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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
7B.32/2004 /frs 
 
Arrêt du 25 mai 2004 
Chambre des poursuites et des faillites 
 
Composition 
Mmes et M. les Juges Escher, Présidente, Meyer et Hohl. Greffier: M. Fellay. 
 
Parties 
Office des faillites de Genève, 
X.________ SA en liquidation, en faillite, 
recourants, 
 
contre 
 
Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève, rue Ami-Lullin 4, case postale 3840, 1211 Genève 3. 
 
Objet 
réalisation de gage consécutive à la suspension de la faillite faute d'actif, 
 
recours LP contre la décision de la Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève du 12 février 2004. 
 
Faits: 
 
A. 
A.a Le 3 septembre 1998, Y.________ SA (ci-après: la créancière) a requis une poursuite en réalisation de gage immobilier à l'encontre de Z.________ sur la base d'une cédule hypothécaire désignant ce dernier comme codébiteur solidaire et grevant des lots PPE constitués sur la parcelle n° xxxx de la commune de A.________, Section B.________, propriété de X.________. 
 
Le commandement de payer (n° xxxxxx) a été notifié le 8 octobre 1998 à cette société, en sa qualité de propriétaire de l'immeuble, qui y a fait opposition, et le 12 du même mois au débiteur, qui n'y a pas fait opposition. L'opposition de la propriétaire a été levée provisoirement le 30 novembre de la même année. Le 12 mai 1999, la créancière a requis la vente des lots objet du gage. 
A.b Le 28 mai 2001, le Tribunal de première instance de Genève a prononcé la faillite de la société propriétaire du gage, de sorte que la vente aux enchères des lots PPE, prévue pour le 30 mai 2002 dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage, a dû être annulée. Le 10 juillet 2003, le tribunal a toutefois prononcé la suspension de la faillite en question faute d'actif (art. 230 al. 1 LP). Cette décision a été publiée dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC) du 23 juillet 2003 avec mention d'un délai au 4 août 2003 pour faire l'avance des frais d'une liquidation, par 4'500 fr. (art. 230 al. 2 LP). 
 
Le 28 juillet 2003, l'Office des faillites de Genève a informé la créancière de la suspension de ladite faillite et lui a indiqué qu'elle avait le choix entre soit demander l'ouverture de la faillite en mode sommaire en effectuant l'avance de frais susmentionnée avant le 4 août 2003, soit demander l'application de l'art. 230a LP, soit faire réaliser son gage par l'office des poursuites en application de l'art. 230 al. 4 LP
A.c Le 30 juillet 2003, l'administration fiscale cantonale, au bénéfice d'une hypothèque légale non inscrite pour l'impôt immobilier privilégié, a demandé l'application de l'art. 230a al. 2 LP. L'office des faillites en a informé la créancière le 14 août 2003, en lui signalant qu'il continuerait dès lors à traiter le dossier. La créancière lui a répondu que l'art. 230a al. 2 à 4 LP ne s'appliquait pas, mais qu'elle ne s'opposait pas à la réalisation du gage immobilier par l'office des faillites pour autant que cette réalisation se fasse dans les meilleurs délais. 
 
Par publication parue dans la Feuille d'avis officielle (FAO) du 27 août 2003, l'office des faillites a invité les créanciers de la faillie à produire jusqu'au 1er octobre 2003. 
A.d Sur requête de l'office des faillites du 11 août 2003, le tribunal de première instance a, par jugement du 1er septembre 2003, prononcé la clôture de la faillite de la société propriétaire du gage. La radiation de cette dernière a été publiée dans la FOSC du 18 septembre 2003, mais l'inscription y relative a été annulée au motif qu'elle avait été opérée à tort, selon publication parue dans la FOSC du 7 octobre 2003. 
 
Le 9 septembre 2003, la créancière a demandé à l'office des poursuites de réactiver sa poursuite en réalisation de gage n° xxxxx conformément à l'art. 230 al. 4 LP et de fixer la date des enchères. Elle a également tenté d'obtenir que l'administration fiscale cantonale accepte une vente du gage par l'office des poursuites dans le cadre de ladite poursuite. Le 7 octobre 2003, l'office des faillites a considéré que la procédure de l'art. 230a LP demandée par l'administration fiscale cantonale était prioritaire. 
 
B. 
La créancière a porté plainte auprès de la Commission cantonale de surveillance en lui demandant d'annuler la décision de l'office des faillites du 7 octobre 2003, d'ordonner l'annulation, aux frais de celui-ci, de l'appel aux créanciers paru dans la FAO du 27 août 2003 et d'ordonner à l'office des poursuites de réactiver la procédure en réalisation de gage immobilier n° xxxxx. 
 
Par décision du 12 février 2004, notifiée le 16 du même mois, la Commission cantonale de surveillance a admis la plainte et donc fait droit aux conclusions de la créancière. 
 
C. 
Par acte du 26 février 2004, l'office des faillites et la faillie, représentée par ce dernier, ont recouru à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral contre la décision de la Commission cantonale de surveillance. Ils la requièrent d'annuler cette décision, d'inviter l'office des faillites à réaliser le gage immobilier en cause et de débouter les parties de toutes autres conclusions. 
La créancière conclut au fond à la confirmation de la décision attaquée. L'administration fiscale cantonale a fait savoir qu'elle n'avait pas d'observations à formuler. Le débiteur n'a pas déposé de détermination. 
 
L'effet suspensif a été attribué au recours par ordonnance présidentielle du 2 mars 2004. 
 
La Chambre considère en droit: 
 
1. 
L'autorité de poursuite ou l'organe de l'exécution forcée dont la décision ou la mesure a été attaquée peut, dans certains cas, avoir qualité pour recourir (P.-R. Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, n. 59 ad art. 19 LP). Cette qualité est notamment reconnue à l'administration de la faillite, contre une décision de l'autorité cantonale de surveillance, pour faire valoir des intérêts de la masse (ATF 117 III 39 consid. 2; 116 III 32 consid. 1; Gilliéron, op. cit., n. 9 ad art. 240 LP; Flavio Cometta, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, n. 19 ad art. 19 LP). 
 
En l'espèce, l'office des faillites ne saurait se voir reconnaître la qualité pour recourir du seul fait qu'il a déposé un rapport en instance cantonale et qu'il chercherait dans son recours à faire prévaloir son opinion sur celle de l'autorité de surveillance (ATF 119 III 4 consid. 1; 116 III 32 consid. 1 et les arrêts cités). Il n'est pas davantage habilité à recourir pour défendre, comme il l'affirme, une solution qui préserve les intérêts de l'ensemble des créanciers de la société faillie. En effet, la procédure de l'art. 230a al. 2 LP (anciennement art. 134 ORFI) est limitée aux personnes intéressées à l'immeuble (ATF 97 III 34 consid. 3); les créanciers non gagistes en sont donc exclus (Franco Lorandi, Einstellung des Konkurses über juristische Personen mangels Aktiven, in PJA 1999, p. 43 let. D; François Vouilloz, La suspension de la faillite faute d'actif, in BlSchK 2001/65, p. 55; Andreas Feuz, Liquidation von Aktiven trotz Einstellung des Konkurses mangels Aktiven?, in Insolvenz- und Wirtschaftsrecht 2002 p. 50). De plus, un éventuel excédent est remis, non aux créanciers de la faillie, mais aux organes autorisés de la personne morale (Lorandi et Vouilloz, loc. cit.; opinion divergente sur ce dernier point: Dominik Gasser, Die Liquidation nach Artikel 230a SchKG, in Schuldbetreibung und Konkurs im Wandel, Festschrift 75 Jahre Konferenz der Betreibungs- und Konkursbeamten der Schweiz, Bâle 2000, p. 61 let. aa in fine, cet auteur préconisant la remise de l'excédent éventuel à l'Etat). 
 
La qualité pour recourir de la faillie, agissant par l'office des faillites, ne fait en revanche aucun doute, vu sa qualité de partie à la procédure de l'art. 230a al. 2 LP pouvant prétendre à la remise d'un éventuel excédent à ses organes autorisés (Lorandi et Vouilloz, loc. cit.). 
 
Il s'ensuit que la Chambre de céans doit entrer en matière. 
 
2. 
Le problème soulevé dans le recours est celui du concours de deux requêtes de réalisation de gage consécutive à une suspension de faillite faute d'actif, l'une fondée sur l'art. 230 al. 4 LP (reviviscence d'une poursuite éteinte par l'ouverture de la faillite en vertu de l'art. 206 LP), l'autre sur l'art. 230a al. 2 LP (requête d'un créancier gagiste). Plus précisément, la question posée est celle de savoir laquelle des deux requêtes a la priorité sur l'autre. 
 
2.1 Selon l'art. 230 al. 4 LP, les poursuites engagées avant l'ouverture de la faillite renaissent après la suspension de celle-ci. Cette règle s'applique à tous les genres et tous les modes de poursuite, les procédures renaissant dans l'état où elles étaient lorsque la faillite a été ouverte (Gilliéron, op. cit., n. 55 ad art. 230 LP). Ainsi, lorsque les enchères fixées dans une poursuite en réalisation de gage immobilier ont été révoquées, comme en l'espèce, en raison de la faillite du propriétaire de l'immeuble, elles peuvent être fixées à nouveau après que la liquidation de la faillite a été suspendue faute d'actif et clôturée (ATF 120 III 141 et les arrêts cités). 
 
Par suspension de la faillite au sens de l'art. 230 al. 4 LP, il faut entendre la publication de l'inscription de la suspension et de la clôture faute d'actif dans la FOSC par les soins de l'Office fédéral du registre du commerce (art. 65 et 66 al. 2 ORC [RS 221.411]; art. 931 et 939 al. 3 CO; Gilliéron, op. cit., n. 53 ad art. 230 LP). En effet, bien que la faillite soit clôturée ipso facto à l'expiration du délai de dix jours prévu par l'art. 230 al. 2 LP - l'ordonnance de clôture rendue par le juge (art. 268 al. 2 LP) étant de nature déclaratoire (Vouilloz, loc. cit., p. 43 et n. 8 avec les références) -, il n'apparaît pas opportun de fixer à ce moment la reviviscence des poursuites éteintes par l'ouverture de la faillite; cela parce que l'on ne sait pas alors si la liquidation de la faillite selon le mode sommaire ne va pas être opérée (art. 230 al. 2 LP) et qu'il ne faut pas inciter des poursuivants à requérir la continuation de poursuites qui ont recommencé à vivre mais qui ne peuvent pas être continuées si des droits patrimoniaux du failli, affectés au désintéressement des créanciers qui seront colloqués, doivent être réalisés par l'administration de la faillite (Gilliéron, ibid.). 
 
2.2 Aux termes de l'art. 230a al. 2 LP, lorsque la masse d'une personne morale en faillite comprend des valeurs grevées de droits de gage et que la faillite a été suspendue faute d'actif, chaque créancier gagiste peut néanmoins exiger de l'office la réalisation de son gage. Cette procédure de liquidation spécifique doit toujours être ouverte d'office. En effet, dès qu'il a connaissance de l'existence de gages, l'office des faillites impartit un délai, généralement de dix à vingt jours, aux créanciers gagistes pour leur permettre d'exiger la réalisation de leurs gages (art. 230a al. 2 2e phrase. LP; Lorandi, loc. cit. p. 42 let. C; Vouilloz, loc. cit. p. 47 let. A; Urs Lustenberger, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, n. 10 ad art. 230a LP). 
 
Déjà compétent lors de la suspension de la faillite, l'office des faillites reste compétent pour cette liquidation spécifique (Lorandi, loc. cit. p. 42 let. B; Vouilloz, loc. cit.; Gasser, loc. cit., p. 60; Lustenberger, loc. cit.). 
 
Cette liquidation spécifique se déroule en cascade, soit: réalisation sur requête d'un créancier gagiste (art. 230a al. 2 LP); à défaut, cession à l'Etat (art. 230a al. 3 LP); en cas de refus de la cession, réalisation par l'office (art. 230a al. 4 LP). Aussi longtemps qu'ils n'ont pas renoncé à la réalisation de leur gage, les créanciers gagistes doivent choisir comme le prescrit l'art. 230a al. 2 LP; s'ils ne réagissent pas, l'office offre la cession des actifs à l'Etat ou réalise ceux-ci conformément aux alinéas 3 et 4 de l'art. 230a LP, étant précisé que le créancier gagiste qui laisse expirer le délai fixé par l'office perd uniquement son droit de demander la réalisation du gage au sens de l'art. 230a LP, son droit de gage subsistant quelle que soit la suite donnée à la procédure (Lorandi, loc. cit., p. 41 et 42/43. let. C; Vouilloz, loc. cit., p. 52 et 54). 
 
2.3 Il résulte donc de ce qui précède que la suspension faute d'actif de la faillite d'une personne morale ne signifie pas nécessairement la fin de la procédure; elle représente plutôt le passage obligé précédant une liquidation spécifique (Vouilloz, loc. cit., p. 46), régie par les règles de la faillite, plus précisément par celles de la procédure sommaire de l'art. 231 LP (Lorandi, loc. cit., p. 43 let. D; Vouilloz, loc. cit., p. 55; Gasser, op. cit., p. 61; Lustenberger, loc. cit.), la réalisation de gage prévue à l'art. 230a al. 2 LP constituant ainsi une exécution spéciale menée dans le cadre d'une exécution générale [faillite] (Lorandi, loc. cit., p. 42 let. A; Vouilloz, loc. cit., p. 53 let. B et 55; Gasser, op. cit., p. 52). 
 
3. 
Dans sa requête de clôture de la faillite du 11 août 2003, l'office des faillites s'est contenté de relever que les créanciers n'avaient pas requis la liquidation de la faillite et n'avaient pas effectué l'avance des frais dans le délai qu'il avait imparti (art. 230 al. 2 LP). Il n'a pas mentionné la demande de l'administration fiscale cantonale du 30 juillet 2003, tendant à l'application de l'art. 230a al. 2 LP, ni même le fait qu'il avait offert à la créancière la possibilité, entre autres, de demander elle-même l'application de l'art. 230a LP. Pour rendre son jugement du 1er septembre 2003 conformément à l'art. 268 al. 2 LP, le tribunal de première instance devait disposer de tous les actes (art. 92 al. 1 OAOF), en particulier de la demande précitée d'application de l'art. 230a al. 2 LP. Au vu du dossier, il ne pouvait manquer de constater en tout cas que la masse en faillite comprenait des "valeurs grevées de droit de gage" (art. 230a al. 2 LP) devant donner lieu à l'ouverture, d'office, de la procédure en cascades prévue par l'art. 230a al. 2 à 4 LP. La procédure de liquidation n'ayant alors pas encore pris fin (cf. consid. 2.2 et 2.3), le tribunal de première instance ne pouvait en prononcer la clôture (cf. Matthias Staehelin, Kommentar zum Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, n. 5 ad art. 268 LP). 
 
Si les autorités de surveillance ne sont évidemment pas habilitées à corriger ou annuler les décisions prises par la voie judiciaire (ATF 120 III 1), il leur incombe en revanche de tenir compte de leur irrégularité ou nullité éventuelle, qu'elles peuvent constater à titre préjudiciel, et de tirer les conséquences qui s'imposent pour la poursuite concernée (ATF 102 III 133 consid. 3 p. 137; 101 III 1 consid. 3 p. 7/8 et les arrêts cités). Attendu que la procédure de liquidation en cause se poursuivait et ne pouvait être clôturée en l'état, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal de première instance, la poursuite en réalisation de gage immobilier éteinte par la faillite n'avait pas encore pu renaître en vertu de l'art. 230 al. 4 LP (cf. consid. 2.1). C'est dès lors à juste titre que l'office des faillites a considéré qu'il devait continuer à traiter le dossier et que la procédure de l'art. 230a LP, dont l'application avait été expressément requise par une créancière gagiste, était prioritaire. 
Dans la mesure où il est recevable (consid. 1), le recours doit par conséquent être admis. 
 
Par ces motifs, la Chambre prononce: 
 
1. 
Le recours est admis dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
La décision attaquée est annulée. 
 
3. 
Le gage immobilier propriété de X.________ SA en liquidation, en faillite doit être réalisé par l'office des faillites conformément à l'art. 230a al. 2 LP
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux recourants, à Z.________, à Y.________ SA, à l'Etat de Genève, Administration fiscale cantonale, et à la Commission de surveillance des offices des poursuites et des faillites du canton de Genève. 
Lausanne, le 25 mai 2004 
Au nom de la Chambre des poursuites et des faillites 
du Tribunal fédéral suisse 
La présidente: Le greffier: