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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 2A.49/2002 
 
Arrêt du 25 avril 2002 
IIe Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Wurzburger, président, Betschart et Müller, 
greffière Rochat. 
 
G.________, recourant, représenté par Me Alain Vuithier, avocat, avenue de Villamont 23, case postale 2252, 1002 Lausanne, 
 
contre 
 
Département fédéral de justice et police, 3003 Berne. 
 
art. 7 et 10 al. 1 LSEE: refus d'approbation d'une autorisation de séjour et renvoi de Suisse 
 
(recours de droit administratif contre la décision du Département fédéral de justice et police du 12 décembre 2001) 
 
Faits: 
A. 
G.________, ressortissant albanais, est entré en Suisse le 1er avril 1998 et a déposé une demande d'asile sous une fausse identité. L'intéressé ayant disparu sans laisser d'adresse, l'Office fédéral des réfugiés a déclaré cette demande irrecevable et a prononcé son renvoi de Suisse, par décision du 19 juin 1998. G.________ n'a cependant pas quitté le pays et a noué, peu après, une relation avec une ressortissante suisse, C.________, chez laquelle il s'est installé dès le mois de janvier 1999. De cette liaison est née une fille prénommée A.________, le 1er mars 2000. 
B. Arrêté pour trafic de drogue s'étendant sur une période de trois semaines en novembre 1999, G.________ a été placé en détention préventive, le 20 du même mois. Il a ensuite été condamné, par jugement du Tribunal correctionnel du district de Lausanne du 1er mai 2000, pour infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants et infraction à la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement, sous déduction de 164 jours de détention préventive, avec sursis pendant cinq ans, ainsi qu'à l'expulsion du territoire suisse pendant cinq ans, également avec sursis pendant cinq ans. 
Par courrier du 15 mai 2001, le Service de la population du canton de Vaud a informé l'intéressé qu'il était favorable à la délivrance d'une autorisation de séjour en sa faveur, sous réserve de l'approbation de l'Office fédéral des étrangers. Cette lettre devait toutefois être considérée comme un sérieux avertissement à ne pas récidiver. L'Office fédéral a refusé son approbation, par décision du 12 juillet 2001. 
G.________ a épousé C.________ le 30 juillet 2001. Partant, le 15 août 2001, le Service de la population du canton de Vaud a transmis une nouvelle fois le dossier à l'Office fédéral des étrangers; celui-ci ne s'est toutefois pas prononcé formellement, en raison du recours de l'intéressé du 13 septembre 2001 contre sa première décision, encore pendant devant le Département fédéral de justice et police. Depuis septembre 2001, G.________ travaille comme aide-jardinier chez un paysagiste de La Côte. 
C. Par décision du 12 décembre 2001, le Département fédéral de justice et police a rejeté le recours déposé par G.________ contre le refus d'approbation de l'Office fédéral des étrangers du 12 juillet 2001. Le Département a considéré avant tout la gravité de la condamnation qui, selon lui, n'était pas contrebalancée par l'évolution positive du recourant. Il a également retenu que l'épouse s'était mariée en connaissance de cause et qu'elle devait dès alors assumer les conséquences d'un renvoi de Suisse. 
D. G.________ forme un recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral et conclut, avec dépens, à l'annulation de la décision du Département fédéral de justice et police du 12 décembre 2001, ainsi qu'à l'octroi d'une autorisation de séjour. Il présente également une requête d'assistance judiciaire et une demande d'effet suspensif. 
Le Département fédéral de justice et police conclut au rejet du recours, dans la mesure où il est recevable. 
E. Par ordonnance présidentielle du 14 février 2002, l'effet suspensif a été attribué au recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
En vertu de l'art. 95 OJ applicable par analogie (art. 113 OJ), le Tribunal fédéral estime qu'il est suffisamment renseigné sur les efforts d'intégration fournis par le recourant, sans qu'il soit encore nécessaire d'entendre les trois témoins dont ce dernier a requis l'audition, soit son épouse et ses beaux-parents. 
2. 
2.1 D'après l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), le conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit en principe à l'octroi et à la prolongation de l'autorisation de séjour. Selon la jurisprudence, pour juger de la recevabilité du recours de droit administratif, seule est déterminante la question de savoir si un mariage au sens formel existe (ATF 122 II 289 consid. 1b p. 292; 120 Ib 6 consid. 1 p. 8; 119 Ib 417 consid. 2c p. 419). 
Il est en l'espèce constant que le recourant est marié à une Suissesse et qu'à ce titre, il peut se prévaloir d'un droit à l'octroi d'une autorisation de séjour pour vivre auprès de son épouse, de sorte que le présent recours est recevable sous l'angle de l'art. 7 al. 1 LSEE. En outre, dans la mesure où il est établi que le couple forme une véritable union conjugale, le recourant peut invoquer la garantie à la vie familiale découlant de l'art. 8 § 1 CEDH (ATF 124 II 361 consid. 3a p. 366). Il s'ensuit que le recours est aussi recevable sous l'angle de cette disposition. La question de savoir si les conditions pour obtenir une autorisation de séjour sont réunies est en revanche une question de fond et non de recevabilité, qu'il y a lieu d'examiner en procédant à la pesée de tous les intérêts en présence. 
2.2 Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 4 OJ, le présent recours n'est pas recevable contre le renvoi prononcé par le Département (ch. 2 du dispositif de la décision attaquée), simultanément à son refus d'approbation de l'autorisation de séjour sollicitée. Vu l'issue du recours (supra consid. 3.6), il incombera toutefois à l'autorité fédérale de revoir sa position à cet égard. 
2.3 Conformément à l'art. 104 OJ, le recours de droit administratif peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (lettre a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (lettre b). Le Tribunal fédéral revoit d'office l'application du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du citoyen (ATF 122 IV 8 consid. 1b p. 11; 121 IV 345 consid. 1a p. 348; 121 II 39 consid. 2d/bb p. 47). Comme il n'est pas lié par les motifs que les parties invoquent, il peut admettre le recours pour d'autres raisons que celles avancées par le recourant ou, au contraire, confirmer l'arrêt attaqué pour d'autres motifs que ceux retenus par l'autorité intimée (art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 121 II 447 consid. 1b p. 448, 473 consid. 1b p. 477; 117 Ib 114 consid. 4a p. 117). Lorsque, comme en l'espèce, l'autorité intimée n'est pas une autorité judiciaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits constatés dans la décision attaquée (art. 105 al. 1 OJ). Il ne peut cependant pas revoir l'opportunité de la décision entreprise, le droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104 lettre c ch. 3 OJ). 
3. 
3.1 L'art. 7 al. 1 in fine LSEE prévoit que le droit à l'octroi de l'autorisation de séjour s'éteint lorsqu'il existe un motif d'expulsion. Selon l'art. 10 al. 1 LSEE, un étranger peut être expulsé de Suisse, notamment, lorsqu'il a été condamné par une autorité judiciaire pour crime ou délit (lettre a) ou si sa conduite, dans son ensemble, et ses actes permettent de conclure qu'il ne veut pas s'adapter à l'ordre établi dans le pays qui lui offre l'hospitalité ou qu'il n'en est pas capable (lettre b). L'expulsion ne sera cependant prononcée que si elle respecte le principe de la proportionnalité, c'est-à-dire si elle paraît appropriée à l'ensemble des circonstances (art. 11 al. 3 LSEE). Pour en juger, l'autorité tiendra notamment compte de la gravité de la faute commise par l'étranger, de la durée de son séjour en Suisse et du préjudice qu'il aurait à subir avec sa fa- mille du fait de son expulsion (art. 16 al. 3 du règlement d'exécution du 1er mars 1949 de la LSEE [RSEE; RS 142.201]). 
3.2 Il découle de cette réglementation que la seule existence d'un crime ou d'un délit n'est pas suffisante pour refuser de délivrer ou de prolonger ou encore d'approuver une autorisation de séjour; encore faut-il que ce refus résulte d'une complète pesée de tous les intérêts en présence. Il en va d'ailleurs de même sous l'angle de l'art. 8 CEDH, car le droit au respect de la vie familiale n'est pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est en effet possible selon l'art. 8 § 2 CEDH, pour autant qu'elle soit prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la 
défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou encore à la protection des droits et libertés d'autrui (ATF 120 Ib 6 consid. 4 p. 13). 
3.3 Lorsque le motif d'expulsion est la commission d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le premier critère s'agissant d'évaluer la gravité de la faute et de procéder à la pesée des intérêts. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral applicable au conjoint étranger d'un ressortissant suisse, une condamnation à deux ans de privation de liberté constitue la limite à partir de laquelle, en général, il y a lieu de refuser l'autorisation de séjour lorsqu'il s'agit d'une demande d'autorisation initiale ou d'une requête de renouvellement d'autorisation déposée après un séjour de courte durée (ATF 120 Ib 6 consid. 4b p. 14 se référant à l'arrêt Reneja, ATF 110 Ib 201). Il s'agit toutefois d'une limite indicative qui, si elle est atteinte, nécessite des circonstances exceptionnelles pour que l'expulsion ne soit pas prononcée. Inversement, lorsque la peine est moins sévère, il n'est pas exclu de prononcer une expulsion ou de ne pas renouveler une autorisation de séjour à laquelle le conjoint étranger aurait normalement droit (art. 7 al. 1 3ème phrase LSEE) si, par l'accumulation des infractions qu'il a commises ou par son comportement général, il démontre son manque d'intégration en Suisse. Dans un tel cas, seule est déterminante la pesée des intérêts publics et privés qu'il y a lieu d'opérer en tenant compte de toutes les circonstances particulières (Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers, in RDAF 53/1997 p. 311). Ces principes sont applicables même lorsque l'on ne peut pas - ou difficilement - exiger de l'épouse suisse de l'étranger qu'elle quitte la Suisse, ce qui empêche de fait les conjoints de vivre ensemble d'une manière ininterrompue. Pour la pesée des intérêts, l'intensité du lien conjugal constitue un autre critère très important. Plus ce lien est intense, plus le refus de délivrer une autorisation de séjour doit être prononcé avec retenue (Alfred Koller, Die Reneja-Praxis des Bundesgerichts, in ZBl 86/1985 p. 513 n. 4 p. 517; arrêt du 21 mars 1997 (2A.284/1996) en la cause S., non publié). 
3.4 En l'espèce, il est établi que le recourant est demeuré en Suisse sans autorisation après que l'Office fédéral des réfugiés eut déclaré sa demande d'asile irrecevable, le 19 juin 1998. Il n'est pas davantage contesté que le recourant a été reconnu coupable d'infraction grave à la loi fédérale sur les stupéfiants pour avoir acheté, en novembre 1999, 400 grammes d'héroïne - représentant 80 grammes d'héroïne pure, si l'on prend un taux de pureté de 20% - qu'il a ensuite revendue à quatre personnes; ce trafic lui a permis de réaliser un bénéfice d'environ 800 fr. L'intéressé a également reconnu avoir tenté d'acheter de la cocaïne, mais sans succès. Il existe donc un motif d'expulsion, au sens de l'art. 10 al. 1 LSEE. Partant, il s'agit uniquement d'examiner si l'autorité fédérale a abusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que l'intérêt public à éloigner le recourant de Suisse était prépondérant par rapport à ses intérêts privés et à ceux de sa famille. 
3.5 Il est vrai que la jurisprudence est particulièrement rigoureuse en matière de trafic de drogue et que cette sévérité est partagée par la Cour européenne des droits de l'homme ( arrêt C. c. Belgique du 7 août 1996, PCourEDH, 1996 915) . Cela ne doit cependant pas empêcher que chaque cas d'expulsion soit examiné en fonction des circonstances particulières, en prenant en considération, à côté des infractions commises, le comportement général de l'étranger sur le plan privé et professionnel, comme dans la vie quotidienne, la durée de son séjour et le degré de son intégration en Suisse (Alain Wurzburger, op. cit. in RDAF 53/1997 p. 308/309). Or, en l'espèce, plusieurs points positifs parlent en faveur du recourant. Le jugement pénal a notamment retenu qu'il n'avait pas d'antécédents judiciaires et qu'il avait toujours cherché à travailler honnêtement. Confronté à des difficultés financières en automne 1999, il s'était laissé convaincre par un compatriote de vendre des stupéfiants afin de contribuer aux dépenses du ménage. Il avait toutefois reconnu la gravité des faits qui lui étaient reprochés et avait manifesté un repentir sincère. Les témoignages de son épouse et de sa belle-famille confirment qu'il est très apprécié et a un rôle de soutien important pour son entourage. Il travaille toujours pour le paysagiste de La Côte qui l'avait engagé en automne 2001 et a réalisé, au mois de janvier 2002, un salaire net d'environ 3'500 fr. Quant à son épouse, ancienne toxicomane, il y a lieu de prendre en considération son état de santé, encore fragile après sa désintoxication, de sorte qu'il n'est pas conseillé, du point de vue médical, qu'elle quitte la Suisse. Il faut par ailleurs relativiser le fait qu'elle se soit mariée après la condamnation du recourant, puisqu'elle l'avait connu plusieurs mois avant son arrestation, en novembre 1999, et que l'enfant issue de cette relation est née le 1er mars 2000. 
 
Au vu de l'ensemble de ces circonstances, le refus d'approuver l'autorisation de séjour en cause est une décision disproportionnée, car elle aurait pour résultat de séparer une famille unie. Le recourant n'a en effet été condamné qu'à une seule reprise et paraît être sur la bonne voie, tant sur le plan familial que professionnel. La condamnation avec sursis est en outre inférieure à la durée indicative de deux ans et, si elle porte sur des faits graves pour la sécurité publique, ceux-ci ne se sont toutefois déroulés que sur une période de trois semaines, de sorte qu'actuellement, rien ne permet d'en déduire que le risque de récidiver soit important. Il y a donc lieu de donner à l'intéressé une chance de pouvoir demeurer en Suisse avec sa famille. Contrairement à ce que soutient le Département intimé, la situation du recourant n'est pas vraiment comparable aux cas jugés par le Tribunal fédéral, sur lesquels il s'est appuyé pour rendre la décision attaquée. Dans l'arrêt M. du 20 octobre 2000 (2A.451/2000), le recourant avait été condamné à plusieurs reprises et le risque de récidive était important. En outre, le lien conjugal n'était pas très intense, les époux vivant séparés depuis juin 2000, et l'intéressé n'avait jamais occupé d'emploi stable. Pour ce qui est de l'arrêt F. du 26 mars 1999 (2A.464/1998), il s'agissait certes de faits assez semblables, mais le couple n'avait pas d'enfants. Quant à l'arrêt du 9 janvier 1997 (2A.426/1996) en la cause A., le recourant avait connu son amie après la condamnation pénale et le mariage avait eu lieu en connaissance de cause; le canton avait au demeurant refusé de lui délivrer une autorisation et il n'avait pas de travail. 
3.6 Il résulte de cet examen que le recours doit être admis et la décision attaquée annulée. Le canton de Vaud peut ainsi délivrer l'autorisation de séjour sollicitée, étant précisé que cette autorisation pourrait ne pas être renouvelée si le comportement de l'intéressé se modifiait. Il convient au surplus de prendre acte de l'avertissement déjà formellement notifié au recourant par le Service de la population dans sa correspondance du 15 mai 2001. 
4. 
4.1 Compte tenu de l'issue du recours, le présent arrêt doit être rendu sans frais (art. 156 al. 2 OJ). En revanche, le Département fédéral de justice et police versera au recourant une indemnité à titre de dépens pour les deux instances fédérales, dans la mesure où le présent arrêt a pour résultat d'annuler sa décision accordant l'assistance judiciaire (art. 114 al. 2 et 159 al. 1 OJ). 
4.2 Il s'ensuit que la demande d'assistance judiciaire présentée par le recourant devient sans objet. 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. Le recours est admis et la décision attaquée est annulée. 
2. Il est constaté que le canton de Vaud peut délivrer l'autorisation de séjour requise. 
3. Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire. 
4. Le Département fédéral de justice et police versera au recourant une indemnité globale de 2'500 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral et la procédure de recours devant lui. 
5. La demande d'assistance judiciaire est devenue sans objet. 
 
6. Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant et au Département fédéral de justice et police. 
Lausanne, le 25 avril 2002 
ROC/elo 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le président: La greffière: