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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 1/2} 
5A_210/2007/frs 
 
Arrêt du 7 février 2008 
IIe Cour de droit civil 
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges Raselli, Président, 
Escher, Meyer, Hohl et Marazzi. 
Greffière: Mme Rey-Mermet. 
 
Parties 
Julliard Immobilier SA en liquidation, 
recourante, représentée par Me Marc Mathey-Doret, avocat, 
 
contre 
 
Banque cantonale vaudoise, 
intimée, représentée par Me Bruno Mégevand, avocat, 
 
Objet 
action révocatoire, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève du 16 mars 2007. 
 
Faits : 
A.a Julliard SA était une société active dans la gérance, la promotion et le courtage immobiliers, dont les administrateurs étaient Jean-Paul Dumartheray et Patrice Suel. Le capital-actions de la société était détenu par les deux prénommés à raison de 32,5 % chacun et de 35 % par la Fondation de prévoyance en faveur du personnel de la société. Son organe de révision était DPS Conseil & Révision SA, lequel était contrôlé par Thierry Dubuisson et Alain Schmalz. 
 
Julliard SA était propriétaire de 522/1000èmes de parts d'étages de l'immeuble dans lequel se trouvaient ses locaux, ce qui constituait son actif le plus substantiel. Ces parts d'étages étaient comptabilisées à hauteur d'environ 1'800'000 fr., valeur très inférieure à leur valeur réelle. Bien que matériellement libres de gage, elles étaient grevées de trois cédules hypothécaires au porteur de 529'308 fr., 556'244 fr. et 1'000'000 fr. 
A.b Vers le milieu des années 1990, la situation financière de la société s'est dégradée. Au nombre de ses actifs figuraient au compte courant actionnaires une créance de 3'100'000 fr. et au compte débiteurs, une créance de 3'900'000 fr. contre Dumartheray et Suel; ceux-ci avaient financé leur acquisition du capital-actions ainsi que des promotions immobilières déficitaires menées en leur nom propre au moyen de prêts obtenus de la société et non remboursés. 
 
B. 
Au début de l'année 1997, Dumartheray et Suel ont décidé de vendre le capital-actions de Julliard SA pour le prix de 8'200'000 fr. à Epidaure Holding SA (ci-après Epidaure SA). Cette société holding dormante était détenue par un homme de paille, Marc Poons, pour le compte de Gabriele Baciocchi, promoteur immobilier. Ses administrateurs étaient Dubuisson et Schmalz. Les actions de la Fondation de prévoyance devaient être vendues pour le prix de 1'145 fr. l'action, soit 600'000 fr. au total, et celles de Dumartheray et Suel pour le prix, sept fois supérieur, de 7'786 fr. l'action, soit 7'600'000 fr. au total. Le prix devait être payé par Epidaure SA notamment au moyen d'un emprunt de 2'000'000 fr. auprès d'une banque. 
Simultanément à la prise de contrôle par Epidaure SA de Julliard SA, il a été convenu que la première devait consentir à Dumartherey et Suel une remise de dette de l'ordre de 2'200'000 fr. sur les 3'900'000 fr. prêtés par Julliard SA (cf. let A.b supra). 
Pour compenser la perte au bilan résultant de cette remise de dette, Julliard SA devait vendre ses parts d'étages à une filiale d'Epidaure SA qui devait être créée à cette fin, Julia SA. L'administrateur unique de cette filiale était Alain Schmalz. Le prix de vente des parts d'étages a été fixé artificiellement, sans tenir compte de la valeur du marché, à 4'000'000 fr. Il devait être payé à raison de 2'000'000 fr. empruntés par Julia SA auprès d'une banque et à raison de 2'000'000 fr. par compensation avec les loyers des dix prochaines années des locaux occupés par Julliard SA en qualité de locataire et dont Julia SA devenait la propriétaire et bailleresse. 
 
C. 
C.a En mai 1997, Epidaure SA et Julia SA ont contacté la Banque cantonale vaudoise (ci-après la BCV ou la banque) pour qu'elle leur fournisse à chacune un financement de 2'000'000 fr. Elles ont expliqué à la banque, soit au gestionnaire de crédit Claude Gindroz, les mécanismes prévus de la vente du capital-actions et de la vente ultérieure des parts d'étages. La banque, par son responsable Pierre-Alfred Palley, a jugé que les opérations, telles que présentées, procédaient d'un montage compliqué et constituaient une "magouillerie". Palley a indiqué qu'il ne voulait pas conclure l'affaire car il ne la comprenait pas; selon lui, un crédit immobilier devait être une chose simple. Il a ainsi demandé un complément d'informations auquel il n'a pas été donné suite. 
C.b Les 28 mai et 25 juin 1997, Epidaure SA a acquis la totalité du capital-actions de Julliard SA et a payé immédiatement, sous forme de chèques, 2'000'000 fr. La remise de dette prévue de 2'200'000 fr. a été accordée aux deux administrateurs. 
 
A la fin juin 1997, la BCV, par un autre responsable, Dionis Maret, lequel ignorait que le dossier avait été précédemment refusé par son collègue Palley, a décidé d'accorder les financements demandés à condition que des garanties immobilières soient fournies. Le 8 juillet 1997, la banque a adressé une offre de prêt de 2'000'000 fr. à chacune des sociétés Epidaure SA et Julia SA. Les deux crédits devaient être garantis par la remise à la banque des trois cédules hypothécaires existantes grevant les parts d'étages (cf. let. A.a supra) et d'une quatrième cédule hypothécaire de 2'000'000 fr. à constituer. 
C.c Le 16 juillet 1997, Julliard SA a remis à son notaire les trois cédules existantes et lui a demandé de constituer la quatrième. 
Par courrier du 23 juillet 1997, conformément aux instructions de Julliard SA, le notaire s'est engagé irrévocablement à remettre à la banque les trois cédules existantes et la quatrième, dès que le registre foncier les lui aurait restituées ou délivrées. 
 
Le 24 juillet 1997, Julia SA a été constituée et inscrite au registre du commerce. Le même jour, la banque a conclu les deux contrats de prêt de 2'000'000 fr. chacun avec Epidaure SA et Julia SA (cf. let. C.b). Simultanément à la conclusion de ces contrats, Julia SA a signé en faveur de la banque quatre actes de cession en propriété aux fins de garantie portant sur les quatre cédules hypothécaires, d'un montant de 4'000'0000 fr., afin de garantir le prêt qui lui était accordé et quatre autres actes de cession portant sur les mêmes cédules, afin de garantir le prêt octroyé à Epidaure SA. A ce moment, Julia SA n'était pas propriétaire des parts d'étages, ni des cédules hypothécaires, dont elle n'avait par ailleurs pas la possession. 
C.d Les 25 et 28 juillet 1997, la banque a remis 2'000'000 fr. à chacune des deux sociétés. Conformément à la destination prévue, Epidaure SA a payé à Dumartheray et Suel la seconde tranche du prix du capital-actions, soit 1'500'000 fr. (cf. let. B supra). De son côté, Julia SA a payé la moitié du prix de vente des parts d'étages à Julliard SA (cf. let. B supra). 
 
Contrairement aux conditions prévues par les contrats de prêts, ces montants ont été versés avant la remise des cédules hypothécaires, du contrat de bail à conclure avec Julliard SA et de l'attestation du registre foncier établissant la qualité de propriétaire des parts d'étages de Julia SA. 
C.e Les 6 et 18 novembre 1997, Julliard SA a vendu les parts d'étages à Julia SA pour le prix prévu de 4'000'000 fr., dont 2'000'000 fr. avaient déjà été versés (cf. let. C.d supra), le solde devant être payé par compensation (cf. let. B supra). 
 
A la suite de la réquisition de novation du notaire au registre foncier, Julia SA a été inscrite le 19 novembre 1997 comme débitrice des montants indiqués dans les titres et propriétaire des parts d'étages. Le 11 février 1998, les quatre cédules hypothécaires ont été remises à la banque par le notaire. 
 
D. 
Julliard SA a subi des prélèvements dans sa trésorerie effectués par Epidaure SA, après être passée sous le contrôle de celle-ci. 
 
Epidaure SA et Julia SA ont rapidement été incapables de procéder au paiement des amortissements et des intérêts des prêts octroyés par la BCV. Le 3 décembre 1999, la banque a dénoncé les quatre cédules au remboursement. Le 10 janvier 2001, elle a requis la réalisation forcée des parts d'étages. Cette réalisation a été suspendue en raison de la saisie pénale des parts d'étages qui a été ordonnée dans le cadre de la procédure pénale ouverte à la suite de la déconfiture de Julliard SA. 
 
La faillite de Julliard SA a été prononcée le 3 octobre 2001, avec un découvert estimé à 9'000'000 fr. 
 
Par convention du 1er octobre 2003, Julia SA s'est engagée à restituer la propriété des parts d'étages à Julliard en liquidation et à acquiescer à une action en revendication ad hoc, tout en renonçant à exiger la restitution des 2'000'000 fr. qu'elle avait versés. Epidaure SA et Baciocchi ont reconnu devoir à Julliard en liquidation 5'300'000 fr. et 450'000 fr. La procédure pénale ouverte contre Dumartheray, Suel, Dubuisson, Schmalz, Poons et Baciocchi pour abus de confiance et gestion fautive a été classée par décision du Procureur général du 27 mars 2006. 
 
Par jugement du 9 mars 2004, sur action en rectification du registre foncier, le Tribunal de première instance de Genève a ordonné que Julliard en liquidation soit à nouveau inscrite comme seule propriétaire des parts d'étages. Celle-ci a alors récupéré les parts d'étages, qui demeurent néanmoins grevées des quatre cédules hypothécaires en mains de la banque. 
 
E. 
Le 2 octobre 2003, Julliard en liquidation a ouvert contre la BCV une action en « constatation de nullité, revendication et révocation » des cédules hypothécaires. Elle a conclu à la condamnation de la banque à lui restituer lesdits titres. 
Par jugement du 6 septembre 2006, le Tribunal de première instance de Genève a admis l'action, révoqué les actes par lesquels Julliard SA a cédé la propriété aux fins de garantie des quatre cédules hypothécaires et condamné la banque à remettre les titres à l'administration de la faillite. 
Statuant le 16 mars 2007 sur recours de la banque, la Cour de justice du canton de Genève a réformé le jugement attaqué et rejeté l'action. 
 
F. 
Contre cet arrêt, Julliard en liquidation interjette un recours en matière civile au Tribunal fédéral. Elle conclut à sa réforme en ce sens qu'il soit constaté qu'elle est seule légitime propriétaire des quatre cédules hypothécaires et que la BCV soit condamnée à lui restituer ces titres. 
 
L'intimée conclut au rejet du recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
Interjeté dans le délai de 30 jours compte tenu des suspensions de Pâques (art. 100 al. 1 et 46 al. 1 let. a LTF), contre une décision finale prise en dernière instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF) dans une cause sujette au recours en matière civile (art. 72 al. 1 et 2 let. a LTF) dont la valeur litigieuse de 30'000 fr. est atteinte (art. 74 al. 1 let. b LTF), le recours est en principe recevable. 
 
2. 
Saisi d'un recours en matière civile, le Tribunal fédéral applique en principe d'office le droit (art. 106 al. 1 LTF). Il statue sur la base des constatations de l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), à moins que le recourant ne démontre que les faits ont été établis de manière manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire (ATF 133 II 249 consid. 1.2.2) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF, et pour autant que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). Il n'est lié ni par les motifs invoqués par les parties, ni par l'argumentation juridique retenue par l'autorité cantonale; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 133 III 545 consid. 2.2). Toutefois, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 2 LTF (Begründungspflicht, obbligo di motivare), qui correspond à celle de l'art. 55 al. 1 let. c OJ (ATF 133 IV 286 consid. 1.4), il n'examine pas toutes les questions juridiques qui peuvent se poser, mais seulement celles qui sont soulevées devant lui (ATF 133 III 545 consid. 2.2). 
 
3. 
La Cour de justice a examiné en premier lieu si le transfert des cédules hypothécaires par Julia SA à la banque constituait un acte révocable au sens des art. 285 ss LP. Elle a ensuite vérifié si ce transfert était nul au sens de l'art. 20 al. 1 CO en raison d'une impossibilité initiale ou parce qu'il serait illicite en ce sens qu'il serait intervenu en violation des art. 164 ss CP. Les juges cantonaux ont finalement examiné si le transfert contrevenait à l'art. 857 al. 3 CC
 
La recourante ne conteste pas les faits de l'arrêt attaqué puisqu'elle déclare qu'elle « fonde ses griefs sur l'état de fait retenu par la cour cantonale ». Elle se plaint - dans un recours inutilement long et confus - de violation de l'art. 288 LP. Elle reproche aussi à l'autorité cantonale diverses violations de l'art. 20 al. 1 CO en relation avec les principes relatifs au transfert de la propriété de cédules hypothécaires, avec les art. 164, 165 et 167 CP et avec l'art. 857 al. 3 CC
 
4. 
Il faut examiner en premier lieu si, au regard des règles sur les droits réels et sur les papiers-valeurs, la banque a valablement obtenu de Julia SA le transfert en propriété aux fins de garantie des cédules hypothécaires. En effet, si le transfert est nul, la question de la révocation des actes de cession au sens des art. 285 ss LP est sans objet. 
 
4.1 Pour autant qu'on la comprenne, la Cour de justice a considéré que Julia SA n'était ni propriétaire ni en possession des cédules lorsqu'elle a signé les actes du 24 juillet 1997. Les cédules n'ont donc pas été transférées à ce moment mais ultérieurement, à savoir lorsque Julia SA a acquis la propriété des parts d'étages et que les cédules ont été novées en sa faveur. La société en a ensuite transféré la possession à la banque. Les juges cantonaux ont considéré qu'il n'y avait pas d'impossibilité objective au sens de l'art. 20 al. 1 CO car le transfert a pu être effectué. Ils ont conclu que Julia SA a valablement cédé les cédules en propriété à la banque en garantie de son emprunt. La cour cantonale a écarté l'avis retenu par le tribunal de première instance selon lequel les cédules avaient été remises en garantie par Julliard SA pour des prêts à Epidaure SA et à Julia SA. Elle a relevé qu'aucune cédule désignant Julliard SA comme débitrice et grevant des parts d'étages dont celle-ci était propriétaire n'était parvenue en mains de la banque. Selon la cour cantonale, il n'y a pas non plus eu de simulation au sens de l'art. 18 CO entre Julia SA et la banque puisque, même si les cédules ont été transférées à la banque après que celle-ci ait versé les montants convenus, les parties ont toujours eu la commune et réelle intention d'effectuer ce transfert. En libérant les fonds sans être en possession des cédules, la banque a pris un risque, mais Julliard SA ne peut s'en prévaloir car elle n'était pas partie au contrat de prêt. 
 
4.2 La recourante soutient que les cédules n'ont pas été valablement transférées à la banque, voire que ce transfert était nul au sens de l'art. 20 al. 1 CO. Selon elle, le titre d'acquisition, qui est la cause du transfert, n'est pas valable. Il est constitué en l'espèce par les actes de cession signés par Julia SA le 24 juillet 1997 en faveur de la banque. La recourante affirme que ces actes sont simulés (art. 18 CO) car au moment de la signature, Julia SA n'était pas propriétaire des cédules, dont elle n'avait même pas la possession. Le fait que les cédules aient finalement été remises ultérieurement à la banque ne suffit pas car en se défaisant irrévocablement et sans contre-partie des cédules au profit de la banque, d'Epidaure SA et de Julia SA, Julliard SA a commis un acte préjudiciable à ses créanciers. 
 
4.3 Le créancier qui reçoit une cédule hypothécaire au porteur (cf. art. 842 et 859 CC) comme cessionnaire - soit en pleine propriété (garantie directe; direktes Grundpfand), soit à titre fiduciaire (garantie fiduciaire; Sicherungsübereignung) - devient titulaire de la créance et du droit de gage immobilier incorporés dans le papier-valeur. 
 
En vertu de l'art. 930 al. 1 CC, le possesseur d'une chose mobilière est présumé propriétaire. Cette règle s'applique notamment aux titres au porteur, comme les cédules hypothécaires au porteur, à l'égard desquels les présomptions des art. 930 ss CC valent tant pour le droit sur le titre que pour le droit incorporé à celui-ci (cf. Peter Jäggi, Commentaire zurichois, n. 315 ad art. 965 CO; Emil Stark, Commentaire bernois, n. 32 ad art. 930 CC). A moins que sa possession ne soit suspecte ou équivoque, le détenteur d'une cédule hypothécaire au porteur qui s'en prétend propriétaire est dès lors présumé en avoir acquis la propriété et, partant, être titulaire de la créance, garantie par gage immobilier, incorporée dans le papier-valeur (cf. arrêt 5C.11/2005 du 27 mai 2005, consid. 3.2.1 et les réf. citées; cf. aussi Dominique Favre/Miranda Liniger, Cédules hypothécaires et procédure de mainlevée, in : SJ 1995 p. 101 ss, spéc. p. 106 let. e; Daniel Staehelin, Betreibung und Rechtsöffnung beim Schuldbrief in : PJA 1994 p. 1255 ss, spéc. p. 1257-1258). Il peut opposer cette présomption à quiconque, notamment au débiteur qui lui a remis la cédule, puisqu'il prétend posséder à titre de propriétaire - et non en tant que titulaire d'un droit réel restreint ou d'un droit personnel - et que la restriction prévue à l'art. 931 al. 2 in fine CC ne s'applique dès lors pas (ATF 54 II 244 consid. 2; Stark, op. cit., n. 35 ad art. 930 CC). 
 
La présomption de l'art. 930 al. 1 CC entraîne le renversement du fardeau de la preuve (Umkehrung der Beweislast; Stark, op. cit., n. 1 ad art. 930 CC). La présomption est toutefois réfragable et le possesseur antérieur peut contester le fait présumé lui-même, à savoir la propriété du titre, et apporter la preuve du contraire. 
 
4.4 En l'espèce, la banque a la possession des quatre cédules hypothécaires au porteur dont elle se dit propriétaire aux fins de garantie. Elle est ainsi présumée titulaire des droits incorporés dans ces titres. Il appartient par conséquent à la recourante d'apporter la preuve du contraire, c'est-à-dire d'établir que le transfert des cédules hypothécaires n'est pas valable. 
 
4.5 A cet effet, elle prétend en premier lieu que le transfert était nul au sens de l'art. 20 al. 1 CO car il avait pour objet une chose impossible. Selon elle, Julia SA ne pouvait remettre valablement les cédules car elle n'en était ni propriétaire ni possesseur au moment de la signature des actes du 24 juillet 1997. 
4.5.1 Le transfert de propriété des cédules hypothécaires aux fins de garantie est soumis aux règles ordinaires de l'acquisition des droits réels et aux règles particulières de l'acquisition des papiers-valeurs: il nécessite donc un titre d'acquisition valable (caractère causal), un acte de disposition par lequel le créancier déclare se dessaisir de sa créance et le transfert de la possession du titre. Le transfert n'est juridiquement possible qu'après la création et la délivrance du titre; en revanche, un engagement conditionnel à transférer la cédule lorsqu'elle sera délivrée est valable (ATF 63 II 252, 46 II 356). 
4.5.2 En l'espèce, lorsqu'elle a signé les actes du 24 juillet 1997, Julia SA n'était propriétaire ni des parts d'étages, ni des cédules hypothécaires qui appartenaient à Julliard SA. On ne saurait toutefois en déduire que le transfert des cédules hypothécaires à la banque était nul. De par la volonté des parties, le contrat de vente des parts d'étages, les contrats de prêts et les actes du 24 juillet 1997 des cédules devaient produire leurs effets au même moment; les fonds ne devaient être libérés qu'après remise du contrat de bail à conclure avec Julliard SA, de l'extrait du registre foncier attestant du transfert de la propriété des parts d'étages à Julia SA et des cédules. Il s'agit donc d'actes soumis à la condition suspensive (art. 151 CO) d'une part que Julia SA acquière la propriété des parts d'étages et des cédules - laquelle est intervenue par le contrat de vente des parts d'étages les 6 et 18 novembre 1997 - et d'autre part que les titres soient créés et délivrés par le registre foncier. Dès la réalisation de ces conditions, les actes de cession ont produit leurs effets. Ainsi, le fait que Julia SA n'était pas propriétaire ni en possession des titres au moment de la signature des actes de cession ne signifie pas que ces actes étaient simulés, comme le prétend la recourante; ils étaient simplement soumis à condition suspensive. 
 
La recourante prétend ensuite que le transfert ultérieur des titres à la banque en novembre 1997 n'était pas valable car, à ce moment, Julia SA les détenait sans cause juridique valable, soit en vertu de l'acte de vente du 18 novembre 1997 que la recourante qualifie de « nul et révocable». Elle ne saurait toutefois tirer argument du jugement rendu le 9 mars 2004 par le Tribunal de première instance. Cette autorité a ordonné la seule réinscription de Julliard SA comme propriétaire des parts d'étages mais ne s'est pas prononcée sur la question de la titularité des cédules. Quant à la convention du 1er octobre 2003 entre Julliard en liquidation et Julia SA, elle est pour la banque une « res inter alios acta ». 
 
Enfin, la question de savoir si Julliard SA, en se défaisant des cédules, a commis un acte préjudiciable à ses créanciers, relève de l'action révocatoire des art. 285 ss LP, ce qui sera examiné ci-après (cf. consid. 5). 
 
En conclusion, la banque est propriétaire des cédules, la preuve du contraire n'ayant pas été apportée. Le grief tiré de la violation de l'art. 20 al. 1 CO au motif que le transfert des cédules aurait eu pour objet une chose impossible est donc infondé. 
 
4.6 La recourante affirme que le transfert des cédules par Julia SA à la banque était nul (art. 20 al. 1 CO) car illicite. Selon elle, il contrevient à l'art. 857 al. 3 CC en ce sens que les cédules hypothécaires ont été transférées à la banque sans le consentement de Julliard SA. 
4.6.1 Aux termes de l'art. 857 al. 3 CC, la cédule hypothécaire ne peut être délivrée au créancier ou à son fondé de pouvoirs qu'avec le consentement exprès du débiteur et du propriétaire de l'immeuble grevé. Ce consentement est destiné au conservateur du registre foncier (Sydney Kamerzin, Le contrat constitutif de cédule hypothécaire, 2003, n° 613; Daniel Staehelin, Commentaire bâlois, n. 7 ad art. 857 CC). Il vise à protéger le débiteur en évitant notamment que le conservateur ne remette le titre au « créancier avant que celui-ci n'ait fourni sa prestation, par ex. avant qu'il n'ait versé le montant du prêt. Ce « pseudo-créancier » pourrait en effet mettre le titre en circulation et l'acquéreur de bonne foi serait protégé conformément aux énonciations du titre (art. 872 CC): le débiteur devrait s'acquitter envers lui (Steinauer, Les droits réels, T. III, 3ème éd., 2003, n° 2966). 
4.6.2 En l'espèce, le grief tiré de la violation de l'art. 857 al. 3 CC est infondé. Julia SA s'est engagée à remettre les titres une fois qu'elle en serait devenue propriétaire et les titres ont effectivement été remis à la banque. Si celle-ci a libéré les fonds avant d'avoir reçu les cédules, elle a pris un risque, qui ne s'est finalement pas réalisé puisque la banque a obtenu les cédules hypothécaires. 
 
5. 
Il convient d'examiner désormais si, comme le soutient la recourante, les cédules hypothécaires peuvent faire l'objet d'une action révocatoire dirigée contre la banque. 
 
5.1 La Cour de justice a relevé que la banque n'avait pas de relation contractuelle avec Julliard SA mais avec les cocontractantes de celle-ci (soit Julia SA et Epidaure SA) à qui elle a accordé des prêts. Elle a alors examiné si la banque avait qualité pour défendre à l'action révocatoire ou, en d'autres termes, si elle devait être considérée comme un tiers de mauvaise foi au sens de l'art. 290 LP. Appliquant la jurisprudence relative au devoir d'information et de conseil de la banque à l'égard de ses clients dans le cadre du mandat, les magistrats ont considéré que la banque n'avait pas l'obligation d'examiner l'arrière-plan économique de l'affaire pour laquelle le crédit était sollicité ou plus précisément les effets de l'opération pour la cocontractante (soit Julliard SA) de son client. Pour le surplus, la Cour de justice a estimé que la recourante - demanderesse à l'action révocatoire - n'avait pas démontré que la banque devait reconnaître, au vu des éléments comptables qui lui étaient présentés, que l'opération était faite dans l'intention de porter préjudice aux créanciers de Julliard SA. Même si son employé Palley avait qualifié l'affaire de « magouillerie », il a demandé des informations complémentaires, ce qui démontre qu'il estimait ne pas disposer de tous les éléments nécessaires. De plus, il n'a pas accordé le crédit car il considérait l'opération comme trop compliquée. Selon les juges cantonaux, ces seuls éléments ne suffisent pas pour retenir que la banque avait reconnu ou devait reconnaître qu'elle porterait préjudice à certains créanciers ou en favoriserait d'autres. 
 
Par ailleurs, la Cour de justice a encore relevé que la condition objective de l'action révocatoire faisait défaut car les créanciers n'avaient pas subi de préjudice en raison des actes de cession des titres à la banque. Celle-ci s'était uniquement fait céder en propriété des cédules à fin de garantie en contrepartie des prêts qu'elle a accordés; elle ne se trouvait donc pas enrichie par les actes dont la révocation est requise. 
 
5.2 La révocation a pour but de soumettre à l'exécution forcée les biens qui lui ont été soustraits par suite d'un acte mentionné aux art. 286 à 288 LP. 
 
En vertu de l'art. 288 LP, sont révocables tous les actes faits par le débiteur dans les cinq ans qui précèdent la déclaration de faillite dans l'intention reconnaissable par l'autre partie de porter préjudice à ses créanciers ou de favoriser certains créanciers au détriment des autres. Cette disposition présuppose ainsi la réalisation d'une condition objective, l'existence d'un préjudice causé aux créanciers, et de deux conditions subjectives, l'intention dolosive du débiteur et l'intention reconnaissable par le bénéficiaire de l'acte (ATF 101 III 92 consid. 4a; 99 III 27 consid. 3). 
5.2.1 L'art. 290 LP traite de la légitimation passive à l'action révocatoire. Selon cette disposition, l'action révocatoire est intentée contre les personnes qui ont traité avec le débiteur ou qui ont bénéficié d'avantages de sa part, contre leurs héritiers ou leurs autres successeurs à titre universel et contre les tiers de mauvaise foi. 
 
Par tiers de mauvaise foi, il faut comprendre le successeur à titre particulier du cocontractant du débiteur qui connaissait l'existence de l'acte révocable (ATF 130 III 235 consid. 6.1.1; 51 III 204 consid. 2). Selon la jurisprudence, l'action révocatoire peut en effet être exercée non seulement contre ceux qui ont été indûment favorisés, mais aussi contre ceux qui ont coopéré à l'acte favorisant d'autres personnes, sans en retirer eux-mêmes un avantage illicite. Ainsi, lorsque celui qui prête de l'argent (en se faisant remettre un gage) afin de permettre à l'emprunteur de désintéresser certains créanciers avant d'autres au moyen de ces fonds, le nantissement du gage forme, avec l'acte favorisant certains créanciers, une opération d'ensemble unique, révocable (ATF 33 II 345 consid. 5). Doit être considéré comme un tiers de mauvaise foi celui qui, au moment où il succède au bénéficiaire de l'acte révocable, savait ou aurait dû savoir en faisant preuve de l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui, qu'à l'origine de la situation patrimoniale ou procédurale de son auteur, il y avait un acte juridique ou une combinaison d'actes juridiques révocables (ATF 52 II 57 consid. 2 p. 57-58). Il faut se placer au moment de l'acte de succession à titre particulier, et non au moment de l'acte attaquable (Daniel Staehelin, Commentaire bâlois, SchKG III, 1998, n. 9 ad art. 290 LP). La mauvaise foi du successeur du bénéficiaire de l'acte révocable est un élément indépendant des conditions de révocabilité établies aux art. 286 à 288 LP (Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, 2003, n. 12 ad art. 290 LP). 
 
5.3 Il s'agit en premier lieu de déterminer si la banque a la légitimation passive à l'action révocatoire ouverte par la recourante. Cela revient à examiner si elle était successeur à titre particulier de Julia SA et si elle savait ou aurait dû savoir qu'à l'origine de la propriété par cette société des cédules hypothécaires, il y aurait un acte juridique révocable. 
 
En l'espèce, Julliard SA a vendu ses parts d'étages à Julia SA pour le prix de 4'000'000 fr. et a remis à celle-ci quatre cédules hypothécaires, libres de tout engagement et à titre gratuit, pour que cette société puisse en disposer pour les nover et être indiquée comme débitrice sur les cédules. Julia SA a ensuite valablement cédé la propriété de ces cédules à la banque qui les a acceptées en garantie de deux prêts qu'elle a accordés à Julia SA et à Epidaure SA. La banque est donc devenue successeur à titre particulier de Julia SA; il n'est pas déterminant qu'elle n'ait pas été enrichie. 
 
5.4 Reste à examiner si la banque était de mauvaise foi. Il faut relever à ce propos que la cour cantonale se réfère à tort à la jurisprudence rendue en application de l'art. 398 CO et relative au devoir d'information et de conseil de la banque à l'égard de ses clients (arrêt 4C.410/1997 du 23 juin 1998 consid. 3c publié in : SJ 1999 I p. 205), laquelle précise que la banque, lorsqu'elle examine le financement d'un projet indépendant d'une affaire bancaire, n'a pas l'obligation de vérifier spontanément la possibilité de réaliser ledit projet d'un point de vue juridique ou économique, pas plus qu'elle n'est tenue d'informer son client des risques liés au financement de l'affaire. La question à résoudre en l'espèce consiste uniquement à déterminer si la banque aurait pu ou dû savoir, en usant de l'attention commandée par les circonstances, qu'il y aurait un acte juridique révocable à l'origine de la situation patrimoniale de Julia SA, en particulier du fait que cette société était devenue propriétaire des cédules hypothécaires. 
5.4.1 La recourante soutient que, lorsqu'une banque soupçonne une affaire douteuse, elle doit demander spontanément des informations complémentaires afin d'éclaircir la situation et les effets de l'acte et, cas échéant, abandonner l'affaire. Elle prétend que l'ensemble des opérations relatives à la vente du capital-actions et des parts d'étages (reprise d'une dette d'actionnaires de 3'100'000 fr. par Epidaure SA, société dont la substance patrimoniale n'était ni vérifiée, ni établie; remise de dette de 2'200'000 fr. au bénéfice de deux actionnaires; vente des parts d'étages à un prix fixé artificiellement et substantiellement inférieur à la valeur vénale; prix de cette vente payé pour moitié par compensation avec des loyers futurs sur dix ans) étaient connues de la banque dès le début, ce qui avait amené Palley à qualifier ces mécanismes de « magouillerie ». A la lecture des documents qui lui ont été remis, la banque pouvait également voir que le prix de vente des actions des deux actionnaires était sept fois supérieur à celui des actions de la Fondation de prévoyance en faveur du personnel. La recourante affirme que cet aspect avait amené un des analystes de la banque à relever que le prix global d'achat du capital-actions était beaucoup trop élevé. Enfin, elle est d'avis que la banque aurait dû constater que Jean-Paul Dumartheray et Patrice Suel, à la fois organes de Julliard SA et actionnaires vendeurs, se trouvaient dans un conflit d'intérêts et ne pouvaient agir au nom de cette société. Selon elle, les crédits ont été ensuite accordés parce que le gestionnaire Claude Gindroz a caché à Dionis Maret le refus opposé par Palley. Elle estime que Gindroz, dont les actes sont imputables à la banque, a signé les contrats de prêt tout en sachant que ces actes étaient préjudiciables aux créanciers de Julliard SA. 
 
Dans ses observations au recours, la banque intimée objecte que l'argumentation de la recourante se fonde en grande partie sur des faits qui ne ressortent pas de l'arrêt attaqué et qu'elle est ainsi irrecevable. En particulier, elle affirme qu'il ne ressort pas des faits constatés par l'autorité précédente que l'intimée savait que le prix de vente des parts d'étages était considérablement inférieur à leur valeur vénale. Elle expose que la cour cantonale n'a pas examiné l'abandon de créances consenti par Julliard SA à ses deux actionnaires sortants, ce que la recourante ne critique pas. Elle est toutefois d'avis que cet abandon de créances était pleinement justifié par le fait que les prêts aux actionnaires correspondaient à deux promotions immobilières dans lesquelles ils n'apparaissaient qu'à titre fiduciaire, pour le compte de la société. Ces promotions étant fortement déficitaires, il convenait de les réduire à leur valeur résiduelle dans les comptes de la société. 
5.4.2 Selon les constatations de fait de l'arrêt attaqué, la banque avait été informée des mécanismes prévus dans le cadre de la reprise du capital-actions de Julliard SA par Epidaure SA et de la vente ultérieure des parts d'étages par Julliard SA à Julia SA (soit notamment vente des actions de Dumartherey et Suel à un prix sept fois supérieur au prix des actions détenues par la Fondation de prévoyance du personnel; remise de dette de 2'200'000 fr. consentie aux actionnaires Dumartherey et Suel sur le total de leurs dettes à l'égard de Julliard; vente des parts d'étages à Julia SA, filiale d'Epidaure SA, pour compenser la perte découlant de la remise de dette pour le prix de 4'000'000 fr.; prix payé pour moitié avec des loyers futurs). Il faut déterminer si l'intimée, en ayant connaissance de ces éléments, pouvait se rendre compte que la vente des parts d'étages par Julliard SA à Julia SA avec remise à titre gratuit des cédules hypothécaires aurait eu pour conséquence de porter préjudice aux créanciers de Julliard SA. 
 
En premier lieu, il n'y a rien d'anormal au fait qu'Epidaure SA et sa filiale Julia SA aient emprunté pour acquérir le capital-actions et les parts d'étages. Lorsqu'un immeuble est vendu à un acheteur, il est en effet fréquent que celui-ci emprunte une partie du prix de vente et donne l'immeuble ou des cédules hypothécaires grevant celui-ci en garantie. De même, lorsque le capital-actions d'une société immobilière est vendu, il est usuel que l'acquéreur emprunte pour payer le prix de vente et donne en garantie l'immeuble ou des cédules hypothécaires grevant celui-ci. La reprise de la dette de Dumartheray et Suel par l'acquéreur et l'encaissement du prix de leur actions en partie sous forme de remise de dettes sont également des opérations qui n'étaient pas de nature à éveiller des soupçons. S'agissant de la différence de prix de vente des actions, la recourante n'expose pas en quoi les créanciers de Julliard SA pouvaient s'en trouver lésés, de sorte que sa critique, faute de motivation suffisante (cf. consid. 2 supra), est irrecevable. Il en va de même s'agissant de l'affirmation selon laquelle les actionnaires Dumartherey et Suel ne pouvaient agir au nom de Julliard SA car ils se trouvaient dans un conflit d'intérêt. 
Le prix de vente des parts d'étages a été fixé artificiellement à 4 millions de francs, sans tenir compte de la valeur du marché. Dès lors qu'Epidaure SA était propriétaire de Julliard SA et de Julia SA, la question du prix réel des parts d'étages n'était en soi pas, pour la banque, un indice d'une volonté de léser les créanciers de Julliard SA. 
Il est vrai que Pierre-Alfred Palley a trouvé l'affaire trop compliquée et l'a qualifiée de « magouillerie », sollicitant des informations complémentaires; Claude Gindroz connaissait les réticences de son supérieur. Toutefois, contrairement à ce que prétend la recourante, il ne ressort pas des constatations de fait qu'Epidaure SA aurait été une « coquille vide ». La banque a relevé que, comme cette société venait d'être créée et n'avait pas de chiffres historiques, un prêt n'était envisageable que si elle fournissait une garantie. Même si les mécanismes de reprise étaient compliqués, rien ne permet de retenir que la banque savait ou aurait dû savoir qu'Epidaure SA, au lieu de reprendre les activités de gérance et de courtage immobiliers, avait l'intention de porter préjudice aux créanciers de Julliard SA. L'absence d'investigations complémentaires procède d'une certaine négligence de la part de la banque, mais ne suffit pas pour admettre qu'elle était de mauvaise foi. Le fait d'avoir accordé le crédit en sachant que le prix de vente des parts d'étages était payé par compensation avec un loyer futur de 10 ans, lequel ne permettrait pas de payer les amortissements et les intérêts, relève également de la négligence. Cela ne suffit toutefois pas pour admettre une mauvaise foi de la BCV, qui présuppose qu'elle ait su ou dû savoir que les créanciers de Julliard SA allaient être lésés. 
 
Il s'ensuit que l'attention que l'on pouvait exiger de la banque, sollicitée de fournir un prêt hypothécaire pour permettre la reprise d'une société de gérance et de courtage immobiliers, ne lui permettait pas, dans les circonstances de l'espèce, de reconnaître que son prêt aurait été destiné à porter préjudice aux créanciers de Julliard SA. Dans ces conditions, il est superflu d'examiner les autres conditions de l'art. 288 LP
 
6. 
Dès lors que la banque n'était pas de mauvaise foi, le grief de violation de l'art. 20 al. 1 CO en relation avec les art. 164 (diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers) et 167 CP (avantage accordé à certains créanciers) est d'emblée exclu. La réalisation de ces infractions suppose en effet que l'auteur ait l'intention, à tout le moins éventuelle, d'avantager un créancier au détriment des autres (Gilliéron, op. cit., n. 17-18 ad art. 285-292 LP). 
 
7. 
Le recours doit donc être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais de son auteur (art. 66 al. 1 LTF). L'intimée ayant été invitée à répondre, elle a droit à des dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 30'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3. 
Une indemnité de 35'000 fr., à verser à l'intimée à titre de dépens, est mise à la charge de la recourante. 
 
4. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève. 
Lausanne, le 7 février 2008 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: 
 
Raselli Rey-Mermet