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Urteilskopf

129 II 484


48. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause X. et Y. contre Commission fédérale des banques (recours de droit administratif)
2A.136/2003 du 26 août 2003

Regeste

Art. 38 Abs. 2 BEHG; Ersuchen um Amtshilfe durch die französische Commission des opérations de bourse (COB; börsenrechtliche Aufsichtsbehörde); Erfordernis der Vertraulichkeit; Öffentlichkeit der Administrativuntersuchung (in Frankreich und den Vereinigten Staaten); Grundsatz der Verhältnismässigkeit.
Die Amtshilfe kann nicht allein mit der Begründung abgelehnt werden, die COB habe die Möglichkeit, auf ihrer Internetseite einen im Anschluss an ein streitiges Verfahren ergangenen Entscheid zu veröffentlichen, mit dem eine Sanktion finanzieller Art gegen eine Person ausgesprochen wird, die gegen die Regelungen über die Finanzmärkte verstossen hat.
Die Amtshilfe ist hingegen ausgeschlossen, wenn die persönlichen Daten einer Person, die lediglich in eine Administrativuntersuchung involviert ist, der Öffentlichkeit nach dem Recht des ersuchenden Staates sofort oder während des laufenden Verfahrens und vor Ergehen eines Entscheids zugänglich sind (unter Vorbehalt des in BGE 128 II 407 ff. vorgesehenen Falles, Ersuchen um gleichzeitige Übermittlung der Informationen an ausländische Straf[verfolgungs]behörden; E. 2 und 3).
Grundsatz der Verhältnismässigkeit. Hinreichende Anzeichen für mögliche Unregelmässigkeiten auf dem Markt im interessierenden Zeitraum (E. 4).

Sachverhalt ab Seite 485

BGE 129 II 484 S. 485

A.- La Compagnie Européenne de Casinos (CEC) est l'une des plus importantes sociétés françaises dans la gestion du jeu de hasard en Europe. Le 17 décembre 2001, la cotation des titres CEC a été suspendue à la suite de l'annonce faite par la société Accor Casinos de lancer un projet d'offre publique d'achat amicale sur la totalité des titres CEC au prix de 52 EUR, ce qui représentait une prime de 36% par rapport à la moyenne des cours des trois derniers mois. La cotation des titres CEC a été reprise le 28 décembre 2001 sur une nette hausse du cours (53,15 EUR), soit à un prix supérieur à celui proposé par Accor Casinos, et ce dans un volume inhabituel de 298'013 titres échangés. A lui seul, le Groupe Partouche, qui est le numéro un français des casinos, a acquis 254'124 actions CEC pour
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le prix de 53,09 EUR l'unité. L'offre publique d'achat de la société Accor Casinos a formellement débuté le 10 janvier 2002. Durant tout le mois de janvier, le titre CEC a évolué au-dessus du prix de l'offre, pour atteindre 57 EUR le 17 janvier 2002. Le 28 janvier 2002, le cours de l'action CEC a clôturé à 59 EUR avec 1'191'922 titres échangés, représentant 30.5% du capital de la société CEC. Le même jour, le Groupe Partouche, qui était l'acquéreur de ces derniers titres, a déposé un projet d'offre publique d'achat concurrente en proposant 59 EUR par action. La cotation des titres CEC a de nouveau été suspendue. Le 6 février 2002, la société Accor Casinos a surenchéri et offert 65 EUR par action. Lors de la reprise de la cotation, le 15 février 2002, le cours a clôturé au-dessus de ce prix, soit 66 EUR. Le 26 février 2002, le Groupe Partouche a encore acquis 696'561 titres CEC au cours de 66,50 EUR, portant ainsi sa participation dans le capital de la société CEC à 54.3%, ce qui a entraîné une surenchère automatique par le Groupe Partouche au prix de 66,50 EUR. Le 5 mars 2002, Accor Casinos a déclaré renoncer à son offre publique d'achat sur le capital de la société CEC.
La Commission française des opérations de bourse (ci-après: la COB) a ouvert une enquête afin de s'assurer que les transactions sur le titre CEC n'ont pas été opérées en violation des dispositions légales et réglementaires réprimant notamment l'usage d'une information privilégiée d'une part et que la réglementation en matière d'offre publique a été respectée d'autre part.

B.- Le 5 juillet 2002, la COB a requis l'assistance administrative de la Commission fédérale des banques (ci-après: la Commission fédérale) afin d'obtenir des informations notamment sur l'identité de la personne ayant acquis le 28 décembre 2001, le cas échéant revendu, 10'000 titres CEC par l'intermédiaire de la banque A., à Genève.
Le 17 juillet 2002, A. a indiqué à la Commission fédérale que, sur ordre de son client X., domicilié à Paris, elle avait acquis le 28 décembre 2001 10'000 actions au cours de 53,97 EUR, titres qu'elle avait revendus le 11 mars 2002 au cours de 66,50 EUR, d'où un bénéfice net de 117'409,45 EUR. Le 24 octobre 2002, la banque a précisé que, d'après les explications fournies par son client, celui-ci aurait agi en fait sur instructions de son cousin Y., domicilié aux Etats-Unis, qui serait le véritable ayant droit économique des avoirs du compte bancaire.

C.- Le 20 février 2003, la Commission fédérale a décidé d'accorder l'entraide administrative internationale à la COB et de lui
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transmettre les informations et les documents reçus de A., tout en rappelant expressément que ceux-ci ne devaient être utilisés qu'à des fins de surveillance directe des bourses et du commerce des valeurs mobilières. De plus, en application de l'art. 38 al. 2 let. c de la loi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières (LBVM; RS 954.1), leur transmission à des autorités tierces, y compris pénales, ne pouvait se faire qu'avec son assentiment préalable, la COB devant requérir le consentement de la Commission fédérale avant une éventuelle retransmission des informations et documents.

D.- X. et Y. ont formé un recours de droit administratif.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.

Erwägungen

Extrait des considérants:

2.

2.1 En vertu de l'art. 38 al. 2 LBVM, la Commission fédérale peut, dans le cadre de l'entraide administrative, transmettre aux autorités étrangères de surveillance des bourses et du commerce des valeurs mobilières des informations et des documents liés à l'affaire, non accessibles au public, à condition que ces autorités étrangères utilisent les informations transmises exclusivement à des fins de surveillance directe des bourses et du commerce des valeurs mobilières (lettre a; principe de la spécialité), qu'elles soient liées par le secret de fonction ou le secret professionnel (lettre b; exigence de la confidentialité) et qu'elles ne retransmettent ces informations à des autorités compétentes et à des organismes ayant des fonctions de surveillance dictées par l'intérêt public qu'avec l'assentiment préalable de l'autorité de surveillance suisse ou en vertu d'une autorisation générale contenue dans un traité international (lettre c 1re phrase; principe dit du "long bras"; "Prinzip der langen Hand", qui oblige concrètement la Commission fédérale à ne pas perdre le contrôle de l'utilisation des informations après leur transmission à l'autorité étrangère de surveillance). Lorsque l'entraide judiciaire en matière pénale est exclue, aucune information ne peut être transmise à des autorités pénales; l'autorité de surveillance décide en accord avec l'Office fédéral de la justice (lettre c 2e et 3e phrases).

2.2 Le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de constater que la COB était l'autorité de surveillance des marchés financiers au sens de l'art. 38 al. 2 LBVM à laquelle l'entraide administrative pouvait être accordée (ATF 126 II 86 consid. 3b; cf. aussi ATF 127 II 142
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consid. 4b, 323 consid. 7b/aa) et que les membres et les agents de la COB étaient astreints au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils pouvaient avoir connaissance en raison de leurs fonctions, dans les conditions et sous les peines prévues par le code pénal, de sorte que l'exigence de confidentialité imposée par l'art. 38 al. 2 let. b LBVM était satisfaite (ATF 126 II 86 consid. 3c). Le Tribunal fédéral a également jugé que les déclarations de "best efforts" faites par le Président de la COB le 26 mars 1999 constituaient des garanties suffisantes pour assurer effectivement, de la part de l'autorité étrangère, le respect du principe de la spécialité et du principe dit du "long bras" (ATF 126 II 86 consid. 3b et 7; ATF 127 II 142 consid. 6c).

2.3 Les recourants ne remettent pas expressément en cause cette jurisprudence. Mais ils font valoir que le secret professionnel auquel sont soumis les agents de la COB n'est pas suffisant pour garantir le respect des principes de la confidentialité, de la spécialité et du "long bras" à partir du moment où la COB peut ordonner la publication de ses décisions sur Internet. Ils se réfèrent à cet égard à l'article L. 621-15 du Code monétaire et financier français, aux termes duquel la COB peut, après une procédure contradictoire, prononcer à l'encontre des auteurs des pratiques contraires à ses règlements des sanctions pécuniaires dont le montant doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits tirés de ces manquements (al. 1 et 2); la COB peut également "ordonner la publication de sa décision dans les journaux ou publications qu'elle désigne" (al. 4). L'article L. 621-30 du Code monétaire et financier français prévoit que les décisions de la COB peuvent faire l'objet d'un recours juridictionnel; bien que le recours ne soit pas suspensif, le premier président de la cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
Les recourants citent, à titre d'exemple, une décision de la COB publiée sur son site Internet, dans laquelle sont notamment rendus publics les noms et fonctions exacts des personnes mises en cause, le lieu de situation des banques à travers lesquelles les opérations boursières ont été effectuées, ainsi que les bénéfices réalisés. Selon eux, la COB ne serait pas en mesure, en raison de sa législation interne, de respecter l'art. 38 al. 2 LBVM exigeant notamment que les informations et les documents transmis par la Suisse ne soient pas accessibles au public. Ils soulignent que la réglementation française
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ne prévoit aucune dérogation à la publication des décisions de la COB, contrairement la législation américaine que le Tribunal fédéral n'a jugée compatible avec l'art. 38 al. 2 LBVM que dans la mesure où elle prévoit une exception au principe de la publicité de la procédure.
Les recourants ne peuvent cependant rien déduire de la jurisprudence rendue à propos de l'entraide administrative avec les Etats-Unis. Le problème à résoudre ici se pose en des termes différents.

3.

3.1 Aux Etats-Unis, les documents et informations en mains de la "Securities and Exchange Commission" (SEC) - qui est l'autorité de surveillance des marchés financiers au sens de l'art. 38 al. 2 LBVM à laquelle l'entraide administrative peut en principe être accordée - sont en règle générale immédiatement et librement accessibles au public. Les audiences devant la SEC sont en outre publiques. En particulier, dans le cadre de la procédure dite de "enforcement action", la SEC publie sur Internet des "litigation releases", par lesquelles elle annonce l'ouverture d'une procédure devant le juge civil ou le juge pénal à l'encontre d'une personne déterminée. La législation américaine prévoit certes une exception au principe de la publicité. Mais, faute de précisions données par la SEC au sujet des moyens de s'opposer concrètement à la divulgation intempestive des documents et informations à transmettre, le Tribunal fédéral a jugé que l'entraide administrative ne pouvait pas être accordée, du moins en l'état. Les déclarations (successives) de "best efforts" faites par la SEC n'ont en effet pas été considérées comme suffisamment claires et dénuées d'ambiguïté pour assurer le respect des principes dit du "long bras", de la confidentialité et de la spécialité (arrêt 2A.51/1999 du 24 novembre 1999, publié in Bulletin CFB 40/2000 p. 116 ss, consid. 3 et 4; ATF 126 II 126 consid. 6; arrêt 2A.349/2001 du 20 décembre 2001, consid. 6).
N'a ainsi pas été jugé compatible avec l'art. 38 LBVM le fait que les informations et documents recueillis par la voie de l'entraide administrative soient accessibles non seulement aux parties, mais également à un large public. Le respect des principes dit du "long bras", de la confidentialité et de la spécialité ne pourrait en effet pas être assuré si les données transmises étaient immédiatement et intégralement accessibles à une autre autorité (civile ou pénale) avant qu'une quelconque décision soit rendue (ATF 126 II 126 consid. 6c/aa p. 141; arrêt 2A.349/2001 précité, consid. 6b/cc). Car la règle de la confidentialité consacrait, dans le domaine de l'entraide administrative,
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la protection des données et la protection de la personnalité des clients quant à leurs relations et opérations commerciales. Ces informations ne devaient pas être dévoilées par l'autorité de surveillance étrangère et donc portées de fait à la connaissance des autres autorités avant la clôture de la procédure (arrêt 2A.349/2001 précité, consid. 6c).
Le Tribunal fédéral a toutefois réservé les cas où, avec l'octroi de l'entraide administrative, la retransmission des informations et documents aux autorités (de poursuite) pénales étrangères a été autorisée (art. 38 al. 2 let. c 2e et 3e phrases LBVM), ce qui n'est pas le cas en l'espèce ni dans les affaires concernant la SEC. Lorsque la Commission fédérale accorde l'entraide administrative et autorise la retransmission des informations et documents reçus par l'autorité requérante aux autorités pénales étrangères, ce sont alors les principes développés en matière d'entraide judiciaire pénale qui s'appliquent notamment quant à la portée de l'exigence de confidentialité. En pareilles circonstances, il y a lieu d'apprécier le principe de la confidentialité de manière moins stricte que lorsque seule l'entraide administrative entre en ligne de compte. En effet, la publicité de la procédure pénale - dont le degré varie selon le droit interne de chaque Etat requérant - est compatible avec l'art. 38 LBVM; elle constitue même l'un des principes des Etats de droit modernes (cf. art. 30 al. 3 Cst. et art. 6 § 1 CEDH). Le Tribunal fédéral a ainsi jugé que, lorsque les conditions étaient réunies pour autoriser la retransmission des informations aux autorités pénales avec l'entraide administrative, lesdites informations pouvaient aussi être accessibles au public dans le cadre de la procédure administrative pendante devant l'autorité de surveillance étrangère; il serait en effet contradictoire d'admettre la publicité de la procédure pénale et non celle de la procédure administrative ouverte parallèlement (ATF 128 II 407 consid. 4.3.2 et 4.3.3 p. 416 concernant une demande d'entraide présentée par l'"Ontario Securities Commission").

3.2 Lorsque l'autorité requérante demande à la Commission fédérale uniquement l'entraide administrative (sans solliciter simultanément l'autorisation de retransmettre les informations aux autorités pénales étrangères compétentes), il convient donc de distinguer nettement deux situations: a) celle où les informations et documents confidentiels sont rendus publics par l'autorité de surveillance des marchés financiers étrangère immédiatement ou en cours d'enquête, avant même qu'une quelconque décision ait été prise (comme aux Etats-Unis) et b) celle où les données transmises sont inaccessibles
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au public durant l'enquête administrative et où seule la décision infligeant une sanction administrative prise par l'autorité de surveillance au terme d'une procédure contradictoire peut être publiée (c'est le cas en France).
S'agissant de la première hypothèse, l'entraide administrative est exclue sous l'angle de l'art. 38 al. 2 LBVM. Il se justifie en effet de ne pas divulguer au cours de l'enquête administrative les données sensibles sur un client qui est simplement mis en cause dans une affaire, mais dont il n'est pas légalement établi qu'il a enfreint la réglementation sur les marchés financiers. L'art. 38 al. 2 LBVM tend à protéger la sphère privée de l'investisseur qui n'a rien à se reprocher; une telle protection vaut pour toute la durée de l'enquête administrative. Autrement dit, le principe de la confidentialité consacré par l'art. 38 al. 2 LBVM doit s'appliquer au cours de l'enquête administrative, sous réserve des cas où l'entraide judiciaire pénale est accordée dans le cadre de l'entraide administrative (ATF 128 II 407 ss).
En ce qui concerne la seconde hypothèse, l'entraide administrative peut en principe être accordée. Lorsqu'une violation des règles sur les marchés financiers a été dûment constatée par l'autorité de surveillance étrangère à l'issue d'une procédure contradictoire, la publication de la décision infligeant une sanction pécuniaire est alors admissible sous l'angle de l'art. 38 al. 2 LBVM, même si les conditions pour accorder la retransmission des données aux autorités pénales ne sont pas réalisées. Il ne se justifie plus de protéger de manière absolue les personnes dont il est établi qu'elles ont commis des manquements à la législation en matière de marchés financiers. Le principe de la confidentialité ne s'applique donc pas de manière absolue lorsque la procédure administrative est terminée et qu'une sanction administrative a été prononcée à l'encontre d'un investisseur peu scrupuleux.
En résumé, si la publicité de l'enquête administrative est incompatible avec l'art. 38 al. 2 LBVM (sous réserve du cas prévu aux ATF 128 II 407 ss), la publicité de la sanction pécuniaire prise à l'issue d'une procédure administrative contradictoire est en revanche normalement admissible.

3.3 En l'occurrence, il n'y a dès lors pas lieu de refuser l'entraide administrative pour le seul motif que la COB a la possibilité de publier la décision infligeant des sanctions pécuniaires après la clôture de la procédure administrative. D'autant moins que le droit interne français offre à la personne concernée suffisamment de garanties de procédure pour défendre ses droits: la décision de la COB peut en
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effet faire l'objet d'un recours juridictionnel et le premier président de la cour d'appel de Paris peut ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de la décision si celle-ci est susceptible d'entraîner des conséquences manifestement excessives (art. L. 621-30 du Code monétaire et financier français).
Cela dit, il ne faut pas perdre de vue qu'en publiant les motifs de sa décision, la COB ne porte à la connaissance du public que le résultat de sa propre enquête, et non les informations et les documents tels que transmis par la Commission fédérale. Même après avoir rendu sa décision et l'avoir le cas échéant publiée, l'autorité requérante n'est pas autorisée à mettre à la disposition du public - et donc d'autres autorités - les renseignements qui lui ont été transmis par la Commission fédérale, ce qui heurterait l'art. 38 al. 2 LBVM.
La COB ne saurait retransmettre les informations et documents reçus de la Commission fédérale à une autorité tierce (pénale ou fiscale) sans avoir préalablement demandé et obtenu le consentement exprès de la Commission fédérale, ce qui a été du reste rappelé dans le dispositif de la décision attaquée. Même si, dans le cadre de la présente affaire, la COB prononçait une sanction administrative à l'encontre des recourants et ordonnait éventuellement la publication de celle-ci sur Internet, les autorités tierces françaises (pénales ou fiscales) ne pourraient pas sans autre utiliser directement ou indirectement les documents remis par la Suisse pour ouvrir à l'encontre de l'un ou l'autre protagoniste de l'affaire une procédure pénale (ATF 128 II 407 consid. 4.3.1 p. 414; cf. aussi dans le domaine de l'entraide judiciaire en matière pénale ATF 129 II 384 consid. 4.2). Il incombera, le cas échéant, à la COB de demander à la Commission fédérale l'autorisation de pouvoir retransmettre les informations en sa possession aux autorités pénales françaises compétentes ou à celles-ci de présenter directement une demande d'entraide judiciaire en matière pénale auprès des autorités suisses compétentes. Il est précisé que la Suisse n'accorde pas l'entraide judiciaire pénale pour une procédure de redressement fiscal, mais uniquement pour la répression d'un délit qui serait assimilable à une escroquerie fiscale au sens du droit suisse.

3.4 En ce qui concerne notamment la faculté de publier les décisions de la COB, la législation française est au demeurant dans le droit fil du droit communautaire. Selon l'art. 14 § 4 de la Directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché (abus de marché), entrée en vigueur le 12 avril 2003, les Etats membres
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doivent prévoir en effet que l'autorité compétente concernée puisse rendre publiques les mesures ou sanctions qui seront appliquées pour non-respect des dispositions adoptées en application de la directive, excepté dans les cas où leur publication perturberait gravement les marchés financiers ou causerait un préjudice disproportionné aux parties en cause. L'art. 15 de cette directive précise que les Etats membres veillent à ce que les décisions prises par l'autorité compétente puissent faire l'objet d'un recours juridictionnel.
Si, en l'occurrence, l'entraide administrative devait être refusée pour le simple motif que la COB peut ordonner la publication des sanctions administratives prises à l'encontre de celui qui a été reconnu coupable d'avoir enfreint la réglementation sur les opérations d'initiés et les manipulations de marché, cela aurait pour conséquence de bloquer tôt ou tard toute procédure d'entraide administrative avec les Etats membres de l'Union européenne qui sont tenus d'adapter leur réglementation pour se conformer à cette directive d'ici au 12 octobre 2004 (cf. art. 18 de ladite Directive). Un tel blocage serait incompatible avec l'art. 38 al. 2 LBVM qui poursuit l'objectif de faciliter l'entraide administrative dans toute la mesure compatible avec les droits des intéressés et le respect des conditions de l'entraide judiciaire en matière pénale, lesquelles ne doivent pas être contournées (cf. ATF 128 II 407 consid. 4.3.2).

3.5 Le simple fait que, contrairement à la COB, la Commission fédérale n'est pas compétente pour prononcer elle-même des amendes administratives et, a fortiori, pour en ordonner la publication ne saurait conduire au refus de l'entraide administrative (cf. art. 40 à 45 LBVM). En effet, l'octroi de l'entraide administrative n'est pas subordonné à la condition que la Commission fédérale et l'autorité de surveillance étrangère disposent exactement des mêmes compétences et des mêmes pouvoirs en matière de sanctions administratives. Pour le surplus, il suffit de rappeler que la COB est considérée comme l'autorité de surveillance des marchés financiers au sens de l'art. 38 al. 2 LBVM à laquelle l'entraide administrative peut être accordée (voir plus haut, consid. 2.2).

3.6 En résumé, l'entraide administrative ne saurait être refusée pour le seul motif que la COB a la possibilité, dans le cadre de ses tâches officielles, de publier les décisions qu'elle a prises à l'issue d'une procédure contradictoire.

4.

4.1 Dans le domaine de l'entraide administrative internationale, le principe de la proportionnalité est consacré par l'art. 38 al. 2
BGE 129 II 484 S. 494
LBVM
qui autorise uniquement la transmission d'informations et de documents liés à l'affaire. Selon ce principe, l'entraide administrative ne peut être accordée que dans la mesure nécessaire à la découverte de la vérité recherchée par l'Etat requérant. La question de savoir si les renseignements demandés sont nécessaires ou simplement utiles à la procédure étrangère est en principe laissée à l'appréciation de ce dernier. L'Etat requis ne dispose généralement pas des moyens lui permettant de se prononcer sur l'opportunité de l'administration de preuves déterminées au cours de la procédure menée à l'étranger, de sorte que, sur ce point, il ne saurait substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité étrangère chargée de l'enquête. Il doit uniquement examiner s'il existe suffisamment d'indices de possibles distorsions du marché justifiant la demande d'entraide. La coopération internationale ne peut être refusée que si les actes requis sont sans rapport avec d'éventuels dérèglements du marché et manifestement impropres à faire progresser l'enquête, de sorte que ladite demande apparaît comme le prétexte à une recherche indéterminée de moyens de preuve ("fishing expedition"; ATF 128 II 407 consid. 5.2.1 p. 417; ATF 127 II 142 consid. 5; ATF 126 II 409 consid. 5 p. 413 ss, 86 consid. 5a p. 90 s.; ATF 125 II 65 consid. 6 et les références citées).

4.2 La COB a notamment exposé que, le 17 décembre 2001, la cotation des titres CEC avait été suspendue à la suite de l'annonce faite par la société Accor Casinos de lancer un projet d'offre publique d'achat sur la totalité des titres CEC au prix de 52 EUR, ce qui représentait une hausse de 36% par rapport à la moyenne des cours des trois derniers mois. Cette offre publique d'achat devait officiellement débuter le 10 janvier 2002. Mais, dès la reprise de la cotation des titres CEC le 28 décembre 2001, la COB a constaté une forte hausse du cours de l'action (53,15 EUR), se situant à un niveau supérieur au prix proposé par Accor Casinos, ainsi qu'une augmentation inhabituelle du nombre de titres échangés. Durant tout le mois de janvier, le cours du titre CEC n'a cessé d'augmenter. Le 28 janvier 2002, le Groupe Partouche a déposé un projet d'offre publique d'achat concurrente en proposant 59 EUR par action.
L'autorité requérante disposait donc d'éléments suffisants lui permettant de soupçonner d'éventuels dérèglements du marché. En outre, la COB a découvert qu'un certain nombre de titres CEC avait été acquis, puis revendu, par l'intermédiaire d'une banque suisse durant une période sensible. Les recourants contestent, pour leur part, que leurs transactions boursières aient été réalisées au cours
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d'une "période critique". Ils soulignent que l'acquisition des titres CEC a eu lieu le 28 décembre 2001, soit après l'annonce du lancement d'une offre publique d'achat par Accor Casinos le 17 décembre 2001. Ces arguments ne sont toutefois pas de nature à désamorcer le soupçon initial de possibles distorsions du marché. Force est en outre de constater que l'achat des titres CEC s'est produit durant la période précédant la survenance d'un (autre) fait confidentiel, soit l'annonce du dépôt d'une offre publique d'achat faite le 28 janvier 2002 par le Groupe Partouche. Les recourants ont en effet acquis 10'000 titres CEC le 28 décembre 2001, du reste à un prix supérieur à celui proposé par Accor Casinos, titres qu'ils ont ensuite revendus avec bénéfice. Il y a donc lieu d'admettre que les transactions litigieuses ont eu lieu pendant une période sensible. Pour le surplus, la demande d'entraide administrative présentée le 2 juillet 2002 contient un exposé de faits pertinents non lacunaire et satisfait aux exigences de motivation posées par la jurisprudence (ATF 128 II 407 consid. 5.2.1 p. 419).
Les recourants soutiennent encore que l'entraide administrative devrait être refusée, car ils ne peuvent de toute façon pas être soupçonnés concrètement d'avoir utilisé une information privilégiée, faute d'autres éléments suspects. Ils précisent notamment que la COB ne fait état d'aucune relation directe ou indirecte entre eux et un détenteur d'une information privilégiée. Point n'est cependant besoin de trancher cette question, puisque l'existence d'indices supplémentaires (insolites) permettant de soupçonner concrètement et de manière vraisemblable l'utilisation d'une information privilégiée par l'intéressé en rapport avec la transaction examinée n'est nécessaire que pour autoriser l'autorité requérante à retransmettre les informations aux autorités pénales étrangères compétentes, ce qui n'a pas (encore) été requis en l'espèce. La variation du cours des titres en cause et l'augmentation inhabituelle de leur volume d'échange durant une période sensible sont à elles seules suffisantes pour accorder l'entraide administrative (cf. ATF 128 II 407 consid. 5.3.1 p. 419; ATF 127 II 323 consid. 7b p. 334 s. et les arrêts cités).
Compte tenu de ces circonstances, la COB pouvait légitimement demander à la Commission fédérale des précisions sur les transactions en cause. L'entraide administrative internationale doit donc être accordée. La Commission fédérale n'a pas à examiner les raisons invoquées par les recourants pour expliquer ces opérations boursières. C'est en vain que les recourants affirment que Y. s'était uniquement fondé sur les nombreux articles parus dans la presse
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financière spécialisée et sur Internet pour procéder auxdites opérations. De telles allégations ne sont en effet pas déterminantes dans ce contexte. Il appartient uniquement à l'autorité requérante de déterminer, sur la base de ses propres investigations et des informations transmises par la Commission fédérale, si ses craintes initiales de possible distorsion du marché étaient ou non fondées (cf. ATF 127 II 142 consid. 5c p. 146/147).

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