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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
4A_136/2015  
   
   
 
 
 
Arrêt du 15 septembre 2015  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges Kiss, présidente, Klett et Hohl. 
Greffier: M. Carruzzo. 
 
Participants à la procédure 
Laboratoire A.________, 
représentée par Me Anne-Florence Raducault, 
recourante, 
 
contre  
 
1. B.________ Ltd, 
2. C.________, 
toutes deux représentées par 
Me Anne-Virginie La Spada-Gaide, 
intimées. 
 
Objet 
arbitrage international; compétence, 
 
recours en matière civile contre la décision incidente sur la compétence rendue le 3 février 2015 par l'arbitre unique siégeant sous l'égide de la  Swiss  Chambers' Arbitration Institution. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Par contrat de distribution tripartite du 21 juillet 2009 (ci-après: le contrat de distribution), soumis au droit suisse, Laboratoire A.________ (ci-après: A.________), société de droit français spécialisée dans la fabrication de médicaments, dont le siège est à Lyon, s'est engagée à vendre certains produits pharmaceutiques à la société de droit anglais B.________ Ltd (ci-après: B.________), à charge pour celle-ci de livrer les produits en question à la société de droit russe C.________ en vue de leur distribution en Russie. 
Le contrat de distribution contient une clause ainsi libellée: 
 
"22 -  ARBITRATION   
Any disputes and disagreements that may arise out of or in connection with this Contract have to be settled between the Parties by negociations. If no Contract can be reached, the Parties shall submit their dispute to the empowered jurisdiction of Geneva, Switzerland. " 
Le 1er avril 2010, les mêmes parties ont signé un avenant au contrat de distribution, qui ne modifiait pas ladite clause (ci-après: l'avenant). 
Conformément à l'art. 6 de cet avenant, A.________ et C.________ ont conclu, les 9 et 24 juin 2010, un contrat intitulé  Quality and Safety Data Exchange Agreement (ci-après: le contrat d'échange de données), constituant une annexe au contrat de distribution, par lequel elles ont formalisé leurs devoirs respectifs en matière de pharmacovigilance notamment.  
Le contrat d'échange de données comporte une clause énonçant ce qui suit: 
 
"7-1) Governing law - Jurisdiction 
This Agreement shall be governed by and construed in accordance with the laws of France. 
The Parties shall do their utmost to reach an amicable settlement to any dispute arising hereunder. If no agreement can be reached, the Parties shall submit their dispute to the empowered jurisdiction of Lyon, France. 
This Agreement constitutes the entire agreement of the Parties hereto with respect to its object and supersedes and cancels any prior representation, commitment, undertaking or agreement between the parties, whether oral or written, with respect to or in connection with any of the matters or things to which such Agreement applies or refers. 
The English version of this Agreement shall prevail." 
Par lettre du 26 mai 2011 adressée à C.________, A.________ a résilié le contrat de distribution de manière anticipée. Il en est résulté un différend entre les parties audit contrat. 
 
B.   
Le 22 mai 2013, B.________, se fondant sur l'art. 22 du contrat de distribution, a déposé une requête de conciliation devant le Tribunal de première instance du canton de Genève en vue d'obtenir le paiement, par A.________, d'un total de 2'687'361,60 euros, intérêts en sus, aux titres de la livraison de produits défectueux et de la résiliation abusive dudit contrat. Sous la rubrique "Compétence du Tribunal de première instance" de cette requête, elle exposait ce qui suit dans sa motivation juridique (p. 16 s.) : 
 
"Selon l'article 22 du Contrat de distribution du 21 juillet 2009 liant B.________ et A.________, tout litige ou désaccord pouvant survenir en relation avec le contrat doit être réglé par la voie de négociations entre les parties, étant précisé qu'en l'absence d'accord, les parties soumettront leur litige aux tribunaux compétents de Genève. 
B.________ et A.________ ont donc fait  élection de for auprès des juridictions genevoises, comme le permet l'art. 5 LDIP.  
A cet égard, le fait que l'article 22 du Contrat soit intitulé "Arbitration" ne signifie pas [que] les parties auraient voulu convenir d'une clause d'arbitrage. Aucun des termes utilisés dans le texte de l'article 22 ne fait référence à une procédure d'arbitrage. De plus le Contrat stipule expressément en page 4, juste avant l'article 1, que les titres des clauses sont insérés uniquement par convenance et n'affectent pas l'interprétation du contrat (...). 
Il convient encore de préciser qu'en russe, le terme "arbitrage" signifie simplement "compétence", ce que confirme la teneur claire de l'article 22 du Contrat (...)." 
Par ailleurs, sous n. 55 de sa requête de conciliation, B.________ expliquait en ces termes l'absence de la société russe dans le rubrum de cette écriture: 
 
"C.________ ouvrira action de son côté contre A.________ devant les Tribunaux de Lyon, France, conformément à l'art. 7-1 de l'Accord entre A.________ et B.________ (sic) modifiant la clause de for du Contrat de distribution en ce qui concerne les relations entre A.________ et C.________. " 
A la suite du dépôt de la requête de conciliation, A.________ a produit spontanément un mémoire, daté du 30 août 2013 et intitulé "Conclusions n° 1", dans lequel elle s'exprimait comme il suit au sujet de l'art. 22 du contrat de distribution (p. 3 s.) : 
 
"Le contrat de distribution tripartite conclu le 21 juillet 2009 entre les sociétés Laboratoire A.________, B.________ et C.________ est rédigé en langue russe et en langue anglaise, étant précisé que la version anglaise prévaut conformément à l'article 21 dudit contrat. 
Ce contrat dispose d'une clause compromissoire en son article 22, intitulée "ARBITRATION", ce qui signifie en langue française "arbitrage". 
D'après le dictionnaire Larousse anglais-français, le terme anglais "arbitration" signifie "arbitrage" au sens juridique du terme et "arbitration clause" signifie "clause compromissoire". 
Les termes de cette clause intitulée "ARBITRATION" sont clairs : en cas de litige ou de désaccord entre les parties relatifs à ce contrat de distribution, les parties se doivent de négocier afin de parvenir à un arrangement amiable. Si aucun arrangement n'est conclu, les parties soumettent leur différend à la juridiction habilitée de Genève. 
Cette clause d'arbitrage ne vise en réalité pas une compétence juridictionnelle du Tribunal Civil de Genève mais l'entité compétente en matière d'arbitrage domiciliée à Genève, à savoir la Chambre de Commerce, d'Industrie et des Services de Genève. 
Cette clause ne saurait donc aucunement être interprétée comme une clause attributive de compétence, mais comme une clause offrant la possibilité aux parties de régler leur différend par la voie de l'arbitrage et qu'en choisissant cette possibilité, celles-ci ont décidé d'un commun accord de s'en remettre aux instances arbitrales genevoises. 
Cette clause n'est non pas une clause attributive de compétence mais une simple clause compromissoire : les parties, si elles souhaitent recourir à l'arbitrage, doivent se rendre devant la Chambre de Commerce, d'Industrie et des Services de Genève, mais elles n'ont aucune obligation d'aller présenter leurs demandes devant cette instance. 
L'intitulé de l'article 22 du contrat "ARBITRATION" ne saurait être regardé comme une maladresse de rédaction comme tente vainement de le démontrer la société B.________. 
C'est pourquoi, en assignant la société Laboratoire A.________ devant le Tribunal de Première Instance de Genève, la société B.________ a assigné devant une juridiction incompétente, car non déterminée par les parties. 
Par ailleurs, en ce qui concerne les règles de compétence relatives aux instances judiciaires, un renvoi au droit communautaire s'impose eu égard à la nationalité des parties." 
En date du 15 avril 2014, le Tribunal de première instance du canton de Genève a délivré une autorisation de procéder à B.________. 
 
C.  
 
C.a. Le 23 mai 2014, B.________ et C.________, agissant conjointement, ont adressé une requête d'arbitrage à la Chambre de commerce, d'industrie et des services de Genève (CCIG). La société anglaise a repris les conclusions figurant dans sa requête de conciliation précitée, tandis que la société russe a réclamé le paiement d'un montant total de 692'148,26 euros, plus intérêts, aux mêmes titres que sa codemanderesse. S'agissant du problème de la compétence, les demanderesses, après avoir cité le texte, reproduit ci-dessus (cf. let. B.b), de l'exception d'arbitrage soulevée par A.________ devant le tribunal étatique genevois, ajoutaient ceci (p. 4, n. 13) :  
 
"Les tentatives de conciliation ayant échoué (...), après plusieurs mois d'échanges infructueux, les Demandeurs acceptent l'interprétation de l'article 22 du Contrat formulée par le Défendeur devant le juge suisse, et introduisent en conséquence la présente Requête. " 
Dans sa réponse du 20 juin 2014 à la requête d'arbitrage, A.________ a contesté l'existence d'une convention d'arbitrage valable, susceptible de lier les parties. Selon elle, le contrat de distribution, signé en 2009, et le contrat d'échange de données, signé en 2010, contenaient des règles de compétence contradictoires - la clause 22 du premier et la clause 7 du second -, si bien que la priorité devait être accordée au contrat le plus récent instituant la compétence des tribunaux étatiques lyonnais. Partie à ce dernier contrat, C.________ devait donc agir devant ces tribunaux-là, raison pour laquelle il se justifiait de suspendre la procédure opposant A.________ à B.________ jusqu'à droit connu dans le procès que la société russe ouvrirait éventuellement à Lyon contre la société française. De toute façon, la clause 22 du contrat de distribution ne constituait pas une convention d'arbitrage valable parce que plusieurs éléments nécessaires à la conduite d'une procédure arbitrale n'y figuraient pas (désignation de la juridiction arbitrale, nombre d'arbitres, durée de l'arbitrage, etc.). A la lire attentivement, ladite clause ne faisait, en réalité, qu'instituer un mécanisme de règlement amiable, en deux phases, des différends pouvant opposer un jour les cocontractantes: la première consisterait en des négociations libres entre les parties; la seconde, en une négociation encadrée par les juridictions genevoises. B.________, au demeurant, en saisissant ces juridictions-là, avait fait un "aveu judiciaire" quant à l'interprétation de la clause 22 et renoncé par là même à la voie arbitrale au profit des juridictions nationales compétentes. Or, les règles du droit de l'Union européenne régissant la compétence établissaient la compétence des tribunaux étatiques de Lyon, en tant que siège de la partie défenderesse, tout comme l'art. 7 du contrat d'échange de données ou l'art. 5 al. 3 LDIP, du reste. 
Le 23 septembre 2014, l'arbitre unique (ci-après: l'arbitre) désigné par la CCIG a décidé de scinder l'instruction de la cause et de statuer sur sa compétence par une décision incidente, conformément à l'art. 186 al. 3 LDIP. A cette fin, il a ordonné un second échange d'écritures sur cette question avant de prononcer la clôture de la procédure par courriel du 22 décembre 2014. 
 
C.b. Par "décision incidente sur la compétence" du 3 février 2015, l'arbitre s'est déclaré compétent pour connaître du différend opposant les parties. Il a précisé que la question des frais relatifs à la procédure incidente serait traitée dans la sentence finale. Les motifs qui l'ont conduit à admettre sa compétence peuvent être résumés comme il suit.  
En soulevant l'exception d'incompétence préalablement à toute défense sur le fond, A.________ s'est conformée aux prescriptions de l'art. 186 al. 2 LDIP. Sa requête est, partant, recevable. 
La réelle et commune intention des parties de recourir à l'arbitrage ressort de l'art. 22 du contrat de distribution et est confirmée par l'attitude subséquente des parties à l'arbitrage, telle que l'on peut l'inférer des conclusions spontanées déposées par A.________ devant l'instance judiciaire de conciliation à Genève et du dépôt de la requête d'arbitrage. L'absence d'accord des parties sur des points secondaires de l'arbitrage ne saurait affecter la validité de la convention d'arbitrage. La référence à la  powered [recte: empowered ]  jurisdiction of Geneva, qui ne contredit en rien l'intention des parties de recourir à l'arbitrage, si elle n'est pas explicite, révèle néanmoins l'intention des parties de désigner sous ces termes un tribunal à constituer sous l'égide de la CCIG et opérant selon le règlement suisse d'arbitrage international de la  Swiss   Chambers' Arbitration Institution.  
On ne saurait déduire de l'art. 7 du contrat d'échange de données de 2010 une révocation de la clause compromissoire contenue dans le contrat de distribution: d'une part, une intention claire des parties allant dans ce sens fait défaut; d'autre part, il n'y a pas identité des parties à ces deux contrats successifs. 
Pour le surplus, A.________ ne se plaint pas, dans la procédure arbitrale, d'une violation d'un éventuel mécanisme contractuel constituant un préalable obligatoire à l'arbitrage, dont on pourrait inférer, le cas échéant, l'incompétence  ratione temporis de l'arbitre. Quoi qu'il en soit, les conditions posées par la jurisprudence à la reconnaissance d'un tel préalable obligatoire ne sont manifestement pas remplies en l'espèce.  
On ne voit pas, enfin, que les demanderesses pourraient avoir renoncé ou donné l'apparence de renoncer à se prévaloir de la convention d'arbitrage en procédant à la conciliation devant les instances judiciaires genevoises, ni qu'elles pourraient se voir imputer de ce fait un comportement contradictoire. En effet, selon leur compréhension de l'art. 22 du contrat de distribution, cette clause requérait la saisine préalable de ces instances-là aux fins de conciliation. Aussi ne saurait-on leur reprocher de s'être conformées à ce qu'elles estimaient être la première étape du mécanisme contractuel de résolution du litige. Et même dans l'hypothèse inverse, encore faudrait-il, pour que l'on puisse admettre l'existence d'une renonciation tacite de leur part à se prévaloir de la convention d'arbitrage, que la partie défenderesse eût procédé sur le fond sans soulever l'exception d'arbitrage. Or, il n'en a rien été puisque, au contraire, A.________ s'est empressée de soulever une telle exception, en la motivant, dans son mémoire du 30 août 2013. 
 
D.   
Le 3 mars 2015, A.________ (ci-après: la recourante) a formé un recours en matière civile, assorti d'une requête d'effet suspensif, pour violation de l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. Elle conclut à l'annulation de la décision incidente du 3 février 2015 et à la condamnation de ses adverses parties au paiement des frais et dépens tant de la procédure fédérale de recours que de la procédure arbitrale, ainsi qu'au versement par chacune d'elles d'une indemnité de 30'000 euros pour procédure abusive. 
En tête de leur réponse commune du 30 avril 2015, B.________ et C.________, représentées par le même conseil, concluent au rejet du recours en tant qu'il est recevable et à la confirmation de la décision attaquée. 
Dans une réplique du 26 mai 2015 et une duplique du 16 juin 2015, la recourante et les intimées ont maintenu leurs précédentes conclusions. 
L'arbitre, qui a déposé le dossier de la cause, a déclaré ne pas avoir d'observations à formuler au sujet du recours. 
La requête d'effet suspensif a été admise par ordonnance présidentielle du 27 mai 2015. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière civile est recevable contre les sentences touchant l'arbitrage international aux conditions fixées par les art. 190 à 192 LDIP (art. 77 al. 1 let. a LTF). Qu'il s'agisse de l'objet du recours, de la qualité pour recourir, du délai de recours, des conclusions touchant la compétence prises par la recourante ou encore du grief soulevé dans le mémoire de recours, aucune de ces conditions de recevabilité ne fait problème en l'espèce. Rien ne s'oppose donc à l'entrée en matière. 
 
2.   
Dans un unique moyen, fondé sur l'art. 190 al. 2 let. b LDIP, la recourante soutient que l'arbitre s'est déclaré à tort compétent pour connaître de la demande qui lui était soumise. 
 
2.1. Saisi du grief d'incompétence, le Tribunal fédéral examine librement les questions de droit, y compris les questions préalables, qui déterminent la compétence ou l'incompétence du tribunal arbitral. Il n'en devient pas pour autant une cour d'appel. Aussi ne lui incombe-t-il pas de rechercher lui-même, dans la sentence attaquée, les arguments juridiques qui pourraient justifier l'admission du grief fondé sur l'art. 190 al. 2 let. b LDIP. C'est bien plutôt à la partie recourante qu'il appartient d'attirer son attention sur eux, pour se conformer aux exigences de l'art. 77 al. 3 LTF (ATF 134 III 565 consid. 3.1 et les arrêts cités).  
En revanche, le Tribunal fédéral ne revoit les constatations de fait que dans les limites usuelles, même lorsqu'il statue sur le moyen pris de l'incompétence du Tribunal arbitral (arrêt 4A_90/2014 du 9 juillet 2014 consid. 3.1). Aussi ne saurait-il faire droit à la requête de la recourante, fondée sur les art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, tendant à ce qu'il rectifie ou complète les constatations de fait posées par l'arbitre. Il a échappé à l'intéressée que l'application de ces deux dispositions est expressément exclue par l'art. 77 al. 2 LTF dans un recours en matière civile dirigé contre une décision d'un tribunal arbitral, qu'il s'agisse d'un arbitrage international ou d'un arbitrage interne. 
 
2.2.   
 
2.2.1. La convention d'arbitrage doit satisfaire aux exigences posées à l'art. 178 LDIP.  
Il n'est pas contesté, ni contestable d'ailleurs, que la clause 22 du contrat de distribution satisfait aux exigences de forme posées à l'art. 178 al. 1 LDIP
En vertu de l'art. 178 al. 2 LDIP, la convention d'arbitrage est valable, s'agissant du fond, si elle répond aux conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du litige et notamment le droit applicable au contrat principal, soit encore le droit suisse. La disposition citée consacre trois rattachements alternatifs  in favorem validitatis, sans aucune hiérarchie entre eux, à savoir le droit choisi par les parties, le droit régissant l'objet du litige (  lex causae ) et le droit suisse en tant que droit du siège de l'arbitrage (ATF 129 III 727 consid. 5.3.2 p. 736). Faute d'une élection de droit touchant la clause 22 du contrat de distribution, l'arbitre a examiné la validité matérielle de celle-ci au regard du droit suisse, lequel constituait à la fois la  lex causaeet la  lex fori. L'examen de la Cour de céans est ainsi restreint à la question de savoir si l'arbitre a méconnu le droit suisse en admettant sa compétence.  
 
2.2.2. La convention d'arbitrage est un accord par lequel deux ou plusieurs parties déterminées ou déterminables s'entendent pour confier à un tribunal arbitral ou à un arbitre unique, en lieu et place du tribunal étatique qui serait compétent, la mission de rendre une sentence à caractère contraignant sur un ou des litige (s) existant (s) (compromis arbitral) ou futur (s) (clause compromissoire) résultant d'un rapport de droit déterminé (arrêt 4A_515/2012 du 17 avril 2013 consid. 5.2 et les références). Il importe que la volonté des parties d'exclure la juridiction étatique normalement compétente au profit de la juridiction privée que constitue un tribunal arbitral y apparaisse. Quant au tribunal arbitral appelé à connaître du litige, il doit être déterminé ou, à tout le moins, déterminable (ATF 138 III 29 consid. 2.2.3 p. 35).  
Les dispositions des conventions d'arbitrage qui sont incomplètes, peu claires ou contradictoires sont considérées comme des clauses pathologiques (sur les différentes espèces de clauses pathologiques, cf., parmi d'autres: Lukas Wyss, Aktuelle Zuständigkeitsfragen im Zusammenhang mit internationalen kommerziellen Schiedsgerichten mit Sitz in der Schweiz, in Jusletter du 25 juin 2012, n. 96 à 107). Pour autant qu'elles n'aient pas pour objet des éléments devant impérativement figurer dans une convention d'arbitrage, en particulier l'obligation de déférer le litige à un tribunal arbitral privé, de telles clauses n'entraînent pas nécessairement la nullité des conventions d'arbitrage dans lesquelles elles figurent. Il faut, bien plutôt, rechercher par la voie de l'interprétation et, le cas échéant, par celle du complètement du contrat conformément aux règles générales du droit des contrats, une solution qui respecte la volonté fondamentale des parties de se soumettre à une juridiction arbitrale (dernier arrêt cité, ibid.). 
En droit suisse, l'interprétation d'une convention d'arbitrage se fait selon les règles générales d'interprétation des contrats. Le juge s'attachera, tout d'abord, à mettre au jour la réelle et commune intention des parties, le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices, sans s'arrêter aux expressions et dénominations inexactes dont elles ont pu se servir. Déterminer ce qu'un cocontractant savait ou voulait au moment de conclure relève des constatations de fait; la recherche de la volonté réelle des parties est qualifiée d'interprétation subjective (ATF 131 III 606 consid. 4.1 p. 611). Si le juge parvient à établir une volonté réelle et concordante des parties, il s'agit d'une constatation de fait qui lie le Tribunal fédéral. S'il n'y parvient pas, il recherchera alors, en appliquant le principe de la confiance, le sens que les parties pouvaient et devaient donner, selon les règles de la bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques en fonction de l'ensemble des circonstances (ATF 140 III 134 consid. 3.2; 135 III 295 consid. 5.2 p. 302 et les arrêts cités). Supposé que l'application de ce principe n'aboutisse pas à un résultat concluant, des moyens d'interprétation subsidiaires pourront être mis en oeuvre, telle la règle dite des clauses ambiguës en vertu de laquelle le contrat s'interprète, en cas de doute, en défaveur de son rédacteur (  Unklarheitsregelin dubio contra stipulatorem ou  proferentem; ATF 124 III 155 consid. 1b p. 158 et les arrêts cités). Au demeurant, si l'interprétation aboutit à la conclusion que les parties ont voulu soustraire à la juridiction étatique le litige qui les divise pour le faire trancher par un tribunal arbitral, mais que des divergences subsistent au sujet du déroulement de la procédure d'arbitrage, force est alors de faire intervenir le principe d'utilité (  Utilitätsgedanke ), c'est-à-dire de donner à la clause pathologique un sens qui permette de maintenir la convention d'arbitrage (ATF 138 III 29 consid. 2.3.3 [condition réalisée]; arrêts 4A_388/2012 du 18 mars 2013 consid. 3.4.3 et 4A_244/2012 du 17 janvier 2013 consid. 4.4 [condition non réalisée]). Partant, une désignation imprécise ou erronée du tribunal arbitral n'entraîne pas nécessairement l'invalidité de la convention d'arbitrage (ATF 138 III 29 consid. 2.2.3 p. 36 et les arrêts cités).  
Ces principes ont été confirmés encore récemment (arrêt 4A_676/2014 du 3 juin 2015 consid. 3.2.2). C'est à leur aune qu'il convient d'examiner les griefs formulés par la recourante. 
 
2.2.3.  
 
2.2.3.1. Il ressort du résumé de son argumentation, tel qu'il a été fait plus haut (cf. let. C.b, 3e §), que l'arbitre est parvenu à établir une volonté réelle et concordante des parties de recourir à l'arbitrage. Il l'a fait sur la base du texte même de la clause 22 du contrat de distribution et en tenant compte du comportement adopté subséquemment par les deux parties (cf. décision attaquée, n. 52 et 55). Il s'agit d'une constatation de fait qui lie le Tribunal fédéral, qu'elle soit fondée ou non. Aussi la recourante tente-t-elle en pure perte de la remettre en question en proposant une appréciation différente des indices ressortant du dossier de l'arbitrage. Elle le fait du reste sur un mode fortement appellatoire, en mêlant les arguments de fait et de droit, à charge pour le Tribunal fédéral d'en faire le tri, ce qui n'est pas une manière admissible d'argumenter dans un recours en matière d'arbitrage international (cf. art. 77 al. 3 LTF).  
Au demeurant, même si les déductions de l'arbitre étaient le résultat d'une interprétation objective de la clause 22 du contrat de distribution,  quod non, elles ne pourraient qu'être approuvées. Le titre de la clause litigieuse - ARBITRATION -, écrit en majuscules et en caractères gras, pèse d'un poids certain dans l'analyse du sens de celle-ci. En comparaison, la clause générale insérée dans le corps du texte du contrat avant l'art. 1er, avec d'autres précisions, et voulant que les titres surmontant les clauses soient insérés par commodité, sans affecter l'interprétation du contrat (  The headings to clauses are inserted for convenience only and shall not affect the construction of this Contract ), apparaît sensiblement de moindre importance. En outre, la thèse de la recourante consistant à voir dans la clause litigieuse l'institution d'un double mécanisme de règlement à l'amiable des futurs différends est assez artificielle, car elle implique que les parties au contrat n'auraient pas jugé nécessaire de régler dans celui-ci la procédure à suivre en cas d'échec de la double tentative de liquider une dispute à l'amiable. Du reste, écartée cette thèse, il faudrait encore expliquer, en admettant, à l'instar de la recourante, que les termes empowered jurisdiction of Geneva feraient référence aux tribunaux étatiques genevois, pourquoi les parties auraient adopté une solution procédurale qui n'était pas admissible au regard du droit communautaire, comme l'intéressée cherche à le démontrer par ailleurs. Au demeurant, l'adjectif empowered, que l'on pourrait traduire en français par "autorisée" ou "habilitée" (Dictionnaire juridique Dahl, 3e éd. 2007, p. 474), n'a pas vocation à désigner nécessairement un tribunal étatique, ainsi que l'arbitre le démontre dans sa décision incidente (n. 52), même s'il y substitue par inadvertance le terme  powered à celui d' empowered qui figure dans la clause en question.  
Le caractère international du contrat de distribution plaide également en faveur de la qualification retenue par l'arbitre. Il est assez vraisemblable, en effet, que trois sociétés commerciales ayant leur siège respectif dans trois pays différents n'appartenant pas tous à la même zone économique et juridique - la République de Russie, d'une part, la France et le Royaume-Uni, membres de l'Union européenne, d'autre part - aient souhaité recourir à un arbitrage privé plutôt que de se soumettre à la juridiction d'un tribunal régional d'un pays tiers. Ça l'est d'autant plus que l'arbitrage, qu'on le veuille ou non, tend à devenir la justice de droit commun du commerce international et que Genève est une place d'arbitrage connue. 
Que l'art. 22 du contrat de distribution soit assez sommaire, au point de devoir être qualifié de clause pathologique et de nécessiter un complètement, n'est pas déterminant, comme l'a bien vu l'arbitre, dès lors que l'on peut en déduire l'obligation des parties de déférer le litige à un tribunal privé. 
 
2.2.3.2. L'argument de la recourante, d'après lequel la clause de juridiction contenue à l'art. 7 du contrat d'échange de données de 2010 aurait rendu caduque celle figurant à l'art. 22 du contrat de distribution de 2009, ne saurait prospérer.  
D'abord, ces deux contrats ne lient pas les mêmes parties, B.________ n'apparaissant pas dans le plus récent. 
Ensuite, le contrat d'échange de données ne constitue qu'une annexe au contrat de distribution, qu'il ne fait que compléter sans l'annuler. 
Enfin, le second contrat en date a une portée bien moins étendue que le premier puisqu'il concerne les relations entre A.________ et C.________ au titre de la pharmacovigilance essentiellement. 
 
2.2.3.3. L'arbitre constate que la recourante ne s'est pas plainte, dans la procédure arbitrale, d'une violation d'un éventuel mécanisme contractuel constituant un préalable obligatoire à l'arbitrage.  
La recourante ne s'en prend pas à cette constatation qui lie, quoi qu'il en soit le Tribunal fédéral. Dès lors, c'est en vain qu'elle paraît vouloir reprocher à C.________ de ne pas avoir mis en oeuvre un tel mécanisme. Qui plus est, l'arbitre constate lui-même que "les parties ont, de leurs propres admissions, procédé en conciliation" (décision attaquée, n. 57 in fine), ce que les intimées démontrent de surcroît dans leur réponse au recours (n. 35/36) et dans leur duplique (p. 2 in medio). 
 
2.2.3.4. Enfin, les divers arguments que la recourante cherche à tirer de la démarche procédurale initiée le 22 mai 2013 par B.________, telle qu'elle a été relatée plus haut (cf. let. B), tombent eux aussi à faux, en plus du fait qu'ils ne sauraient être imputés à la seconde intimée, C.________.  
Dans la mesure, d'abord, où l'intéressée s'en sert pour contester l'interprétation du contrat faite par l'arbitre, elle tente en vain de remettre en cause l'interprétation subjective de la clause litigieuse à laquelle ce dernier a procédé sur le vu du texte de celle-ci et du comportement ultérieur des parties. Que, dans la prise en compte de ce comportement, l'arbitre n'ait pas ou pas suffisamment pris en considération l'ensemble des circonstances pertinentes, y compris celle dont il est ici question, ne change rien à l'affaire, dès lors que la démarche entreprise par lui ressortit au domaine des faits et ne peut donc pas être critiquée comme telle. 
Par ailleurs, l'arbitre a expliqué pourquoi, à supposer même que le dépôt de la requête en conciliation puisse être assimilé à une renonciation à l'arbitrage, le fait que la recourante n'ait pas procédé au fond devant l'instance judiciaire genevoise, mais ait soulevé immédiatement et spontanément l'exception d'arbitrage, ne permettait pas de traiter le comportement de B.________ comme une renonciation tacite à la convention d'arbitrage, vu la jurisprudence fédérale en la matière (arrêt 4A_579/2010 du 11 janvier 2011 consid. 2.2.2 et les références). 
On peut s'interroger enfin, sous l'angle du principe de la bonne foi qui régit aussi la procédure arbitrale (arrêt 4A_374/2014 du 26 février 2015 consid. 4.2.2.), sur l'admissibilité du comportement d'une partie, telle la recourante, consistant à soulever une exception d'arbitrage lorsque son adversaire l'assigne en conciliation devant un tribunal étatique, puis à se prévaloir de l'incompétence de l'arbitre lorsque ce même adversaire, entrant dans ses vues, dépose cette fois-ci une requête d'arbitrage. 
Cela étant, le grief tiré de la violation de l'art. 190 al. 2 let. b LDIP se révèle infondé dans la mesure où il n'est pas déjà irrecevable. 
 
3.   
La recourante, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 LTF) et verser des dépens aux intimées, lesquelles en seront créancières solidaires (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 10'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.   
La recourante versera aux intimées, créancières solidaires, une indemnité de 12'000 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à l'arbitre unique. 
 
 
Lausanne, le 15 septembre 2015 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: Kiss 
 
Le Greffier: Carruzzo