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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1C_293/2011 
 
Arrêt du 12 octobre 2011 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Fonjallaz, Président, Aemisegger et Reeb. 
Greffière: Mme Mabillard. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Nicolas Voide, avocat, 
recourant, 
 
contre 
 
Commission d'estimation en matière d'expropriation, Mme Viviane Zehnder, présidente, rue du Chanoine-Broquet 5, 1890 St-Maurice, 
Commune de Martigny, Administration communale, 1920 Martigny, représentée par Me Damien Revaz, avocat. 
 
Objet 
Indemnité, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, du 12 mai 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
Par décision du 2 juin 2010, le Conseil d'Etat du canton du Valais a approuvé le projet relatif à la réalisation de divers accès à la Bâtiaz (commune de Martigny), lequel prévoit notamment la construction d'une nouvelle route entre la route cantonale T9 qui mène à Vernayaz et la RC 71 qui conduit à Fully, dénommée route Transversale. Ce projet implique l'expropriation de 488 m2 sur un total de 2'523 m2 de la parcelle 5038 de A.________. Celui-ci n'a pas fait opposition au projet. 
Le 20 octobre 2010, le prénommé a assisté à la visite des lieux organisée par la Commission d'estimation en matière d'expropriation (ci-après: la Commission d'estimation) et a donné son accord à la prise de possession de la partie expropriée au 1er janvier 2011. 
La Commission d'estimation a statué sur l'indemnité à verser pour l'acquisition visée, le 10 décembre 2010, fixant notamment à 6 fr. le prix du m2 de terrain exproprié. 
Par arrêt du 12 mai 2011, le Tribunal cantonal du canton du Valais (ci-après: le Tribunal cantonal) a rejeté le recours de A.________ contre la décision précitée. Il a considéré en substance qu'il n'y avait pas de raison de s'écarter de l'indemnisation retenue par la Commission d'estimation, celle-ci correspondant au dernier prix payé pour des terres agricoles dans la région concernée au moment déterminant. 
 
B. 
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________ demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal du 12 mai 2011 et d'admettre son recours du 7 janvier 2011 contre la décision de la Commission d'estimation du 10 décembre 2010, la valeur de son terrain exproprié étant arrêté à 200 fr. le m2, subsidiairement 10 fr. le m2. 
Le Tribunal cantonal et la Commission d'estimation renoncent à se déterminer. La Commune de Martigny conclut au rejet du recours. Le recourant n'a pas répliqué. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
La voie du recours en matière de droit public au sens de l'art. 82 let. a LTF est ouverte contre une décision en matière d'expropriation fondée sur du droit cantonal, aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF n'étant réalisée. Le recourant a pris part à la procédure de recours devant le Tribunal cantonal et est particulièrement touché par l'arrêt attaqué, qui lui alloue une indemnité largement inférieure à celle qu'il avait requise. Il a donc la qualité pour agir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF. Pour le surplus, les autres conditions de recevabilité sont remplies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2. 
A titre de moyens de preuve, le recourant demande l'édition des dossiers du Tribunal cantonal et de la Commission d'estimation. Sa requête est satisfaite sur ce point, la Cour cantonale ayant déposé son dossier, comprenant celui de la Commission, dans le délai que le Tribunal fédéral lui avait imparti à cette fin (cf. art. 102 al. 2 LTF). 
Le recourant requiert également la production, par l'administration communale de Martigny, respectivement le Service cantonal de l'aménagement du territoire, du dossier complet de modification du plan de zones concernant le secteur intégrant la parcelle 5038. Cet élément n'étant pas pertinent pour l'issue du litige (cf. consid. 6 ci-après), il n'y a pas lieu d'instruire à ce sujet et la requête doit donc être rejetée sous cet angle. 
 
3. 
3.1 Le recourant évoque divers moyens en relation avec l'indemnité qui lui a été allouée, qu'il estime trop basse et en contradiction avec les principes d'une indemnisation pleine et entière. Il dénonce à cet égard une violation de l'art. 26 al. 2 Cst., qui prévoit qu'une pleine indemnité est due en cas d'expropriation, ainsi que des art. 6 al. 2 de la Constitution du 8 mars 1907 du canton du Valais et 11 al. 1 de la loi cantonale du 8 mai 2008 sur les expropriations (ci-après: LEx/VS), qui reprennent ce principe. Comme il ne prétend pas que ces deux dernières dispositions lui accorderaient une protection plus étendue que celle découlant de l'art. 26 Cst., ses griefs doivent en principe être examinés au regard du droit constitutionnel fédéral (cf. ATF 112 Ia 124 consid. 3a p. 126). 
 
3.2 Saisi d'un recours en matière de droit public portant sur une indemnité d'expropriation, le Tribunal fédéral jouit d'un pouvoir d'examen libre si le principe même de l'indemnisation est en jeu. Il en va de même lorsque la question litigieuse porte sur la constitutionnalité du droit cantonal déterminant au regard de l'exigence d'une pleine indemnité contenue à l'art. 26 al. 2 Cst. En revanche, son pouvoir d'examen est limité à l'arbitraire si le recourant critique simplement l'application du droit cantonal qui régit le mode de fixation de l'indemnité ou les méthodes d'estimation utilisées et le résultat de l'estimation (cf. ATF 122 I 168 consid. 2c p. 173; 119 Ia 21 consid. 1a p. 25; 112 Ia 198 consid. 1b p. 201 et les arrêts cités). 
En l'espèce, le recourant se plaint exclusivement du montant insuffisant de l'indemnité qui lui a été allouée pour la surface de sa parcelle touchée par l'expropriation. Ainsi formulés, les griefs tirés de la violation de l'art. 26 al. 2 Cst. se confondent avec celui de l'arbitraire. Selon la jurisprudence, une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté ou encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (cf. ATF 134 II 244 consid. 2.2 et 2.3 p. 246 s.; 130 I 258 consid. 1.3 p. 261 s.; 129 I 113 consid. 2.1 p. 120 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral ne s'écarte ainsi de la solution retenue par l'autorité cantonale de dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction manifeste avec la situation effective, ou si elle a été adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit pas que les motifs de la décision critiquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 132 I 13 consid. 5.1 p. 17). 
 
4. 
4.1 En vertu de l'art. 13 let. a LEx/VS, l'indemnité comprend la pleine valeur vénale du droit exproprié. La date déterminante pour établir la valeur vénale (dies aestimandi) est celle de la fixation de l'indemnité (art. 15 al. 1 LEx/VS). 
Selon la jurisprudence, la méthode comparative ou statistique doit être appliquée à l'estimation du prix du terrain (sans les bâtiments). Cette méthode consiste à fixer la valeur vénale des terrains non bâtis sur la base des prix payés pour des fonds semblables. Elle implique de rechercher, parmi les transactions récentes intervenues dans la région peu avant le dies aestimandi, les prix payés pour des fonds de même nature, de même qualité et de même situation (cf. ATF 122 II 246 consid. 4a p. 250, 337 consid. 5a p. 344: 122 I 168 consid. 3a p. 173 s. et les références citées dans ces arrêts). 
 
4.2 Après avoir rappelé ces principes, les juges cantonaux ont indiqué que la Commission d'estimation avait arrêté à 6 fr. par m2 l'allocation pour la surface expropriée en se basant sur les informations et pièces qui lui avaient été communiquées par le Service cantonal de l'agriculture. Il en ressortait que le prix indicatif d'un terrain agricole nu analogue à la parcelle 5038 au moment où elle statuait variait entre 5 et 6 fr. par m2, et que les transactions pour des terrains similaires dans la région concernée au moment déterminant s'étaient effectuées à des prix variant entre 6 et 10 fr. le m2. 
Le recourant ne remet pas en question ces constatations de fait, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF). Dans ces conditions, le Tribunal cantonal pouvait, sans arbitraire, considérer que les éléments précités permettaient à la Commission d'estimation de fixer de manière objective l'indemnité correspondant à la valeur vénale du terrain en cause et qu'il n'y avait pas de raison de s'écarter de l'indemnisation retenue, à savoir 6 fr. par m2. C'est à tort que le recourant affirme que l'indemnité devrait au minimum couvrir le prix d'acquisition de son terrain (10 fr. le m2); l'indemnité d'expropriation représente en effet uniquement la compensation de la valeur de l'immeuble et ne se détermine pas en fonction des frais d'acquisition de celui-ci (cf. art. 13 let. a LEx/VS). De même, l'intéressé soutient en vain que la notion de pleine indemnité exigeait de prendre en considération la valeur supérieure de la fourchette retenue pour la valeur vénale au dies aestimandi. La Commission d'estimation a certes indiqué que les transactions pour des terrains similaires dans la région concernée au moment déterminant s'étaient effectuées à des prix variant entre 6 et 10 fr. le m2; elle a toutefois également relevé que, selon le Service de l'agriculture, le prix indicatif d'un terrain agricole nu analogue à la parcelle 5038 au moment où elle statuait variait entre 5 et 6 fr. par m2. Partant, la fixation de l'indemnité à 6 fr. le m2 repose sur des motifs objectifs et n'est pas arbitraire, ce que le recourant ne prétend de toute façon pas. 
 
5. 
Le recourant se prévaut d'un courrier du 19 août 2009 de la ville de Martigny l'informant de l'ouverture d'une procédure d'appel à contribution auprès des propriétaires fonciers concernés par la construction des accès à la Bâtiaz. Pour sa parcelle, la participation est arrêtée à 25.54 fr. au m2. Il allègue que, dans ces conditions, admettre une valeur du terrain à 6 fr./m2 reviendrait à considérer que la commune de Martigny était prête à effectuer des investissements en multipliant par cinq la valeur du terrain. C'est donc uniquement en ayant en tête la valeur des terrains après modification du plan de zone (cf. consid. 6 ci-après), à savoir au minimum 200 fr./m2, que l'on peut prétendre effectuer des investissements de 25.54 fr. /m2. 
Comme l'a souligné le Tribunal cantonal, il n'est pas tenu compte, dans l'estimation de la valeur vénale, des augmentations ou des diminutions de valeur résultant de l'ouvrage de l'expropriant (art. 15 al. 3 LEx/VS). En l'occurrence, le montant de la participation du recourant dans le cadre de l'appel à contribution équivaut à la part d'avantage économique particulier dont il bénéficiera par la réalisation de la route en question (cf. art. 14 al. 1 de la loi cantonale du 15 novembre 1988 concernant la perception des contributions de propriétaires fonciers aux frais d'équipements et aux frais d'autres ouvrages publics [ci-après: LPV/VS]); cette plus-value n'est dès lors pas déterminante pour calculer la valeur vénale de la parcelle. De plus, avec les juges cantonaux, on peut relever que, calculé sur le coût global de l'?uvre (cf. art. 15 al. 1 LPV/VS), le montant de cette contribution est évidemment étranger à la valeur du marché de cette terre agricole et ne constitue nul indice tenant à augmenter la valeur retenue par la Commission d'estimation. L'application de l'art. 15 al. 3 LEx/VS par le Tribunal cantonal échappe dès lors à l'arbitraire et le recours doit être rejeté sur ce point. 
 
6. 
Enfin, le recourant fait valoir que sa parcelle se trouvera, après concrétisation des modifications mises à l'enquête publique le 25 mars 2011, dans le périmètre de la zone à bâtir. Les premières discussions et décisions relatives à ce projet dateraient à tout le moins de la même époque que celle à laquelle ont été initiées les procédures d'expropriation et d'appel à plus-value. Il y aurait dès lors lieu d'appliquer l'art. 15 al. 2 LEx/VS. 
 
6.1 L'art. 15 al. 2 LEx/VS prévoit que l'estimation de la valeur vénale doit tenir compte dans une juste mesure de la possibilité et de la vraisemblance de pouvoir mieux utiliser l'immeuble dans un délai raisonnable. D'après la jurisprudence, la possibilité d'une utilisation meilleure n'est prise en considération que si elle apparaît hautement vraisemblable dans un proche avenir; de vagues perspectives ne suffisent pas (ATF 134 II 176 consid. 11.4 p. 179; 114 Ib 321 consid. 3 p. 324; 112 Ib 531 consid. 3 p. 533). La date déterminante pour l'estimation de la valeur vénale du fonds et des perspectives de meilleure utilisation est celle de la fixation de l'indemnité (art. 15 al. 1 LEx/VS). 
 
6.2 Le Tribunal cantonal a relevé qu'au moment déterminant, soit le 10 décembre 2010, le biens-fonds en question était de nature exclusivement agricole. S'il était certes notoire que l'administration communale avait, le 25 mars 2011, soumis à l'enquête publique la modification partielle du plan d'affectation des zones et du règlement communal des constructions et des zones concernant l'ensemble du territoire de la commune de Martigny, cette circonstance n'avait en aucun cas influé à la hausse les prix pratiqués de gré à gré pour des terrains analogues. Le recourant n'avait d'ailleurs pas exposé concrètement d'autres situations, ni produit des pièces propres à laisser penser que des montants à hauteur de 200 fr. par m2 auraient été pratiqués dans la région pour des parcelles agricoles antérieurement à la mise à l'enquête en question. 
Le recourant discute la motivation de l'arrêt attaqué, sans toutefois alléguer qu'elle serait arbitraire. Il ne peut de toute façon être suivi lorsqu'il affirme que la surface expropriée a déjà vocation de terrain à bâtir influant sur la fixation de l'indemnité d'expropriation, puisque, compte tenu des règles sévères de la législation en matière d'aménagement du territoire, la nature du terrain à bâtir ne peut en principe être reconnue qu'à des parcelles classées en zone de construction par un plan d'affectation approuvé par le Conseil d'Etat, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Son raisonnement est d'ailleurs contradictoire puisqu'il admet ensuite que la modification du plan de zone n'est pas effective et que, par conséquent, aucun acheteur ne se risquerait à déjà payer un prix correspondant à la zone à bâtir tant qu'une telle décision n'est pas en force. Il semble ainsi implicitement reconnaître que la condition d'un meilleur usage de sa parcelle dans un délai raisonnable n'était pas remplie au moment déterminant. Enfin, comme le relève la commune de Martigny dans ses déterminations du 29 août 2011, ce n'est pas la route projetée mais uniquement les parcelles voisines qui seraient éventuellement classées en zone à bâtir. Il n'est dès lors pas vraisemblable que les terrains expropriés fassent l'objet d'un classement futur, puisque la route sera bien entendu impropre à la construction; les surfaces expropriées ne seront donc de toute évidence jamais classées en zone à bâtir. Au vu de ce qui précède, le Tribunal cantonal n'est pas tombé dans l'arbitraire en excluant l'application de l'art. 15 al. 2 LEx/VS au cas particulier et le présent grief doit par conséquent être rejeté. 
 
7. 
Entièrement mal fondé, le recours doit être rejeté, aux frais du recourant qui succombe (art. 65 et 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à la commune de Martigny (art. 68 al. 3 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
 
2. 
Les frais judiciaires, fixés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3. 
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant et de la Commune de Martigny, à la Commission d'estimation en matière d'expropriation et au Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public. 
 
Lausanne, le 12 octobre 2011 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président: Fonjallaz 
 
La Greffière: Mabillard