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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
6B_680/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 6 novembre 2013  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Mathys, Président, 
Schneider et Jacquemoud-Rossari. 
Greffier: M. Vallat. 
 
Participants à la procédure 
X.________, représenté par Me François Membrez, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Neuchâtel, rue du Pommier 3, 2000 Neuchâtel,  
intimé. 
 
Objet 
Ordonnance de classement partiel (déni de justice formel), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Autorité de recours en matière pénale, du 6 juin 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
Le 24 avril 2012, X.________ a adressé au Ministère public du canton de Neuchâtel une plainte pénale à l'encontre de A.________ pour abus de confiance, escroquerie et gestion déloyale. Il lui reprochait, en résumé, d'avoir encaissé 4'561'504,142 LYD (dinars libyens; soit 3'275'660 francs suisses) devant revenir à la société B.________ SA ayant son siège à L.________ - dont A.________ était administrateur et actionnaire à 60% et lui-même actionnaire à 40% -, par le biais d'une société homonyme incorporée par l'administrateur aux Iles vierges britanniques. Après avoir, notamment, entendu le prévenu et donné à X.________ la possibilité de s'exprimer, le ministère public a rendu le 10 décembre 2012 une ordonnance par laquelle il a classé partiellement la procédure à l'endroit du prévenu dans la mesure où aucune infraction aux art. 138 et 146 CP n'était retenue (ch. 1), refusé à X.________ la qualité de partie plaignante dès l'entrée en force de dite ordonnance de classement partiel (ch. 2), dit que dès l'entrée en force de cette même ordonnance X.________ aura la qualité de dénonciateur (ch. 3), écarté les conclusions civiles de la partie plaignante (ch. 4) et mis à la charge de cette dernière une part des frais à concurrence de 1000 fr. (ch. 5). 
 
B.   
Statuant sur le recours de X.________, par arrêt du 6 juin 2013, l'Autorité de recours en matière pénale du Tribunal cantonal neuchâtelois a déclaré ce recours irrecevable en tant qu'il s'en prenait aux chiffres 2 à 4 du dispositif de l'ordonnance précitée. Elle en a annulé le chiffre 5, relatif aux frais de première instance et mis ceux de seconde instance cantonale à hauteur de 700 fr. à la charge du recourant, une indemnité partielle de dépens de 100 fr. lui étant, par ailleurs, allouée à charge de l'Etat. 
 
C.   
X.________ recourt en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant principalement à sa réforme en ce sens que la qualité de partie plaignante lui soit reconnue et, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à la cour cantonale afin qu'elle statue sur sa qualité de partie plaignante et ses griefs relatifs aux chiffres 2 à 4 de l'ordonnance du 10 décembre 2012. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Le Tribunal fédéral examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis, la qualité pour recourir, en particulier. 
 
Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 5 LTF, la partie plaignante qui a participé à la procédure de dernière instance cantonale est habilitée à recourir au Tribunal fédéral si la décision attaquée peut avoir des effets sur le jugement de ses prétentions civiles. Indépendamment de sa qualité pour recourir sur le fond, le plaignant peut invoquer la violation de droits que la loi de procédure applicable ou le droit constitutionnel lui reconnaît comme partie à la procédure, lorsque cette violation équivaut à un déni de justice formel (ATF 136 IV 41 consid. 1.4 p. 44, 29 consid. 1.9 p. 40). Il en va notamment ainsi de la décision qui déclare irrecevable un recours cantonal au motif du défaut de qualité de partie plaignante du recourant (v. parmi d'autres arrêt 6B_252/2013 du 14 mai 2013 consid. 1.1). 
 
En l'espèce, le recourant ne remet pas en question le classement partiel en relation avec les accusations d'abus de confiance et d'escroquerie formulées dans sa plainte, mais uniquement le refus de le considérer comme partie plaignante dans le cadre de la procédure pénale demeurant ouverte pour gestion déloyale, respectivement l'irrecevabilité de son recours cantonal pour ce motif. Il a, partant, qualité pour former un recours en matière pénale sur ce point précis. 
 
La décision rejetant une demande de constitution de partie plaignante dans le procès pénal présente par ailleurs, pour la partie concernée, qui se trouve définitivement écartée de la procédure, les traits d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (ATF 128 I 215 consid. 2 p. 215 ss). Le recours, de surcroît recevable à la forme et déposé en temps utile, apparaît ainsi recevable. 
 
2.   
En résumé, la cour cantonale considère que la question de la recevabilité du recours cantonal, en tant qu'il s'en prend aux chiffres 2 à 4 du dispositif de l'ordonnance du 10 décembre 2012, se confond avec celle de la qualité de plaignant du recourant, le recours étant recevable si ce dernier a cette qualité, mais ne l'étant pas s'il n'a pas - comme plaignant ou à un autre titre - d'intérêt juridique au recours. Le recourant n'étant atteint qu'indirectement ou par ricochet par un éventuel acte de gestion déloyal commis par le prévenu au préjudice de la société anonyme suisse dont le recourant est actionnaire, il ne peut, selon la cour cantonale, être considéré comme lésé au sens de l'art. 115 al. 1 CPP, ce qui exclurait qu'il eût qualité pour recourir au regard de l'art. 382 CPP
 
Le recourant reproche à la cour cantonale un déni de justice formel (art. 29 al. 1 Cst.) en tant qu'elle a déclaré son recours irrecevable. Il invoque également la violation des art. 115 et 382 CPP
 
3.   
La qualité pour former recours est définie à l'art. 382 al. 1 CPP, disposition générique en matière de qualité pour recourir. Selon cette norme, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision a qualité pour recourir contre celle-ci. La notion de partie visée à l'art. 382 CPP doit être comprise au sens des art. 104 et 105 CPP. L'art. 104 al. 1 let. b CPP reconnaît notamment cette qualité à la partie plaignante soit, selon l'art. 118 al. 1 CPP, au lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil. La notion de lésé est, quant à elle, définie par l'art. 115 al. 1 CPP, qui dispose qu'a cette qualité toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Les droits touchés sont les biens juridiques individuels tels que la vie et l'intégrité corporelle, la propriété, l'honneur, etc. Un dommage n'est pas nécessaire pour être lésé au sens de l'art. 115 CPP. L'atteinte directe selon cette disposition se rapporte à la violation du droit pénal et non à un dommage (ATF 139 IV 78 consid. 3.3.3 p. 81 s.). En d'autres termes, est considérée comme personne lésée le détenteur d'un bien juridique que la disposition pénale en question protège directement d'une atteinte ou d'une mise en danger (ATF 138 IV 258 consid. 2.3 p. 263). Selon une pratique constante et ancienne, la séparation des patrimoines de l'actionnaire et de la société anonyme conduit, sauf démonstration de l'existence d'un autre intérêt juridique, à considérer que l'actionnaire n'est pas lésé (soit touché directement) par les atteintes aux droits protégés pénalement dont est titulaire la société anonyme (v. p. ex.: arrêts 6S.365/2005 du 8 février 2006 consid. 4.2.1; 6S.325/2000 du 6 septembre 2000; 1P.437/1993 du 3 novembre 1993). 
 
3.1. Le recourant ne conteste pas cette approche dans son principe. En se référant à un article de doctrine ( ANDREW M. GARBARSKI, La constitution de partie civile de l'actionnaire en procédure pénale: analyse critique de la jurisprudence de la Chambre d'accusation, SJ 2010 II p. 47 ss), ainsi qu'à la jurisprudence rendue dans le canton de Zurich sous l'empire de l'ancien droit de procédure, il soutient qu'il se justifierait néanmoins, dans certaines circonstances particulières, de reconnaître à l'actionnaire la qualité de plaignant.  
 
3.2. Dans la contribution précitée, son auteur rappelle que selon la pratique initiée par la Chambre d'accusation du canton de Genève en 1996, l'actionnaire d'une société qui n'est pas en faillite peut se voir reconnaître la qualité de partie plaignante, moyennant qu'il agisse au profit de la société, en ce sens que les conclusions qu'il sera appelé, cas échéant, à prendre devant l'autorité de jugement ne pourront concerner que la société, par exemple, la réserve des droits de celle-ci. Cette jurisprudence repose sur un parallèle avec l'art. 756 al. 1 CO, disposition qui prend en considération le fait qu'il faut donner à ces actionnaires la faculté de procéder en cas d'inaction de la direction de la société, ce qui permet de résoudre le conflit d'intérêt qui se poserait si la société bénéficiait de la légitimation active ( GARBARSKI, op. cit., p. 53 et la réf. à l'ordonnance de la Chambre d'accusation genevoise OCA/226/96 du 20 novembre 1996).  
 
Cette approche, qui pouvait peut être s'expliquer par une certaine imprécision des normes cantonales genevoises déterminantes ( JO PITTELOUD, Code de procédure pénale suisse, commentaire à l'usage des praticiens, 2012, art. 115 CPP, n° 249) n'est cependant plus compatible avec le texte même de l'art. 115 CPP, qui exige expressément que le lésé soit touché directement par l'infraction dans ses droits protégés par la norme pénale. Dans son message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, le Conseil fédéral a également indiqué de manière très claire, tout en soulignant qu'il fallait laisser à la jurisprudence et à la doctrine le soin de définir, dans les détails, la qualité de lésé, que la titularité du bien juridique était seule déterminante (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale, du 21 décembre 2005, FF 2005 1057 ss, ch. 2.3.3.1). Du reste, l'auteur auquel se réfère le recourant souligne lui-même que la pratique genevoise, qui n'était déjà plus compatible avec la conception dite « pénaliste » de la notion de lésé à laquelle s'était, par ailleurs, rattachée la Chambre d'accusation, ne l'était pas non plus avec l'ancienne approche, dite « civiliste », celle-ci exigeant un dommage direct, cependant que l'actionnaire qui entend fonder sa qualité de lésé sur l'art. 756 al. 1 CO ne peut invoquer que le dommage subi par la société et agir pour celle-ci (  Prozessstandschaft; GARBARSKI, op. cit., p. 52 et 54 s.). Enfin, l'interprétation fidèle au texte de l'art. 115 CPP trouve appui dans la doctrine très largement majoritaire, pour ne pas dire unanime, relative à cette norme (v. PITTELOUD, loc. cit.; apparemment du même avis bien que concédant un certain flou en ce qui concerne la situation dans la société anonyme: MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Code de procédure pénale, 2013, art. 115 CPP n° 9; ANDREW GARBARSKI, Qualité de partie plaignante et criminalité économique: Quelques questions d'actualité, RPS 2012 p. 160 ss, spéc. p. 165 et 177; MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, in Basler Kommentar, Strafprozessordnung, 2011, art. 115 CPP, nos 28 et 54; CAMILLE PERRIER, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2011, art. 115 CPP, n° 13; VIKTOR LIEBER, in Kommentar zur schweizerischen Strafprozessordnung, 2010, art. 115 CPP, nos 4 et 5).  
 
3.3. Par ailleurs, la jurisprudence zurichoise à laquelle se réfère le recourant vise la situation dans laquelle la société anonyme se trouve en faillite, l'actionnaire faisant valoir des prétentions en responsabilité au sens de l'art. 754 CO, auxquelles la société a renoncé (art. 757 al. 2 CO). Elle se fonde sur le rapport particulier existant entre les créanciers et le patrimoine de la société lésée, créé par la réglementation légale du sort des prétentions en responsabilité (ZH: Kassationsgericht, 5 août 2004, reproduit in ZR 2005 p. 14 ss, spéc. consid. 4c/cc p. 19). Or, en soulignant que la société dont il est actionnaire n'est qu'en situation de « quasi-faillite », le recourant ne met en exergue que la situation économique de cette entité mais ne démontre pas se trouver dans la situation juridique spécifique visée par cette jurisprudence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si cette pratique demeure conforme à l'art. 115 al. 1 CPP.  
 
3.4. Il résulte de ce qui précède que la cour de céans n'a pas de raison de s'écarter de sa pratique actuelle (v. supra consid. 3) sur ce point, de sorte que l'on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir violé le droit fédéral en considérant que le recourant n'était pas touché directement par l'infraction de gestion déloyale et n'avait, partant, pas la qualité de partie lésée.  
 
3.5. Pour le surplus, en tant que le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir commis un déni de justice, il suffit de relever que si l'autorité précédente a déclaré irrecevable le recours cantonal, motif pris du défaut de qualité de partie plaignante du recourant et a ainsi méconnu que toute partie écartée de la procédure est légitimée à recourir pour contester son éviction, elle a cependant considéré que cette question se confondait avec celle, de fond, de la qualité de partie plaignante. Il s'ensuit que, matériellement, la cour cantonale a bien examiné la question soulevée par le recourant, ce qui exclut le déni de justice (v. sur cette notion: ATF 135 I 6 consid. 2.1 p. 9).  
 
3.6. Le recourant invoque encore qu'il aurait été victime d'un faux dans les titres, 2'920'000 fr. devant revenir à la société anonyme n'ayant pas été portés à son compte de pertes et profits et à son bilan depuis 2008, de sorte que ses comptes seraient faux. Il en déduit que, touché directement par cette infraction en qualité d'actionnaire de la société ayant son siège à L.________, il aurait, à ce titre, la qualité de partie plaignante.  
 
Ni la plainte ni la décision d'ouvrir une procédure pénale (art. 309 al. 3 CPP) ne portaient sur cette infraction. Il n'apparaît pas non plus que le recourant aurait requis l'extension de la procédure (art. 311 al. 2 CPP) à celle-ci, même au moment de se déterminer sur la clôture d'enquête (art. 318 al. 1 CPP). Il n'a pas plus invoqué ce moyen devant la cour cantonale. Dans ces conditions, force est d'admettre qu'aucune décision n'a été rendue sur ce point au niveau cantonal, par l'autorité précédente en particulier. Le recours en matière pénale n'est, partant, pas recevable (art. 80 al. 1 LTF). Au demeurant, compte tenu de l'inactivité du recourant devant les autorités cantonales, le fait de soulever ce moyen, pour la première fois devant le Tribunal fédéral apparaît violer les principes de la bonne foi en procédure ( ATF 135 III 334 consid. 2.2 p. 336), ce qui conduit également à l'irrecevabilité du grief. 
 
4.   
Le recourant succombe. Il supporte les frais de la procédure (art. 65 al. 2 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al. 1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Autorité de recours en matière pénale. 
 
 
Lausanne, le 6 novembre 2013 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Mathys 
 
Le Greffier: Vallat