Wichtiger Hinweis:
Diese Website wird in älteren Versionen von Netscape ohne graphische Elemente dargestellt. Die Funktionalität der Website ist aber trotzdem gewährleistet. Wenn Sie diese Website regelmässig benutzen, empfehlen wir Ihnen, auf Ihrem Computer einen aktuellen Browser zu installieren.
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
7B.6/2006 /frs 
 
Arrêt du 27 avril 2006 
Chambre des poursuites et des faillites 
 
Composition 
Mme et MM. les Juges Hohl, Présidente, 
Meyer et Marazzi. 
Greffier: M. Fellay. 
 
Parties 
X.________ SA, 
recourante, représentée par Me Rémy Wyler, avocat, 
 
contre 
 
Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, en qualité d'autorité supérieure de surveillance, route du Signal 8, 1014 Lausanne. 
 
Objet 
concordat par abandon d'actif 
 
recours LP contre l'arrêt de la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud, en qualité d'autorité supérieure de surveillance, du 30 décembre 2005. 
 
Faits: 
A. 
A.a Le 9 avril 2002, la société A.________ SA a proposé à ses créanciers un concordat par abandon d'actif au sens des art. 317 ss LP, contenant notamment les dispositions suivantes: 
 
"I. [...] la débitrice confère à ses créanciers le droit de disposer de tous ses biens avec effet au jour de l'homologation définitive du concordat. 
II. [...] les créanciers renoncent définitivement à la part de leurs créances (en capital, intérêts et frais) qui ne serait pas couverte par le produit de la liquidation des biens de la débitrice. 
[...] 
V. [...] 
b. Les dettes de la débitrice deviennent exigibles au jour de l'octroi du sursis provisoire (8 mars 2001), à l'exception toutefois de celles qui sont garanties par gages sur les immeubles de la débitrice. Les créanciers peuvent faire valoir outre le capital, l'intérêt courant jusqu'au 8 mars 2001 et les frais [...] 
c) Le cours des intérêts s'arrête à l'égard de la débitrice à la date d'octroi du sursis concordataire provisoire (8 mars 2001). Les intérêts des créances garanties par gages continuent cependant à courir jusqu'à la réalisation dans la mesure où le produit du gage dépasse le montant de la créance et des intérêts échus au 8 mars 2001. 
[...] 
g. Les créances postposées ou subordonnées feront l'objet d'une collocation en quatrième classe conformément aux dispositions contractuelles qui les régissent." 
 
Le 2 mai 2002, X.________ SA a adhéré sans condition au concordat. 
 
Par jugement du 12 juin 2002, le Président du Tribunal d'arrondissement de Lausanne a homologué le concordat. Il a retenu en particulier que, selon l'appréciation du commissaire au sursis et vu l'état des prêts subordonnés d'un total de 327'526'500 fr., l'insuffisance de couverture des passifs s'élevait, dans un "scénario optimiste", à 34'277'000 fr. et, dans un "scénario pessimiste", à 71'428'000 fr.; le dividende estimé pour les créanciers de troisième classe était, respectivement, de 90 % et de 80,5 %, et les prêts subordonnés ne faisaient l'objet d'aucun dividende. 
A.b Dans le cadre de la procédure concordataire, X.________ SA a été colloquée comme créancière gagiste pour un montant de 1'500'000 fr. et, en outre, en troisième classe pour deux montants, respectivement de 98'261'203 fr. 28 et de 742'500 fr., correspondant à ses créances envers la débitrice en capital et intérêts jusqu'à la date d'octroi du sursis provisoire, soit le 8 mars 2001, à l'exclusion des intérêts échus depuis cette date. 
 
Quant aux créances de quatrième classe, l'état de collocation faisait état de créances "postposées (hors 3ème classe)", colloquées pour un montant total de 272'731'500 fr., dont les titulaires étaient H.________ SA, N.________ SA et O.________ AG. 
B. 
B.a Par lettre du 29 octobre 2004, X.________ SA s'est adressée au liquidateur notamment en ces termes: 
 
"L'évolution favorable de la liquidation du concordat [...] laissera très certainement apparaître un excédent d'actifs après paiement en capital de l'ensemble des créances colloquées en 3ème classe. 
En conséquence, nous produisons par la présente l'accessoire de nos créances en capital admises à l'état de collocation en 3ème classe, soit 
CHF 15'904'150.06 s.e. & o. 
représentant les intérêts au taux légal de 5 % ayant couru du 8 mars 2001 au 31 octobre 2004 sur nos créances en 3ème classe. 
[...] 
Nous sommes conscients que vous ne pourrez couvrir nos intérêts qu'après avoir remboursé en capital l'ensemble des créances colloquées en 3ème classe. 
Notre prétention à obtenir le paiement des intérêts se fonde notamment sur une décision du Tribunal fédéral publiée aux ATF 102 II p. 40 ss. [prévoyant que] lorsque dans la faillite ou le concordat par abandon d'actif, la réalisation fait apparaître un excédent d'actif, cet excédent doit servir à la couverture des intérêts que les créanciers auraient pu réclamer, en l'absence de faillite pour la période postérieure à l'ouverture, en l'absence de concordat pour la période qui a suivi l'octroi du sursis (intérêts contractuels, intérêts moratoires dès l'échéance ordinaire des créances) ...". 
 
Le 1er décembre 2004, le liquidateur a adressé à X.________ SA la lettre suivante: 
 
"[...] Je me réfère à votre lettre signature du 29 octobre 2004 par laquelle vous produisez une prétention nouvelle en paiement des intérêts, sur vos différentes productions en 3ème classe, pour la période du 8 mars 2001 au complet paiement desdites productions. 
Votre production étant tardive au sens de l'art. 251 al. 1 LP, je vous impartis un délai au 13 décembre 2004 pour effectuer une avance de frais de CHF 17'000.- destinée à couvrir les frais occasionnés par votre production tardive, en application de l'art. 251 al. 2 LP
[...] 
Faute de paiement dans le délai imparti, la production sera considérée comme retirée. [...]" 
B.b X.________ SA a saisi le Président du Tribunal d'arrondissement, en sa qualité d'autorité inférieure de surveillance, d'une plainte tendant à ce qu'il soit constaté que son courrier du 29 octobre 2004 ne constituait pas une production tardive, à ce que la lettre du liquidateur du 1er décembre 2004 soit annulée et à ce que celui-ci soit invité à établir un tableau de distribution tenant compte des prétentions d'intérêts dès le 8 mars 2001 relatives aux créances colloquées en troisième classe, prioritairement à tout versement sur les créances portées à l'état de collocation en tant que "créances postposées-hors troisième classe". 
 
Par prononcé du 22 juin 2005, l'autorité inférieure de surveillance a rejeté la plainte, en bref pour les motifs suivants: tous les créanciers admis à l'état de collocation n'avaient pas été désintéressés, puisqu'il restait les créanciers postposés, de sorte qu'on ne pouvait encore parler d'excédent d'actifs et que la démarche de la plaignante tendant à ce que l'excédent soit affecté au paiement des intérêts sur sa créance courus depuis l'octroi du sursis concordataire était prématurée. 
 
Saisie d'un recours de la plaignante contre cette décision, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois l'a rejeté et a maintenu le prononcé entrepris par arrêt du 30 décembre 2005. 
C. 
X.________ SA a recouru le 11 janvier 2006 à la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral en reprenant, à titre principal, les conclusions de sa plainte et concluant, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'autorité cantonale supérieure de surveillance pour nouvelle décision dans le sens des considérants, avec suite de frais et dépens. Elle reproche en substance à la cour cantonale d'avoir fait une interprétation arbitraire, ou à tout le moins erronée, du concordat et d'avoir retenu à tort que son courrier du 29 octobre 2004 devait être considéré comme une nouvelle production. 
H.________ SA conclut au rejet du recours avec suite de frais et dépens. La commission des créanciers et le liquidateur de A.________ SA en liquidation concordataire proposent également le rejet du recours, avec suite de dépens. 
 
L'effet suspensif a été attribué au recours par ordonnance présidentielle du 16 janvier 2006. 
 
La Chambre considère en droit: 
1. 
La recourante s'étant notamment fondée sur l'ATF 129 III 559, la cour cantonale a tout d'abord rappelé le contenu de cet arrêt selon lequel, en résumé, un excédent de liquidation après couverture des créances colloquées sert au paiement des intérêts que les créanciers auraient pu exiger pour la période postérieure à l'octroi du sursis si le concordat n'avait pas été conclu. Elle a toutefois relevé une différence essentielle entre cet arrêt et la présente espèce, à savoir que, dans ledit arrêt, l'existence d'un excédent de liquidation était une donnée non contestée, seule étant litigieuse l'affectation de cet excédent, alors qu'en la présente espèce, la question de l'excédent constitue le coeur du litige en raison, notamment, de la présence d'une quatrième classe de créances colloquées. 
 
A ce propos, la cour cantonale a constaté que, selon le rapport d'activité du liquidateur du 24 février 2005, toutes les créances de troisième classe ayant été payées ou fait l'objet d'une consignation, ainsi que les créances garanties par gages, il restait des actifs disponibles (actifs libres) d'un montant de 12'572'000 fr., soit un montant inférieur à la somme des prêts subordonnés (créances postposées) s'élevant à 272'731'000 fr. La question était dès lors de savoir si les actifs libres à ce stade devaient permettre prioritairement le paiement des intérêts sur les créances de troisième classe pour la période postérieure à l'octroi du sursis ou être affectés au paiement des créances de quatrième classe ou, en d'autres termes, si la prétention des créanciers aux intérêts au-delà du 8 mars 2001 devait être colloquée ou prise en compte avant les créances postposées. 
 
L'interprétation du concordat à laquelle la cour cantonale a procédé pour résoudre cette question l'a conduite à considérer que la collocation de créances en quatrième classe avait pour effet que ces créances devaient être payées après celles de troisième classe en capital, intérêts courus jusqu'au 8 mars 2001 et frais, mais avant les créances d'intérêts courus dès le 8 mars 2001. Partant, l'interprétation du concordat excluait d'admettre, à ce stade, l'affectation des actifs libres à des intérêts dus sur les créances de troisième classe sans modification préalable de l'état de collocation. Admettre le contraire revenait à priver de toute portée la collocation des créances en quatrième classe ou à déroger à l'ordre de désintéressement des créances résultant du concordat. Si, alors que le dividende prévu permettait en principe de couvrir très largement les créances de troisième classe, les parties avaient voulu affecter d'éventuels actifs libres aux intérêts de ces créances, elles auraient pu l'indiquer; or, elles n'avaient pas inclus une telle disposition dans le concordat, mais avaient au contraire prévu de colloquer des créances en quatrième classe. Les actifs libres à ce stade devaient par conséquent être affectés en priorité au paiement de ces créances de quatrième classe, sous réserve d'une éventuelle modification de l'état de collocation, à laquelle le liquidateur ne pouvait pas procéder d'office dans le cadre de la distribution et qui devait être demandée par la voie de la production tardive. 
2. 
2.1 Au stade de la distribution des deniers (art. 261 ss LP), soit lorsque l'état de collocation est définitif (art. 261 al. 1 LP), l'autorité de surveillance ne peut, sur plainte, qu'examiner si le tableau de distribution correspond à l'état de collocation (ATF 102 III 155 consid. 2 p. 159; P.-R. Gilliéron, Poursuite pour dettes, faillite et concordat, 4e éd. 2005, n. 2075), dans le cas particulier si la réponse du liquidateur à la créancière recourante était conforme à l'état de collocation. 
2.2 L'état de collocation ici en cause a été déposé en novembre 2002 et août 2003 (complément) et il est en force. Le liquidateur doit dès lors établir le tableau de distribution sur la base dudit état de collocation. En l'occurrence, il a indiqué dans sa réponse à la recourante comment il avait l'intention d'établir ce tableau. 
L'état de collocation comprenant des créances colloquées en 3e classe avec intérêts jusqu'au 8 mars 2001, soit pour des montants précis, et des créances "hors 3e classe" colloquées, selon le concordat, en une "4e classe" (ch. V let. g), le liquidateur a considéré qu'il fallait que les créanciers postposés de la 4e classe soient payés avant que l'on puisse parler d'un excédent. En signifiant ainsi à la recourante, dans sa réponse, qu'il serait ainsi procédé, le liquidateur ne s'est nullement écarté de l'état de collocation et a donc agi correctement. 
2.3 Lorsqu'elle demande que l"excédent" après paiement de la 3e classe serve à payer les intérêts des créances de cette classe courus après le 8 mars 2001 (non colloqués) et donc que les créanciers de 3e classe soient entièrement payés avant les créanciers postposés, la recourante soulève un problème de fond, à savoir celui du rapport entre les différents créanciers, problème qui doit être liquidé au stade, non pas de la distribution des deniers, mais de la collocation et qui relève de la compétence du juge. C'est donc à juste titre que le liquidateur a traité la demande en question comme une production nouvelle et tardive, donnant lieu au paiement d'une avance de frais en vertu de l'art. 251 al. 2 LP, car elle revenait à modifier l'état de collocation. 
 
Contre la décision acceptant ou refusant de colloquer la créance d'intérêts litigieuse, la recourante pourra ouvrir action en contestation de l'état de collocation devant le juge et c'est à ce dernier qu'il appartiendra, le cas échéant, d'interpréter le concordat, notamment son ch. V let. g, pour savoir si la recourante a accepté que ses intérêts postérieurs au 8 mars 2001 soient payés après paiement des créances postposées colloquées en 4e classe, respectivement si les conventions de postposition ont prévu que les créances postposées seraient payées après désintéressement total des créanciers des trois premières classes. 
3. 
Il résulte de ce qui précède que l'autorité cantonale supérieure de surveillance a, à tort, tranché une question de fond. Dans la mesure, toutefois, où elle maintient le prononcé de l'autorité cantonale inférieure de surveillance qui a rejeté la plainte et que, partant, la décision du liquidateur de traiter la demande de la recourante comme une production tardive selon l'art. 251 LP est ainsi confirmée, la Chambre de céans peut se limiter à rejeter le recours. 
 
Conformément aux art. 20a al. 1 LP, 61 al. 2 let. a et 62 al. 2 OELP, il n'y a pas lieu de percevoir d'émolument de justice, ni d'allouer des dépens. 
Par ces motifs, la Chambre prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la recourante, au liquidateur de A.________ SA en liquidation concordataire, à Me François Logoz, avocat, pour la Commission des créanciers de A.________ SA en liquidation concordataire, à l'Office des faillites de Lausanne et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
Lausanne, le 27 avril 2006 
Au nom de la Chambre des poursuites et des faillites 
du Tribunal fédéral suisse 
La présidente: Le greffier: