme représentait l'intérêt au taux de 5% l'an du 11 août 1994 au 31 juillet 1997 sur le capital de 1'360'684 fr. reconnu à l'époque de la consignation (201'830 fr. 65), sous déduction de l'intérêt produit par la consignation (61'170 fr. 10). 
 
Le défendeur X.________ a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement, au paiement de 30'780 fr. 
avec intérêts à 5% l'an dès le 19 août 1997. 
 
E.- Par jugement du 29 octobre 2001, la première Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel a rejeté la demande principale et admis la demande reconventionnelle à concurrence de 30'780 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 1er mai 1999, lendemain du dépôt de la demande reconventionnelle. 
Les considérants de ce jugement peuvent être résumés de la manière suivante: 
 
a) Si la somme de 1'824'900 fr. déposée en mains de l'exécuteur testamentaire avait été valablement consignée, le cours des intérêts aurait été arrêté. Il se serait en effet agi d'une consignation tenant lieu d'exécution, qui supposait une demeure préalable du créancier. Or, comme l'avait constaté la Présidente du Tribunal civil du district de Neuchâtel dans son ordonnance du 12 mai 1997, le créancier B.________ n'était pas en demeure en juillet 1994. Les intérêts avaient ainsi continué de courir après le 11 août 1994 (jugement attaqué, consid. 3a). 
 
b) Le défendeur avait indiscutablement commis une erreur en croyant que cette consignation avait un effet libératoire. 
S'il avait été le mandataire de la demanderesse, la question de sa responsabilité se serait certainement posée. 
Toutefois, en sa qualité d'exécuteur testamentaire, le défendeur avait la charge des intérêts collectifs des héritiers, en vue d'exécuter les dernières volontés du de cujus, et ne pouvait donc pas être le mandataire de l'un des héritiers contre l'un ou l'autre de ses cohéritiers. Dans la mesure où un différend opposait certains héritiers à d'autres, l'exécuteur testamentaire devait se limiter à des conseils ou à des propositions, et ne pouvait être tenu pour responsable de la survenance ou de la persistance du différend (jugement attaqué, consid. 3b p. 9). 
 
c) Indiscutablement aussi, la demanderesse n'avait pas pu ignorer que le dépôt qu'elle opérait en mains de l'exécuteur testamentaire ne la libérait pas au même titre qu'une consignation judiciaire. En effet, elle avait elle-même posé cette exigence d'obtenir quittance et décharge de son frère B.________ contre versement de la somme. Or le mandataire de B.________ avait écrit tant à l'exécuteur testamentaire, par lettre du 12 septembre 1994 que ce dernier a communiquée à la demanderesse le 14 septembre 1994, qu'au mandataire de la demanderesse, Me Y.________, par lettre du 11 novembre 1994, que son client n'acceptait pas de donner quittance à ces conditions et qu'il considérait que les intérêts continuaient à courir sur le montant à payer par A.________. En outre, il ressortait d'une lettre écrite à la demanderesse le 15 août 1997 par sa mère que celle-ci lui avait fait expliquer par Me Z.________, lors du dépôt opéré en mains de l'exécuteur testamentaire, que les conditions du pacte successoral ne pouvaient être remplies par ce dépôt. 
Cette situation n'autorisait plus la demanderesse à s'en remettre quasi aveuglément à l'avis de l'exécuteur testamentaire, et elle devait comprendre que la question était litigieuse (jugement attaqué, consid. 3b p. 9-11). 
 
d) Au surplus, la demanderesse, au moment du versement des fonds à l'exécuteur testamentaire, s'était réservé le droit de déconsigner les fonds s'ils ne pouvaient pas être remis à B.________ dans un délai raisonnable, ainsi que le défendeur l'avait rappelé dans sa lettre du 9 août 1994 à B.________, dont la demanderesse avait reçu copie, et dans une lettre du 10 janvier 1995 à Me Y.________ et à la demanderesse directement. On ne pouvait mieux exprimer l'absence de consignation au sens juridique et procédural du terme. À l'époque déjà où l'exécuteur testamentaire préparait un projet de décompte de la charge, il avait indiqué par lettre du 21 avril 1994 à la demanderesse qu'il conviendrait qu'il fasse, de la part de celle-ci, la proposition de régler la somme indiquée dans un délai très court, ajoutant que si B.________ refusait, la demanderesse pourrait consigner le montant reconnu (jugement attaqué, consid. 3b p. 10). 
 
e) Force était ainsi de constater que la demanderesse elle-même n'avait rien ignoré des conséquences du dépôt opéré en mains de l'exécuteur testamentaire le 11 août 1994. 
Ses mandataires successifs pouvaient et devaient la conseiller. 
Devant la contestation clairement exprimée par B.________ et son mandataire, en particulier sur le fait que les intérêts continuaient à courir, elle avait maintenu son exigence d'obtenir quittance et décharge avant de libérer les fonds, alors qu'il aurait été si simple d'opérer le versement de cette somme en précisant qu'elle valait à ses yeux paiement pour solde, quitte à recevoir de son destinataire la mention qu'elle était acceptée à titre d'acompte. De la sorte, l'essentiel du capital aurait été versé et n'aurait plus été productif d'intérêts. En outre, la demanderesse, qui était allée jusqu'à s'opposer contre toute logique à la requête en consignation déposée contre elle le 13 juin 1997 par le défendeur, n'avait pas voulu non plus reprendre les fonds qui étaient pourtant à sa disposition sous préavis de 48 heures vis-à-vis de la banque. Pourtant, outre des conseils juridiques de ses mandataires successifs, elle pouvait bénéficier sur le plan bancaire ou économique des conseils de son propre fils, économiste de formation, qui suivait de près l'évolution de l'affaire (jugement attaqué, consid. 3b p. 11 et consid. 3c p. 12). 
 
f) En définitive, si l'on pouvait admettre que le défendeur avait commis une erreur en parlant de consignation pour le dépôt opéré en ses mains par la débitrice de la charge successorale, l'on devait constater que le refus signifié par le créancier de cette charge d'accepter le montant proposé contre quittance et décharge - avec la précision que les intérêts à 5% continuaient de courir - était parfaitement connu de la demanderesse. Il incombait en conséquence à celle-ci de décider du sort de ce versement en mains de l'exécuteur testamentaire, voire de le faire parvenir au créancier qui ne l'aurait accepté que comme acompte, ou encore de le reprendre dans les 48 heures selon les modalités prévues avec la banque. Si faute il y avait eu, elle avait été largement partagée par la demanderesse et ses conseillers. Elle devait en assumer les conséquences puisqu'elle en connaissait les tenants et aboutissants, et la responsabilité de l'exécuteur testamentaire en tant que tel - qui n'était pas le mandataire de la demanderesse - était dégagée (jugement attaqué, con-sid. 3d p. 12/13). 
 
F.- Contre ce jugement, A.________ exerce en parallèle un recours de droit public et un recours en réforme au Tribunal fédéral. Dans le second, elle conclut avec suite de frais et dépens à la réforme du jugement attaqué en ce sens que le défendeur soit condamné à lui verser la somme de 140'660 fr. 55 avec intérêts au taux de 5% l'an dès le 25 juillet 1997. Le défendeur conclut avec suite de frais et dépens au rejet du recours en réforme. 
Considérant en droit : 
 
1.- a) Aux termes de l'art. 57 al. 5 OJ, il est sursis en règle générale à l'arrêt sur le recours en réforme jusqu'à droit connu sur le recours de droit public. Cette disposition souffre toutefois des exceptions dans des situations particulières, qui justifient l'examen préalable du recours en réforme; il en est ainsi notamment lorsque le recours en réforme paraît devoir être admis indépendamment même des griefs soulevés dans le recours de droit public (ATF 122 I 81 consid. 1 et la jurisprudence citée; 117 II 630 con-sid. 1a et les arrêts cités). Tel étant précisément le cas en l'espèce, il se justifie de déroger au principe posé par l'art. 57 al. 5 OJ
 
b) Le jugement attaqué tranche une contestation civile portant sur des droits de nature pécuniaire dont la valeur dépasse largement 8'000 fr.; il constitue une décision finale, prise par le tribunal suprême du canton de Neuchâtel et ne pouvant être l'objet d'un recours cantonal ordinaire. 
Le recours en réforme, interjeté en temps utile, est donc recevable au regard des art. 46, 48 al. 1 et 54 al. 1 OJ. 
 
2.- a) La demanderesse se plaint de diverses violations du droit fédéral par la cour cantonale. En premier lieu, les considérants du jugement attaqué sur la nature de la responsabilité de l'exécuteur testamentaire (cf. let-tre E/b supra) tomberaient à faux. En effet, la demanderesse ne reproche pas tant au défendeur de n'être pas parvenu à convaincre B.________ d'accepter la charge, mais de lui avoir proposé déjà le 21 avril 1994 (cf. lettre E/d supra) de consigner le montant reconnu si B.________ devait refuser le montant fixé par l'exécuteur testamentaire. 
 
Par ailleurs, la cour cantonale aurait mal appliqué les règles sur la responsabilité de l'exécuteur testamentaire. 
En effet, selon la doctrine et la jurisprudence, cette responsabilité s'apprécie comme celle d'un mandataire; elle impose pour le moins à l'exécuteur testamentaire, en vertu de son obligation de fidélité, de s'abstenir de nuire aux inté-rêts de l'un ou l'autre des héritiers. Or lorsqu'il a été averti le 12 septembre 1994 par le mandataire de B.________ que ce dernier n'acceptait pas de donner quittance aux conditions posées par la demanderesse et considérait que les intérêts continuaient à courir sur le montant à payer par celle-ci, le défendeur - qui était au demeurant l'initiateur du calcul de la charge - s'était contenté de transmettre cette lettre à la demanderesse, sans aucun conseil ou commentaire (cf. lettre E/c supra). Or le défendeur, s'il avait respecté ses devoirs de diligence et de fidélité, aurait dû faire part à la recourante du risque financier que lui faisait courir, en cas de blocage de la situation, le placement à vue effectué pour la "consignation", et requérir de sa part de nouvelles instructions afin de parer à ce risque, pour le moins après un délai raisonnable. 
 
Enfin, la cour cantonale aurait violé le droit fédéral en considérant que la demanderesse avait commis une faute et que cette faute écartait toute responsabilité du défendeur (cf. lettre E/f supra). Celui-ci, en ne signifiant à aucun moment à la demanderesse que, le délai raisonnable étant passé, elle devait lui donner de nouvelles instructions sur le sort des fonds "consignés" - par exemple les reprendre pour rechercher un meilleur placement ou les libérer, comme acompte -, a lui-même commis une faute qui ne saurait être qualifiée de légère. Une éventuelle faute concomitante de la demanderesse aurait tout au plus pu entraîner une réduction de l'indemnité en vertu de l'art. 44 al. 1 CO, mais pas le rejet intégral de la demande. 
 
b) Le disposant peut, par une disposition pour cause de mort, charger de l'exécution de ses dernières volontés un exécuteur testamentaire (art. 517 al. 1 CC). Celui-ci a, sauf si le disposant en a ordonné autrement, les droits et les devoirs de l'administrateur officiel d'une succession; il est chargé de faire respecter la volonté du défunt, notamment de gérer la succession, de payer les dettes, d'acquitter les legs et de procéder au partage conformément aux ordres du disposant ou suivant la loi (art. 518 al. 1 et 2 CC). 
 
Si le défunt a imposé à un héritier ou légataire une charge successorale (art. 482 CC), il entre également dans les compétences de l'exécuteur testamentaire de veiller à son exécution (Peter Breitschmid, Die Stellung des Willensvollstreckers in der Erbteilung, in Praktische Probleme der Erbteilung, Berne 1997, p. 146; Hans Rainer Künzle, Der Willens-vollstrecker im Schweizerischen und US-Amerikanischen Recht, Zurich 2000, p. 66 et les références citées; Jean Nicolas Druey, Die Aufgaben des Willensvollstreckers, in Willensvollstreckung, Berne 2001, p. 10; Arnold Escher, Zürcher Kommentar, Band III/1, Zurich 1959, n. 16 ad art. 518 CC; Jean Lob, Les pouvoirs de l'exécuteur testamentaire en droit suisse, thèse Lausanne 1952, p. 53 et les références citées). 
 
L'exécuteur testamentaire est tenu de renseigner les héritiers sur les faits importants pour le partage de la succession et sur les activités déployées dans le cadre de sa mission (ATF 90 II 365 consid. 3a et b; Künzle, op. cit. , p. 264 ss; Druey, op. cit. , p. 16/17; Breitschmid, op. cit. , p. 117 ss; Martin Karrer, Basler Kommentar, Bâle 1998, n. 17 ad art. 518 CC). L'absence de renseignements ou des renseignements erronés de la part de l'exécuteur testamentaire peuvent engager sa responsabilité (Künzle, op. cit. , p. 266). 
 
La responsabilité de l'exécuteur testamentaire à l'égard des héritiers s'apprécie comme celle d'un mandataire, auquel on l'assimile; l'exécuteur testamentaire étant responsable de la bonne et fidèle exécution des tâches qui lui sont confiées (cf. art. 398 al. 2 CO), il appartient aux héritiers qui s'estiment lésés de prouver la violation de ses devoirs par l'exécuteur testamentaire, le dommage et la relation de causalité entre ces deux faits; la faute de l'exécuteur tes-tamentaire est alors présumée (cf. art. 97 CO) et il lui ap-partient d'établir qu'il n'a pas commis de faute pour échap-per à sa responsabilité (ATF 101 II 47 consid. 2; Künzle, op. 
cit. , p. 335 ss). Lorsqu'il s'agit d'un mandataire au bénéfice d'un diplôme de capacité professionnelle, qui s'est vu délivrer une autorisation officielle de pratiquer et qui exerce son activité contre rémunération, tel qu'un avocat et/ou notaire, on doit pouvoir attendre de lui une diligence particulière en relation avec ses connaissances spécifiques et compter, notamment, qu'il conseille et oriente son client quant aux possibilités juridiques ou pratiques qui se présentent à lui dans certaines situations (ATF 117 II 563 consid. 2a; cf. 
ATF 121 III 350 consid. 6c et la jurisprudence citée en ce qui concerne la responsabilité encourue par celui qui, disposant de connaissances particulières dans un domaine, accepte de fournir des renseignements ou des conseils hors de tout rapport contractuel). 
 
c) En l'occurrence, le défendeur, agissant dans le cadre de ses attributions d'exécuteur testamentaire (cf. consid. 2b supra), a établi le 5 juillet 1994 un décompte de la charge due par la demanderesse à son frère B.________. Le 13 juillet 1994, il a transmis ce décompte à ce dernier en l'invitant à donner à la demanderesse, sous réserve de bonne réception de la somme de 1'822'821 fr., pleine et entière décharge de toutes les obligations qu'elle avait à son égard selon le pacte successoral. Face aux difficultés d'exécution de la charge - B.________ refusant de donner décharge du montant fixé par le défendeur -, la demanderesse a "consigné" le 11 août 1994 en mains du défendeur, sur le conseil de celui-ci, le montant du décompte du 5 juillet 1994, complété des intérêts courus dans l'intervalle sur le capital de la charge. 
Le défendeur a averti B.________ qu'il tenait cette somme à sa disposition pour autant que lui soit retournée la décharge jointe à sa lettre du 13 juillet 1994. Par lettre du 12 septembre 1994, le mandataire de B.________ a répondu au défendeur que son client n'acceptait pas de donner quittance à ces conditions et qu'il considérait que les intérêts continuaient à courir sur le montant à payer par la demanderesse. 
 
Le défendeur, qui croyait à tort que la "consignation" opérée en ses mains le 11 août 1994 avait un effet libératoire et qu'elle avait ainsi arrêté le cours des intérêts dus en vertu du pacte successoral au taux de 5% l'an jusqu'à l'exécution de la charge, s'est contenté de transmettre cette lettre à la demanderesse, sans conseil ni commentaire. 
 
Il a fallu ensuite trois ans pour que la demanderesse et B.________ trouvent un accord pour l'exécution complète de la charge successorale imposée par feu leur père. Le montant finalement payé par la demanderesse à son frère comprenait apparemment l'intérêt au taux de 5% l'an du 11 août 1994 au 31 juillet 1997 sur le capital de la charge reconnu à l'époque de la consignation, soit un montant nettement supérieur, selon les allégations de la demanderesse, à celui des intérêts produits par la "consignation". Dans l'intervalle, le défendeur a attendu le 2 avril 1997 pour tenter sans succès de faire constater par le Tribunal civil du district de Neuchâtel que les fonds qu'il avait déposés en banque pour la demanderesse étaient "dûment consignés au sens de la loi". Au terme d'une deuxième procédure devant le même tribunal, dirigée cette fois contre la demanderesse, il a été autorisé par décision du 11 juillet 1997 à consigner les montants que la demanderesse se refusait à reprendre. 
 
d) Sur le vu de ce qui vient d'être rappelé, force est de constater que le défendeur, notaire et avocat, a violé ses devoirs de renseignement envers la demanderesse en proposant à celle-ci une "consignation" productive d'intérêts nettement inférieurs à ceux prévus au taux de 5% l'an par le pacte successoral et qui continuaient à courir. À tout le moins a-t-il violé ses devoirs en omettant de renseigner la demanderesse, après le refus réitéré de B.________ - assorti de la précision que les intérêts à 5% continuaient à courir - de donner quittance aux conditions posées par la demanderesse, sur les risques financiers que faisait courir à celle-ci le maintien de la "consignation" jusqu'à ce qu'un accord puisse être trouvé sur l'exécution de la charge. Le dommage allégué par la demanderesse est dans son principe en relation de causalité directe avec la violation par le défendeur de ses devoirs. Si la demanderesse avait été dûment renseignée, elle aurait pu faire parvenir les fonds à son frère à titre de paiement partiel dans la mesure où celui-ci acceptait un tel paiement (cf. art. 69 CO), ou les reprendre dans les 48 heures selon les modalités prévues avec la banque et les placer avec un meilleur rendement. 
 
Il ne ressort pas des constatations de fait du jugement attaqué que le défendeur aurait établi n'avoir pas commis de faute, laquelle est présumée (cf. consid. 2b supra). 
Selon l'art. 43 al. 1 CO, applicable par analogie en matière de responsabilité contractuelle (art. 99 al. 3 CO) - à laquelle, comme on l'a vu (consid. 2b supra), la responsabilité de l'exécuteur testamentaire est assimilée -, le juge détermine le mode ainsi que l'étendue de la réparation d'après les circonstances et la gravité de la faute; ainsi, en application de l'art. 44 al. 1 CO, le juge peut réduire les dommages-intérêts ou même n'en point allouer, notamment lorsque des faits dont la partie lésée est responsable ont contribué à créer le dommage, à l'augmenter ou qu'ils ont aggravé la situation du débiteur (ATF 127 III 453 consid. 8c). En l'espèce, rien dans les constatations du jugement attaqué ne permet de considérer la faute concomitante de la demanderesse comme suffisamment grave pour avoir relégué la violation par le défendeur de ses devoirs de renseignement à l'arrière-plan au point que cette violation n'apparaîtrait plus comme la cause adéquate du dommage, ce qui justifierait de ne point allouer d'indemnité du tout (cf. ATF 116 II 422 consid. 3; 115 II 62 consid. 3d). 
 
e) Il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué doit être annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouveau jugement, le Tribunal fédéral ne disposant pas de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la demande (cf. art. 64 al. 1 OJ). Dans la mesure où la procédure cantonale le permet (cf. art. 66 al. 1 OJ), la cour cantonale complétera au besoin le dossier (cf. art. 64 al. 1 OJ) - notamment en vue de déterminer la quotité du dommage qui est en relation de causalité directe avec les manquements imputables au défendeur - avant de statuer à nouveau sur tous les points nécessaires à la résolution du litige, y compris sur les prétentions reconventionnelles du défendeur. Les juges cantonaux auront en particulier à trancher la question de la faute concomitante de la demanderesse (cf. consid. 2d supra), en vue de fixer, dans le cadre de leur large pouvoir d'appréciation (ATF 127 III 453 consid. 8c), la réduction éventuelle de l'indemnité due à celle-ci; à cet effet, ils réexamineront avec soin, eu égard aux critiques formulées sur ce point dans le recours de droit public connexe, la question de savoir dans quelle mesure la demanderesse pouvait bénéficier des conseils de mandataires ou de son fils. 
 
3.- En définitive, le recours, fondé, doit être admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à l'autorité cantonale pour nouveau jugement dans le sens des considérants. 
Le défendeur, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ) ainsi que ceux de la demanderesse (art. 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, 
 
le Tribunal fédéral : 
 
1. Admet le recours, annule le jugement attaqué et renvoie la cause à l'autorité cantonale pour nouveau jugement dans le sens des considérants. 
 
2. Met à la charge de l'intimé: 
a) un émolument judiciaire de 5'000 fr.; 
b) une indemnité de 5'000 fr. à verser à la recourante à titre de dépens. 
 
3. Communique le présent arrêt en copie aux mandataires des parties et à la première Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel. 
 
__________ 
Lausanne, le 6 mars 2002 ABR/dxc 
 
Au nom de la IIe Cour civile 
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE : 
Le Président, 
 
Le Greffier,