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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_51/2020  
 
 
Arrêt du 25 février 2020  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président, 
Kneubühler et Haag. 
Greffier : M. Tinguely. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Maîtres Guglielmo Palumbo et Matthias Bourqui, avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, 
Tribunal d'application des peines et mesures de la République et canton de Genève, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève. 
 
Objet 
détention pour des motifs de sûreté, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale 
de recours, du 24 décembre 2019 
(ACP/1014/2019 PM/779/2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Par jugement du 9 février 2001 de la Cour d'assises de la République et canton de Genève, confirmé par arrêt du 12 octobre 2001 de la Cour cantonale de cassation, A.________ a été condamné à une peine de 20 ans de réclusion, sous déduction de la détention préventive subie, pour assassinat, extorsion aggravée, vols, lésions corporelles simples, violence contre les fonctionnaires, dommages à la propriété et vol d'usage d'un véhicule automobile.  
Dans le cadre de la procédure, A.________ avait fait l'objet, en 2000, d'une expertise psychiatrique dont il ressortait qu'il souffrait d'un trouble de la personnalité dyssociale. Sa dangerosité n'était toutefois pas en rapport avec son état mental mais était l'expression de son mode de vie, de son identité antisociale et de son manque d'insertion dans la société. Compte tenu de l'absence de traitement médical ou de soins spéciaux susceptibles de diminuer le risque de récidive, aucun traitement institutionnel ou ambulatoire n'avait été préconisé. 
 
A.b. Par jugement du 27 novembre 2014, le Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) a refusé la libération conditionnelle de A.________ et a ordonné à son égard une mesure thérapeutique institutionnelle en milieu fermé (art. 59 al. 3 CP).  
Le TAPEM s'est fondé sur une expertise psychiatrique réalisée le 13 février 2014 par les Drs B.________ et C.________, qui faisait état chez l'intéressé d'un trouble de la personnalité psychopathique avec des traits paranoïaques et immatures surajoutés correspondant à un grave trouble mental de sévérité importante. L'expert avait estimé que l'évolution du trouble avait été défavorable et souligné un risque élevé de récidive pour des infractions du même genre. S'il ressortait de l'expertise que l'intéressé était en l'état anosognosique et que l'internement (art. 64 CP) était la seule mesure qui pouvait être préconisée " dans une perspective de sécurité pour la collectivité ", le TAPEM a néanmoins considéré qu'il était prématuré de considérer que l'intéressé était définitivement réfractaire à toute prise en charge médicale. Le principe de subsidiarité qui prévalait en la matière commandait qu'il fût au préalable tenté d'obtenir du cité une adhésion à une prise en charge thérapeutique, qui n'avait à ce stade pas été expérimentée. 
Le recours formé par A.________ contre le jugement du 27 novembre 2014, en tant qu'il portait uniquement sur le refus de libération conditionnelle, a été rayé du rôle par arrêt du 3 février 2015 de la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise. 
 
A.c. Par jugement du 6 décembre 2016, le TAPEM a ordonné la prolongation de la mesure thérapeutique institutionnelle jusqu'au prochain contrôle annuel.  
Le recours formé par A.________ contre ce jugement a été rejeté par arrêt du 29 mars 2017 de la Chambre pénale de recours. 
 
A.d. Par jugement du 5 juillet 2018, le TAPEM a ordonné une nouvelle fois la prolongation de la mesure thérapeutique institutionnelle jusqu'au prochain contrôle annuel.  
Le recours formé par A.________ contre ce jugement a été rejeté par arrêt du 16 octobre 2018 de la Chambre pénale de recours. Celle-ci a alors néanmoins considéré que, pour l'avenir, seul un changement de mesure, soit un basculement de la mesure thérapeutique institutionnelle en internement, semblait a priori envisageable, compte tenu de l'échec de la première, de la dangerosité de l'intéressé ainsi que du risque de récidive y afférent. Dans cette attente et faute de toute autre mesure adéquate, la mesure thérapeutique institutionnelle en milieu fermé devait être poursuivie. 
 
B.  
 
B.a. Le 2 juillet 2019, le Ministère public a saisi le TAPEM d'une demande de levée de la mesure thérapeutique institutionnelle au profit d'un internement. Il se fondait à cet égard sur une expertise psychiatrique réalisée le 24 mai 2019 ainsi que sur le préavis du 20 juin 2019 du Service d'application des peines et mesures (SAPEM), lesquels préconisaient la levée de la mesure thérapeutique institutionnelle et le prononcé d'une mesure d'internement au sens de l'art. 64 CP.  
Par décision du 29 août 2019, rendue à la suite de l'audience du même jour à laquelle avaient comparu A.________ et le Ministère public, le TAPEM a retiré du dossier l'expertise du 24 mai 2019 et ordonné une nouvelle expertise psychiatrique. Dans l'intervalle, la mesure thérapeutique institutionnelle se poursuivait. 
 
B.b. Le 20 novembre 2019, le TAPEM a sollicité du Tribunal des mesures de contrainte (Tmc) le placement de A.________ en détention pour des motifs de sûreté pour une durée de 6 mois, dès lors que sa décision sur la requête du 2 juillet 2019 n'interviendrait pas avant l'échéance du délai de 5 ans (cf. art. 59 al. 4 CP), soit le 27 novembre 2019.  
Une audience s'est tenue le 22 novembre 2019 au Tmc. A.________ s'est alors opposé à sa mise en détention pour des motifs de sûreté et a conclu à sa libération immédiate. Il a demandé en outre le constat de la nullité des jugements rendus par le TAPEM postérieurement à l'expertise psychiatrique du 13 février 2014. 
 
B.c. Par ordonnance du 22 novembre 2019, le Tmc a placé A.________ en détention pour des motifs de sûreté jusqu'au 22 février 2020. Il a par ailleurs constaté que les jugements du TAPEM des 27 novembre 2014, 6 décembre 2016 et 5 juillet 2018 n'étaient pas nuls.  
Le recours formé par A.________ contre cette ordonnance a été rejeté par arrêt du 24 décembre 2019 de la Chambre pénale de recours. 
 
C.   
Par acte adressé le 8 janvier 2020 au Tribunal fédéral et intitulé " recours ", A.________ a demandé à pouvoir retourner en Serbie, son pays d'origine. 
Le 27 janvier 2020, A.________ a formé, par l'intermédiaire de son mandataire, un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 24 décembre 2019. Il a conclu, avec suite de frais et dépens, principalement à sa libération immédiate, après le constat de la nullité absolue des jugements du TAPEM des 27 novembre 2014, 6 décembre 2015 (recte: 2016) et 5 juillet 2018 ainsi que le constat d'une violation de l'art. 5 CEDH. Subsidiairement, il a conclu à sa libération immédiate. Plus subsidiairement, il a conclu à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à la Chambre pénale de recours pour nouvelle décision. Il a sollicité en outre le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
Invitée à se déterminer, la Chambre pénale de recours a indiqué qu'elle n'avait pas d'observations à formuler, se référant aux considérants de l'arrêt entrepris. Le Ministère public et le TAPEM ont pour leur part conclu au rejet du recours. 
Le 10 février 2020, A.________ a persisté dans ses conclusions. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Par la décision attaquée, rendue en dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF), la cour cantonale a statué sur la validité de la détention du recourant pour des motifs de sûreté, laquelle a été ordonnée dans le cadre d'une procédure judiciaire ultérieure indépendante (art. 363 ss CPP) concernant le prononcé d'un internement ensuite de la levée d'une mesure thérapeutique institutionnelle (art. 62c al. 4 CP en relation avec l'art. 64 al. 1 CP). Le recours en matière pénale est dès lors ouvert. Dès lors que le maintien en détention repose actuellement sur l'ordonnance du 18 février 2020 du Tmc - qui prolonge la détention jusqu'au 18 août 2020 -, le recourant conserve un intérêt juridique à la vérification de la décision attaquée qui ordonne sa détention pour des motifs de sûreté (art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF; arrêt 1B_184/2019 du 9 mai 2019 consid. 1). 
Tant l'écriture personnelle du recourant que le mémoire de recours de son mandataire ont été déposés en temps utile (art. 100 al. 1 LTF). Néanmoins, par l'acte que le recourant a adressé personnellement le 8 janvier 2020, celui-ci se borne pour l'essentiel à évoquer, de manière parfois inconvenante, des faits sans relation directe avec le présent litige, sans exposer non plus en quoi l'arrêt du 24 décembre 2019 viole le droit, de sorte que cette écriture ne répond pas aux exigences de l'art. 42 LTF. En revanche, l'acte de recours du 27 janvier 2020, rédigé par le mandataire du recourant, remplit pour sa part les conditions de forme découlant de la disposition précitée. Il peut dès lors être entré en matière. 
 
2.   
En premier lieu, le recourant demande le constat de la nullité des jugements rendus par le TAPEM les 27 novembre 2014, 6 décembre 2016 et 5 juillet 2018, par lesquels cette autorité avait ordonné à son égard - puis prolongé - un traitement institutionnel (art. 59 al. 3 CP). Le TAPEM n'étant dès lors pas fondé à convertir cette mesure - inexistante - en internement (art. 62c al. 4 CP) et la peine privative de liberté à laquelle il avait été condamné en 2001 ayant de surcroît été entièrement exécutée, il en déduit que sa libération doit être ordonnée immédiatement. 
 
2.1.  
 
2.1.1. La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office (ATF 137 I 273 consid. 3.1 p. 275; arrêt 6B_290/2017 du 27 novembre 2017 consid. 3).  
"En tout temps" signifie qu'alors même qu'une décision est entrée en force, une décision postérieure qui trouve son fondement dans la première peut faire l'objet d'un recours en vue de constater la nullité de la première décision. La nullité peut être constatée "par toute autorité" dans la mesure où une décision peut influer sur la validité de décisions postérieures dans les situations les plus diverses (cf. arrêts 6B_986/2015 du 23 août 2016 consid. 2.1 et les références citées; 6B_339/2012 du 11 octobre 2012 consid. 1.2.1 in fine). 
 
2.1.2. La nullité absolue ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement décelables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit (ATF 138 II 501 consid. 3.1 p. 503 s.; 138 III 49 consid. 4.4.3 p. 56; 137 I 273 consid. 3.1 p. 275). Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 p. 257; arrêt 6B_986/2015 précité consid. 2.1). L'illégalité d'une décision ne constitue pas par principe un motif de nullité; elle doit au contraire être invoquée dans le cadre des voies ordinaires de recours (ATF 130 II 249 consid. 2.4 p. 257). Des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 138 II 501 consid. 3.1 p. 503 s.). Dans le domaine du droit pénal, la sécurité du droit revêt une importance particulière. On ne saurait ainsi admettre facilement la nullité de décisions entrées en force (ATF 145 IV 197 consid. 1.3.2 p. 201).  
 
2.2. A l'appui de ses conclusions en constat de la nullité des jugements du TAPEM, le recourant soutient que l'expertise psychiatrique réalisée le 13 février 2014 - sur laquelle ces jugements se fondent - comporte de graves vices procéduraux. Ainsi, alors que son silence lors de son audition par les experts au parloir de la prison de Thorberg avait été interprété à charge dans l'expertise litigieuse, il relève ne pas avoir été informé de son droit de refuser de collaborer, en violation des art. 6 CEDH et 185 al. 5 CPP, ce qui a pour conséquence de rendre l'expertise inexploitable en application de l'art. 158 al. 2 CPP. Il se plaint en outre que les entretiens réalisés par les experts avec des surveillants et le directeur de la prison n'ont pas fait l'objet d'un interrogatoire respectant les règles de procédure.  
 
2.2.1. Aux termes de l'art. 185 al. 5 CPP, si l'expert procède à des investigations, le prévenu et les personnes qui ont le droit de refuser de déposer ou de témoigner peuvent, dans les limites de ce droit, refuser de collaborer ou de faire des déclarations. L'expert informe les personnes concernées de leur droit au début des investigations.  
S'agissant du prévenu, la prescription de l'art. 185 al. 5 CPP est similaire à celle comprise à l'art. 158 al. 1 let. b CPP, selon laquelle, au début de la première audition, la police ou le ministère public informent le prévenu dans une langue qu'il comprend qu'il peut refuser de déposer et de collaborer. Compte tenu de la prescription de l'art. 185 al. 5 CPP relative spécifiquement au prévenu, il convient d'admettre que l'expert doit informer celui-ci de ses droits au début de ses investigations, même si l'intéressé en a déjà, auparavant, été informé par la police ou le ministère public (arrêt 6B_824/2018 du 19 septembre 2018 consid. 1.1 et les références citées). 
Selon l'art. 158 al. 2 CPP, les auditions effectuées sans que les informations évoquées à l'al. 1 de cette disposition aient été données ne sont pas exploitables. Il ne s'agit pas d'une simple règle dont la violation n'exclurait pas toute exploitation du contenu de l'audition (cf. Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1173 ad art. 155 al. 2). 
 
2.2.2. Invoquant une violation de son droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.), le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir examiné son grief tiré de l'inexploitabilité de l'expertise du 13 février 2014.  
 
2.2.2.1. Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. art. 3 al. 2 let. c, 101 et 107 CPP) implique notamment le devoir pour l'autorité de motiver sa décision. Selon la jurisprudence, il suffit que le juge mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause. L'autorité n'a pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 145 IV 99 consid. 3.1 p. 109; 143 III 65 consid. 5.2 p. 70 s.; 141 IV 244 consid. 1.2.1 p. 246). Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté même si la motivation présentée est erronée. La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel lorsqu'elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565).  
 
2.2.2.2. La Chambre pénale de recours a considéré que le recourant ne pouvait pas prétendre n'être soumis à aucune mesure thérapeutique institutionnelle valable, dès lors que les jugements du TAPEM n'avaient pas été contestés dans le cadre de voies de droit ordinaires, respectivement avaient été confirmés par l'autorité de recours (cf. arrêt entrepris, consid. 3.2 p. 10).  
L'autorité de recours ne se prononce certes pas sur la caractère exploitable de l'expertise. Il peut néanmoins être déduit de la motivation retenue que, de l'avis de la cour cantonale, il était exclu que les vices procéduraux invoqués, dont il a été tenu compte dans la partie " en fait " de l'arrêt (cf. arrêt entrepris, let. D.a p. 8), revêtissent une gravité suffisante pour permettre le constat de la nullité de la mesure prononcée à son égard. Cette conclusion s'imposait d'autant plus que la mesure avait été ordonnée, puis prolongée, par plusieurs décisions judiciaires successives. 
Par ailleurs, au regard des motifs que le recourant développe, il n'apparaît pas que celui-ci a été empêché de contester utilement, dans la présente procédure, le refus de la cour cantonale de constater la nullité des jugements du TAPEM. Il s'ensuit que le grief tiré d'une violation de son droit d'être entendu doit être rejeté. 
 
2.2.3. Certes, le rapport d'expertise psychiatrique réalisé le 13 février 2014 ne relève pas que le recourant avait été informé, en application de l'art. 185 al. 5 CPP, de son droit de refuser de collaborer ou de faire des déclarations.  
Il en ressort toutefois que l'intéressé, avisé oralement que les experts B.________ et C.________ étaient mandatés pour rendre un rapport le concernant (cf. rapport d'expertise du 13 février 2014, p. 2), avait refusé catégoriquement dès le début de l'entretien de répondre à leurs questions, déclarant uniquement qu'il souhaitait retourner dans sa cellule. Le rapport mentionne ainsi qu'aucun échange verbal n'avait été possible " malgré l'insistance des experts " (cf. rapport d'expertise, p. 12 s.). Cela étant, dans ces circonstances, il n'est en rien manifeste que le défaut d'information au sens de l'art. 185 al. 5 CPP, de même que l'insistance reprochée aux experts, aient eu, au préjudice du recourant, une influence déterminante dans l'établissement de l'expertise. Si les experts ont certes qualifié le comportement du recourant " d'infantile " (cf. rapport d'expertise, p. 12) et révélateur " d'un vécu persécutoire " (cf. rapport d'expertise, p. 14), il n'apparaît pas que ces constatations pouvaient être déduites de la seule attitude du recourant lors de l'entretien du 21 janvier 2014. Ainsi, dans la partie " Discussion " du rapport, les experts, qui avaient eu accès à l'ensemble du dossier, avaient notamment relevé l'existence de nombreux courriers adressés à des autorités judiciaires, par lesquels le recourant avait exprimé son sentiment d'être persécuté, se prétendant victime d'une erreur judiciaire (cf. rapport d'expertise, p. 14). Selon les experts, la nature immature de son fonctionnement psychique ressortait par ailleurs de son comportement en détention, en particulier de son refus de travailler et des nombreuses sanctions qui lui avaient été infligées (cf. rapport d'expertise, p. 14 s.). 
 
2.2.4. Quant aux reproches en lien avec l'absence d'interrogatoires formels des surveillants et du directeur de l'établissement carcéral, le recourant perd de vue que l'art. 185 al. 4 CPP autorise l'expert à procéder à des investigations simples qui ont un rapport étroit avec le mandat qui lui a été confié et à convoquer des personnes à cet effet. Il a déjà été jugé à cet égard que l'art. 78 CPP, relatif aux procès-verbaux d'audition, ne s'adressait pas à l'expert et ne l'obligeait pas à tenir un procès-verbal des auditions qu'il menait (cf. arrêt 6B_276/2018 du 24 septembre 2018 consid. 1.4.2). Pour le surplus, le recourant n'explique pas dans quelle mesure les personnes concernées auraient pu se prévaloir d'un refus de déposer ou de témoigner, ni ne se plaint d'un défaut d'autorisation de la direction de la procédure pour procéder à ces auditions.  
 
2.3. Dans ce contexte, il ne saurait être considéré que les erreurs de procédure invoquées constituent en l'espèce des vices graves ou manifestes affectant l'expertise psychiatrique réalisée le 13 février 2014 et permettant au recourant de se prévaloir, en dehors des voies ordinaires de recours, de l'illégalité des jugements prononçant le traitement institutionnel litigieux.  
Le grief doit dès lors être rejeté. 
 
3.   
Le recourant conteste que les conditions du prononcé d'une détention pour des motifs de sûreté soient réunies. Il invoque des violations des art. 5 CEDH et 31 al. 1 Cst. 
 
3.1.  
 
3.1.1. Aux termes de l'art. 5 par. 1 CEDH, toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales, à savoir, notamment s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent (let. a) ou s'il s'agit de la détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond (let. e). Pour respecter l'art. 5 par. 1 CEDH, la détention doit avoir lieu "selon les voies légales" et "être régulière". En la matière, la CEDH renvoie pour l'essentiel à la législation nationale et consacre l'obligation d'en respecter les normes de fond comme de procédure, mais elle exige de surcroît la conformité de toute privation de liberté au but de l'art. 5 CEDH : protéger l'individu contre l'arbitraire (arrêts CourEDH  Ilnseher contre Allemagne du 4 décembre 2018 [requêtes n os 10211/12 et 27505/14] § 136;  Papillo contre Suisse du 27 janvier 2015 [requête n° 43368/08] § 41).  
 
3.1.2. L'art. 62c al. 1 let. a CP dispose que la mesure thérapeutique institutionnelle doit être levée notamment si son exécution ou sa poursuite paraît vouée à l'échec. Néanmoins, si, lors de la levée d'une mesure ordonnée en raison d'une infraction prévue à l'art. 64 al. 1 CP, il est sérieusement à craindre que l'auteur ne commette d'autres infractions du même genre, le juge peut ordonner l'internement à la requête de l'autorité d'exécution (art. 62c al. 4 CP).  
La conversion d'une mesure thérapeutique institutionnelle en internement est régie par la procédure décrite aux art. 363 ss CPP (procédure en cas de décisions judiciaires ultérieures indépendantes), laquelle ne contient pas de dispositions spécifiques s'agissant de la détention pour des motifs de sûreté (arrêts 1B_486/2018 du 22 novembre 2018 consid. 1; 1B_204/2018 du 15 mai 2018 consid. 1.2). Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les art. 221 ss et 229 CPP sont toutefois applicables par analogie à cette procédure (ATF 142 IV 105 consid. 5.5 p. 113 et les arrêts cités; cf. également infra consid. 4.2). 
L'art. 221 al. 1 CP dispose ainsi que la détention pour des motifs de sûreté ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il se soustraie à la procédure pénale ou à la sanction prévisible en prenant la fuite (let. a), qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuves (let. b) ou qu'il compromette sérieusement la sécurité d'autrui par des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre (let. c). Lorsque la détention pour des motifs de sûreté est ordonnée dans le cadre d'une procédure judiciaire ultérieure, il n'est pas nécessaire de prouver l'existence de forts soupçons, dès lors qu'il existe déjà un jugement de condamnation entré en force. Toutefois, afin de prononcer ou d'ordonner la continuation de la détention pour des motifs de sûreté, il convient d'établir avec une vraisemblance suffisante que la procédure mènera au prononcé d'une mesure qui exige la détention de l'intéressé (ATF 137 IV 333 consid. 2.3.1 p. 337; arrêts 1B_41/2019 du 19 février 2019 consid. 2.4; 1B_569/2018 du 28 janvier 2019). 
 
3.2. Si le recourant se prévaut des art. 5 CEDH et 31 al. 1 Cst., ses critiques portent essentiellement sur l'absence de vraisemblance du prononcé d'un internement à la suite de la procédure actuellement en cours devant le TAPEM (cf. infra consid. 3.3).  
Le recourant ne revient en revanche pas sur la problématique, mise en exergue par l'arrêt de la CourEDH  I.L. contre Suisse du 3 décembre 2019 (requête n° 72393/16), d'un éventuel défaut de conformité à l'art. 5 CEDH d'un placement pour des motifs de sûreté prononcé dans le cadre d'une procédure judiciaire ultérieure indépendante (qui concernait en l'occurrence la prolongation d'une mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l'art. 59 al. 4 CP), faute de base légale explicite ou d'une jurisprudence suffisamment établie (cf. arrêt  I.L. contre Suisse précité, § 47 et 53).  
A cet égard, il est néanmoins renvoyé à l'arrêt 1B_24/2020 du 3 février 2020 (cf. en particulier consid. 2 et 3), qui expose de manière détaillée les motifs pour lesquels l'arrêt  I.L. contre Suisse précité, qui n'est pas définitif - car susceptible d'un renvoi devant la Grande Chambre (cf. art. 44 al. 2 let. b CEDH) -, ne justifie pas en l'état de s'écarter de la jurisprudence rendue depuis l'entrée en vigueur du CPP en 2011, laquelle prévoit de manière constante une application analogique des dispositions du CPP en matière de détention pour des motifs de sûreté (art. 221 ss et 229 CPP) dans une situation telle que celle d'espèce (cf. arrêt 1B_24/2020 précité consid. 3.3 et les nombreux arrêts cités).  
 
3.3.  
 
3.3.1. S'agissant du caractère vraisemblable de l'internement qui pourrait être ordonné à l'égard du recourant dans le cadre de la procédure actuellement pendante devant le TAPEM, il est rappelé que l'expertise psychiatrique réalisée le 13 février 2014 avait déjà préconisé le prononcé d'un internement (cf. rapport d'expertise, p. 19). En outre, le SAPEM avait relevé, dans son préavis du 20 juin 2019, que, selon les différents intervenants, le recourant présentait une dangerosité élevée et un haut risque de récidive violente. Il ressortait en outre de ce préavis que l'ultime tentative de soins, telle qu'envisagée par le TAPEM dans son jugement du 5 juillet 2018, n'avait pas donné de résultat de sorte que la seule option à envisager était l'internement. Le SAPEM faisait par ailleurs état de récentes sanctions alors infligées à l'intéressé - il avait été sanctionné depuis 2015 à six reprises pour un total de 19 jours en cellule forte -, qui tendaient à démontrer que sa remise en question était nulle et que la violence restait un mode privilégié de résolution des conflits (cf. arrêt entrepris, let. B.m p. 4).  
A ce stade, et en l'attente des conclusions de l'expertise en cours de réalisation, il y a lieu d'admettre que ces circonstances suffisent à rendre vraisemblable le prononcé d'un internement à l'égard du recourant. 
 
3.3.2. Certes, le recourant soutient que le principe de la  lex mitior (art. 2 CP) est de nature à faire obstacle au prononcé d'un internement. Il relève dans ce contexte que le droit applicable au moment des faits - et en vigueur jusqu'au 1 er janvier 2007 - lui est plus favorable, dès lors qu'il prévoyait l'internement uniquement pour les " délinquants d'habitude " (art. 42 aCP) ainsi que pour ceux " mentalement anormaux " (art. 43 ch. 1 al. 2 aCP), sans viser, au contraire de l'actuel art. 64 al. 1 let. a CP, les caractéristiques de la personnalité de l'auteur. Ainsi, dans la mesure où aucune expertise n'établirait par ailleurs qu'il est atteint d'un grave trouble mental au sens de l'art. 64 al. 1 let. b CP, le prononcé d'un internement serait juridiquement impossible.  
On ne voit toutefois pas d'emblée qu'un internement prononcé en vertu de l'art. 64 al. 1 let. b CP, respectivement de l'art. 43 ch. 1 al. 2 aCP, serait ici exclu, étant en particulier observé que, selon les auteurs de l'expertise psychiatrique du 13 février 2014, le diagnostic retenu (trouble de la personnalité psychopathique avec des traits paranoïaques et immatures surajoutés) était " compatible avec un grave trouble mental " (cf. rapport d'expertise, p. 14). Cela étant, il paraît que l'éventuel bien-fondé du grief relatif à l'application de la  lex mitior, qui relève du fond, est notamment susceptible de dépendre des conclusions de l'expertise en cours d'élaboration, et en particulier du motif pour lequel l'internement sera, le cas échéant, préconisé. On ne saurait ainsi reprocher à la cour cantonale de ne pas avoir examiné le grief au stade du contrôle de la détention pour des motifs de sûreté.  
De même, ce n'est pas au juge de la détention d'examiner si le prononcé d'une mesure thérapeutique (art. 65 al. 1 CP) préalablement à son éventuelle conversion en internement (art. 62c al. 4 CP) visait à éluder en l'espèce les conditions plus strictes d'un changement de sanction au sens de l'art. 65 al. 2 CP
 
3.4. Le recourant ne conteste pas en tant que tel le risque de récidive retenu.  
A cet égard, la cour cantonale pouvait considérer que ce risque, très concret, pouvait être notamment déduit du comportement provocateur et agressif adopté dans les divers établissements où il exécutait sa mesure, qui lui avait valu un nombre important de sanctions, que ce soit en lien avec des injures et menaces envers le personnel pénitentiaire, des troubles à l'ordre de l'établissement et la possession d'objets prohibés. Dans ses échanges verbaux et écrits, le recourant pouvait par ailleurs se montrer intransigeant, injurieux, voire intimidateur. Enfin, il avait régulièrement eu des mots durs envers sa victime et avait exhibé des photographies de l'homicide extraites de son dossier pénal, ce qui permettait de douter d'une éventuelle prise de conscience de sa part (cf. arrêt entrepris, p. 7; ordonnance du Tmc du 22 novembre 2019, p. 5). 
 
3.5. Pour le surplus, on ne voit pas que les conditions du prononcé de mesures de substitution (art. 237 CPP) seraient réunies en l'espèce, le recourant ne le prétendant du reste pas.  
Enfin, du point de vue temporel, même si l'arrêt entrepris ne contient aucune indication quant à la date prévisible de la réalisation de l'expertise psychiatrique ordonnée le 29 août 2019, il y a lieu d'admettre que la durée de trois mois pour laquelle la détention pour des motifs de sûreté a été ordonnée demeure en l'état proportionnée. 
 
3.6. Au vu de ces éléments, la mesure de détention pour des motifs de sûreté peut être confirmée.  
 
4.   
Il s'ensuit que le recours doit être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
Les conditions posées à l'art. 64 al. 1 LTF étant réunies, il convient de mettre le recourant au bénéfice de l'assistance judiciaire, de lui désigner Me Guglielmo Palumbo comme avocat d'office et d'allouer à celui-ci une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du tribunal. Il n'est en outre pas perçu de frais judiciaires (art. 64 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Guglielmo Palumbo est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, au Ministère public de la République et canton de Genève, au Tribunal d'application des peines et mesures de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 25 février 2020 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Chaix 
 
Le Greffier : Tinguely