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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
6B_1126/2020  
 
 
Arrêt du 10 juin 2021  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
Mmes et MM. les Juges fédéraux 
Jacquemoud-Rossari, Présidente, 
Denys, Muschietti, van de Graaf et Hurni. 
Greffière : Mme Musy. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Marie Röthlisberger, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Ministère public de la République 
et canton du Jura, 
Le Château, 2900 Porrentruy, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
intimés. 
 
Objet 
Discrimination raciale, diffamation; libertés d'opinion 
et d'information, 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour pénale, du 21 août 2020 (CP 30 / 2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par jugement du 7 mai 2019, la Juge pénale du Tribunal de première instance de la République et canton du Jura a déclaré A.________ coupable de discrimination raciale, ainsi que de diffamation à l'encontre de B.________, C.________ et D.________, et l'a condamné à une peine pécuniaire d'ensemble de 85 jours-amende à 100 fr. le jour, cette peine étant complémentaire à celles prononcées les 3 juillet 2018 et 4 octobre 2018. Elle a en outre révoqué le sursis à l'exécution de la peine pécuniaire de 80 jours-amende à 150 fr. le jour prononcée le 18 juin 2015. 
 
B.  
Statuant sur l'appel de A.________ par jugement du 21 août 2020, la Cour pénale du Tribunal cantonal jurassien l'a rejeté et intégralement confirmé le jugement de première instance. 
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants. 
 
B.a. A.________ est le rédacteur en chef du journal " E.________ ", mensuel satirique paraissant dans le canton du Jura.  
 
B.b. Dans une rubrique intitulée " Le Fou follo " qu'il a publiée dans le numéro 539 de septembre 2017, il a rédigé, sous le titre " Triste renversement ", le texte suivant: " Durant toute leur histoire, les Juifs ont été des victimes dignes de compassion. Aujourd'hui, ils sont des bourreaux ne suscitant que le dégoût ". Le 23 novembre 2017, F.________ a déposé une dénonciation pénale à raison de ce texte.  
 
B.c. A la suite d'actes de vandalisme dont il a été victime en 2015, en 2016 et en 2017, A.________ a porté plainte contre inconnu pour dommages à la propriété. Il s'est ultérieurement exprimé à ce sujet dans la presse. Ses propos ont notamment fait l'objet d'un article publié le 30 octobre 2017 dans " G.________ ". Il ressort notamment de cet article ce qui suit: " " Je pense aux tireurs, mais je ne vise personne ", déclare ironiquement l'éditeur qui a publié 540 numéros en 46 ans. A.________ mène la vie dure au stand de tir de son village, dont il réclame la fermeture ". D.________, C.________ et B.________, tous trois membres de l'Association sportive de tir de H.________, ont déposé une plainte pénale pour diffamation les 16, 18 et 25 janvier 2018.  
 
C.  
Contre ce jugement, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation du jugement du 21 août 2020, respectivement du 7 mai 2019, et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouveau jugement. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours en matière pénale est une voie de réforme (art. 107 al. 2 LTF). Le recourant ne peut se borner à demander l'annulation de la décision et le renvoi de la cause à l'autorité cantonale, mais doit également, sous peine d'irrecevabilité, prendre des conclusions sur le fond du litige. Il n'est fait exception à ce principe que lorsque le Tribunal fédéral, s'il admettait le recours, ne serait pas en mesure de statuer lui-même sur le fond et ne pourrait que renvoyer la cause à l'autorité cantonale (ATF 137 II 313 consid. 1.3 p. 317; 134 III 379 consid. 1.3 p. 383; parmi d'autres: arrêts 6B_832/2020 du 22 février 2021 consid. 1; 6B_943/2019 du 7 février 2020 consid. 1). 
En l'espèce, le recourant conclut uniquement à l'annulation du jugement attaqué et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale de deuxième instance. Une telle manière de faire n'est en principe pas admissible. Les motifs du recours permettent toutefois de comprendre que le recourant souhaite être acquitté des chefs d'infraction des art. 261bis al. 4 et 173 CP. Cela suffit tout juste pour satisfaire aux exigences de forme déduites de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3 p. 317; arrêt 6B_832/2020 précité consid. 1). 
 
2.  
Le recourant conteste sa condamnation pour discrimination raciale (art. 261bis al. 4 CP) à raison du texte intitulé " Triste renversement " publié dans le journal " E.________ " de septembre 2017.  
 
2.1.  
 
2.1.1. L'art. 261bis al. 4 CP punit celui qui aura publiquement, par la parole, l'écriture, l'image, le geste, par des voies de fait ou de toute autre manière, abaissé ou discriminé d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion ou qui, pour la même raison, niera ou minimisera grossièrement ou cherchera à justifier un génocide ou d'autres crimes contre l'humanité. En l'occurrence, c'est la première partie de la disposition qui entre en considération en l'espèce.  
Cette norme vise notamment à protéger la dignité que tout homme acquiert dès la naissance et l'égalité entre les êtres humains. A la lumière de cet objectif, constituent un abaissement ou une discrimination au sens de l'art. 261bis al. 4 CP, tous les comportements qui dénient à des membres de groupes humains, en raison de leur race, de leur appartenance ethnique ou de leur religion, une valeur égale en tant qu'être humain ou des droits de l'homme identiques, ou du moins, qui remettent en question cette égalité (ATF 143 IV 193 consid. 1 p. 198; 140 IV 67 consid. 2.1.1 p. 69; 133 IV 308 c. 8.2 et les références citées). On doit admettre qu'un rabaissement porte atteinte à la dignité humaine au sens de l'art. 261bis al. 4 CP lorsque la personne visée est traitée comme un être humain de deuxième classe. Une affirmation xénophobe, de mauvais goût, amorale ou choquante sur le plan moral ou encore inconvenante ou non civilisée en rapport avec une ethnie, une race ou une religion n'est pas encore constitutive de discrimination raciale (ATF 143 IV 308 consid. 4.1 p. 310 s., in SJ 2018 I 25 et les références). 
Le judaïsme constitue une religion au sens de l'art. 261bis CP (ATF 143 IV 77 consid. 2.3 p. 79; 124 IV 121 consid. 2b p. 124; 123 IV 202 consid. 4c p. 209). De manière générale, les déclarations dirigées contre un État et sa politique ne relèvent pas du droit pénal, puisque les États ou nations ne sont pas des catégories protégées par l'art. 261bis CP. Tel n'est en revanche pas le cas si la désignation de l'État d'Israël est utilisée comme synonyme de " judaïsme " ou de " juif " (arrêt 6B_1017/2014 du 3 novembre 2015 consid. 2.1.1; Marcel Alexander Niggli, Rassendiskriminierung, 2e éd. 2007, n° 762 p. 242). Il faut ainsi déterminer au cas par cas, en fonction du contexte concret et de la manière dont le destinataire moyen comprendrait la déclaration si c'est uniquement l'État d'Israël, soit notamment sa politique, qui est visé (arrêt 6B_1017/2014 précité consid. 2.1.1; Marcel Alexander Niggli, op. cit., n° 762 p. 242; cf. ATF 140 IV 67 consid. 2.1.2 p. 69). 
Déterminer le contenu d'un message relève des constatations de fait. L'interprétation du message ressortit, en revanche, à l'application du droit fédéral, que le Tribunal fédéral revoit librement dans le recours en matière pénale. Il s'agit de rechercher le sens qu'un destinataire non prévenu doit conférer aux expressions utilisées, compte tenu de l'ensemble des circonstances pertinentes, soit, notamment, la personne dont émane le message et celles qui sont visées (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.3 p. 464; 143 IV 193 consid. 1 p. 198; 137 IV 313 consid. 2.1.3 p. 316). L'art. 261bis CP doit toutefois être interprété à la lumière des principes régissant la liberté d'expression (art. 16 Cst.; art. 10 CEDH; art. 19 Pacte ONU II). Dans une démocratie, il est essentiel que même les opinions qui déplaisent à la majorité, ou celles qui choquent nombre de personnes, puissent être exprimées et les propos tenus dans un débat politique ne doivent pas être appréhendés de manière strictement littérale parce que les simplifications et les exagérations sont usuelles dans un tel contexte (ATF 143 IV 193 consid. 1 p. 198; 131 IV 23 consid. 2.1 p. 26 et consid. 3.1 p. 27 s. ainsi que les références citées). 
 
2.1.2. Selon la jurisprudence de la CourEDH, la protection conférée par l'art. 10 de la Convention s'applique également à la satire, qui est une forme d'expression artistique et de commentaire social qui, de par l'exagération et la déformation de la réalité qui la caractérisent, vise naturellement à provoquer et à agiter. C'est pourquoi il faut examiner avec une attention particulière toute ingérence dans le droit d'un artiste à s'exprimer par ce biais (arrêt de la CourEDH Vereinigung Bildender Künstler c. Autriche du 25 janvier 2007 [requête n° 68354/01], § 33). Cependant, la jurisprudence de la CourEDH a également défini les limites de la liberté d'expression. En particulier, la CourEDH a jugé que " l'article 17, pour autant qu'il vise des groupements ou des individus, a pour but de les mettre dans l'impossibilité de tirer de la Convention un droit qui leur permette de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés reconnus dans la Convention; qu'ainsi personne ne doit pouvoir se prévaloir des dispositions de la Convention pour se livrer à des actes visant à la destruction des droits et libertés visés (...) " (arrêt de la CourEDH Lawless c. Irlande du 1er juillet 1961, p. 45, § 7, série A no 3). Ainsi, la Cour a jugé qu'un " propos dirigé contre les valeurs qui sous-tendent la Convention " se voit soustrait par l'art. 17 à la protection de l'art. 10 (arrêt de la CourEDH Lehideux et Isorni c. France du 23 septembre 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998-VII, §§ 47 et 53). La Cour a ainsi eu à connaître d'affaires où étaient incriminées des déclarations qui niaient l'Holocauste, qui justifiaient une politique pronazie, qui alléguaient la persécution des Polonais par la minorité juive et l'existence d'inégalités entre eux, qui associaient tous les musulmans à un grave acte de terrorisme ou encore qui déniaient au juifs le droit à la dignité nationale (voir les arrêts de la CourEDH Dieudonné M'Bala M'Bala c. France du 20 octobre 2015 [requête n°25239/13] n° 32-33; Lehideux et Isorni précités, §§ 47 et 53; Garaudy c. France [requête n°65831/01, CEDH 2003-IX; W.P. et autres c. Pologne du 2 septembre 2004 [requête n°42264/98]; Norwood c. Royaume-Uni du 16 novembre 2004 [requête n°23131/03]; Witzsch c. Allemagne du 13 décembre 2005 [requête n°7485/03]; Pavel Ivanov c. Russie du 20 février 2007 [requête n°35222/04]). En particulier, dans l'affaire Pavel Ivanov précitée, le requérant était l'unique fondateur, propriétaire et rédacteur en chef d'un journal dans lequel il avait publié une série d'articles appelant à exclure les Juifs de la vie sociale, alléguant l'existence d'un lien de cause à effet entre le malaise social, économique et politique et les activités des Juifs, et qualifiant ce groupe ethnique de malfaisant. La CourEDH a indiqué n'avoir aucun doute quant à la teneur fortement antisémite des opinions du requérant et elle a fait sienne la conclusion des tribunaux internes selon laquelle l'intéressé cherchait par ses publications à faire haïr le peuple juif. Une attaque aussi générale et véhémente contre un groupe ethnique particulier était en contradiction avec les valeurs de tolérance, de paix sociale et de non-discrimination qui sous-tendaient la Convention. En conséquence, la CourEDH a estimé qu'en vertu de l'art. 17 de la Convention, le requérant ne pouvait bénéficier de la protection de l'art. 10 (arrêt de la CourEDH Pavel Ivanov précité, § 1).  
 
2.1.3. Du point de vue subjectif, le délit est intentionnel, le dol éventuel pouvant suffire (ATF 145 IV 23 consid. 2.3 p. 26; arrêt 6B_350/2019 du 29 mai 2019 consid. 1.1). En outre, le comportement punissable doit consister en une manifestation caractéristique de la discrimination (ATF 145 précité consid. 2.3 p. 26 s.). Aussi, pour retenir l'infraction de l'art. 261bis al. 4 CP, convient-il de démontrer, sous l'angle subjectif, non seulement que l'intention de l'auteur a porté sur tous les éléments constitutifs objectifs, mais également que l'intéressé était mû par un mobile discriminatoire (arrêt 6B_350/2019 précité consid. 1.1).  
 
2.2. Le recourant soutient que dans l'encart litigieux, il a fait usage du terme " Juifs " comme métaphore pour désigner Israël en tant qu'État. Il n'avait fait que reprendre l'amalgame que l'État critiqué lui-même encourageait, cela afin de comparer l'histoire tragique du peuple juif avec l'actualité tragique dont l'État d'Israël était un acteur. En effet, dans sa résolution du 29 novembre 1947, l'ONU utilise le terme " État juif " pour désigner l'un des deux États à créer en Palestine. Ce terme avait été repris par l'État d'Israël pour se qualifier lui-même dans sa déclaration d'indépendance ainsi que dans d'autres textes de loi, dont la célèbre loi du retour votée par la Knesset le 5 juillet 1950 ainsi que, plus récemment en juillet 2018, la " Loi fondamentale: Israël, l'État-nation du peuple juif ". Le recourant affirme que par son texte, il ne s'en prenait pas au peuple en tant que tel, mais à l'État qui dit les représenter, et exprimait ainsi son désaccord vis-à-vis des actions politiques menées par cet État, notamment à l'encontre des Palestiniens. Ce comportement était protégé par le principe de liberté d'expression.  
Par ailleurs, le recourant se prévaut du caractère satirique de la revue dans laquelle il a rédigé son encart, la rubrique s'intitulant d'ailleurs " Le Fou follo ". Son texte, tout comme les autres publications qui figurent dans " E.________ ", devait être compris au second, voire au troisième degré. Selon lui, " un trait d'humour, ou la critique d'une politique qui fait des amalgames, ne doit pas être puni ".  
 
2.3. Comme l'a relevé la cour cantonale, le texte litigieux n'a pas été publié dans le cadre d'un article consacré au conflit israélo-palestinien qui aurait permis, le cas échéant de comprendre le message que le recourant voulait prétendument faire passer. Dans son texte, le recourant n'a pas opéré la moindre distinction entre les personnes victimes de violence en raison de leur religion et les auteurs potentiels des actes de violence qu'il affirme avoir voulu dénoncer, dès lors qu'il les désigne invariablement et sans réserve comme étant les " Juifs ". Plus généralement, le bref encart ne fait nulle mention ou référence explicite à l'État d'Israël. Dans ce contexte, il ne fait aucun doute que par les " Juifs ", un destinataire moyen non prévenu comprend les personnes dont le point commun est d'être de même confession religieuse et qui sont visées en raison de leur appartenance à cette religion. Le propos incriminé vise donc bien un groupe protégé au sens de l'art. 261bis CP.  
 
Par ailleurs, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de souligner que le ressentiment d'une personne par rapport à la politique d'un État - en l'occurrence l'État d'Israël - ne saurait en aucun cas justifier des déclarations discriminantes contre des personnes en raison de leur appartenance religieuse - en l'occurrence la confession juive. Quoi que semble en penser le recourant, un tel amalgame est dans tous les cas inacceptable (cf. arrêts 6B_1017/2014 du 3 novembre 2015 consid. 2.3; 6B_1100/2014 du 14 octobre 2015 consid. 3.8). 
 
2.4. La ligne éditoriale de la revue dans laquelle le recourant a publié le texte incriminé, qui se veut satirique et pamphlétaire selon le prénommé, n'empêche pas le lecteur moyen non averti de discerner, sous une ironie de façade, le caractère hostile et discriminatoire du texte incriminé. Le propos du recourant est en effet dépourvu du moindre trait d'humour et il ne ressort aucunement du style employé que son auteur se distancierait des affirmations faites, par exemple en ayant recours à la déformation de la réalité ou à l'exagération évidente. En l'absence de plusieurs niveaux de lecture, on ne saurait reprocher à la cour cantonale d'avoir interprété le texte du recourant de manière littérale.  
En conséquence, il y a lieu de retenir que le message que le recourant voulait faire passer ne dénote aucune ambiguïté quant à sa teneur, à savoir une déclaration de nature à rabaisser les personnes de confession juive. En effet, en traitant les personnes de confession juive de " bourreaux " (soit des personnes qui exercent des violences physiques sur un être sans défense [Grand Larousse de la langue française, sous l'entrée bourreau n° 2, consulté en ligne à l'adresse https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1200532b/f587.item.r=bourreau, la dernière fois le 1er juin 2021]) et en ajoutant qu'elles ne suscitent que le dégoût, le recourant a non seulement jeté l'opprobre sur le groupe visé mais également, au regard des qualificatifs employés, véhiculé un discours haineux et méprisant à son encontre, allant manifestement au-delà d'une critique globalement objective. En cela, il a porté atteinte à la dignité humaine des membres de ce groupe. Partant, les conditions objectives de l'art. 261bis al. 4 première partie CP sont remplies. 
Il sied également de conclure que les propos exprimés, dont la connotation antisémite est évidente, paraissent incompatibles avec les valeurs proclamées et garanties par la CEDH. En ce sens, ils pourraient être considérés comme soustraits à la protection de l'art. 10 CEDH par l'art. 17 CEDH (cf. consid. 2.1 supra). Ce point peut cependant être laissé ouvert car, en toute hypothèse, la restriction apportée aux art. 16 Cst. et 10 CEDH repose sur une base légale suffisante et poursuit un but légitime de protection de la réputation et des droits d'autrui (cf. ATF 137 IV 313 consid. 3.6 p. 325). L'atteinte demeure en outre proportionnée, étant souligné que le recourant ne s'est pas exprimé dans le cadre d'un débat politique. Sur ce point, il peut encore être relevé que le recourant ne critique d'aucune manière la peine qui lui a été infligée. Il ne soutient pas, en particulier, que la quotité de la sanction serait disproportionnée au point de constituer une restriction indue de sa liberté d'expression, et il n'apparaît pas que tel soit le cas. Par conséquent, le grief de violation de la liberté d'expression est infondé. 
 
 
2.5. Pour le surplus, on ne discerne pas clairement, dans l'écriture du recourant, de grief relatif à l'application erronée du droit fédéral en ce qui concerne la réalisation des conditions subjectives de l'infraction. En tant qu'il se borne à affirmer que son encart était motivé par une volonté de critiquer les actions de l'État d'Israël, il suffit ici de relever, comme la cour cantonale l'a constaté, que le recourant était tout à fait conscient de la portée de son texte et qu'il avait encore déclaré, dans le cadre de son audition par la police, que les " Juifs " avaient actuellement un comportement totalement honteux. Ces constatations de fait, qui lient le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF), démontrent suffisamment l'existence de l'intention portant sur les éléments constitutifs de l'infraction ainsi que le mobile qui, en sus de l'antisémitisme, ne peut relever que de la discrimination, car directement lié à l'appartenance religieuse.  
 
2.6. Selon ce qui précède, la condamnation du recourant ne viole pas l'art. 261bis al. 4 première partie CP ni le principe de liberté d'expression. Le grief est rejeté.  
 
3.  
Le recourant discute sa condamnation pour diffamation (art. 173 CP) à raison du soupçon, exprimé dans la presse, que les " tireurs " concernés par son combat pour la fermeture du stand de tir de son village auraient commis des dommages à la propriété. 
 
3.1. A teneur de l'art. 173 ch. 1 CP, se rend coupable de diffamation celui qui, en s'adressant à un tiers, aura accusé une personne ou jeté sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, celui qui aura propagé une telle accusation ou un tel soupçon, sera, sur plainte, puni d'une peine pécuniaire (ch. 1). Cette disposition protège la réputation d'être un individu honorable, c'est-à-dire de se comporter comme une personne digne a coutume de le faire selon les conceptions généralement reçues. Il faut donc que l'atteinte fasse apparaître la personne visée comme méprisable. L'honneur protégé par le droit pénal est conçu de façon générale comme un droit au respect, qui est lésé par toute assertion propre à exposer la personne visée au mépris en sa qualité d'homme (ATF 137 IV 313 consid. 2.1.1 p. 315; 132 IV 112 consid. 2.1 p. 115).  
Pour apprécier si une déclaration est attentatoire à l'honneur, il faut procéder à une interprétation objective selon le sens que le destinataire non prévenu devait, dans les circonstances d'espèce, lui attribuer (ATF 145 IV 462 consid. 4.2.3 p. 464; 137 IV 313 consid. 2.1.3 p. 315 s.). Lorsqu'il s'agit d'un article de presse, il y a lieu de se placer du point de vue du lecteur moyen (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, 2e éd. 2017, n° 17 ad. art. 173 CP et les références). 
La personne dont l'honneur est visé n'a pas à être désignée, il suffit qu'elle soit reconnaissable, soit identifiable (ATF 124 IV 262 consid. 2a p. 266 s.; 117 IV 27 consid. 2c p. 29 et les arrêts cités). Une offense adressée à un groupe de personnes désignées collectivement ne peut constituer une atteinte à l'honneur punissable que si elle est dirigée contre un groupe bien déterminé et relativement restreint, distinct de l'ensemble d'une collectivité, de telle sorte que chacun des membres de ce groupe puisse se sentir touché dans son honneur et que le destinataire du message puisse comprendre clairement qui ce message concerne. Une attaque dirigée contre un cercle de personnes mal déterminé, par exemple contre tous les chirurgiens, tous les chasseurs, tous les citoyens suisse ou tous les officiers ne remplit pas cette exigence (cf. ATF 143 IV 77 consid. 4.3 p. 83 s.; 124 IV 262 consid. 2a p. 266 s. in SJ 1999 I 177; 100 IV 43 consid. 1-4 in SJ 1975 p. 42: voir aussi: Rieben/Mazou, Commentaire romand, Code pénal II, 2018, art. 173 ch. 9 et les références; Dupuis et al., op. cit., n° 15 ad art. 173 CP). 
Selon l'art. 173 ch. 2 et 3 CP, le prévenu n'encourt aucune peine s'il prouve que les allégations par lui articulées ou propagées sont conformes à la vérité, ou qu'il avait des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies (ch. 2); il n'est cependant pas autorisé à apporter cette preuve s'il a agi sans égard à l'intérêt public ou sans motif suffisant, et dans le dessein de dire du mal d'autrui (ch. 3). 
 
3.2. En l'occurrence, l'article de presse paru dans " G.________ " du 30 octobre 2017 relate les dégâts causés à la maison du recourant et à la voiture de son épouse, maculées de peinture durant la nuit. L'article contient le passage suivant: " " Je pense aux tireurs, mais je ne vise personne ", déclare ironiquement l'éditeur qui a publié 540 numéros en 46 ans. A.________ mène la vie dure au stand de tir de son village, dont il réclame la fermeture. Lorsque le pamphlétaire avait subi un assaut nocturne identique, le 13 décembre 2015, les tireurs participaient à un match au loto. L'année précédente, ce sont des clous qui ont été répandus autour de sa maison, dans le but de crever les pneus de sa voiture lorsqu'il démarrerait ".  
 
 
3.3. Le recourant soutient qu'un lecteur moyen ne pouvait retenir qu'il s'en prenait aux intimés en personne ou en tant que groupe déterminé; ceux-ci n'étaient en effet pas reconnaissables sous la désignation des " tireurs ". Il ne saurait être tenu pour responsable du lien fait par le journaliste avec l'Association sportive de tir de H.________.  
En l'espèce, il y a lieu de retenir que le contenu de l'article de presse paru dans " G.________ " permettait au lecteur moyen non averti de comprendre qui étaient " les tireurs " que le recourant désignait comme probables auteurs des dommages. En effet, l'indication " A.________ mène la vie dure au stand de tir de son village, dont il réclame la fermeture " ajoutée après ses propos cités " je pense aux tireurs, mais je ne vise personne ", permet de relier les " tireurs " aux usagers du stand de tir du village et, ainsi, à l'Association sportive de tir de H.________. Par ailleurs, les membres ou les sympathisants de l'Association sportive de tir de H.________ constituent un groupe de personnes suffisamment déterminé et restreint pour qu'une attaque les visant puisse tomber sous le coup de l'art. 173 CP (cf. consid. 3.1 supra), ce que le recourant ne conteste du reste pas.  
Enfin, le recourant est malvenu de soutenir qu'il ne saurait être tenu responsable du lien fait par le journaliste avec le stand de tir car, comme on le perçoit aisément à sa lecture, l'article s'appuyait sur les révélations du prénommé. La cour cantonale a d'ailleurs constaté - ce que lie le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF) -, que le recourant avait précisé avoir déclaré au journaliste qui l'a interviewé qu'il pensait " aux tireurs du stand de tir " (En fait, I.4 p. 4) et que l'article retranscrivait expressément les termes qu'il avait employés (consid. 4.4. p. 11). 
En définitive, la cour cantonale pouvait conclure, sans violer le droit fédéral, que le lecteur moyen non averti comprenait que le recourant suspectait les membres ou les sympathisants de l'Association sportive de tir de H.________ d'être les auteurs des dommages mentionnés, soit un groupe de personnes suffisamment déterminé pour que chacun de ses membres puisse se sentir concerné par le message du prénommé. 
 
3.4. Le recourant affirme également qu'une simple hypothèse sur l'identité des auteurs des déprédations, formulée très vaguement et de manière humoristique, ne saurait être constitutive de diffamation.  
 
Le lecteur peut effectivement percevoir le jeu de mot entre le terme " tireurs " et l'expression " je ne vise personne " utilisés par le recourant, ce d'autant que le qualificatif " ironiquement " a été ajouté pour commenter la citation. Cela étant, ce trait d'esprit n'enlève rien au contenu du propos pris dans le contexte d'ensemble, soit un article qui détaille les préjudices subis par le recourant et établit un lien clair et direct avec l'Association de tir de H.________. Le lecteur pouvait ainsi comprendre que le recourant exprimait des soupçons sur l'identité des auteurs des déprédations dont il se disait victime. Comme l'a relevé à juste titre la cour cantonale, les allégations sont objectivement de nature à ternir la réputation des personnes visées, respectivement à les exposer au mépris d'autrui. Par ailleurs, il est sans importance que le recourant n'ait pas formulé une accusation stricte mais se soit limité à l'expression d'un simple soupçon, lequel tombe déjà sous le coup de l'art. 173 CP, comme cela ressort du texte légal. 
 
3.5. Le recourant soutient encore que sa condamnation pour diffamation à raison de ses propos constitue une atteinte à sa liberté d'expression dans la mesure où cela revient à lui interdire de s'exprimer sur son affaire de dommages à la propriété, y compris devant les autorités et juridictions pénales, tant et aussi longtemps qu'une décision pénale condamnant les membres de l'Association sportive de tir de H.________ pour ces faits ne serait pas entrée en force.  
Il est douteux que le recourant invoque ainsi de manière suffisante la violation de sa liberté d'expression, étant rappelé les exigences élevées de motivation applicables au grief de violation d'un droit fondamental (art. 106 al. 2 LTF). 
Pour le surplus, le recourant ne peut comparer le comportement pour lequel il est présentement jugé avec celui consistant à faire part de ses soupçons de la commission d'une infraction devant l'autorité pénale compétente pour identifier, poursuivre et condamner la ou les personne (s) responsable (s). Dans le cas d'espèce, la cour cantonale a constaté que le recourant ne disposait d'aucun élément d'appréciation lui permettant raisonnablement de tabler sur le bien-fondé de ses soupçons et rien n'en commandait, quoi qu'il en soit, la communication à un nombre indéterminé de personnes n'ayant ni la volonté, ni la possibilité d'en vérifier l'exactitude. Le recourant n'avait aucune raison d'agir de la sorte, si ce n'est pour satisfaire son désir de discréditer publiquement les membres ou les sympathisants de l'Association sportive de tir de H.________ contre lesquels il avait développé, au fil des ans, une grande aversion. La cour cantonale a donc retenu que le recourant avait agi sans motif suffisant et principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui, de sorte qu'il n'était pas admis à apporter les preuves libératoires, ce qu'il n'avait d'ailleurs pas essayé de faire (cf. art. 172 ch. 2 et 3 CP). Le recourant ne consacre aucun développement visant à remettre en cause le jugement cantonal sur ce point. 
Ainsi, loin de s'être contenté de communiquer de bonne foi ses soupçons à une autorité pénale - ce qui aurait pu lui permettre, toute condition remplie par ailleurs, d'exciper d'une preuve libératoire au sens de l'art. 173 ch. 2 CP et d'échapper ainsi à la condamnation pénale -, le recourant a diffusé par voie de presse des propos attentatoires à l'honneur de manière purement gratuite et sans poursuivre d'autre but que celui de dire du mal d'autrui. Ce comportement n'est pas protégé par la garantie offerte par les art. 16 Cst. et 10 CEDH (cf. arrêt 6B_938/2017 du 2 juillet 2018 consid 6.1-6.2 et les références citées). Au demeurant, la restriction apportée à la liberté d'expression du recourant est admissible dans ces circonstances. 
 
3.6. Pour le reste, le recourant n'élève pas de grief suffisamment motivé (cf. art. 42 al. 2 LTF) de violation du droit en lien avec la réalisation de l'élément subjectif de l'infraction de diffamation.  
Compte tenu de ce qui précède, les griefs formés par le recourant à l'encontre de sa condamnation pour diffamation sont écartés. 
 
4.  
En conséquence, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens aux intimés qui n'ont pas été invités à procéder (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Cour pénale. 
 
 
Lausanne, le 10 juin 2021 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Jacquemoud-Rossari 
 
La Greffière : Musy