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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_626/2021  
 
 
Arrêt du 10 décembre 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix et Haag. 
Greffière : Mme Kropf. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Kathrin Gruber, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens VD. 
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 22 octobre 2021 (970 - PE21.016630-CPB). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 27 septembre 2021, le Ministère public du canton de Vaud - section STRADA - a ouvert une instruction pénale contre inconnu pour meurtre en raison du décès, le [...] à U.________, d'un ressortissant [...] domicilié à X.________, sous les coups et coups de couteaux de divers individus dont l'identification et l'implication n'étaient pas encore déterminées à ce jour. L'altercation avait aussi fait un blessé, soit un ressortissant [...] également domicilié à X.________. Deux groupes, venant, d'une part de Y.________ et du canton de V.________ et, d'autre part, de Z.________ et de X.________, se seraient opposés ce jour-là.  
L'enquête a été transférée au Ministère public de l'arrondissement de U.________ (ci-après : le Ministère public), lequel a, le 5 octobre 2021, ouvert une enquête pour meurtre, lésions corporelles graves et rixe notamment contre A.________, ressortissant du [...] domicilié à W.________. Le prévenu a été entendu le 6 octobre 2021 par la police et par le Ministère public en vue de son arrestation; s'il a reconnu avoir été sur les lieux et connaître la victime, il a contesté toute implication. 
Par ordonnance du 8 octobre 2021, le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : Tmc) a ordonné le placement en détention provisoire de A.________ pour une durée de trois mois, retenant l'existence de risques de collusion, ainsi que de réitération. 
 
A.b. Selon le casier judiciaire de A.________, celui-ci a été reconnu coupable, par ordonnance pénale du 8 mars 2021 du Ministère public du canton de V.________, d'obtention frauduleuse d'une prestation ainsi que de contravention à la loi fédérale du 20 mars 2009 sur le transport de voyageurs (LTV; RS 745.1); il a été condamné à une peine pécuniaire de dix jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'au paiement d'une amende de 1'700 francs. Figurent également dans le casier du précité les trois enquêtes en cours à son encontre, soit celle du Ministère public vaudois dans le cadre de la présente cause, celle de 2019 pour brigandage, ainsi que celle de 2020 pour séquestration et enlèvement et prise d'otage, ces deux dernières étant instruites par le Ministère public V.________.  
 
 
B.  
Le 22 octobre 2021, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois (ci-après : la Chambre des recours pénale) a rejeté le recours formé par A.________ contre l'ordonnance du Tmc du 8 octobre 2021. 
 
C.  
Par acte du 18 novembre 2021, A.________ (ci-après : le recourant) forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant à son annulation et à sa libération immédiate. Le recourant demande également l'octroi de l'assistance judiciaire. 
Le Ministère public, ainsi que l'autorité précédente ont renoncé à déposer des déterminations, se référant à la décision attaquée. Invité à se déterminer jusqu'au 7 décembre 2021, le recourant n'a pas déposé d'autres observations. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière pénale (art. 78 al. 1 LTF) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire au sens des art. 212 ss CPP. Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le recourant, prévenu détenu, a qualité pour recourir. Le recours a été formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision prise en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il y a donc lieu d'entrer en matière. 
 
2.  
Le recourant conteste l'existence de soupçons suffisants de la commission d'infractions (cf. art. 221 al. 1 CPP). A cet égard, il reproche notamment à l'autorité précédente de s'être fondée sur des pièces ne figurant pas au dossier du Tmc et dont il n'aurait pas eu connaissance vu le refus du Ministère public de lui donner l'accès au dossier d'instruction (cf. en particulier le procès-verbal des opérations et celui de l'audition de B.________). 
 
2.1. Concrétisant le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), ainsi que les garanties relatives à un procès équitable et aux droits de la défense (art. 6 par. 3 CEDH et 32 al. 2 Cst.), les art. 101 al. 1 et 107 al. 1 let. a CPP permettent aux parties de consulter le dossier de la procédure pénale (ATF 146 IV 218 consid. 3.1.1 p. 221 s.). L'art. 101 al. 1 CPP prévoit que les parties peuvent consulter le dossier d'une procédure pendante au plus tard après la première audition du prévenu et l'administration des preuves principales par le ministère public, l'art. 108 CPP étant réservé. Celui-ci permet de refuser dans des phases ultérieures de l'instruction l'accès au dossier sous certaines conditions; la conséquence de telles restrictions est que les pièces non communiquées ne peuvent être utilisées pour fonder une décision que si la partie a été informée de leur contenu essentiel (art. 108 al. 4 CPP; arrêt 1B_344/2019 du 16 janvier 2020 consid. 2.1 et les arrêts cités).  
 
2.2. Une mesure de détention provisoire ou pour des motifs de sûreté n'est compatible avec la liberté personnelle (art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH) que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite, un danger de collusion ou de réitération (cf. art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister à l'égard de l'intéressé des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH; ATF 139 IV 186 consid. 2 p. 187 s.).  
Selon la jurisprudence, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (ATF 143 IV 330 consid. 2.1 p. 333 s.; 143 IV 316 consid. 3.1 et 3.2 p. 318 s.). 
 
2.3. La cour cantonale a tout d'abord rappelé les faits à l'origine de l'instruction (agression de cinq personnes venant de X.________ par un groupe de six ou sept hommes le [...]; blessure mortelle à une première victime et à la jambe pour la seconde; ouverture d'une enquête contre inconnu, puis, après identification, contre C.________ et d'autres prévenus, dont le recourant; auditions et mises en prévention de ceux-ci entre le 30 septembre et le 13 octobre 2021 [cf. le procès-verbal des opérations (P. 28)]).  
Indépendamment de savoir si les faits reprochés au recourant pouvaient être qualifiés de rixe (cf. la demande de mise en détention du Ministère public) ou d'agression, la cour cantonale a estimé que le comportement typique de ces chefs de prévention était relativement analogue, à savoir une participation de l'auteur; si la victime des coups à la jambe - qui avait admis s'être battue - avait déclaré au sujet du recourant l'avoir vu dans la soirée, mais pas avec le groupe, cela ne suffisait pas pour en déduire que le recourant n'avait pas participé à l'agression : en effet, la victime, qui se battait "un contre un", avait pu ne pas se rendre compte de l'ensemble des participants ayant pris part au troisième complexe de faits, soit lorsque l'autre victime avait été mortellement blessée. Selon l'autorité précédente, le recourant reconnaissait de plus avoir été présent sur les lieux et avoir fui à l'arrivée de la police; il ne s'était en outre pas clairement expliqué, notamment quant aux événements survenus ultérieurement, et était "mis en cause, selon le rapport de police du 6 octobre 2021, par B.________ [...], pour avoir participé aux faits en cause (P. 79, p. 2) ". La Chambre des recours pénale a considéré que ces éléments suffisaient pour fonder des soupçons suffisants à l'encontre du recourant. 
 
2.4. S'agissant tout d'abord des violations du droit d'être entendu invoquées, il n'est pas établi que le recourant ait obtenu une copie du procès-verbal des opérations. Cela étant, l'autorité précédente - laquelle doit, dans le cadre de son examen des soupçons suffisants, prendre en compte l'éventuel développement de la procédure (arrêt 1B_638/2020 du 4 juin 2021 consid. 5.2.2 non destiné à la publication) et qui dispose d'une pleine cognition en fait et en droit (ATF 141 IV 396 consid. 4.4 p. 405; arrêt 6B_196/2020 du 14 octobre 2020 consid. 2.2; 1B_606/2019 du 19 mai 2020 consid. 2) - s'y est avant tout référée pour rappeler les faits à l'origine de l'enquête, éléments que le recourant ne soutient pas ignorer. Quant à l'indication relative à l'identification des participants entre le 30 septembre et le 13 octobre 2021, ainsi que par rapport à leur mise en prévention, le recourant ne prétend pas qu'elle aurait été utilisée à sa charge; au contraire, celui-ci a développé en lien avec cette information une argumentation visant à contester l'existence d'un risque de collusion (cf. p. 4 s. et 9 du recours).  
En ce qui concerne ensuite le rapport de police du 6 octobre 2021 (cf. P. 79), mentionné expressément à titre de référence par l'autorité précédente, il a été produit au dossier du Tmc avec la demande de mise en détention du Ministère public, ce que ne conteste pas le recourant (voir également p. 2 de ses déterminations devant le Tmc qui s'y réfère). Au tout début d'une enquête, le seul fait que le recourant n'ait pas encore été confronté, dans le cadre de l'instruction principale, aux déclarations de B.________ ne suffit pas pour écarter toute valeur probante aux constats des policiers (sur cette notion en lien avec ce type particulier d'écritures, ATF 142 IV 289 consid. 2.2.3 p. 295 et 3.1 p. 296 ss), lesquels retiennent que B.________ mettait le recourant en cause pour avoir participé activement à la bagarre. Peu importe donc en l'état les indications quant au rôle [...] qu'aurait exercé B.________; le recourant ne développe d'ailleurs aucune argumentation tendant à expliquer de quelle manière ces informations pourraient être interprétées comme des éléments à sa charge. 
Au vu des considérations qui précédent, le grief de violations du droit d'être entendu peut être écarté. 
Cela étant, si cette manière de procéder est encore admissible à un stade très précoce de l'enquête, le recourant devra être à même de pouvoir se déterminer de manière conforme aux exigences découlant du droit d'être entendu dans le cadre d'une éventuelle demande de prolongation de la détention provisoire : il pourra alors, notamment, accéder, le cas échéant, aux pièces venant appuyer cette mesure de contrainte ou être informé de leur contenu essentiel. 
 
2.5. Sur le fond, l'appréciation de l'autorité précédente peut être confirmée. Cette conclusion s'impose vu les faits en cause : deux groupes opposés dont certains membres se sont, à un moment, provoqués, puis battus; s'y ajoutent le stade précoce de l'enquête, ainsi que la nature et la gravité des infractions pouvant entrer en considération (rixe ou agression, meurtre). Le seul fait que l'une des victimes ait déclaré n'avoir pas vu le recourant avec le groupe des agresseurs ne suffit pas en l'état pour exclure toute participation de sa part - notamment à un moment ou à un autre -, dès lors que le recourant reconnaît avoir été sur les lieux au moment des événements, qu'il a pris la fuite lorsque la police est intervenue et que celle-ci considère, dans son rapport, qu'il est mis en cause par un autre prévenu pour avoir participé à la bagarre. Au début d'une enquête pour des faits très graves, ces éléments sont suffisants pour fonder de graves soupçons de la commission d'une infraction. Le Ministère public ne manquera cependant pas de les étayer dans une éventuelle demande de prolongation de la détention provisoire.  
 
3.  
Le recourant conteste ensuite l'existence de risques de collusion ou de réitération. 
 
3.1. Pour retenir l'existence d'un risque de collusion au sens de l'art. 221 al. 1 let. b CPP, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manoeuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction elle doit encore effectuer et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuves susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure (ATF 137 IV 122 consid. 4.2 p. 127 s.; 132 I 21 consid. 3.2 p. 23 s. et les références citées). Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (cf. ATF 137 IV 122 consid. 4.2 p. 128; 132 I 21 consid. 3.2.2 p. 24; arrêt 1B_414/2021 du 16 août 2021 consid. 5.1).  
 
3.2. En l'occurrence, ce risque est patent, dès lors que l'enquête n'en est qu'à ses débuts. Quelques semaines se sont écoulées depuis les événements et il se peut que tous les participants aient été à présent identifiés. Cependant, ainsi que l'a retenu l'autorité précédente, ceux-ci ne se sont pas encore tous expliqués clairement notamment au sujet de l'identité du porteur du couteau et sur le sort de cette arme. Certains ont en outre été entendus et mis en prévention après l'interpellation du recourant. En tout état de cause, les auditions de confrontation n'ont pas encore eu lieu, ce que ne conteste pas le recourant. On ne peut pas non plus ignorer la nature du chef de prévention de rixe, susceptible d'entrer en considération dans le cas d'espèce; certains pourraient être tentés de charger les membres de l'autre groupe, respectivement de protéger ceux appartenant à son groupe, notamment en coordonnant leur version. La cour cantonale pouvait ainsi à juste titre relever qu'il importait dès lors (i) d'éviter que le recourant ne puisse prendre contact avec l'un ou l'autre des protagonistes pour accorder leur version ou faire disparaître des moyens de preuve et (ii) de garantir la spontanéité des déclarations de chacun.  
 
3.3. Au regard des considérations précédentes, il n'y a pas lieu d'examiner les arguments soulevés par le recourant afin de contester le risque de récidive retenu par la cour cantonale (cf. art. 221 al. 1 let. c CPP) dès lors que l'existence d'un seul risque au sens de l'art. 221 al. 1 CPP suffit pour justifier le maintien en détention.  
 
3.4. Le recourant ne soutient plus, à juste titre, devant le Tribunal fédéral qu'il existerait des mesures de substitution permettant de réduire le risque de collusion existant. Il ne prétend pas non plus que la durée de la détention provisoire subie violerait le principe de proportionnalité, notamment quant à la peine concrètement encourue au regard des chefs de prévention qui pourraient être retenus.  
 
3.5. Partant, au vu de l'existence d'un risque de collusion qu'aucune mesure de substitution ne saurait pallier, la Chambre des recours pénale n'a pas violé le droit fédéral en confirmant le placement en détention provisoire du recourant ordonné le 8 octobre 2021 par le Tmc.  
 
4.  
Il s'ensuit que le recours est rejeté. 
Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire (art. 64 al. 1 LTF). Comme le recours n'était pas d'emblée dénué de chances de succès, cette requête doit être admise. Il y a lieu de désigner Me Kathrin Gruber en tant qu'avocate d'office du recourant et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF), ni alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
La requête d'assistance judiciaire est admise. Me Kathrin Gruber est désignée comme avocate d'office du recourant et une indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par le Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Ministère public central du canton de Vaud et à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 10 décembre 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Kropf