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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
1B_407/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 16 décembre 2013  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président, Aemisegger, Merkli, Karlen et Eusebio. 
Greffier: M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représenté par Me Nicola Meier, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève,  
intimé. 
 
Objet 
détention pour des motifs de sûreté, 
 
recours contre l'ordonnance du Président de 
la Cour de justice du canton de Genève, 
Chambre pénale d'appel et de révision, 
du 11 octobre 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
Par jugement du 8 mai 2013, le Tribunal correctionnel du canton de Genève a condamné X.________ à dix mois de privation de liberté (sous déduction de 150 jours de détention avant jugement) pour vol en bande et séjour illégal. Par décision du même jour, le tribunal a ordonné le maintien en détention pour des motifs de sûreté, en raison du risque de fuite. 
Par arrêt du 20 septembre 2013, la Chambre pénale d'appel et de révision du canton de Genève (ci-après: CPAR) a admis l'appel formé par le Ministère public et a révoqué la libération conditionnelle accordée en septembre 2012 pour un solde de peine de deux ans et deux mois, fixant la peine d'ensemble à deux ans et six mois. Cet arrêt ne dit rien sur le maintien en détention. 
 
B.   
Le 8 octobre 2013, le Ministère public s'est adressé au Président de la CPAR en relevant qu'au 9 octobre 2013, le condamné aurait passé dix mois en détention, ce qui correspondait à la peine prononcée en première instance. Compte tenu de la peine infligée en appel, la détention devait être maintenue, mais à ce stade, la direction de la procédure n'incombait plus au Ministère public, et celui-ci ne pouvait pas délivrer un ordre d'écrou puisque le délai de recours contre l'arrêt du 20 septembre 2013 n'était pas échu. 
Le 8 octobre 2013, le Président de la CPAR a rendu une ordonnance sur mesures provisionnelles ordonnant le maintien de X.________ en détention pour des motifs de sûreté; une audience a été convoquée au 10 octobre 2013 afin d'entendre l'intéressé. Lors de cette audience - et préalablement par télécopie -, l'avocat de X.________ a demandé la récusation du Président, celui-ci s'étant déjà prononcé sur le fond en appel. Il estimait par ailleurs que le titre de détention du 8 mai 2013 n'était plus valable et qu'aucune base légale ne permettait un nouveau prononcé après la procédure d'appel. 
Par ordonnance du 11 octobre 2013, le Président de la CPAR a confirmé sa décision sur mesures provisionnelles et ordonné le maintien en détention de X.________ avec effet au 9 octobre 2013. Le Président a estimé qu'il n'y avait pas motif à se récuser, et a transmis la demande de récusation à la CPAR. La compétence du Tribunal des mesures de contrainte (Tmc) ayant été écartée par le législateur pour la procédure d'appel, il y avait lieu de reconnaître celle de la CPAR lorsque la peine prononcée en première instance arrivait à échéance après le jugement rendu en appel, par application analogique de l'art. 388 let. b CPP. Les conditions d'une détention pour des motifs de sûreté étaient réunies; l'intéressé n'avait aucun titre de séjour ni aucune attache en Suisse, et avait déclaré vouloir retourner en Roumanie. 
 
C.   
Par acte du 11 novembre 2013, X.________ forme un recours en matière pénale par lequel il demande au Tribunal fédéral, principalement: de constater l'incompétence du Président de la CPAR et l'illicéité de l'ordonnance de mesures provisionnelles du 8 octobre 2013; d'annuler l'ordonnance du 11 octobre 2013; d'ordonner sa mise en liberté; de constater l'illicéité de la détention subie du 9 octobre 2013 à minuit au 11 octobre 2013, et de lui octroyer une indemnité de 200 fr. par jour de détention injustifiée. Subsidiairement, il demande le renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
La CPAR a fait savoir, après l'échéance du délai fixé, qu'elle renonçait à se déterminer. Le Ministère public ne s'est pas non plus déterminé. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Selon l'art. 78 LTF, le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions rendues en matière pénale. En font partie les décisions relatives à la détention pour des motifs de sûreté au sens des art. 220 ss CPP
 
1.1. Prise par la direction de la procédure de la juridiction d'appel, la décision attaquée ne peut pas faire l'objet d'un recours cantonal (cf. art. 232 al. 2 et 380 CPP). Le recours au Tribunal fédéral est dès lors directement ouvert, nonobstant le caractère incident de la décision attaquée (ATF 137 IV 22 consid. 1 p. 23).  
 
1.2. Conformément à l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le prévenu a qualité pour agir. Le recourant indique que nonobstant les décisions présidentielles, il a été remis en liberté le 11 octobre 2013, sans que l'on sache les raisons d'un tel élargissement. Le recourant n'en conserve pas moins un intérêt actuel au recours, dans la mesure où celui-ci tend à une constatation d'illicéité et à une indemnisation pour les jours de détention qu'il prétend illégale. Par ailleurs, la jurisprudence fait exception à l'exigence d'un intérêt actuel au recours lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle ne perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 137 I 23 consid. 1.3.1 p. 25, 120 consid. 2.2 p. 123; 137 II 40 consid. 2.1 p. 41). Ces conditions sont réunies en l'espèce, ce qui justifie d'entrer en matière.  
 
1.3. Le recourant a requis la récusation du Président de la CPAR. Cette question a été soumise au collège de cette juridiction, appelé à rendre une décision séparée. Le recourant pourrait sans doute remettre en cause directement la validité de la décision attaquée en faisant valoir dans son recours qu'elle émane d'un juge récusable. Il déclare toutefois lui-même qu'il renonce à développer ce grief, de sorte que le Tribunal fédéral, faute de toute motivation (art. 42 al. 2 et 106 al. 2 LTF) n'a pas à examiner la question.  
 
2.   
Le recourant estime que la décision de maintien en détention pour des motifs de sûreté, prise par le Tribunal correctionnel à l'issue des débats, arrivait à échéance le 9 octobre 2013 à minuit. En effet, cette mesure avait pour but de garantir l'exécution de la peine prononcée en première instance (art. 321 al. 1 let. a CPP), soit dix mois de privation de liberté. Dans la mesure où elle tendait aussi à assurer la présence de l'intéressé à la procédure d'appel (art. 321 al. 1 let. b CPP), ce but avait également été atteint. Cette manière de voir n'est contestée ni par le Ministère public (qui a requis l'intervention de la CPAR à l'échéance des dix mois de privation de liberté), ni par l'autorité intimée. Le recourant considère que la décision de la direction de la procédure de la CPAR violerait les art. 232 et 388 CPP: les mesures provisionnelles ou un ordre de mise en détention ne pourraient selon lui être prononcés que pour la durée de la procédure d'appel, et non près de 20 jours après le prononcé de l'arrêt. Le recourant est d'avis que dans ce cas, seul le Tmc pouvait statuer. 
 
2.1. La détention pour des motifs de sûreté commence au dépôt de l'acte d'accusation et s'achève lorsque le jugement devient exécutoire, lorsque le prévenu commence à purger sa peine ou lorsqu'il est libéré (art. 220 al. 2 CPP). Devant le tribunal de première instance, le Tmc demeure compétent pour ordonner le maintien ou la mise en détention, sur requête du ministère public ou de la direction de la procédure (art. 229 et 230 CPP). Au moment du jugement, le tribunal de première instance doit se prononcer sur la mise ou le maintien en détention (art. 231 al. 1 CPP). Il doit le faire par décision motivée, au moment du prononcé oral du jugement ou par une décision écrite séparée, dans les plus brefs délais (ATF 139 IV 179). S'il omet de le faire ou tarde à rendre son jugement, il lui appartient de réexaminer lui-même d'office l'adéquation aux principes de célérité et de proportionnalité de la détention pour des motifs de sûreté (ATF 139 IV 94 consid. 2.3 p. 96).  
 
2.2. Dès que la juridiction d'appel est saisie (art. 399 al. 2 CPP), les art. 231 à 233 CPP confèrent à la direction de la procédure de cette juridiction différentes compétences en matière de détention pour des motifs de sûreté: elle peut revenir sur la libération ordonnée par le tribunal de première instance après un jugement d'acquittement (art. 231 al. 2 CPP), ordonner une mise en détention en raison de faits nouveaux apparus pendant la procédure d'appel (art. 232 CPP) et statuer sur les demandes de libération formées durant la procédure d'appel (art. 233 CPP). Elle est également compétente pour maintenir le prévenu en détention si l'autorité de première instance a omis de se prononcer sur ce point (arrêt 1B_683/2011 du 5 janvier 2012 consid. 2.3 publié in Pra 2012 p. 791). La détention n'est toutefois plus soumise à un contrôle périodique, une demande de mise en liberté pouvant être présentée en tout temps (ATF 139 IV 186 consid. 2.2 p. 188). Le législateur a clairement exclu la compétence du Tmc à ce stade, considérant que celui-ci ne pouvait être appelé à statuer sur des demandes formées par une instance supérieure (FF 2006 1217).  
Lors du prononcé du jugement en appel, la juridiction doit, à l'instar du tribunal de première instance, se prononcer sur la question de la détention. En effet, si l'autorité d'appel entre en matière, son jugement se substitue à celui de première instance (art. 408 CPP); il y a lieu, dès lors d'appliquer mutatis mutandis l'art. 231 CPP et de décider si le condamné doit être placé ou maintenu en détention pour garantir l'exécution de la peine ou en prévision d'un éventuel recours, pour autant que les conditions de l'art. 221 CPP soient satisfaites. La juridiction d'appel peut ainsi prononcer le maintien de la détention pour des motifs de sûreté, ou ordonner une mise en détention en se fondant sur l'art. 232 CPP. La jurisprudence considère en effet qu'une éventuelle condamnation en appel peut constituer un motif de détention apparu en cours de procédure au sens de l'alinéa premier de cette disposition (ATF 138 IV 81 consid. 2.1 p. 83); cette décision, qui doit être dûment motivée, peut être prononcée par le tribunal in corpore dans le cas où elle est rendue dans le cadre du jugement sur appel (même arrêt consid. 2.5), ou par la direction de la procédure si elle est rendue après le prononcé (arrêt 1B_219/2013 du 16 juillet 2013 consid. 2.1). Lorsqu'un recours a été déposé au Tribunal fédéral contre le jugement d'appel, cela n'a pas pour conséquence de transférer à la juridiction fédérale les compétences cantonales en matière de prolongation de détention ou de mise en liberté (cf. arrêts 6B_101/2013 du 23 août 2013 consid. 3, 6B_135/2012 du 18 avril 2012 consid. 1.6). 
 
2.3. En l'occurrence, l'arrêt de la CPAR a été rendu le 20 septembre 2013; il ne se prononce pas sur le maintien de la détention pour des motifs de sûreté. Le recourant et les autorités intimées s'accordent à admettre que la détention aurait été valablement prolongée jusqu'au 9 octobre 2013, date d'échéance de la condamnation de première instance. Compte tenu des principes rappelés ci-dessus, cette manière de voir ne peut être partagée puisqu'il appartenait à la juridiction d'appel d'ordonner, au moment de son prononcé, le maintien en détention du recourant. A défaut d'une telle décision, il n'existait plus de titre de détention valable après le 20 septembre 2013, ce qu'il y a lieu de constater, le recours étant au demeurant dépourvu de toute motivation et de toute conclusion sur ce point.  
 
2.4. Le Président de la cour cantonale a été saisi dix-huit jours après le prononcé de l'arrêt, durant le délai de recours au Tribunal fédéral. Dans ces circonstances, il y a lieu de considérer que les conditions de l'art. 232 CPP étaient réunies et que la direction de la procédure de la juridiction d'appel pouvait encore statuer sur le maintien de la détention pour des motifs de sûreté. Le recourant estime à tort que la compétence "ordinaire" du Tmc devrait être retenue dans un tel cas: si, comme cela a été rappelé ci-dessus, l'intervention du Tmc a été exclue par le législateur pour la procédure d'appel, pour des motifs tenant aux différents niveaux de juridiction, il n'y a pas lieu, a fortiori, de la réintroduire à un stade plus avancé encore de la procédure pénale. La décision attaquée ne viole pas, par conséquent, l'art. 232 CPP.  
 
2.5. Dans la mesure où la direction de la procédure de la juridiction d'appel conserve des compétences en matière de détention pour des motifs de sûreté après le prononcé du jugement d'appel, le grief de violation de l'art. 388 CPP doit lui aussi être écarté. Cette disposition générale (qui s'applique à la procédure d'appel) permet en effet à la direction de la procédure d'ordonner la mise en détention du prévenu (let. b). Il n'est au demeurant pas contesté que le recourant a été entendu et que la décision attaquée a été rendue dans les 48 heures après le prononcé sur mesures provisionnelles; le délai fixé à l'art. 232 CPP a ainsi été respecté. La détention subie du 9 au 11 octobre 2013 n'a dès lors rien d'illicite.  
 
2.6. Pour le surplus, le recourant ne conteste nullement que les conditions de fond à un maintien en détention (soit notamment les charges suffisantes telles qu'elles résultent du jugement d'appel et le risque de fuite, particulièrement évident en l'espèce) sont remplies.  
 
3.   
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans toutes ses conclusions. Le recourant a requis l'assistance judiciaire et les conditions en sont réunies. Me Meier est désigné comme avocat d'office du recourant, rétribué par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Nicola Meier est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice du canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 16 décembre 2013 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Fonjallaz 
 
Le Greffier: Kurz