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Urteilskopf

126 III 230


40. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 28 mars 2000 dans la cause X. S.A. et Y. S.A. contre République et Canton du Jura (procès direct)

Regeste

Werkvertrag; mangelhafte Erstellung des Werks während der Ausführung (Art. 366 Abs. 2 OR).
Das Recht auf Ersatzvornahme schliesst weitere Rechtsbehelfe nicht aus. Sind die Voraussetzungen für die Anwendung von Art. 366 Abs. 2 OR erfüllt, stehen dem Besteller auch die Wahlrechte gemäss Art. 107 Abs. 2 OR zu. Wie im vorliegenden Fall kann er daher auch auf die versprochene Leistung verzichten und Schadenersatz verlangen.

Sachverhalt ab Seite 230

BGE 126 III 230 S. 230

A.- Les 12 juin et 3 juillet 1995, la République et Canton du Jura a conclu avec les sociétés X. S.A. et Y. S.A., formant un consortium, deux contrats d'entreprise ayant pour objet l'exécution de divers travaux, dont la fourniture et la pose de chemins de câbles destinés aux galeries techniques dans les tunnels du Mont-Terri et du Mont-Russelin, le long de la Transjuranne.
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Par la suite, un différend a surgi entre les parties quant à la qualité du zingage et à l'épaisseur des chemins de câbles.
Le 31 octobre 1995, le maître de l'ouvrage a indiqué au consortium que, comme celui-ci persistait à ne pas fournir la qualité et le type de chemins de câbles adjugés, il avait décidé de rompre les contrats conclus.
Les parties ont encore tenté, mais en vain, de parvenir à une solution.
Le 11 mars 1996, la République et Canton du Jura a envoyé au mandataire du consortium une lettre recommandée comprenant notamment les passages suivants:
"... Nous pouvons donc constater sans équivoque, après vous avoir fixé à plusieurs reprises un délai convenable pour nous garantir une exécution des travaux conforme aux conventions conclues, que vous entendez poursuivre les travaux au mépris de vos engagements contractuels.
Après avoir soumis ce dossier sur les plans technique et juridique à l'Office fédéral des routes, nous vous notifions formellement que nous résilions les contrats conclus les 12 juin/3 juillet 1995 ..., conformément à l'article 366 alinéa 2 CO, dès lors qu'il est manifeste que le consortium entend poursuivre l'exécution du contrat d'une manière qui est à la fois défectueuse et contraire aux conventions conclues.
Par ailleurs, comme le prévoit également l'article 366 alinéa 2 CO, les travaux seront confiés à des tiers aux frais et risques de vos clients. L'Etat jurassien fera également valoir les dommages-intérêts occasionnés par l'attitude du consortium. Les services en charge de ce dossier vous adresseront ultérieurement le montant détaillé de ces prétentions."

B.- Par mémoire-demande du 29 mai 1996, X. S.A. et Y. S.A. (ci-après: les demanderesses) ont assigné la République et Canton du Jura directement devant le Tribunal fédéral. Elles font valoir que la défenderesse n'avait pas le droit de se départir des contrats d'entreprise en cause sans les indemniser complètement et réclament, de ce fait, le paiement de 502 811 fr.75, avec intérêts à 5% dès l'introduction de l'action, à titre d'indemnité au sens de l'art. 377 CO, frais et dépens en sus.
Dans sa réponse datée du 4 octobre 1996, la défenderesse a confirmé et développé le point de vue qu'elle avait soutenu dans sa lettre du 11 mars 1996, précitée, concluant dès lors au déboutement des demanderesses avec suite de frais et dépens. A titre reconventionnel, elle a réclamé le paiement de dommages-intérêts à concurrence de 181 641 fr.30, plus intérêts à 5% dès le dépôt de sa demande, à compenser avec la somme de 59 523 fr.30 correspondant aux travaux exécutés par les demanderesses et admis par elle.
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Le 27 octobre 1999, lors d'une audience d'administration des preuves, il a été convenu que le Tribunal fédéral statuerait d'abord sur la validité de la résiliation litigieuse des contrats, l'examen de la question du dommage étant reporté à une phase ultérieure de la procédure. Les parties ont renoncé à plaider sur ce point et convenu de présenter un mémoire final, ce qu'elles ont fait.
Par jugement incident du 28 mars 2000, le Tribunal fédéral a constaté que les conditions d'application de l'art. 366 al. 2 CO étaient réalisées en l'espèce, que la défenderesse avait valablement renoncé aux prestations promises par les demanderesses et qu'elle était en droit de réclamer à ces dernières des dommages-intérêts pour cause d'inexécution.

Erwägungen

Extrait des considérants:

7. a) L'art. 366 al. 2 CO prévoit que, si l'entrepreneur ne s'exécute pas dans le délai fixé, les réparations ou la continuation des travaux seront confiées à un tiers, aux frais et risques de l'entrepreneur. Cette disposition, à l'instar d'autres règles particulières (cf. les art. 259b let. b, 288 al. 1 et 392 al. 3 CO), se rattache à l'art. 98 al. 1 CO qui régit de façon générale l'exécution par substitution (ou exécution in rem; "Ersatzvornahme"), dans les rapports contractuels relevant du droit privé, en cas de violation d'une obligation de faire (GAUCH, Le contrat d'entreprise [adaptation française par Benoît Carron], n. 870 et les auteurs cités). C'est l'art. 1144 du Code civil français (CCF) qui a servi de modèle au législateur fédéral à cet égard (BÜHLER, Commentaire zurichois, n. 60 ad art. 366 CO; ZINDEL/PULVER, Commentaire bâlois, n. 45 ad art. 366 CO; GAUTSCHI, Commentaire bernois, n. 2d ad art. 366 CO; HONSELL, Schweizerisches Obligationenrecht, Besonderer Teil, 5e éd., p. 265; BUCHER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil [cité: AT], p. 332, note 19); dans sa teneur actuelle, il énonce ce qui suit: "Le créancier peut aussi, en cas d'inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l'obligation aux dépens du débiteur. Celui-ci peut être condamné à faire l'avance des sommes nécessaires." (cf. Dalloz 2000, p. 827). Cependant, contrairement à cette disposition et à la règle générale du Code des obligations, l'art. 366 al. 2 CO ne subordonne pas à une autorisation du juge le droit du maître de procéder à l'exécution par substitution. Pour que le maître soit en mesure d'empêcher une exécution défectueuse de l'ouvrage qui est prévisible avec certitude, il doit, en effet, pouvoir agir rapidement suivant
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les circonstances, sans devoir requérir au préalable une autorisation du juge (GAUCH, op. cit., n. 887; KOLLER, Commentaire bernois, n. 504 ad art. 366 CO; NIKLAUS, Das Recht auf Ersatzvornahme gemäss Art. 366 Abs. 2 OR, thèse Saint-Gall 1999, p. 46 s., n. 1.109).
aa) L'exécution par substitution, au sens de l'art. 366 al. 2 CO, suppose que le maître renonce à faire réparer l'ouvrage par l'entrepreneur ou à laisser ce dernier continuer les travaux. Cette manifestation de volonté formatrice et irrévocable, qui n'est pas soumise à l'exigence d'une forme spéciale et qui peut intervenir au moment de la fixation ou après l'expiration du délai de grâce prévu par la disposition citée, a pour effet de modifier les droits et obligations des parties relativement à la prestation de l'entrepreneur: le maître renonce définitivement à exiger de celui-ci qu'il procède lui-même à l'exécution des travaux (réparation ou achèvement de l'ouvrage) et il en confie le soin à un tiers (ou le fait lui-même) aux frais et risques de l'entrepreneur; ainsi, l'obligation de faire, qui incombait à l'origine à l'entrepreneur en vertu du contrat d'entreprise (art. 363 CO), se transforme en une obligation de payer les frais de l'exécution par substitution à laquelle viendra s'ajouter, suivant les circonstances, l'obligation de payer des dommages-intérêts (cf. art. 98 al. 1 in fine CO). Toutefois, comme l'exécution in rem n'est qu'un succédané de l'exécution convenue, l'existence du contrat d'entreprise initial n'en est pas affectée, nonobstant le changement de nature de l'obligation à exécuter par l'entrepreneur et la mise en oeuvre par le maître d'un tiers sur la base d'un second contrat d'entreprise. Le maître reste tenu de payer le prix de l'ouvrage, tel qu'il a été fixé dans le contrat d'entreprise, mais il peut exiger de l'entrepreneur qu'il lui rembourse - voire, pour une partie de la doctrine, qu'il lui avance - les frais de l'exécution par substitution ("Kostenersatz" par opposition au "Schadenersatz" ou dommages-intérêts) et, de surcroît, qu'il assume, en principe, les conséquences, non couvertes par le tiers, d'une mauvaise exécution in rem, puisque cette exécution se fait non seulement aux "frais" mais encore aux "risques" de l'entrepreneur; les deux créances réciproques pourront être éteintes par voie de compensation (pour plus de détails au sujet de l'exécution par substitution et des controverses que suscitent certaines de ses modalités, cf. parmi d'autres: GAUCH, op. cit., n. 868 ss; KOLLER, op. cit., n. 465 à 473, n. 547 ss et n. 615 ad art. 366 CO; NIKLAUS, op. cit., p. 111 ss).
bb) Il faut encore examiner si l'exécution par substitution, dont on vient de tracer les grandes lignes, revêt un caractère exclusif ou
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si le maître peut agir par une autre voie à l'encontre de l'entrepreneur lorsque les conditions d'application de l'art. 366 al. 2 CO sont réalisées.
Les avis sont partagés au sein de la doctrine. Pour GAUCH (op. cit., n. 867, 869 et 893), l'art. 366 al. 1 CO, qui confère sans conteste au maître le droit d'option prévu à l'art. 107 al. 2 CO, et l'art. 366 al. 2 CO régissent des états de fait différents. Par conséquent, le maître ne peut pas se départir du contrat s'il est en mesure de procéder à une exécution par substitution; il peut le faire, en revanche, par une application analogique de l'art. 366 al. 1 CO, si l'entrepreneur est tenu d'exécuter l'ouvrage en personne et est ainsi irremplaçable ou si, eu égard aux circonstances de l'espèce, on ne peut raisonnablement exiger du maître qu'il commette un entrepreneur de remplacement. ZINDEL/PULVER (op. cit., n. 41 ad art. 366 CO) suivent cette opinion et mentionnent d'autres exemples de situations dans lesquelles une exception peut être faite au principe posé par GAUCH. Quant à ENGEL (Contrats de droit suisse, 2e éd., p. 443 s.), il se réfère à cet auteur et n'évoque que la possibilité d'une exécution par substitution. Un autre courant doctrinal accorde au maître, les conditions d'application de l'art. 366 al. 2 CO étant remplies, le droit d'option prévu à l'art. 107 al. 2 CO (KOLLER, op. cit., n. 477 ss ad art. 366 CO; NIKLAUS, op. cit., p. 42, n. 1.98 et la note 154 où l'auteur renvoie à BÜHLER, op. cit., n. 66 ad art. 366 CO; CORBOZ, Contrat d'entreprise III/Les défauts de l'ouvrage, in FJS no 460, p. 11; BUCHER, Obligationenrecht, Besonderer Teil, 3e éd., p. 214; GAUTSCHI, op. cit., n. 7d ad art. 366 CO; HONSELL, Schweizerisches Obligationenrecht, Besonderer Teil, 5e éd., p. 265; cf. aussi DURI PALLY, Mangelfolgeschaden im Werkvertragsrecht, thèse Saint-Gall 1995, p. 24 s.; WEBER, Commentaire bernois, n. 62 ad art. 98 CO). Les tenants de cette opinion, qu'ils ne motivent d'ailleurs pas tous de la même façon, considèrent, en substance, qu'il ne se justifie pas de traiter moins bien le maître qui est confronté à un ouvrage défectueux (art. 366 al. 2 CO) que celui qui subit le retard de l'entrepreneur (art. 366 al. 1 CO).
Le Tribunal fédéral se range à l'avis de ce dernier groupe d'auteurs. L'art. 366 CO, qui sanctionne le retard dans l'exécution de l'ouvrage (al. 1) et l'exécution défectueuse de celui-ci (al. 2), envisage de manière complète l'inexécution ou la mauvaise exécution apparaissant au cours des travaux. Il n'y a pas de raison de penser que le législateur fédéral ait voulu traiter le maître moins favorablement en cas de défaut qu'en cas de retard. Aussi l'exécution par
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substitution doit-elle être conçue comme une faculté supplémentaire accordée au maître dans une situation où une action rapide s'imposera plus souvent que dans l'hypothèse d'un simple retard (KOLLER, op. cit., n. 477 ad art. 366 CO, p. 326). On peut également aborder le problème sous un autre angle et soutenir qu'à l'instar de l'entrepreneur qui ne commence pas les travaux à temps ou en diffère indûment l'exécution, l'entrepreneur qui ne prend pas les mesures nécessaires pour parer à l'éventualité d'une exécution de l'ouvrage défectueuse ou contraire à la convention doit être traité comme un débiteur en demeure, à l'égal du premier, son obligation de remédier à cet état de choses étant incluse dans l'obligation générale d'exécuter l'ouvrage qui lui incombe. Considéré de ce point de vue, l'art. 366 al. 2 CO entrerait dans les prévisions de l'art. 366 al. 1 CO (dans ce sens, cf. NIKLAUS, ibid.). Peu importe, en définitive, le fondement théorique de la solution retenue, dès lors que celle-ci n'est pas exclue par le texte légal et qu'elle vise à traiter de la même manière deux situations comparables. Il faut donc poser que le maître qui invoque l'art. 366 al. 2 CO et qui ne souhaite pas procéder à l'exécution par substitution dispose, comme en cas de retard (art. 366 al. 1 CO), des facultés offertes au créancier par l'art. 107 al. 2 CO. Les auteurs qui n'admettent pas cette possibilité sont du reste obligés de réserver de nombreuses exceptions à la règle de l'exécution par substitution ou la prise en considération des circonstances particulières, ce qui n'est certes pas de nature à favoriser la sécurité du droit. Au demeurant, la solution retenue est celle qui s'harmonise le mieux avec les règles générales sur la demeure et, singulièrement, avec l'art. 98 al. 1 CO, puisqu'il est communément admis que le créancier d'une obligation de faire peut se prévaloir des art. 107 ss CO plutôt que de solliciter du juge l'autorisation d'exécuter l'obligation aux frais du débiteur (WEBER, op. cit., n. 91 ad art. 98 CO; WIEGAND, Commentaire bâlois, n. 8 ad art. 98 CO; BUCHER, AT, p. 332, ch. 5 et note 19; VON TUHR/ESCHER, Allgemeiner Teil des Schweizerischen Obligationenrechts, vol. II, p. 92 in fine; GAUCH/SCHLUEP/SCHMID/REY, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, vol. II, 7e éd., n. 2590; SCHWENZER, Schweizerisches Obligationenrecht, Allgemeiner Teil, p. 354, n. 61.07; GUHL/MERZ/KOLLER, Das Schweizerische Obligationenrecht, 8e éd., p. 38).
Le maître peut donc choisir, parmi les trois possibilités que lui offre l'art. 107 al. 2 CO, celle de renoncer à la prestation promise et de réclamer des dommages-intérêts positifs à l'entrepreneur qui a commis une faute (CORBOZ, ibid.; KOLLER, op. cit., n. 477 ad art. 366
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CO; GAUTSCHI, ibid.). S'il le fait, il est tenu d'accepter les parties de l'ouvrage déjà exécutées, pour autant qu'elles soient utilisables, et d'en payer le prix (cf. GAUCH, op. cit., n. 662). Son dommage équivaut à l'intérêt qu'il avait à l'exécution régulière de l'obligation de l'entrepreneur (NIKLAUS, op. cit., p. 163, n. 4.22). Pour en juger, il convient de se demander quelle eût été sa situation patrimoniale si l'entrepreneur avait continué les travaux et lui avait livré le solde de l'ouvrage en conformité avec les clauses de leur contrat (sur la notion d'intérêt positif, cf. ENGEL, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p. 717 s.). Le maître pourra ainsi porter en compte, entre autres postes de son dommage, tous les frais se rapportant à l'achèvement de l'ouvrage ainsi que le préjudice découlant d'un éventuel retard dans la livraison de celui-ci ("Verspätungsschaden"; cf. GAUCH, op. cit., n. 665), pour autant que ce retard soit en relation de cause à effet avec le comportement fautif de l'entrepreneur ayant conduit le maître à renoncer à la prestation promise; mais il devra imputer sur sa créance de dommages-intérêts, selon la théorie de la différence, ce qu'il aurait dû payer à l'entrepreneur si ce dernier avait exécuté régulièrement le solde des travaux et lui avait livré à temps l'ouvrage achevé. Une fois établi, de manière concrète ou abstraite (cf. KOLLER, op. cit., n. 605 ss ad art. 366 CO), le dommage du maître, il conviendra de fixer l'étendue de la réparation en fonction des critères mentionnés aux art. 43 et 44 CO, dispositions applicables en matière contractuelle par renvoi de l'art. 99 al 3 CO.
Il va de soi que le maître qui renonce à la prestation promise et réclame des dommages-intérêts positifs (art. 107 al. 2 deuxième hypothèse CO) ne saurait jouer sur les deux tableaux et profiter, de surcroît, des avantages qu'aurait pu lui procurer l'exécution par substitution (sur les incidences, positives et négatives, liées au choix entre ces deux partis, cf. KOLLER, op. cit., n. 603 ss ad art. 366 CO; NIKLAUS, op. cit., p. 164 ss, n. 4.24 ss). Ainsi, le maître n'aura certes pas à rendre compte à l'entrepreneur de l'utilisation des fonds qu'il aura perçus au titre des dommages-intérêts. En revanche, il ne pourra pas exiger de l'entrepreneur qu'il lui avance les frais à payer pour l'achèvement de l'ouvrage - à supposer que l'on admette le principe d'une telle obligation dans le cadre de l'exécution par substitution, question qui peut rester ici indécise -, il devra s'en prendre à lui-même si, procédant à un calcul abstrait, il réclame un montant qui s'avère insuffisant pour payer le solde de l'ouvrage et, enfin, comme l'exécution par le tiers n'intervient plus, dans cette hypothèse, "aux risques" de l'entrepreneur initial, il ne pourra pas se
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retourner contre celui-ci, par exemple, en cas de mauvaise exécution du solde des travaux par le tiers et d'insolvabilité de ce dernier.
cc) Savoir si le maître a opté pour l'exécution par substitution ou pour la renonciation à la prestation promise et l'octroi de dommages-intérêts positifs est une question d'interprétation de la manifestation de volonté y relative. Pour la résoudre, il faut appliquer les règles ordinaires touchant l'interprétation des déclarations de volonté, notamment le principe de la confiance, et considérer, en particulier, les conclusions des parties ainsi que le type de dommage réclamé (cf., mutatis mutandis, NIKLAUS, op. cit., p. 82, n. 2.61 et WEBER, op. cit., n. 119 ad art. 107 CO).
b) La lettre précitée du 11 mars 1996, par laquelle la défenderesse a renoncé à la collaboration des demanderesses, manque de clarté. En effet, si, dans un premier temps, le maître y manifeste sa volonté de "résilier" les contrats d'entreprise, il y indique ensuite que les travaux seront confiés à des tiers aux frais et risques des demanderesses, comme le prévoit l'art. 366 al. 2 CO, ajoutant qu'il "fera également valoir les dommages-intérêts occasionnés par l'attitude" des entreprises demanderesses. Or, on a souligné plus haut que le maître ne peut pas à la fois renoncer à la prestation promise, conformément à l'art. 107 al. 2 deuxième hypothèse CO, et procéder à l'exécution du solde des travaux aux frais et risques de l'entrepreneur. Il convient donc de rechercher, par voie d'interprétation, quel est le choix qui a été fait, en définitive, par la défenderesse.
Les circonstances ayant entouré la manifestation de volonté litigieuse plaident en faveur de la thèse de la renonciation à la prestation promise, assortie d'une demande de dommages-intérêts positifs. De fait, la volonté de la défenderesse de ne plus avoir affaire aux demanderesses, de quelque manière que ce soit, ressort nettement de la lettre adressée le 31 octobre 1995 par la première aux secondes, dans laquelle le maître déclare notamment ceci: "... nous décidons de rompre les contrats ... avec effet immédiat". Considérée à la lumière de ce courrier, la lettre du 11 mars 1996 n'apparaît, dès lors, que comme la confirmation, après l'échec des dernières tentatives d'arrangement, de la volonté de la défenderesse, déjà manifestée antérieurement, de renoncer à l'exécution et de réclamer aux demanderesses des dommages-intérêts pour cause d'inexécution.
Il ressort du comportement ultérieur des parties qu'elles ont toutes deux attribué une telle signification à la manifestation de volonté en question. On notera, à ce propos, que ce sont les entreprises demanderesses, et non le maître, qui ont ouvert action en premier lieu en
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fondant leurs prétentions sur l'art. 377 CO, disposition régissant la "résiliation par le maître ..." selon sa note marginale. Quant à la défenderesse, elle déclare expressément, dans son mémoire de réponse, qu'elle entend compenser la créance des demanderesses pour les travaux exécutés avec "son propre dommage résultant de l'inexécution du contrat" et qu'elle réclame des "dommages et intérêts". Elle n'a du reste pas invité les demanderesses à avancer les frais afférents au solde des travaux et n'a pas non plus réservé un règlement de comptes après l'achèvement de ceux-ci. Enfin, lors de la séance du 27 octobre 1999, les parties ont chargé le Tribunal fédéral de statuer d'abord sur la validité de la "résiliation" litigieuse.
Force est d'admettre, dans ces conditions, que la défenderesse a renoncé purement et simplement aux prestations promises par les demanderesses, qu'elle l'a fait valablement au regard de l'art. 366 CO et qu'elle est dès lors fondée à réclamer à ces dernières des dommages-intérêts pour cause d'inexécution (art. 107 al. 2 deuxième hypothèse CO).

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Erwägungen 7

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Artikel: Art. 366 Abs. 2 OR, Art. 107 Abs. 2 OR

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