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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
4A_626/2020  
 
 
Arrêt du 15 mars 2021  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Kiss, juge présidant, Niquille et May Canellas. 
Greffier: M. O. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
tous deux représentés par Mes Antonio Rigozzi et Riccardo Coppa, 
recourants, 
 
contre  
 
C.________, 
représenté par Me Vitus Derungs, 
intimé. 
 
Objet 
arbitrage international en matière de sport, 
 
recours en matière civile contre la décision rendue le 30 octobre 2020 par le Tribunal Arbitral du Sport (CAS 2020/A/7283). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 18 juin 2020, la Chambre de Résolution des Litiges de la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) a rendu une décision dans un litige de nature contractuelle opposant le demandeur C.________, club de football xxx, au footballeur A.________ (ci-après: le joueur ou le footballeur) ainsi qu'à l'équipe B.________. Elle a notamment condamné les défendeurs, solidairement entre eux, à payer au demandeur la somme de 1'129'499 dollars américains (USD), intérêts en sus. 
 
B.   
C.________ a adressé au Tribunal Arbitral du Sport (TAS) une déclaration d'appel visant ladite décision (CAS 2020/A/7283). Les deux autres parties à la procédure ainsi que D.________, club dans lequel joue actuellement le footballeur, ont également interjeté un appel auprès du TAS. 
Le TAS a joint les quatre procédures arbitrales. Le recours soumis à l'examen de la Cour de céans concerne cependant uniquement la cause CAS 2020/A/7283. 
Le 14 août 2020, le TAS a avisé les parties que le délai pour déposer leurs mémoires d'appel respectifs était prolongé au 24 août 2020. 
Le 21 août 2020, les appelants ont chacun requis une prolongation de délai de vingt jours pour transmettre au TAS leurs mémoires d'appel. 
Le même jour, le TAS a indiqué que le délai imparti au joueur, à D.________ et à B.________ pour déposer leurs mémoires d'appel était provisoirement suspendu. 
En date du 25 août 2020, le TAS a précisé que le délai fixé à C.________ pour la transmission du mémoire d'appel était aussi suspendu jusqu'à nouvel avis. 
Le 31 août 2020, le TAS a notamment écrit ce qui suit aux parties: 
 
" In view of the Parties' agreement, the Appellants' requests of extension of 20 days of their deadline to file the Appeal Brief are  granted. In view of the above, the suspension of the Appellant's deadline is hereby  lifted with immediate effect. "  
Le 14 septembre 2020, le footballeur, D.________ et B.________ ont transmis au TAS leurs mémoires d'appel. 
En date du 18 septembre 2020, C.________ a sollicité une nouvelle prolongation de délai de cinq jours pour déposer son mémoire d'appel. 
Le même jour, le TAS a invité les parties à se prononcer sur ladite requête, tout en précisant que le délai pour transmettre le mémoire d'appel était suspendu jusqu'à nouvel avis. 
Le joueur, D.________ et B.________ se sont opposés à ladite requête puisque, selon eux, le délai pour déposer le mémoire d'appel avait expiré le 14 septembre 2020. 
Le 23 septembre 2020, le TAS a notamment indiqué ce qui suit aux parties: 
 
" With respect to the admissibility and timeliness of the request of extension filed by C.________, the Parties are advised as follows: 
 
- On 21 August 2020, C.________ requested an extension of its deadline to file the Appeal Brief which was to expire on 24 August 2020; 
- Such request was filed before the expiration of the deadline to file the Appeal Brief; 
- On 25 August 2020, the CAS Court Office acknowledged receipt of such request of extension and suspended the deadline; 
- On 31 August 2020, the CAS Court Office granted a 20-day extension of the Appellants' deadline to file the Appeal Brief. 
- The deadline of C.________ was suspended between the 25 and 31 August 2020. 
- Accordingly, the deadline of C.________ to file its Appeal Brief did not expire on 14 September 2020, but on 21 September 2020. 
- On 18 September 2020, C.________ requested an extension of five days of its deadline to file the Appeal Brief. 
- In view of the above, the request of extension of C.________ is admissible. 
In view of the fact that Mr A.________, B.________ and D.________ disagree with the requested extension, it is for the President of the CAS Appeals Arbitration Division, or her Deputy, to decide the issue in accordance with Article R32 of the Code. 
The Parties are hereby informed that the Deputy of the President of the CAS Appeals Arbitration Division has decided to  grant the requested extension in accordance with Article R32 of the Code.  
Accordingly, the suspension of the deadline of C.________ to file its Appeal Brief is  lifted with immediate effect. "  
C.________ a déposé son mémoire d'appel le 28 septembre 2020. 
Une fois la Formation constituée, le joueur et B.________ ont prié celle-ci de trancher la question de savoir si C.________ avait déposé son mémoire d'appel en temps utile. 
Le 30 octobre 2020, le TAS a indiqué aux parties que la Formation avait décidé ce qui suit en ce qui concerne la recevabilité du mémoire d'appel transmis par C.________: 
 
" The Panel notes that this issue has been submitted to the Deputy President of the CAS Appeals Division, who decided to grant the Appellant's extension request making the Appeal Brief eventually filed, admissible. 
The Panel considers that the Deputy President of the CAS Appeals Division's decision  is final and that the Panel cannot subsequently review and reconsider the decision taken.  
Accordingly, the Appeal Brief submitted by C.________ is  admissible. "  
 
C.   
Le 30 novembre 2020, le joueur et B.________ (ci-après: les recourants) ont formé un recours en matière civile dans lequel ils demandent, en substance, au Tribunal fédéral d'annuler la décision rendue le 30 octobre 2020, de déclarer irrecevable le mémoire d'appel interjeté par C.________ et de clôturer la procédure CAS 2020/A/7283 conformément à l'art. R51 du Code de l'arbitrage en matière de sport. A titre préalable, ils prient la Cour de céans de suspendre l'examen du présent recours jusqu'à ce que la Formation rende sa sentence finale dans la cause CAS 2020/A/7283. 
C.________ (ci-après: l'intimé) et le TAS n'ont pas été invités à déposer une réponse. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Les recourants requièrent, à titre préalable, la suspension de la présente procédure jusqu'au prononcé de la sentence finale. Ils indiquent qu'ils entendent demander à la Formation de revenir sur sa décision en ce qui concerne la recevabilité du mémoire d'appel de l'intimé. Le présent recours est dès lors déposé, selon leurs propres termes, " à titre de précaution procédurale ", pour le cas où la Formation viendrait à confirmer que la décision du 30 octobre 2020 était définitive. 
En l'occurrence, la Formation a considéré que la décision prise par la Présidente suppléante de la Chambre d'appel du TAS relative à la prolongation de délai requise par l'intimé et à la recevabilité du mémoire d'appel déposé par celui-ci était finale et ne pouvait pas être réexaminée. Sur la base de cette appréciation, elle a confirmé que le mémoire d'appel était recevable. Sur le vu de ce qui précède, il ne faut pas s'attendre à ce que la Formation réexamine la question de la recevabilité du mémoire d'appel dans la sentence finale. Aussi, celle-ci ne peut-elle avoir aucune influence sur la décision à rendre concernant la recevabilité du présent recours interjeté au Tribunal fédéral. Partant, la requête de suspension est rejetée. 
 
2.  
 
2.1. Dans le domaine de l'arbitrage international, le recours en matière civile est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions prévues par les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 let. a LTF).  
 
2.2. Le siège du TAS se trouve à Lausanne. Aucune des parties n'avait son domicile ou son siège en Suisse au moment déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables (art. 176 al. 1 LDIP).  
 
3.   
Le Tribunal fédér al examine d'office la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 138 III 542 consid. 1.1). 
 
3.1. Le recours en matière civile visé par l'art. 77 al. 1 let. a LTF en liaison avec les art. 190 à 192 LDIP n'est recevable qu'à l'encontre d'une sentence. L'acte attaquable peut être une sentence finale, qui met un terme à l'instance arbitrale pour un motif de fond ou de procédure, une sentence partielle, qui porte sur une partie quantitativement limitée d'une prétention litigieuse ou sur l'une des diverses prétentions en cause ou encore qui met fin à la procédure à l'égard d'une partie des consorts (ATF 143 III 462 consid. 2.1; arrêt 4A_222/2015 du 28 janvier 2016 consid. 3.1.1), voire une sentence préjudicielle ou incidente, qui règle une ou plusieurs questions préalables de fond ou de procédure (sur ces notions, cf. l'ATF 130 III 755 consid. 1.2.1 p. 757). En revanche, une simple ordonnance de procédure pouvant être modifiée ou rapportée en cours d'instance n'est pas susceptible de recours (ATF 143 III 462 consid. 2.1; 136 III 200 consid. 2.3.1 p. 203; 136 III 597 consid. 4.2; arrêt 4A_596/2012 du 15 avril 2013 consid. 3.3).  
Pour juger de la recevabilité du recours, ce qui est déterminant n'est pas la dénomination du prononcé entrepris, mais le contenu de celui-ci (ATF 143 III 462 consid. 2.1; 142 III 284 consid. 1.1.1; arrêt 4A_222/2015, précité, consid. 3.1.1). 
Il résulte de l'art. 190 al. 2 et 3 LDIP qu'une sentence finale ou partielle peut être attaquée pour tous les motifs énumérés à l'art. 190 al. 2 LDIP. Selon l'art. 190 al. 3 LDIP, une décision incidente ne peut en revanche être attaquée devant le Tribunal fédéral que pour les motifs tirés de la composition irrégulière (art. 190 al. 2 let. a LDIP) ou de l'incompétence (art. 190 al. 2 let. b LDIP) du tribunal arbitral. 
 
3.2. Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral, se référant notamment à deux contributions doctrinales (STEFANIE PFISTERER, Die Befristung der Schiedsvereinbarung und die Zuständigkeit eines Schiedsgerichts ratione temporis - eine Illusion?, in Mélanges en l'honneur de Anton K. Schnyder, 2018, p. 275 ss; ANTONIO RIGOZZI, Le délai d'appel devant le Tribunal arbitral du sport: quelques considérations à la lumière de la pratique récente, in Le temps et le droit, 2008, p. 255 ss), a considéré que le respect du délai d'appel au TAS est une condition de recevabilité de l'appel, qui ne concerne pas la compétence du tribunal arbitral (arrêt 4A_413/2019 du 28 octobre 2019 consid. 3.3.2). L'inobservation du délai dans lequel un appel doit être déposé auprès du TAS n'entraîne en effet pas l'incompétence de cette juridiction arbitrale, mais seulement l'irrecevabilité de l'appel. Par conséquent, le grief tiré du non-respect du délai d'appel au TAS ne s'inscrit pas dans le cadre tracé par l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. La partie recourante ne peut ainsi pas attaquer immédiatement la sentence incidente par laquelle le TAS retient qu'un appel a été déposé en temps utile, dans la mesure où elle ne conteste ni la composition du tribunal arbitral ni sa compétence (art. 190 al. 3 LDIP).  
Le Tribunal fédéral a confirmé sa jurisprudence à plusieurs reprises depuis lors (arrêts 4A_198/2020 du 1er décembre 2020 consid. 3.2; 4A_290/2020 du 26 août 2020; 4A_287/2019 du 6 janvier 2020 consid. 4.2). 
 
3.3. Dans leur mémoire, les recourants contestent la solution retenue dans l'arrêt 4A_413/2019 et estiment que le respect du délai d'appel au TAS est une question de compétence au sens large visée par l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. Selon eux, le fait que le non-respect du délai d'appel n'amène pas le TAS à se déclarer incompétent ne signifie pas pour autant que le Tribunal fédéral ne puisse pas revoir cette décision sous l'angle de l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. Les recourants font encore valoir que la contribution de Stefanie Pfisterer, citée dans l'arrêt 4a_413/2019, examine uniquement la question de la compétence  ratione temporis du tribunal arbitral en matière d'arbitrage commercial et non dans le domaine sportif. Quant à l'autre opinion doctrinale citée, qui n'est autre que celle de leur propre conseil, les intéressés soulignent que celui-ci a soutenu lui aussi, dans une contribution ultérieure, que le Tribunal fédéral pourrait examiner la question liée au respect du délai d'appel au TAS sous l'angle de l'art. 190 al. 2 let. b LDIP (RIGOZZI/HASLER, in Arbitration in Switzerland, The Practitioner's Guide, vol. II, 2e éd. 2018, no 26 ad art. R49 du Code et la note infrapaginale 65). Enfin, ils relèvent que la doctrine récente s'est montrée critique à l'égard de la solution retenue dans l'arrêt 4A_413/2019.  
 
3.4. Les éléments avancés par les recourants ne justifient pas de remettre en cause, en l'état, la solution adoptée récemment par le Tribunal fédéral. Bien que l'arrêt 4A_413/2019 ait suscité certaines critiques en doctrine (cf. notamment SÉBASTIEN BESSON, note relative à l'arrêt précité, in Revue de l'Arbitrage 2020/3 p. 916), il convient de souligner que plusieurs auteurs ont accueilli favorablement cette nouvelle jurisprudence (cf. MARCO STACHER, Jurisdiction and Admissibility under Swiss Arbitration Law - the Relevance of the Distinction and a New Hope, in Bulletin ASA 2020/1 p. 67 s. et 73; STACHER/PÜSCHEL-ARNOLD, BGer 4A_413/2019: Schiedsgerichtsbarkeit: Fristgerechte Klage und Postulationsfähigkeit - (beschwerdefähige) Zuständigkeitsfragen ?, in PJA 2020/2 p. 250 s.; MLADEN STOJILJKOVIC, Swiss Federal Court Addresses Jurisdiction and Admissibility in CAS Arbitration, in dRSK, 17 décembre 2019).  
Pour le reste, l'arrêt paru aux ATF 142 III 296 cité par les recourants, dans lequel le Tribunal fédéral a examiné le grief tiré du non-respect d'un mécanisme contractuel constituant un préalable obligatoire à la mise en oeuvre d'un arbitrage commercial sous l'angle de l'art. 190 al. 2 let. b LDIP, ne leur est d'aucun secours, car il vise une situation différente. Les intéressés ne peuvent dès lors rien en tirer dans la présente cause. On relèvera, en passant, que certains auteurs invitent le Tribunal fédéral à étendre la portée de l'arrêt 4A_413/2019 à d'autres situations dans lesquelles la Cour de céans est entrée en matière, par le passé, sur différents recours en interprétant largement l'art. 190 al. 2 let. b LDIP, notamment dans l'affaire ayant fait l'objet de l'ATF 142 III 296 (STACHER, op. cit., p. 64 et 73; STOJILJKOVIC, op. cit., n. 16 s.; STACHER/PÜSCHEL-ARNOLD, op. cit., p. 250 s.). Point n'est toutefois besoin d'examiner ici si la solution retenue dans l'arrêt 4A_413/2019 doit être transposée à d'autres cas de figure. 
Sur le vu de ce qui précède, il convient de s'en tenir à la jurisprudence récente du Tribunal fédéral selon laquelle le moyen pris du non-respect du délai d'appel au TAS ne s'inscrit pas dans le cadre tracé par l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. Partant, le présent recours doit être déclaré irrecevable. 
 
4.   
Les recourants, qui succombent, seront condamnés solidairement à payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 et 5 LTF). L'intimé n'a pas droit à des dépens puisqu'il n'a pas été invité à déposer une réponse. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
La requête de suspension est rejetée. 
 
2.   
Le recours est irrecevable. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Tribunal Arbitral du Sport (TAS) et à la Fédération Internationale de Football Association (FIFA), à Zurich. 
 
 
Lausanne, le 15 mars 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Juge présidant : Kiss 
 
Le Greffier : O. Carruzzo