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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4C.246/2003 /ech 
 
Arrêt du 30 janvier 2004 
Ire Cour civile 
 
Composition 
MM. et Mme les Juges Walter, juge présidant, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Nyffeler et Favre. 
Greffière: Mme de Montmollin. 
 
Parties 
X.________ SA, 
défenderesse et recourante, représentée par Me Charles Poncet, avocat, 
 
contre 
 
Y.________ SA, 
demanderesse et intimée, représentée par Me Vincent Solari. 
 
Objet 
transfert de bail 
 
recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 20 juin 2003. 
 
Faits: 
A. 
A.a 
Y.________ SA (ci-après: Y.________) a occupé de 1981 à 1999, en tant que locataire, des locaux d'un seul tenant par étage sis dans un groupe d'immeubles à Genève, où elle exerçait ses activités commerciales. Les locaux faisaient l'objet de six contrats de bail qui devaient venir à échéance le 30 juin 2001. L'art. 3 de ces accords prévoyait que les parties s'avertiraient de leurs intentions au sujet de la résiliation des baux ou de leur renouvellement une année au moins avant la fin du bail, leur silence étant assimilé à un acquiescement à une prolongation d'une année, toutes les conditions du bail demeurant en vigueur et ainsi de suite d'année en année. 
 
Le 10 novembre 1997, les bailleurs ont fait parvenir à Y.________ une offre de renouvellement des baux prenant effet au 1er juillet 2001, avec une hausse de loyer de 6,5 %, ce qui portait le prix du m2 à 652 fr. 25 par an. 
 
Au début de l'année 1998, Y.________ a décidé de déménager. Elle a signé avec des tiers un contrat de bail pour de nouveaux bureaux à Genève dès le 1er mars 1998. 
 
Par courrier du 22 avril 1998, Y.________ a fait savoir à la régie mandataire des bailleurs qu'elle entendait quitter les locaux en fin d'année et qu'elle lui notifierait en temps utile la résiliation des baux pour le 30 juin 2001. Elle précisait qu'elle menait des pourparlers avec plusieurs sociétés en vue du transfert des baux concernés et qu'elle appréciait sa collaboration pour négocier avec elles des contrats de longue durée, probablement pour dix ans à partir de 1999. 
A.b Dès le printemps 1998, Z.________ SA, devenue le 2 mai 2001 X.________ SA (ci-après: X.________), s'est intéressée à la reprise des locaux loués par Y.________. 
 
Par lettre du 19 mai 1998, Y.________ a indiqué à X.________ qu'elle était en train de rédiger à son attention six contrats de cession de bail, étant précisé que d'autres sociétés étaient également sur les rangs. Elle ajoutait que la cession des contrats en une transaction était préférable, que l'offre de son interlocutrice était la plus intéressante, tout comme son autre offre, relative à la reprise d'une partie de son mobilier et équipement. Elle réservait la décision des propriétaires en mentionnant qu'un entretien serait fixé à cet effet et que les questions à débattre comprenaient notamment la durée des contrats de bail après le 30 juin 2001, échéance des baux alors existants. 
 
Le 27 mai 1998, Y.________ a envoyé à X.________ trois projets de contrats de transfert de bail. Ces projets, auxquels le bailleur était aussi partie, prévoyaient que X.________ reprendrait les locaux selon les dispositions du bail, y compris toute modification ultérieure, avec effet au premier avril 1999. Le bailleur y donnait son consentement exprès. Aucune condition relative à un éventuel renouvellement du bail après le 30 juin 2001 n'y figurait. 
A.c Dès l'été 1998, X.________ s'est adressée directement à la régie mandataire des bailleurs pour négocier les conditions d'un renouvellement du bail après le 30 juin 2001. Le 17 juillet 1998, la régie a proposé à X.________ de reconduire le bail des locaux dès le 1er juillet 2001 au prix de 662 fr. le m2, soit à des conditions à peu près similaires à celles proposées à Y.________ en novembre 1997. A la mi-août 1998, X.________ a mandaté des représentants afin de négocier la conclusion d'un bail à des conditions plus favorables pour elle que celles offertes par les bailleurs. Les discussions n'ont pas abouti. 
 
Le 26 octobre 1998, Y.________ et X.________ ont passé une convention portant sur la cession d'une partie des locaux litigieux. Selon l'art. 1 de cet accord, Y.________ s'engageait à céder les baux en question à X.________ avec effet au 1er avril 1999; suivait l'énumération des étages et des surfaces concernés ainsi que le montant des loyers annuels, sous réserve d'une augmentation de loyer intervenue entre-temps; la clause précisait que la cession des contrats de bail à loyer ferait l'objet de contrats en bonne et due forme. L'art. 3 indiquait que X.________ était intéressée à reprendre simultanément une partie des installations et meubles se trouvant dans les locaux cédés; les modalités relatives à la reprise de ce mobilier et de ces installations feraient l'objet de négociations séparées entre les parties concernées. 
 
Le 27 octobre 1998, les représentants des bailleurs et de X.________ se sont réunis. Les bailleurs ont été informés de la signature de la convention susmentionnée. Les pourparlers interrompus entre les participants ont repris. Ceux-ci n'ont pu se mettre d'accord sur le montant des loyers. 
Le 29 octobre 1998, Y.________ a écrit à X.________, à la demande de cette dernière, pour lui confirmer que les baux à loyer visés par la convention du 26 octobre 1998 n'avaient pas été résiliés par ses soins. Y.________ réitérait en outre les engagements pris dans la convention du 26 octobre 1998 et annonçait qu'elle adresserait à son interlocutrice les conventions de cession de baux dans les meilleurs délais. 
A.d Le 9 novembre 1998, les bailleurs ont fait notifier à Y.________ des avis de résiliation des baux avec effet au 30 juin 2001. 
 
Le 24 novembre 1998, X.________ a adressé au représentant des bailleurs une nouvelle offre au sujet du montant des loyers des locaux en se référant à la cession des baux avec effet au 1er avril 1999 qu'elle avait obtenue. Celui-ci a répondu le 30 novembre que les propriétaires, auxquels il avait soumis la nouvelle offre, n'avaient jamais consenti à la cession. 
 
Le 10 décembre 1998, Y.________ a fait savoir aux bailleurs qu'elle considérait la résiliation des baux comme abusive. Le même jour, Y.________ et X.________ ont chacune déposé une requête devant la commission de conciliation tendant principalement à ce qu'il soit constaté que les baux avaient été valablement transférés à X.________, que leur résiliation était nulle ou annulable, et, subsidiairement, à ce que les contrats soient prolongés pour six ans dès le 30 juin 2001. 
 
Les négociations entre X.________ et les bailleurs se sont définitivement interrompues une semaine plus tard. Par courrier du 22 décembre 1998, X.________ a fait savoir à Y.________ qu'elle considérait que la fin de non-recevoir opposée par les bailleurs à sa dernière offre rendait impossible l'exécution de la "convention préliminaire du 26 octobre 1998" car elle n'entendait pas entrer dans des locaux dont les baux avaient été résiliés et dont les propriétaires refusaient toute proposition. Le 12 janvier 1999, Y.________ a répondu qu'elle considérait son interlocutrice comme valablement liée par la cession du 26 octobre 1998. 
 
Les deux requêtes pendantes devant la commission de conciliation ont été retirées courant janvier 1999. Par la suite, Y.________ a trouvé un nouveau locataire qui a assumé le paiement du loyer d'une partie des locaux à partir du 1er février 2000 et du tout à partir du 1er avril 2000. 
B. 
Le 13 novembre 2002, Y.________ a assigné X.________ devant le Tribunal de première instance du canton de Genève en paiement de 1 475 645 fr. avec intérêts à 5 % dès le 1er octobre 1999, arguant de l'inexécution de la convention du 26 octobre 1998. Par jugement du 23 mai 2002, le tribunal a fait entièrement droit à la demande. Cette décision a été confirmée par la Cour de justice du canton de Genève le 20 juin 2003. 
C. 
X.________ recourt en réforme au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 20 juin 2003. Ses conclusions tendent à l'annulation de la décision attaquée et principalement au rejet de la demande, subsidiairement au renvoi de la cause en instance cantonale. Invoquant la violation des art. 1, 2, 18, 22 et 263 CO, elle soutient en bref que la convention du 26 octobre 1998 ne constitue pas un contrat parfait, se prévalant en outre de l'exception "non adimpleti contractus" sur la base de l'art. 82 CO, ou des règles sur l'impossibilité subséquente au sens de l'art. 119 CO
 
Y.________ propose le rejet du recours. 
 
La cour cantonale ne présente pas d'observations. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations reposant sur une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille compléter les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). En dehors de ces exceptions, il ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ). Celui qui s'en prend à une constatation de fait dans le cadre d'un recours en réforme doit établir avec précision, et en se référant aux pièces du dossier, que les conditions prévues par les art. 63 al. 2 ou 64 OJ sont réalisées (ATF 119 II 353 consid. 5c/aa; 115 II 399 consid. 2a, 484 consid. 2a). 
 
En l'espèce, l'état de fait dressé en début de l'acte de recours s'écarte parfois des constatations de la Cour de justice. Dans la mesure où la défenderesse ne démontre nullement en quoi l'une ou l'autre des exceptions rappelées ci-dessus serait réalisée, on ne peut prendre en considération cette partie de son écriture. Il en va de même pour plusieurs griefs qui, bien que figurant dans les développements juridiques du recours, s'adressent en réalité à des éléments relevant du fait, notamment en ce qui concerne la volonté réelle des parties. 
2. 
Si le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de l'autorité cantonale, il n'est en revanche lié ni par les motifs que les parties invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par l'argumentation juridique de la cour cantonale (art. 63 al. 3 OJ). Il peut donc admettre un recours pour d'autres raisons que celles qui sont développées à son appui ou rejeter un recours en adoptant une autre argumentation juridique que celle de la cour cantonale (ATF 127 III 248 consid. 2c et les références). 
3. 
La cour cantonale a considéré que la convention du 26 octobre 1998 ne constituait pas une promesse de contracter, mais un contrat à part entière. Elle contenait en effet tous les éléments essentiels à la conclusion d'un transfert de bail: la date de la reprise, les locaux visés, les parties concernées et le prix des surfaces. La reconduction des baux après leur échéance contractuelle ou l'accord écrit des bailleurs au transfert ne représentaient pas des points essentiels dans le cadre des relations contractuelles que la demanderesse et la défenderesse avaient décidé de nouer. Les bailleurs ne s'opposaient pas au transfert en lui-même, mais aux conditions posées par la défenderesse pour la période après l'échéance du contrat alors en vigueur. Pour avoir poursuivi durant plusieurs mois les négociations sur la reprise, les propriétaires n'auraient d'ailleurs pas pu refuser leur accord à l'opération. Les enquêtes avaient en outre établi que la défenderesse savait que le prix serait revu à la hausse et qu'elle estimait que c'était à elle et non à la demanderesse de mener les discussions à propos de la conclusion de nouveaux baux. Juridiquement, la défenderesse pouvait reprendre les baux en question pour la durée contractuelle restante. En outre, la teneur les écritures produites devant la commission de conciliation montrait que l'intéressée ne nourrissait aucun doute quant au caractère contraignant de la convention du 26 octobre 1998. 
 
Enfin, la résiliation des baux litigieux, dont la cause était l'échec des pourparlers entre les bailleurs et la défenderesse, elle-même artisane de ce résultat, ne portait pas atteinte au caractère exécutoire et obligatoire de la convention du 26 octobre 1998; rien n'aurait empêché la défenderesse de reprendre les baux jusqu'à leur échéance contractuelle du 1er juillet 2001. 
 
Dans ces conditions, la demanderesse avait droit à la réparation de son dommage selon l'art. 97 CO
4. 
Il convient d'examiner d'abord si la convention du 26 octobre 1998 constitue une promesse de contracter ou un contrat parfait. La défenderesse soutient qu'il s'agit plutôt d'un contrat ou d'une promesse de contrat boiteux ne la liant pas car des éléments essentiels ne sont ni déterminés ni déterminables; les bailleurs n'ont en outre pas donné leur consentement écrit au transfert. 
5. 
La conclusion du contrat est soumise aux règles générales des art. 1er et 2 CO. Son interprétation s'opère conformément à l'art. 18 CO
5.1 Selon l'art. 1er al. 1 CO, le contrat est parfait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante, manifesté leur volonté. Si elles ne se mettent pas d'accord sur tous les éléments essentiels du contrat, celui-ci ne vient pas à chef (ATF 127 III 248 consid. 3c, 3d et 3e). On distingue entre les points objectivement essentiels - c'est-à-dire ceux qui constituent le noyau dur de l'opération envisagée, qui doivent être nécessairement réglés pour que l'accord forme un tout fonctionnel, généralement les éléments mentionnés dans la définition légale du type de contrat - et les points subjectivement essentiels - à savoir ceux qui constituent aux yeux d'une partie ou des deux une condition "sine qua non" de la conclusion du contrat. 
 
L'art. 2 CO permet aux parties de réserver des points secondaires. Si elles ne parviennent en définitive pas à s'entendre sur ceux-ci, le juge les règle en tenant compte de la nature de l'affaire. 
La réserve d'un point à régler peut être convenue de manière informelle, même dans le cadre d'un contrat soumis à une exigence de forme (ATF 127 III 248 consid. 3e). 
 
L'art. 22 CO laisse la faculté aux parties de se lier par un précontrat, soit de s'engager à passer une convention future. Cette figure juridique est critiquée par de nombreux auteurs. Dans la jurisprudence aussi, il a été observé que souvent la promesse de contracter s'identifie au contrat principal, ce qui est le cas lorsqu'il s'agit dans le précontrat de conclure un contrat principal entre les mêmes parties aux mêmes conditions. Dans la mesure en effet où une promesse de contracter n'est valide que si les parties ont réglé les points essentiels, ou au moins que ceux-ci sont déterminables, on ne voit pas ce qui la distingue, logiquement, du contrat principal dont la conclusion obéit aux mêmes conditions; dans ces circonstances, le précontrat donne naissance directement à l'action en exécution (ATF 118 II 32 consid. 3b et c; cf. aussi Dessemontet, Commentaire romand, n° 3 ss ad art. 22 CO). 
5.2 Pour déterminer l'existence et le contenu d'un contrat, le juge doit d'abord rechercher la réelle et commune intention des parties, cas échéant empiriquement, sur la base d'indices; on parle d'interprétation subjective (ATF 129 III 664 consid. 3.1). Si le juge y parvient, il s'agit d'une question de fait qui ne peut être remise en cause dans un recours en réforme (ATF 129 III 118 consid. 2.5; 126 III 25 consid. 3c). Si la volonté réelle des parties ne peut être établie, ou si elle est divergente - et dans ces hypothèses seulement - le juge doit interpréter les déclarations faites et les comportements observés par les parties selon la théorie de la confiance (ATF 128 III 265 consid. 3a; 127 III 444 consid. 1b). Il recherchera donc comment une déclaration ou une attitude devait être comprise selon les règles de la bonne foi, en fonction de l'ensemble des circonstances (ATF 126 III 59 consid. 5b, 375 consid. 2e/aa). Même si la teneur d'une clause contractuelle paraît claire à première vue, il peut résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les parties ou d'autres circonstances que son texte ne restitue pas exactement le sens de l'accord conclu (ATF 127 III 444 consid. 1b). Il n'y a cependant pas lieu de s'écarter du texte adopté par les intéressées lorsqu'il n'y a pas de raisons sérieuses de penser qu'il ne correspond pas à leur volonté (ATF 129 III 118 consid. 2.5; 128 III 265 consid. 3a). Le principe de la confiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement même s'il ne correspond pas à sa volonté intime (ATF 129 III 118 consid. 2.5). Cette interprétation objective est une question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner librement (ATF 129 III 664 consid. 3.1). 
 
Le contenu de la manifestation de volonté et les circonstances relèvent cependant du fait (ATF 129 III 118 consid. 2.5; 126 III 375 consid. 2e/aa). 
5.3 Selon l'art. 263 CO, le locataire d'un bail commercial peut transférer son bail à un tiers avec le consentement écrit du bailleur. Ce dernier ne peut refuser son accord que pour de justes motifs. Dès que celui-ci est délivré, le cessionnaire se substitue au locataire dans la relation juridique préexistante, avec tous les droits et obligations qui en découlent; il n'y a donc pas de nouveau bail (Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., n° 2268 s.). Naturellement, une modification du contrat peut intervenir selon les règles générales si le bailleur donne son consentement en toute connaissance de cause (Higi, Commentaire zurichois, n° 46 ad art. 263 CO; plus réservé, Christophe Reymond, Le transfert du bail commercial, in Questions de droit 2001 n° 9, p. 8). Le locataire transférant répond toutefois solidairement avec le cessionnaire des obligations de celui-ci jusqu'à l'expiration du bail ou la résiliation de celui-ci mais dans les deux cas pour deux ans au plus. 
 
C'est au locataire qu'il appartient de présenter la demande de transfert, cette démarche dont la preuve lui incombe. L'exigence de la forme écrite est destinée à faciliter cette preuve. La jurisprudence précise que l'exigence de la forme écrite ne doit pas être confondue avec celle du consentement. Plusieurs auteurs soutiennent en effet qu'il peut y avoir abus de droit à invoquer l'absence de la forme écrite si le consentement a été donné par actes concluants (ATF 125 III 226 consid. 2a et les références; Higi, op. cit., n° 28 ad art. 263 CO; Lachat, Commentaire romand, n° 5 ad art. 263 CO). Si le bailleur ne donne pas de réponse ou refuse son consentement, c'est encore le locataire qui doit saisir le juge en invoquant l'absence de justes motifs (ATF 125 III 226 consid. 2a). 
 
Pour déterminer s'il y a de justes motifs, on fait généralement appel aux mêmes critères que ceux qui permettent de juger si un locataire de remplacement peut être raisonnablement refusé (art. 264 CO; arrêt 4C.411/1997 du 24 mars 1998 consid. 2). La question se résout de cas en cas, au regard de l'ensemble des circonstances propres à la cause en litige (ATF 119 II 36 consid. 3d). Outre des motifs touchant par exemple à la personne du reprenant, ou du bailleur, comme la solvabilité du premier, il est des circonstances concernant le bail lui-même et son affectation. Savoir si le fait que le transfert intervienne à une date proche du terme du bail constitue un motif d'empêchement, en raison du risque accru d'une demande de prolongation que cette circonstance peut comporter, est controversé en doctrine (Christophe Reymond, op. cit., p 9; pour: Barbey, Le transfert de bail commercial, in SJ 1992 p. 56; contre: Lachat, op. cit., n° 6 ad art. 263 CO). 
 
Si le bailleur refuse son consentement, la convention entre le locataire et le tiers n'a aucun effet sur les rapports juridiques entre le locataire et le bailleur (Message du Conseil fédéral in FF 1985 I 1425). Le consentement de ce dernier est une condition suspensive du transfert (ATF 125 III 226 consid. 2b), à laquelle s'appliquent donc les art. 151 ss CO, notamment l'art. 156 CO en cas d'empêchement frauduleux de l'accomplissement de la condition par l'une des parties. Wessner (Le nouveau droit du bail à loyer, 6e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1990, p. 17 s) a néanmoins défendu l'avis qu'une telle convention pourrait valoir "cession de bail", soit la cession - au sens de l'art. 164 CO - du droit d'usage de la chose à un tiers cessionnaire. Cette opération, parfois qualifiée de "cession cumulative" puisqu'elle ne libère pas le preneur de ses obligations, sauf aux conditions de l'art. 176 CO, ne nécessite pas le consentement du bailleur (ATF 93 II 453 consid. 2a), mais son admissibilité pour les locaux commerciaux dans le nouveau droit du bail est controversée (cf. Higi, op. cit., n° 11 15 ad art. 263 CO). 
 
Limité aux locaux commerciaux, le transfert de bail intervient en général dans le cadre d'une remise de commerce, qui porte en outre sur la vente des installations mobilières ou de la clientèle, contrat sui generis (ATF du 10 décembre 1986 in SJ 1987 p. 177). Les conséquences du refus de consentement du bailleur au transfert du bail sur le contrat de remise de commerce ne sont pas réglées par l'art. 263 CO. La question de savoir si le contrat peut être ou non invalidé dépend de l'interprétation de l'accord, qui souvent érigera en condition suspensive, selon les art. 151ss CO, l'obtention du consentement du bailleur (cf. ATF 109 II 20 sur l'application de l'art. 156 CO dans un cas où le futur reprenant adopte un comportement provoquant le refus du bailleur de consentir à la reprise ou à la conclusion d'un nouveau contrat de bail de manière contraire à la bonne foi), subsidiairement de la mise en oeuvre des art. 23 ss CO sur les vices du consentement (Barbey, op. cit., p. 57; cf. aussi Higi, op. cit., n° 5, 19 et 50 ad art. 263 CO) . 
6. 
Il n'apparaît pas que la cour cantonale ait violé les règles qui précèdent en retenant que les parties étaient valablement liées par la convention du 26 octobre 1998. 
 
D'emblée, on relèvera qu'on ne comprend pas sur quoi la défenderesse fonde le reproche qu'elle adresse à la cour cantonale d'avoir déplacé l'objet du litige et en réalité interprété des projets de convention de mai 1998 et non la convention signée du 26 octobre 1998. Sont également vaines les critiques adressées à la détermination par la cour cantonale de la volonté réelle des parties, qui sont des questions de fait soustraites à l'examen du Tribunal fédéral dans la procédure du recours en réforme (art. 63 al. 2 OJ). 
 
Cela étant, tous les éléments objectivement essentiels du contrat de bail, et de son transfert, sont déterminés ou déterminables sur la base du document signé le 26 octobre 1998. Le loyer est mentionné; la réserve d'une augmentation éventuelle paraît explicable dans la mesure où le bail initial subsiste, avec ses clauses éventuelles permettant une modification du loyer (sur le caractère essentiel du montant du loyer: ATF 119 II 347 consid. 5a et les auteurs cités; arrêt 4C.162/2001 du 11 décembre 2001 in SJ 2002 I 241 consid. 2a; Tercier, Les contrats spéciaux, 3e éd., n° 1745). La défenderesse se heurte par ailleurs aux constatations de fait de la cour cantonale lorsqu'elle soutient que les locaux objets de la reprise n'étaient pas déterminés. Les surfaces et les étages sont expressément décrits, à la seule exception non relevée par la recourante des places de parking dans le garage souterrain, dont la convention ne donne pas le nombre exact mais indique le prix de 6000 fr. à l'année. Enfin, les parties à l'accord sont connues. Contrairement à ce que la défenderesse prétend, les bailleurs ne doivent pas être parties à celui-ci, mais simplement donner leur consentement. La cour cantonale a souverainement constaté (art. 63 al. 2 OJ) que les bailleurs - avec lesquels la défenderesse avait préféré mener directement les négociations concernant le montant des loyers après l'échéance des baux cédés - n'avaient en réalité jamais refusé leur accord à la reprise, mais leur accord aux conditions proposées par la défenderesse en cas de reconduction des contrats. Le montant des loyers restait la pierre d'achoppement; rien n'indique dans l'arrêt attaqué que le fait que le transfert ne porte pas sur tous les locaux ait posé le moindre problème. On a vu ci-dessus que l'exigence de la forme écrite posée à l'expression du consentement a pour but de favoriser la preuve de l'existence de celui-ci, mais qu'il peut y avoir abus pour l'une des parties à se prévaloir de la non-observation de cette forme lorsque la réalité de celui-ci est établie comme en l'occurrence (ATF 125 III 226 consid. 2b). De toute façon, comme la cour cantonale l'a bien relevé, les bailleurs n'auraient pas pu faire valoir de justes motifs pour s'opposer au transfert du contrat au moins jusqu'à l'expiration de celui-ci, dans les circonstances d'espèce, après avoir accepté de négocier pendant plusieurs mois les conditions de la reprise. 
 
On aurait pu s'attendre à ce que la défenderesse fasse dépendre la validité du transfert des baux durant les 15 mois restant de la reconduction de ceux-ci après le 1er juillet 2001. S'il ne s'agit pas d'un élément objectivement essentiel du transfert, il aurait pu s'agir d'un élément subjectivement essentiel de celui-ci. Aucune condition de ce type ne figure toutefois dans la convention du 26 octobre 1998. Celle-ci paraît complète sur les autres points, puisqu'elle réserve expressément à un accord ultérieur le prix de reprise du mobilier et des installations - ce qui en fait un élément secondaire au sens de l'art. 2 CO ne faisant pas obstacle à la venue à chef du contrat. Avec les premiers juges, on se basera sur le principe jurisprudentiel voulant qu'une partie qui considère un point objectivement secondaire comme une condition de son engagement doive le déclarer nettement, à défaut de quoi la présomption de l'art. 2 al. 1 CO joue contre elle et le contrat est réputé conclu (ATF 118 II 32 consid. 3). Il convient de s'en tenir à cette règle dans le cas d'espèce, d'autant plus que la défenderesse était assistée de mandataires qualifiés. 
 
La cour cantonale s'est en outre conformée à la jurisprudence en considérant que la promesse de contracter, dans la mesure où elle réglait tous les éléments essentiels de la cession des baux, fondait directement une action en exécution (ATF 118 II 32 précité). 
 
Dans ces conditions, c'est à bon droit que la cour cantonale a retenu que la convention du 26 octobre 1998 constituait un contrat valablement venu à chef, étant observé que la question d'un vice du consentement, spécialement de l'existence d'une erreur essentielle sur la base nécessaire du contrat au sens de l'art. 24 al. 1 ch. 4 CO n'a pas été évoquée en l'occurrence. Les moyens pris de la violation des art. 1, 2, 18 et 22 CO doivent être rejetés. 
7. 
Le contrat étant considéré comme valablement venu à chef, reste à examiner si, comme le prétend la défenderesse, les art. 82 CO et 119 CO lui permettent de se dégager de toute obligation. 
7.1 S'agissant de l'art. 82 CO, la défenderesse soutient que la demanderesse n'a pas pris toutes les mesures préparatoires nécessaires pour exécuter l'obligation conformément au contrat, n'ayant entrepris aucune démarche efficace pour obtenir le consentement des bailleurs. Elle n'a dès lors pu mettre à disposition les locaux litigieux, ce qui autoriserait sa cocontractante à invoquer l'exception "non adimpleti contractus". 
 
Cette manière de voir se heurte à nouveau aux constatations de fait des juges cantonaux. Selon l'arrêt attaqué, la défenderesse a signifié le 22 décembre 1998 à la demanderesse sa volonté de ne pas exécuter la convention du 26 octobre 1998, soit plusieurs mois avant la remise prévue des baux pour le 1er avril 1999, arguant que la fin de non-recevoir opposée par les bailleurs à sa dernière offre rendait "impossible l'exécution de la convention préliminaire du 26 octobre 1998 car (elle) n'entendait pas entrer dans des locaux dont les baux ont été résiliés et dont le propriétaire refuse d'entrer en matière sur quelque proposition que ce soit". Or l'exception, dilatoire, de l'art. 82 CO ne peut être invoquée par le débiteur qui conteste comme en l'espèce l'existence même de son obligation ou encore soutient que sa prestation est devenue impossible (ATF 122 III 66 consid. 3; Hohl, Commentaire romand, n° 6 ad art. 82 CO). En refusant de mettre en oeuvre l'art. 82 CO, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral. 
7.2 Pour la défenderesse, la cour cantonale a violé deux fois l'art. 119 CO, en n'admettant pas que d'une part le défaut de consentement écrit des bailleurs à la reprise constituait une impossibilité juridique à la mise en oeuvre de la convention du 26 octobre 1998, et que d'autre part l'échec des pourparlers rendait impossible l'exécution de dite convention, vu les frais excessifs qu'impliquerait le déménagement d'un établissement bancaire pour une durée limitée; selon les règles de la bonne foi en affaires, on ne saurait exiger d'elle deux déménagements en un laps de temps aussi court. 
 
Sur le premier point, on peut simplement se référer à ce qui a été dit plus haut à propos de l'absence de preuve écrite du consentement des bailleurs à la reprise des baux litigieux pour la période visée dans la convention du 26 octobre 1998. 
 
Sur le second, on peut adopter l'avis de la cour cantonale selon lequel les difficultés pratiques et financières liées à deux déménagements sur une période de 15 mois ne constituent pas un cas d'impossibilité au sens de l'art. 119 CO. De plus, le Tribunal fédéral est lié par la constatation de fait (art. 63 al. 2 OJ) de la cour cantonale selon laquelle la défenderesse était l'artisane de l'échec des pourparlers, la responsabilité du débiteur constituant un motif d'exclusion de l'application de l'art. 119 CO (Aepli, Commentaire zurichois, n° 56 ad art. 119 CO). Enfin, on n'est pas en présence d'un événement objectivement imprévisible permettant la mise en oeuvre de la "clausula rebus sic stantibus" (Aepli, op. cit., n° 43 ad art. 119 CO; Thévenoz, Commentaire romand, n° 5 ad art. 119 CO; Winiger, Commentaire romand, n° 193 ss ad art. 18 CO). 
8. 
Au vu de ce qui précède, les instances cantonales ont condamné à juste titre la défenderesse à réparer le préjudice résultant de l'inexécution de la convention du 26 octobre 1998 en application des art. 97 ss CO. Devant le Tribunal fédéral, l'intéressée renonce expressément à critiquer le calcul du dommage. 
9. 
Le recours doit être rejeté. La recourante supportera les frais de justice et versera une indemnité de dépens à l'intimée (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 12 000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
3. 
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 14 000 fr. à titre de dépens. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 30 janvier 2004 
Au nom de la Ire Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le juge présidant: La greffière: