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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_344/2017  
   
   
 
 
 
Arrêt du 20 septembre 2017  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Merkli, Président, 
Karlen, Fonjallaz, Chaix et Kneubühler. 
Greffière : Mme Tornay Schaller. 
 
Participants à la procédure 
 Erwin Sperisen, représenté par Maîtres Florian Baier et Giorgio Campá, avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Détention pour des motifs de sûreté, 
 
recours contre l'ordonnance de la Présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 18 juillet 2017. 
 
 
Faits :  
 
A.   
Prévenu d'assassinats commis au Guatemala sur dix personnes entre novembre 2005 et septembre 2006, Erwin Sperisen, ressortissant suisse et guatémaltèque, a été arrêté à Genève le 31 août 2012. Il se trouve depuis lors à la prison genevoise de Champ-Dollon, en détention provisoire puis pour des motifs de sûreté. 
Par acte d'accusation du 10 janvier 2014, le prénommé a été renvoyé en jugement en sa qualité de directeur général de la Police nationale civile du Guatemala (PNC), d'une part, pour l'assassinat de sept détenus commis le 25 septembre 2006 au sein de la prison "Ferme de réhabilitation Pavón", dans le cadre d'un plan secret (plan L.________) destiné à éliminer lesdits détenus (ch. I.) et, d'autre part, pour l'assassinat de trois détenus évadés le 22 octobre 2005 du centre pénitentiaire "El Infiernito" et abattus, pour l'un, le 3 novembre 2005 (ch. II.) et, pour les deux autres, le 1er décembre 2005 (ch. III.) dans le cadre d'un plan destiné à exécuter ces détenus plutôt que de les remettre aux autorités pénitentiaires. Erwin Sperisen a toujours contesté toute responsabilité pénale dans ces actes. 
 
B.   
Par jugement du 6 juin 2014, le Tribunal criminel du canton de Genève a reconnu Erwin Sperisen coupable des sept assassinats décrits sous ch. I. de l'acte d'accusation, l'a acquitté des faits décrits sous ch. II. et III. et l'a condamné à une peine privative de liberté à vie. 
Par arrêt du 12 juillet 2015, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice du canton de Genève a rejeté l'appel formé par le prénommé contre ce jugement et a admis l'appel joint du Ministère public du canton de Genève. Elle a reconnu Erwin Sperisen coupable des chefs d'assassinat dont il avait été acquitté en première instance et a confirmé pour le surplus le jugement attaqué. 
Le 29 juin 2017, la Cour de droit pénal du Tribunal fédéral a admis partiellement le recours en matière pénale formé par Erwin Sperisen contre ce verdict, a annulé l'arrêt cantonal et a renvoyé la cause à la cour cantonale afin qu'elle rende une nouvelle décision, rejetant pour le surplus le recours, dans la mesure de sa recevabilité (cause 6B_947/2015). 
 
C.   
Le 12 juillet 2017, Erwin Sperisen a requis sa mise en liberté immédiate, invoquant l'insuffisance des charges retenues à son encontre. 
Par ordonnance du 18 juillet 2017, la Présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision a rejeté la demande de libération. Elle a considéré en substance que les charges étaient suffisantes et rendaient vraisemblable la perspective d'une condamnation; elle a retenu l'existence d'un risque de fuite, point que ne discutait d'ailleurs pas le détenu; se saisissant d'office de cette question, elle a estimé que le principe de la proportionnalité n'était pas violé; enfin, le détenu ne pouvait pas se plaindre du régime d'isolement dont il disait souffrir en prison puisqu'il avait lui-même demandé, pour sa propre sécurité, à être seul en cellule. 
 
D.   
Agissant par la voie du recours en matière pénale, Erwin Sperisen demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler l'ordonnance du 18 juillet 2017 et d'ordonner sa mise en liberté immédiate moyennant le dépôt de tous ses passeports. Il conclut subsidiairement à sa mise en liberté moyennant le dépôt de tous ses passeports et de toutes autres mesures de substitution jugées utiles par le Tribunal fédéral; en tout état, la République et canton de Genève doit être condamnée en tous les frais et dépens de la procédure. 
Invités à se déterminer, la Présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision et le Ministère public concluent au rejet du recours. Le recourant a répliqué, par courrier du 30 août 2017. 
Il ressort des dernières observations des parties que les nouveaux débats auront lieu à Genève à compter du 28 novembre 2017. A cette occasion, quatre témoins seront convoqués, dont deux ont déjà été entendus par les instances cantonales. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Selon l'art. 78 LTF, le recours en matière pénale est ouvert contre les décisions rendues en matière pénale, dont font partie les décisions relatives à la détention pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP (ATF 137 IV 22 consid. 1 p. 23). Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le prévenu - actuellement détenu - a qualité pour agir. Pour le surplus, le recours est formé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue en dernière instance cantonale (art. 80 LTF) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF
 
 
2.   
Contrairement à ce qu'affirme le Ministère public, le recours ne contient pas de conclusions nouvelles proscrites par l'art. 99 al. 2 LTF. Le recourant a certes modifié, tout au moins formellement, l'argumentation juridique déployée à l'appui de ses conclusions, renonçant à faire de l'absence de charges suffisantes un grief propre, pour se concentrer sur la prétendue violation des art. 5 al. 3 CEDH (jugement dans un délai raisonnable et avec une diligence particulière) ainsi que 3 CEDH et 10 al. 3 Cst. (conditions dégradantes de détention). Or, tant que la partie recourante invoque devant le Tribunal fédéral un grief constitutionnel suffisamment motivé (art. 106 al. 2 LTF), même si elle ne l'avait pas fait valoir précédemment, le Tribunal fédéral doit en principe entrer en matière, si la dernière instance cantonale qui a rendu la décision entreprise disposait d'un plein pouvoir d'examen et devait examiner le droit d'office (ATF 142 I 155 consid. 4.4.6 p. 159). 
L'instance précédente a procédé ici d'elle-même à un examen du respect du principe de la proportionnalité et vérifié si le principe de célérité avait été violé; elle a aussi abordé avec un plein pouvoir d'examen la question des conditions de détention de l'intéressé. Aucun obstacle procédural ne s'oppose donc à ce que le Tribunal fédéral entre en matière sur l'ensemble des griefs évoqués devant lui. 
 
3.   
Une mesure de détention préventive n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale (art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst.), soit en l'espèce l'art. 221 CPP. Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 2 et 3 Cst.). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par les besoins de l'instruction, par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé (art. 221 al. 1 CPP; art. 5 par. 1 let. c CEDH), c'est-à-dire des raisons plausibles de le soupçonner d'avoir commis une infraction. 
 
4.   
Le recourant ne fait plus de l'absence de charges suffisantes un grief à part entière de son mémoire devant le Tribunal fédéral. Il n'en demeure pas moins qu'il reproche à l'instance précédente d'avoir considéré que la perspective d'une condamnation était vraisemblable, estimant pour sa part qu'une telle issue serait "tout juste encore  possible, mais en aucun cas  vraisemblable". De tels développements obligent la Cour de céans à vérifier la présence de forts soupçons d'assassinats au sens de l'art. 221 al. 1 CPP, ce d'autant plus que la situation procédurale s'est modifiée depuis le dernier arrêt qu'elle a rendu, le 7 juin 2017, en matière de détention. Le Ministère public a d'ailleurs consacré la majeure partie de ses observations à exposer les charges pesant sur le recourant. En outre, le degré de vraisemblance de ces soupçons aura son incidence sur la nécessité d'examiner l'éventualité de mesures de substitution (cf.  infra consid. 5).  
 
4.1. A teneur de l'art. 221 al. 1 CPP, la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté suppose que le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit. Selon la jurisprudence, il n'appartient pas au juge de la détention de procéder à une pesée complète des éléments à charge et à décharge et d'apprécier la crédibilité des personnes qui mettent en cause le prévenu. Il doit uniquement examiner s'il existe des indices sérieux de culpabilité justifiant une telle mesure. L'intensité des charges propres à motiver un maintien en détention préventive n'est pas la même aux divers stades de l'instruction pénale; si des soupçons, même encore peu précis, peuvent être suffisants dans les premiers temps de l'enquête, la perspective d'une condamnation doit apparaître avec une certaine vraisemblance après l'accomplissement des actes d'instruction envisageables (arrêt 1B_322/2017 du 24 août 2017 consid. 2.1 destiné à publication; ATF 137 IV 122 consid. 3.2 p. 126 s.; 116 Ia 143 consid. 3c p. 146).  
En d'autres termes, les soupçons susdécrits doivent se renforcer, plus l'instruction avance et plus l'issue du jugement au fond approche (Catherine Hohl-Chirazi, La privation de liberté en procédure pénale suisse: buts et limites, thèse Genève 2016, n. 801). Si des raisons plausibles de soupçonner une personne d'avoir commis une infraction suffisent au début de l'enquête, ces motifs objectifs doivent passer de plausibles à vraisemblables. Il faut ainsi pour reprendre la jurisprudence relative au degré de preuve requis dans un procès, que des éléments parlent en faveur de la culpabilité du prévenu, et ce même si le juge envisage l'éventualité que tel ne soit pas le cas (cf. ATF 140 III consid. 4.1, p. 613). 
 
4.2. En l'occurrence, la dernière fois que le Tribunal fédéral a statué sur la détention du recourant, celui-ci avait été reconnu coupable de plusieurs assassinats et condamné à la peine privative de liberté à vie en première et deuxième instances cantonales: cela suffisait amplement à fonder des forts soupçons au sens de l'art. 221 al. 1 CPP (arrêt 1B_182/2017 du 7 juin 2017 consid. 2.2). Ces verdicts de culpabilité ont depuis lors été annulés. Il convient dès lors d'examiner aujourd'hui, sur la base du dossier actuel, les motifs objectifs susceptibles de fonder des soupçons suffisants de commission de plusieurs assassinats. Ces soupçons résultent d'abord de l'arrêt de renvoi du Tribunal fédéral du 29 juin 2017 (cause 6B_947/2015) qui lie la cour cantonale sur plusieurs points pour lesquels les griefs du recourant ont été rejetés (art. 107 al. 2 LTF; ATF 135 III 334 consid. 2.1 p. 335 s.).  
Il ressort en effet de cet arrêt que la cour cantonale pouvait retenir, sans sombrer dans l'arbitraire, que les détenus tués le 25 septembre 2006 lors de l'opération de reprise de la prison "Ferme de réhabilitation Pavón" (ch. I. de l'acte d'accusation) ne sont pas morts au cours d'affrontements avec la police ou d'autres forces armées (consid. 9.5), mais que leur élimination avait été planifiée (consid. 9.8). Le Tribunal fédéral a en outre considéré qu'il n'était pas insoutenable de retenir comme indices susceptibles d'établir la participation personnelle du recourant dans cette élimination planifiée les éléments suivants: le jour de la reprise de la prison "Ferme de réhabilitation Pavón", le recourant se trouvait à 4 heures du matin avec le Ministre de l'intérieur, le Directeur du système pénitentiaire et certains de ses subordonnés, en compagnie d'un groupe d'hommes cagoulés et armés (consid. 10.3.5.2); en tant que directeur de la PNC, le recourant ne pouvait ignorer l'attribution à ses propres services de la direction de l'opération L.________ et le silence du recourant quant à une modification du plan officiel constituait un indice supplémentaire à charge (consid. 10.3.4.4); le recourant n'a pas empêché des hommes se trouvant dans la maison du détenu A.________ - où ont été retrouvés plusieurs détenus abattus par balles - d'agir à leur guise (consid. 10.3.4.5); B.________, sous-directeur de la PNC et subordonné du recourant, était présent au moment de l'interpellation du détenu C.________, retrouvé mort peu après, ce qui constituait un élément à charge du recourant (consid. 9.10.3); le recourant n'a pas manifesté de réaction en apprenant que des personnes avaient été tuées dans une opération à laquelle participaient ses hommes, il a adopté une attitude purement passive et n'a, par la suite, diligenté aucune enquête, même simplement interne, ce qui ne constituait pas le comportement que l'on pouvait attendre du responsable de la PNC (consid. 9.2, 10.3.11.2 et 10.3.13). 
Dans son arrêt du 29 juin 2017, le Tribunal fédéral a aussi abordé les circonstances relatives à l'exécution par un commando, le 3 novembre 2005, du détenu évadé D.________ sur la route qui mène à Guatemala City, dans le secteur connu sous le nom de "Rio Hondo" (ch. II de l'acte d'accusation). Tout en reprochant à la cour cantonale de ne pas avoir examiné si les preuves issues des listings téléphoniques entre le recourant et un membre du commando étaient exploitables au sens de l'art. 140 CPP (consid. 11.1.4.1), le Tribunal fédéral a néanmoins estimé que plusieurs communications (cas échéant deux seulement), même de brève durée, suffiraient à constituer un indice de l'implication du recourant dans l'opération d'exécution des détenus évadés (consid. 6.2.3.2). 
 
4.3. De tels indices constituaient certainement des éléments suffisants pour placer et maintenir un certain temps en détention le responsable hiérarchique d'une police nationale, soupçonné d'avoir participé à plusieurs exécutions extra-judiciaires de détenus. S'agissant d'investigations portant sur des faits intégralement contestés, remontant alors à près de dix ans et à mener principalement à l'étranger, notamment par le biais de commissions rogatoires, une longue enquête était inévitable, ce qui justifiait une détention provisoire d'une durée certaine. Au fil du temps, la procédure avait pour but de renforcer les soupçons d'origine, de manière à ce que le renvoi en jugement - même si une telle opération n'est par principe pas assurée de conduire à une condamnation - s'accompagne d'éléments forts rendant vraisemblable un verdict de culpabilité. Pris à eux seuls, les éléments qui viennent d'être énoncés au considérant 4.2 ne paraissent toutefois pas suffisants pour fonder une détention pour des motifs de sûreté d'une durée telle que celle que connaît maintenant la procédure. Il appartient cependant encore au juge de la détention de prendre aussi en compte les éléments sur lesquels porteront, lors du nouveau procès, l'administration et l'appréciation des preuves par le juge du fond.  
Dans son arrêt du 29 juin 2017, le Tribunal fédéral a énuméré les actes de procédure qui ne pouvaient pas être exploités au motif que la cour cantonale n'avait pas offert suffisamment de garanties de procédure à l'accusé. Il en va d'abord des déclarations de plusieurs témoins entendus en commission rogatoire au Guatemala au sujet de la présence du recourant lors de l'exécution du détenu A.________ ou de la mise à l'écart du détenu G.________ (consid. 5.5.5.4); s'agissant du décès du détenu A.________, la participation du recourant repose sur les déclarations du témoin K.________, entendu uniquement en commission rogatoire, sans confrontation avec le recourant (consid. 10.3.10.2); s'agissant de la mise à l'écart du détenu G.________, la cour cantonale ne pouvait pas retenir que les témoignages étaient nombreux et convergents (consid. 10.3.7.4). Le Tribunal fédéral a aussi estimé que la cour cantonale avait violé le droit d'être entendu du recourant en renonçant à convoquer les témoins E.________ et F.________ dont il avait demandé l'audition (consid. 6.2.2.2). Par ailleurs, la cour cantonale ne pouvait fonder son verdict de culpabilité sur un épisode de torture reproché au recourant, alors que ces faits n'étaient pas visés dans l'acte d'accusation (consid. 7), qu'ils n'avaient de toute manière pas fait l'objet d'une appréciation complète des preuves (consid. 10.1) et qu'ils reposaient uniquement sur les conclusions des enquêteurs de la Commission internationale contre l'impunité au Guatemala (CICIG) qui se référaient à des témoins dont les procès-verbaux ne figuraient pas au dossier et dont on ignorait l'identité (consid. 10.2). Il était aussi insoutenable de retenir, sauf analyse technique approfondie des vidéos et photographies des événements, que le recourant était présent lors de l'assaut de la maison du détenu A.________ (consid. 10.3.9). 
A teneur de l'ordonnance de la direction de la procédure d'appel du 25 août 2017, la nouvelle administration des preuves est réduite à l'audition de quatre témoins: il s'agit des enquêteurs de la CICIG H.________ et I.________, qui ont déjà été entendus par les instances cantonales, et des témoins J.________ et K.________, entendus jusqu'à présent uniquement par commission rogatoire sans confrontation avec le recourant; à teneur de l'ordonnance de procédure, ces derniers "sont les seuls témoins ayant rapporté avoir, le jour des événements de Pavón, entendu le recourant être avisé par radio de la capture de C.________ ou l'avoir vu avec A.________ dans l'escalier menant à l'étage de sa maison, où son cadavre sera ensuite trouvé"; l'ordonnance précise que si ces auditions "s'avéraient irréalisables ou trop difficilement réalisables, les droits de la défense seraient sauvegardés par les conséquences du défaut de confrontation physique avec les témoins dont les déclarations constituent une preuve à charge essentielle". 
D'autres actes d'instruction ne sont pas prévus, tels qu'une nouvelle commission rogatoire au Guatemala garantissant mieux les droits de la défense (cf. consid. 5.5.7) ou une analyse technique des vidéos et photographies de l'assaut de la maison de A.________ (cf. consid. 10.3.9). Pour le surplus, le Ministère public renonce à l'audition des témoins E.________ et F.________ (cf. consid. 6.2.2.2) et la direction de la procédure propose à la juridiction d'appel de renoncer à faire modifier l'acte d'accusation pour y inclure les actes de torture reprochés au recourant (cf. consid. 7). Enfin, aucune mesure n'est apparemment prise pour donner accès aux procès-verbaux et à l'identité des témoins entendus par les enquêteurs de la CICIG (cf. consid. 10.2.2.6.4). 
 
4.4. En définitive, les soupçons de commission de dix assassinats reposent sur les indices retenus par le Tribunal fédéral dans son arrêt de renvoi (cf.  supra consid. 3.2) et sur l'audition prévue de quatre témoins (cf.  supra consid. 3.3). Or, le Tribunal fédéral a déjà exposé que les déclarations des deux témoins déjà entendus n'apparaissaient "pas, à elles seules, déterminantes au sens de la jurisprudence européenne" (consid. 5.5.5.3). Quant aux deux témoins entendus précédemment en commission rogatoire, leur présence à Genève ne paraît pas, de l'avis de la direction de la procédure d'appel, assurée.  
Dans ces conditions, force est de constater que les soupçons pesant sur le recourant d'avoir participé, au Guatemala entre novembre 2005 et septembre 2006, à dix exécutions extra-judiciaires de détenus - même s'ils continuent à parler en faveur d'une culpabilité - ont diminué depuis le dernier examen des conditions de détention par la Cour de céans. En regard de la privation de liberté subie par le recourant depuis plus de cinq années, les différents indices déjà mentionnés, auxquels il faut ajouter l'audition prévue, mais incertaine pour certains d'entre eux, de quatre témoins par l'instance d'appel, ne constituent pas des éléments suffisants pour justifier absolument un maintien en détention pour des motifs de sûreté sans envisager des mesures de substitution. Selon les circonstances, il incombe en effet au juge de la détention de rechercher et de mettre en oeuvre, même d'office, des mesures moins incisives que la détention et qui permettent d'atteindre le même but (cf. art. 237 al. 1 CPP; Hohl-Chirazi, op. cit., n. 848 et 921). Les infractions reprochées au recourant sont certes d'une extrême et rare gravité, mais cette seule circonstance - de nature à entraîner une peine très lourde, telle qu'une mesure privative de liberté à vie - ne saurait ni justifier par elle-même une détention avant jugement de longue durée, ni exclure d'envisager toute mesure de substitution à la privation de liberté (cf. Hohl-Chirazi, op. cit., n. 809). 
 
5.   
Il y a donc lieu d'examiner s'il existe un risque de fuite et, dans l'affirmative, si des mesures de substitution au sens de l'art. 237 CPP sont envisageables. 
 
5.1. Selon la jurisprudence, le risque de fuite au sens de l'art. 221 al. 1 let. a CPP doit s'analyser en fonction d'un ensemble de critères tels que le caractère de l'intéressé, sa moralité, ses ressources, ses liens avec l'Etat qui le poursuit ainsi que ses contacts à l'étranger, qui font apparaître le risque de fuite non seulement possible, mais également probable (ATF 117 Ia 69 consid. 4a p. 70 et la jurisprudence citée).  
Dans le dernier arrêt où il a abordé la question du risque de fuite du prévenu (arrêt 1B_197/2013 du 26 juin 2013 consid. 4), le Tribunal fédéral avait retenu que le détenu pouvait se prévaloir de liens avec la Suisse, dans la mesure où il y avait résidé avec sa femme et ses trois enfants mineurs pendant cinq ans avant son arrestation; ces attaches avaient alors été qualifiées de relativement récentes et atténuées par le fait que le recourant n'avait exercé aucun emploi en Suisse; il était d'ailleurs retourné à plusieurs reprises au Guatemala depuis son installation en Suisse; sa femme et son beau-père s'étaient aussi rendus en 2012 au Guatemala et au Salvador, où le recourant détient une maison, de sorte que la cour cantonale pouvait à l'époque retenir un risque concret de fuite (consid. 4.2). 
A juste titre, l'autorité précédente ainsi que le Ministère public s'en tiennent à ces constatations de fait établissant l'existence d'un risque de fuite, constatations que le recourant n'a pas contestées dans les procédures ultérieures. L'écoulement du temps, en particulier s'agissant de l'insertion des enfants mineurs du recourant, va certes dans le sens d'un renforcement des attaches du recourant et de sa famille avec la Suisse, mais cette circonstance à elle seule ne permet pas de revoir fondamentalement l'appréciation de la Cour de céans posée en juin 2013. L'intéressé affirme encore qu'il "serait suicidaire de prendre la fuite alors que sa condamnation a été annulée, de reconnaître ce faisant une culpabilité qu'il a toujours niée et de risquer hors de Suisse une arrestation immédiate en vue de son extradition vers le Guatemala, le mandat d'arrêt international délivré par la CICIG étant toujours en vigueur, alors que les chances de survie d'un ancien directeur de la PNC dans une prison guatémaltèque sont à peu près nulles". Cette affirmation péremptoire est insuffisante à faire admettre l'invraisemblance du risque de fuite. 
En revanche, l'intensité du risque de fuite alors retenu s'est affaiblie en regard du niveau des soupçons pesant désormais sur le recourant. A cet égard, il convient de rappeler que la gravité de l'infraction, même si elle permet souvent de présumer un danger de fuite en raison de l'importance de la peine prévisible, ne peut pas à elle seule justifier la prolongation de la détention (arrêt 1B_322/2017 du 24 août 2017 consid. 3.1 et les références). Compte tenu du degré du risque de fuite retenu en l'espèce, des mesures moins sévères que la détention sont susceptibles d'atteindre les même buts que celle-ci. 
 
5.2. A teneur de l'art. 237 al. 1 CPP, le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Cette disposition est une concrétisation du principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.) qui impose d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (ATF 141 IV 190 consid. 3.2 p. 192). L'art. 237 al. 2 CPP permet ainsi, entre autres mesures de substitution susceptibles d'entrer ici en considération, la fourniture de sûretés (let. a), la saisie des documents d'identité et autres documents officiels (let. b), l'assignation à résidence (let. c) et l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (let. d). L'art. 237 al. 3 CPP précise que, pour surveiller l'exécution de ces mesures, le tribunal peut ordonner l'utilisation d'appareils techniques qui peuvent être fixés à la personne sous surveillance.  
Dans ses conclusions devant le Tribunal fédéral, le recourant propose comme mesure de substitution le dépôt de tous ses passeports. Contrairement à ses précédentes requêtes de mise en liberté, il n'offre pas de déposer de caution, mais n'exclut pas "toute autre mesure substitution jugée utile par le Tribunal fédéral". 
Pour pallier le risque de fuite, le dépôt de toutes les pièces d'identité suisses et guatémaltèques du recourant paraît une première mesure indispensable. L'assignation à résidence ainsi que l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif constituent aussi des mesures aptes à réduire le risque de fuite ou, tout au moins, à découvrir une telle fuite et permettre une intervention rapide de la police (ATF 137 IV 122 consid. 6.2 p. 132; arrêt 1B_447/2011 du 21 septembre 2011 consid. 3.3). Dans le contexte d'une assignation à résidence, une surveillance électronique permet de contrôler l'exécution d'une telle mesure (art. 237 al. 3 CPP); d'ailleurs, la mise en oeuvre d'un tel moyen est parfois suffisante pour dissuader le prévenu d'enfreindre l'assignation à résidence; en tout état, la surveillance électronique ne saurait être écartée d'emblée au motif que les équipements techniques feraient défaut (arrêt 1B_447/2011 du 21 septembre 2011 consid. 3.3; Jeanneret/Kuhn, Précis de procédure pénale, Berne 2013, n. 15074-15077). Enfin, on ne saurait exclure pour assurer la présence du recourant à l'audience de jugement la fourniture de sûretés, dont le montant dépend de la gravité des actes reprochés au prévenu et de sa situation personnelle (art. 238 al. 2 CPP). 
 
5.3. En définitive, compte tenu du degré du risque de fuite retenu en l'espèce, des mesures moins sévères que la détention peuvent atteindre les même buts que celle-ci. En omettant d'examiner ces questions de manière approfondie, les autorités précédentes ont donc violé le principe de la proportionnalité.  
Il n'appartient cependant pas au Tribunal fédéral de prononcer, en première instance et sans autre débat, les mesures de substitution adéquates dans le cas d'espèce (arrêt 1B_237/2011 du 7 juin 2011 consid. 7.3). Il convient dès lors de renvoyer la cause à l'instance précédente pour qu'elle examine quelles mesures de substitution sont adéquates pour pallier le risque de fuite qui subsiste. Elle devra décider jusqu'à quel point ces mesures doivent être combinées entre elles pour assurer les meilleures garanties de présence du recourant aux prochains débats devant elle. Il lui appartiendra aussi de déterminer le rythme d'une éventuelle annonce auprès d'une autorité administrative. Enfin, elle devra organiser, si elle l'estime nécessaire, la mise en oeuvre d'une surveillance électronique de l'assignation à résidence qu'elle risque de prononcer. Cas échéant, une caution, fixée en fonction de la situation personnelle du recourant, assurera encore mieux sa présence à la prochaine audience de jugement. 
Pour éviter toute critique relative à la violation du principe de célérité prévalant tout particulièrement en matière de détention (art. 5 al. 2 CPP), l'instance précédente devra statuer dans de très brefs délais. 
 
6.   
Lorsque le Tribunal fédéral constate que la procédure de prolongation de la détention n'a pas satisfait aux garanties constitutionnelles ou conventionnelles en cause, il n'en résulte pas obligatoirement que le prévenu doive être immédiatement remis en liberté (ATF 116 Ia 60 consid. 3b p. 64; 115 Ia 293 consid. 5g p. 308; 114 Ia 88 consid. 5d p. 93). Une telle issue ne se justifie pas en l'espèce, dès lors que le maintien en détention reste fondé sur le risque de fuite en attendant que l'autorité compétente statue - à très brève échéance - sur des mesures de substitution à la détention. La conclusion tendant à la mise en liberté immédiate du recourant doit donc être rejetée. 
 
7.   
Il s'ensuit que le recours est admis partiellement et l'ordonnance attaquée annulée. Vu l'issue du litige, les autres griefs formulés par le recourant n'ont pas à être examinés; au demeurant, ils ne conduiraient pas à une libération immédiate du recourant. La cause est renvoyée à la Présidente de la Chambre pénale d'appel et de révision pour nouvelle décision dans le sens des considérants. 
Il n'y a pas lieu de percevoir de frais judiciaires (art. 66 al. 4 LTF). Le canton de Genève versera en revanche une indemnité de dépens au recourant, qui obtient partiellement gain de cause avec l'assistance d'avocats (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis partiellement. L'ordonnance attaquée est annulée et la cause est renvoyée à l'instance précédente afin qu'elle prononce, à bref délai, la mise en liberté du recourant moyennant les mesures de substitution qu'elle estimera utiles. 
 
2.   
La demande de mise en liberté immédiate est rejetée. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Une indemnité de 2'500 fr. est allouée au recourant à titre de dépens, à la charge du canton de Genève. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, au Ministère public et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision. 
 
 
Lausanne, le 20 septembre 2017 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Merkli 
 
La Greffière : Tornay Schaller