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[AZA] 
H 328/99 Rl 
 
IIe Chambre  
 
composée des Juges fédéraux Lustenberger, Président, Meyer 
et Ferrari; Wagner, Greffier 
 
Arrêt du 3 avril 2000  
 
dans la cause 
 
1. B.________, 
2. F.________, 
recourants, tous deux représentés par Maître G.________, 
avocat, 
 
contre 
 
Caisse cantonale vaudoise de compensation, rue du Lac 37, 
Clarens, intimée, 
 
et 
 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne 
 
    A.- L'entreprise C.________ SA avait pour but la 
location de voitures avec ou sans chauffeur, le leasing, 
l'achat et la vente de tous véhicules à moteur, ainsi que 
l'exploitation de locaux commerciaux tels que parking. Au 
cours de 1993, l'administrateur unique a démissionné de ses 
fonctions. Le 15 novembre 1993, J.________, B.________ et 
F.________ sont entrés au conseil d'administration de la 
société. 
    Les comptes de l'exercice 1992 se soldèrent par une 
perte, de même que ceux de l'exercice 1993. Le 4 août 1994, 
B.________ renonça avec effet immédiat à son mandat 
d'administrateur. C'est ce que fit également F.________ le 
6 septembre 1994. 
    Le 13 janvier 1995, le président du Tribunal du 
district de Nyon prononça la faillite de la société. Après 
la suspension de la liquidation ensuite de constatation de 
défaut d'actif, la faillite fut clôturée le 19 avril 1995. 
    Le 27 novembre 1995, la Caisse cantonale vaudoise de 
compensation procéda à un contrôle d'employeur, ce qui don- 
na lieu à une reprise de salaires (rapport du réviseur du 
9 janvier 1996). Par une décision de taxation du 6 février 
1996, elle réclama à la faillie le versement de cotisations 
s'élevant à 3725 fr. 25. 
    Le 29 février 1996, la caisse a rendu une décision en 
réparation du dommage à l'encontre de B.________ et de 
F.________. Elle les rendait responsables, ainsi que 
J.________, du dommage subi dans la faillite de C.________ 
SA et leur réclamait le versement de 30 657 fr. 75, soit la 
somme de 27 580 fr. 10 correspondant aux cotisations 
restées impayées dues pour 1991, 1992, 1993 et 1994, ainsi 
qu'aux cotisations sur la reprise de salaires à la suite du 
contrôle d'employeur, montant auquel s'ajoutaient les 
intérêts moratoires s'élevant à 1825 fr. 65 et les frais de 
poursuite de 1252 fr. 
 
    B.- F.________ et B.________ ont formé opposition 
contre cette décision. Le 22 avril 1996, la caisse a porté 
leurs cas devant le Tribunal des assurances du canton 
de Vaud, en demandant que leurs oppositions soient levées 
et que leur responsabilité solidaire soit reconnue jusqu'à 
concurrence de 30 657 fr. 75. 
    Lors d'une audience du 26 août 1998, la caisse a 
ramené ses conclusions à 23 256 fr. 65, montant correspon- 
dant au dommage actuel, compte tenu des versements déjà 
effectués par J.________ et H.________. Par jugement rendu 
le même jour, notifié le 30 août 1999, la juridiction 
cantonale a admis la demande dirigée contre B.________ et 
F.________, lesquels étaient reconnus débiteurs solidaires 
de la caisse du montant de 23 256 fr. 65. 
 
    C.- B.________ et F.________ interjettent recours de 
droit administratif contre ce jugement, en concluant, sous 
suite de frais et dépens, à l'annulation de celui-ci. Ils 
invitent le Tribunal fédéral des assurances à dire qu'ils 
ne sont pas débiteurs solidaires de la caisse du montant de 
23 256 fr. 65. A titre subsidiaire, ils demandent que la 
cause soit renvoyée à la juridiction cantonale pour 
instruction complémentaire et nouvelle décision et que 
leurs droits patrimoniaux contre J.________ soient 
réservés. 
    La Caisse cantonale vaudoise de compensation conclut 
au rejet du recours. 
 
Considérant en droit  
:  
 
    1.- a) Les recourants allèguent qu'une action récur- 
soire contre J.________ aurait dû être réservée à 
concurrence du montant de 23 256 fr. 65 arrêté dans le 
dispositif du jugement attaqué, afin de valoir titre de 
mainlevée définitive. Ils reprochent à la juridiction can- 
tonale d'avoir ainsi commis une omission qui lèse irrévo- 
cablement leurs intérêts, raison pour laquelle ils deman- 
dent à titre subsidiaire que leurs droits patrimoniaux 
contre J.________ soient réservés. 
    Cette conclusion est irrecevable. En effet, lorsque, 
comme en l'espèce, une caisse de compensation dirige son 
action au sens de l'art. 81 al. 3 RAVS contre deux débi- 
teurs, ceux-ci ne peuvent, dans le cadre de cette procédure 
et au moyen d'une dénonciation du litige, évoquer en garan- 
tie un tiers responsable en faisant valoir à son égard une 
prétention récursoire (ATF 119 V 87 consid. 5b et la réfé- 
rence). 
 
    b) Le litige n'ayant pas pour objet l'octroi ou le 
refus de prestations d'assurance, le Tribunal fédéral des 
assurances doit se borner à examiner si les premiers juges 
ont violé le droit fédéral, y compris par l'excès ou par 
l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si les faits 
pertinents ont été constatés d'une manière manifestement 
inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis au mépris 
de règles essentielles de procédure (art. 132 en corréla- 
tion avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ). 
 
    2.- En vertu de l'art. 52 LAVS, l'employeur qui, in- 
tentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des 
prescriptions et cause ainsi un dommage à la caisse de com- 
pensation est tenu à réparation. Si l'employeur est une 
personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre 
subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATF 
123 V 15 consid. 5b, 122 V 66 consid. 4a, 119 V 405 
consid. 2 et les références). 
    Dans le cas d'une société anonyme, la notion d'organe 
responsable selon l'art. 52 LAVS est en principe identique 
à celle qui ressort de l'art. 754 al. 1 CO. En particulier, 
la responsabilité incombe aux membres du conseil d'adminis- 
tration. 
    3.- a) Selon la jurisprudence, le nouvel administra- 
teur a le devoir de veiller tant au versement des cotisa- 
tions courantes qu'à l'acquittement des cotisations arrié- 
rées, qui sont dues pour la période pendant laquelle il ne 
faisait pas encore partie du conseil d'administration, car 
il y a dans les deux cas un lien de cause à effet entre 
l'inaction de l'organe et le non-paiement des cotisations 
(ATF 119 V 407 consid. 4c; RCC 1992 p. 269 ad consid. 7b). 
    Toutefois, la causalité adéquate entre la violation 
intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et 
la survenance du dommage doit être niée lorsqu'une société 
anonyme est insolvable au moment de l'entrée en fonction du 
nouvel administrateur; en pareille hypothèse, ce dernier ne 
répond pas du dommage déjà survenu à ce moment (ATF 
119 V 406 consid. 4b). 
 
    b) Le jugement cantonal retient en fait l'existence 
d'une perte de 60 537 fr. 80 pour l'exercice 1992 et d'une 
perte de 84 473 fr. 80 pour l'exercice 1993. Ces constata- 
tions sont incomplètes au regard des comptes déposés en 
cause. De toute manière, elles auraient été suffisantes 
pour retenir en droit que C.________ SA était insolvable à 
la fin 1993, les pertes nettes cumulées étant supérieures 
au montant du capital social. 
    Selon les pièces comptables déposées en cause, il 
ressort du compte charges et produits hors exploitation que 
la perte finale au 31 décembre 1992 s'élevait à 
183 055 fr. 35. Or, dans un rapport du 14 janvier 1994 
relatif aux comptes de l'exercice 1992, qui se soldaient 
par un déficit au bilan de 177 613 fr. 45, l'organe de 
révision avait attiré l'attention de l'assemblée des 
actionnaires de la société sur le fait que, malgré 
l'existence d'un surendettement, le conseil d'adminis- 
tration avait omis d'établir un bilan intermédiaire aux 
valeurs de liquidation. Le bilan intermédiaire ne pouvant 
que confirmer le surendettement, le juge devait en être 
informé conformément à l'art. 725 al. 2 CO
    D'autre part, le bilan au 31 décembre 1993 présentait 
un déficit de 262 087 fr. 25, compte tenu du résultat re- 
porté de 177 613 fr. 45 et de la perte nette de 
84 473 fr. 80. Dans un rapport du 17 février 1994, l'organe 
de révision avait insisté à nouveau pour que le juge soit 
informé du surendettement de la société (art. 725 al. 2 
CO). 
    Lorsque, le 15 novembre 1993, les recourants sont en- 
trés au conseil d'administration de C.________ SA, la 
société était donc insolvable. Il s'ensuit que la causalité 
adéquate avec le dommage survenu jusque-là n'est pas 
donnée. 
 
    4.- a) Les recourants contestent toute faute qualifiée 
au sens de l'art. 52 LAVS. En effet, non seulement ils sont 
entrés au conseil d'administration de C.________ SA pour 
rendre service à J.________, ressortissant français, mais 
encore avaient-ils des raisons sérieuses et objectives de 
penser que la société pourrait s'acquitter de sa dette de 
cotisations dans un délai raisonnable grâce aux recettes de 
l'hiver 93/94, attendu qu'elle était très active en saison 
d'hiver à L.________. Leur négligence, si négligence il y 
a, ne saurait dès lors être qualifiée de grave. Par ail- 
leurs, la faillite étant intervenue de nombreux mois après 
leurs démissions, il manque ainsi toute relation de causa- 
lité adéquate entre une négligence éventuelle et la surve- 
nance du dommage dont l'intimée leur demande réparation. 
 
    b) D'après la jurisprudence, la responsabilité de 
l'administrateur dure, en règle ordinaire, jusqu'au moment 
de sa sortie (par suite de démission ou de révocation) du 
conseil d'administration et non jusqu'au moment de la ra- 
diation de ses pouvoirs au registre du commerce (ATF 
123 V 173 consid. 3a, 112 V 4 consid. 3c, 111 II 484 sv., 
109 V 93 consid. 13; Thomas Nussbaumer, Die Haftung des 
Verwaltungsrates nach Art. 52 AHVG, in PJA 9/1996, 
p. 1080). En l'espèce, les recourants étaient encore 
inscrits au registre du commerce comme membres du conseil 
d'administration au moment de la faillite de C.________ SA. 
Il faut retenir, toutefois, que B.________ a démissionné de 
sa fonction le 4 août 1994 et que F.________ en a fait de 
même le 6 septembre 1994. Le premier restait donc 
juridiquement soumis à la responsabilité de l'art. 52 LAVS 
jusqu'au 4 août 1994, le deuxième jusqu'au 6 septembre 
1994. 
    L'art. 716a al. 1 CO, en vigueur depuis le 1er juillet 
1992 et donc applicable à l'époque des manquements repro- 
chés aux recourants, énumère les attributions intransmissi- 
bles et inaliénables des membres du conseil d'administra- 
tion. En font partie l'exercice de la haute surveillance 
sur les personnes chargées de la gestion, pour s'assurer 
notamment qu'elles observent la loi, les règlements et les 
instructions données (ch. 5). Dans le cadre de l'exercice 
de cette haute surveillance, l'administrateur répond, comme 
sous le régime de l'ancien droit de la société anonyme, de 
la cura in custodiendo (Adrian Kammerer, Die unübertragba- 
ren und unentziehbaren Kompetenzen des Verwaltungsrates, 
thèse Zurich, 1997, p. 226). C'est ainsi qu'il a non seule- 
ment le devoir d'assister aux séances du conseil d'adminis- 
tration, mais également l'obligation de se faire renseigner 
périodiquement sur la marche des affaires (Kammerer, op. 
cit., p. 186). Il est tenu de prendre les mesures appro- 
priées lorsqu'il a connaissance ou aurait dû avoir connais- 
sance d'irrégularités commises dans la gestion de la socié- 
té (Forstmoser/Meier-Hayoz/Nobel, Schweizerisches Aktien- 
recht, § 30 note 49). 
    c) La responsabilité des recourants était engagée à 
partir du 15 novembre 1993 et pour la durée de leurs man- 
dats. 
    En effet, il est établi que le 30 novembre 1993, l'in- 
timée a avisé R.________ SA - dont B.________ est 
l'administrateur - que les cotisations dues par C.________ 
SA jusqu'au 2e trimestre 1993, y compris l'arriéré 
concernant 1991 et 1992, s'élevaient à 15 434 fr. 65. Dans 
une proposition de paiement par acomptes du 13 janvier 
1994, la caisse a accepté que les cotisations d'employeur 
pour la période du 1er janvier 1991 au 30 juin 1993 (y 
compris les intérêts moratoires et les frais d'encaisse- 
ment), d'un total de 14 600 fr., soient réglées par un pre- 
mier acompte de 600 fr. à verser jusqu'au 31 janvier 1994 
et par 28 acomptes mensuels de 500 fr. à payer à la fin de 
chaque mois. 
    Or, non seulement ce plan de paiement n'a pas été res- 
pecté par l'employeur, mais encore les cotisations couran- 
tes dues sur les salaires versés au personnel au cours de 
1994 n'ont-elles pas été payées. Au demeurant, le conseil 
d'administration, lors des assemblées des 31 janvier et 
18 mars 1994, n'a pas suivi l'organe de révision qui, dans 
ses rapports des 14 janvier 1994 relatif aux comptes de 
l'exercice 1992 et 17 février 1994 relatif aux comptes de 
l'exercice 1993, demandait que le juge soit informé du 
surendettement de la société (art. 725 al. 2 CO). 
    Il faut dès lors retenir que les recourants n'exer- 
çaient aucune surveillance. Ils ont donc commis une né- 
gligence qui doit, sous l'angle de l'art. 52 LAVS, être 
qualifiée de grave (ATF 112 V 3 consid. 2b). Qu'ils n'aient 
pas été en mesure d'exercer leurs mandats, parce que la 
société était dirigée en fait par le président du conseil 
d'administration, ou qu'ils aient accepté leur mandat à 
titre fiduciaire dans le seul but de permettre au conseil 
d'administration de satisfaire aux exigences de l'art. 708 
al. 1 CO, n'est pas un motif de suppression ou d'atténua- 
tion de la faute commise (Jean-François Egli, Aperçu de la 
jurisprudence récente du Tribunal fédéral relative à la 
responsabilité des administrateurs de société anonyme, in 
Publication CEDIDAC 8, 1987, p. 32). Par ailleurs, en 
choisissant de poursuivre l'activité d'une société 
insolvable, ils ont contribué à la survenance du dommage, 
dès lors qu'ils faisaient supporter le risque inhérant au 
financement d'une entreprise par l'assurance sociale (ATF 
108 V 196 consid. 4). 
 
    d) Les éléments permettant de fixer le dommage font 
défaut. Il se justifie dès lors de renvoyer la cause à la 
juridiction cantonale pour instruction complémentaire et 
nouveau jugement. 
 
    5.- Le litige n'ayant pas pour objet l'octroi ou le 
refus de prestations d'assurance, la procédure n'est pas 
gratuite (art. 134 OJ a contrario). L'intimée, qui succom- 
be, supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 en 
corrélation avec l'art. 135 OJ). Représentés par un avocat, 
les recourants ont droit à une indemnité de dépens pour 
l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en liaison avec 
l'art. 135 OJ). 
 
    Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances 
 
p r o n o n c e  
:  
 
I. Dans la mesure où il est recevable, le recours est  
    admis en ce sens que le jugement du Tribunal des 
    assurances du canton de Vaud, du 26 août 1998, est 
    annulé, la cause étant renvoyée à l'autorité judi- 
    ciaire cantonale pour complément d'instruction au sens 
    des considérants et nouveau jugement. 
 
II. Les frais de justice, d'un montant de 1700 fr., sont  
    mis à la charge de l'intimée. 
 
III. L'avance de frais versée par les recourants, d'un  
    montant de 1700 fr., leur est restituée. 
 
IV. L'intimée versera aux recourants la somme de 2500 fr.  
    (y compris la taxe sur la valeur ajoutée) à titre de 
    dépens pour l'instance fédérale. 
 
V. Le présent arrêt est communiqué aux parties, au  
    Tribunal des assurances du canton de Vaud et à 
    l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 3 avril 2000 
 
Au nom du 
Tribunal fédéral des assurances 
Le Président de la IIe Chambre : 
 
Le Greffier :