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Urteilskopf
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30. Arrêt du 20 février 1974 en la cause Hoirs Rosset contre canton de Fribourg
Regeste
Grundstückgewinnsteuer. Art. 4 BV.
1. Wo die Besteuerung der Grundstückgewinne im Falle des Erwerbs durch Erbfolge nicht aufgeschoben wird, widerspricht eine Gesetzesbestimmung, wonach die Steuereinschätzung dieses Gutes im Zeitpunkt des Todes als mutmasslicher Erwerbspreis gilt, Art. 4 BV nicht (Erw. 2).
2. Es ist willkürlich, für die Bestimmung des Erwerbspreises sich strikt an die Steuereinschätzung des Grundstücks zur Zeit des Todes zu halten, wenn der Verkehrswert im selben Zeitabschnitt bei weitem höher lag (Erw. 3).
A.- Selon l'art. 1er de la loi fribourgeoise du 25 février 1960 instituant un impôt cantonal sur les gains immobiliers et la plus-value (LIGIP), l'impôt sur les gains immobiliers a pour objet le bénéfice net provenant de l'aliénation de tout
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ou partie d'immeubles. Le gain imposable est constitué par la différence entre le prix d'acquisition augmenté des impenses et le produit de l'aliénation (art. 3). Le prix d'acquisition est le prix payé par l'aliénateur, tel qu'il ressort des actes déposés au registre foncier (art. 4). En cas de construction de l'immeuble par l'aliénateur, le prix d'acquisition est alors égal au coût de la construction augmenté du prix du terrain.L'art. 5 définit le prix d'acquisition des immeubles acquis par succession ou donation. Il a la teneur suivante:
"En cas d'aliénation d'un immeuble acquis par donation ou succession, c'est la valeur prise en considération pour la fixation des droits d'enregistrement sur cette donation ou succession, sans déduction de dettes, qui détermine le prix d'acquisition.
A ce défaut, la valeur fiscale, du moment de la donation ou du décès, est réputée prix d'acquisition.
..."
B.- Georges Rosset a acquis le 30 mars 1961 l'immeuble "chemin des Kybourg 13", à Fribourg, pour le prix de 185 000 fr. De 1961 à 1963, il y avait fait exécuter d'importants travaux de transformation, dont le coût total s'est élevé à 370 000 fr. environ. Il décéda le 20 octobre 1964, laissant comme héritiers sa veuve, dame Jeanne Rosset, et ses trois enfants, Dominique, Claude et Jacqueline. Ces derniers, en 1968/1969, firent transformer les bureaux de leur époux et père en un appartement. Le coût de ces travaux s'éleva à 47 892 fr.
Le 14 juillet 1972, les hoirs Rosset vendirent l'immeuble pour le prix de 760 000 fr.
C.- Le Service cantonal des contributions a établi comme suit le gain immobilier imposable, à la suite de l'aliénation du 14 juillet 1972: "Produit de l'aliénation: Fr. 760000.--
Valeur fiscale au moment du dècès: Fr. 335000.--
Impenses: 48482.15: Fr. 383482.15
Gain immobilier imposable: Fr. 376517.85
Il a notifié le 23 février 1973 aux hoirs Rosset un bordereau fixant l'impôt cantonal sur le gain immobilier à 30 121 fr. 40, soit le 8% de 376 517 fr. 85.
Les hoirs Rosset adressèrent le 1er mars 1973 une réclamation contre la taxation du Service cantonal des contributions, réclamation qui fut écartée le 20 mars 1973. Ils recoururent à
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la Commission cantonale de recours en matière d'impôt (CCR), en demandant l'annulation tant de la décision attaquée que de la taxation du 23 février 1973. La CCR a rejeté ce recours par décision du 14 septembre 1973.Elle relevait notamment qu'il n'avait pas été, en l'espèce, perçu de droits d'enregistrement sur la succession de Georges Rosset. L'autorité de taxation s'était donc basée avec raison sur la valeur fiscale du moment du décès pour fixer le prix d'acquisition (art. 5 al. 2 LIGIP). Si, à la suite de travaux de transformation, la valeur fiscale d'un immeuble n'était pas majorée en fonction de l'augmentation effective de la valeur de l'immeuble transformé, le contribuable devait s'en prendre à lui-même, n'ayant pas fourni au fisc des informations suffisantes.
D.- Agissant par la voie du recours de droit public, les hoirs Rosset demandent au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la CCR. Ils soutiennent que l'art. 5 al. 1 et 2 LIGIP n'est pas compatible avec l'art. 4 Cst., en se fondant sur l'arrêt du Tribunal fédéral publié au RO 95 I 130.
La CCR et le Service cantonal des contributions concluent au rejet du recours.
Considérant en droit:
1. La loi fribourgeoise du 25 février 1960, modifiée le 26 novembre 1963, institue un impôt sur les gains immobiliers et la plus-value. Seul entre en considération en l'espèce l'impôt sur les gains immobiliers, dont l'objet est la différence entre le produit de l'aliénation et le prix d'acquisition de l'immeuble augmenté des impenses. L'art. 5 LIGIP règle le cas particulier du prix d'acquisition d'un immeuble acquis par succession. Ce prix est égal à la valeur prise en considération pour la fixation des droits d'enregistrement sur la succession ou, à ce défaut, à la valeur fiscale du moment du décès. Les recourants soutiennent que l'art. 5 al. 2 LIGIP, applicable in casu, ne s'appuie pas sur des motifs sérieux et objectifs, que cette disposition conduit à des inégalités de traitement et qu'elle est incompatible avec les exigences de l'art. 4 Cst. et, partant, inconstitutionnelle. Ils taxent au surplus d'arbitraitre la décision attaquée en se référant en particulier à l'arrêt du Tribunal fédéral publié au RO 95 I 130.
2. a) Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral,
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l'inconstitutionnalité d'une loi cantonale qui n'a pas fait l'objet d'un recours de droit public dans les trente jours dès sa publication, peut encore être invoquée à titre préjudiciel dans un recours formé contre une décision d'application (RO 97 I 29, avec citations).b) L'art. 4 Cst. ne lie pas seulement les autorités chargées d'appliquer la loi, mais aussi le législateur cantonal ou communal. Celui-ci doit respecter, outre les autres limites qui découlent du droit constitutionnel et du droit fédéral, le principe de l'égalité devant la loi et l'interdiction de l'arbitraire qui en résulte. Une norme générale et abstraite viole cees principes constitutionnels lorsqu'elle n'est pas fondée sur des motifs sérieux et objectifs, qu'elle est dépourvue de sens et d'utilité et qu'elle opère des distinctions juridiques que ne justifient pas les faits à réglementer. Dans ces limites, le législateur jouit d'un large pouvoir d'appréciation. Le juge constitutionnel limitera son intervention aux cas d'abus de pouvoir ou d'excès des limites de celui-ci. Il ne doit en revanche pas substituer sa propre appréciation à celle du législateur (RO 95 I 134 consid. 5; cf. également RO 96 I 66).
c) Les réglementations cantonales relatives à l'imposition des gains immobiliers peuvent être classées dans deux groupes principaux, selon la solution qu'elles donnent au problème de la détermination du prix d'acquisition d'un immeuble acquis par succession, un tel transfert n'étant pas considéré comme une aliénation dont résulte un gain immobilier imposable.
La plupart des lois cantonales prescrivent qu'en cas d'aliénation d'un immeuble acquis par succession, le gain immobilier imposable est égal à la différence entre le produit de l'aliénation et le prix d'acquisition de l'immeuble par le précédent propriétaire, montant augmenté des impenses faites depuis lors. Le transfert de l'immeuble par voie successorale n'a donc en principe aucune incidence sur la détermination du montant du gain (cf. par exemple les lois fiscales des cantons de Schaffhouse et de Saint-Gall, qui précisent qu'il y a report d'imposition en cas de transfert par succession; cf. également la loi zurichoise sur les impôts directs, du 8 juillet 1951, §§ 161 al. 3 lettre b et 164 al. 3; la loi lucernoise sur l'imposition des gains immobiliers, du 31 octobre 1961, §§ 4 ch. 8 et 10 al. 1; la loi soleuroise sur les impôts directs de l'Etat et des communes, du 29 janvier 1961, §§ 36 al. 1 ch. 6 et 37 al. 1; la loi vaudoise sur
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les impôts directs cantonaux, du 26 novembre 1956, art. 41 lettre d et 45; la loi neuchâteloise instituant un impôt sur les gains immobiliers, du 20 février 1962, art. 11 al. 1 ch. 7 et art. 5).Certaines législations cantonales en revanche n'entendent frapper de l'impôt sur les gains immobiliers que le gain qu'a réalisé l'aliénateur d'un immeuble acquis par succession depuis que cet élément de fortune est entré dans son patrimoine. Ainsi en est-il, par exemple, de la loi bernoise sur les impôts directs de l'Etat et des communes, du 29 octobre 1944, dont l'art. 83 al. 3 dispose que le prix d'acquisition d'un immeuble hérité est constitué par la valeur officielle au moment de la dévolution d'hérédité, l'al. 4 de cette disposition donnant à l'aliénateur la possibilité de faire valoir le prix d'acquisition qui serait déterminant pour le défunt, avec les impenses. La loi fiscale du canton des Grisons, du 21 juin 1964, prescrit également que l'impôt sur les gains immobiliers n'est pas perçu en cas de transfert par voie successorale (art. 75 lettre a) et que la valeur d'inventaire au décès vaut alors comme prix d'acquistion en cas d'aliénation de l'immeuble (art. 78 ch. 1 lettre f; voir toutefois art. 78 al. 2).
La loi fribourgeoise du 25 février 1960 instituant un impôt cantonal sur les gains immobiliers et la plus-value, applicable en l'espèce, appartient au second des groupes décrits ci-dessus; elle a été abrogée par la loi du 7 juillet 1972 sur les impôts cantonaux, dont l'art. 51 qualifie le transfert de l'immeuble par succession d'aliénation prorogeant l'imposition.
Les recourants ne contestent pas en soi le système d'imposition adopté en 1960 par le législateur fribourgeois. Ils reprochent à l'autorité dont la décision est attaquée d'avoir considéré comme prix d'acquisition, dans un système d'imposition des gains immobiliers nets, la valeur fiscale de l'immeuble du moment du décès (art. 5 al. 2 LIGIP), alors que cette valeur était manifestement inférieure à la valeur vénale du bien à la même époque.
d) Dans son arrêt publié au RO 95 I 130 ss., le Tribunal fédéral a déclaré contraire à l'art. 4 Cst. la prescription qui prend en considération, pour le calcul du gain immobilier imposable, la différence entre le prix de vente d'un immeuble et sa valeur fiscale, alors même que le prix d'acquisition est connu. Le Tribunal fédéral relevait en particulier que, dans un
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système d'imposition des gains immobiliers nets, l'objet de l'impôt n'est pas l'augmentation de la valeur de l'immeuble, mais bien le bénéfice net réalisé. Le bénéfice imposable doit donc être entendu dans le sens qu'a cette notion dans le langage courant et dans la vie des affaires, c'est-à-dire comme étant la différence entre le prix de vente et les frais d'acquisition, ceux-ci comportant, outre le prix d'achat, les impenses ayant entraîné une plus-value. Déjà, dans un arrêt du 20 mars 1944 en la cause Brasserie Beauregard c. Ville de Fribourg, le Tribunal fédéral avait admis que si le prix d'acquisition était supérieur à la taxe fiscale ou même au prix de revente, le système d'imposition tenant pour bénéfice imposable la différence entre la taxation cadastrale et le prix de vente de l'immeuble n'était plus raisonnable. Aboutissant à frapper un montant supérieur au bénéfice effectif, un tel système ne répondait plus à la notion d'un impôt sur les gains nets réalisés dans les transactions immobilières et violait en lui-même la garantie constitutionnelle.C'est en se référant à ces arrêts que les recourants soutiennent que l'art. 5 al. 2 LIGIP viole l'art. 4 Cst. Ce grief ne peut toutefois pas être admis. La jurisprudence précitée, qui excluait que l'on impose comme gain immobilier la différence entre le produit de l'aliénation et la valeur fiscale ou cadastrale, alors que le prix d'acquisition était supérieur, n'est en effet pas directement applicable, s'agissant de la détermination du prix d'acquisition d'un immeuble acquis par succession lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un tel transfert ne proroge pas l'imposition. L'autorité de recours relève dans la décision attaquée qu'en règle générale, la valeur fiscale ne s'écarte pas sensiblement du prix d'acquisition de l'immeuble, augmenté des impenses qui ont entraîné une augmentation de sa valeur. Les recourants ne contestent pas cette opinion. On ne saurait dès lors considérer comme contraire à l'art. 4 Cst. la disposition qui prévoit qu'en cas d'aliénation d'un immeuble acquis par succession, l'estimation fiscale est présumée prix d'acquisition, car elle n'entraîne pas en principe l'imposition d'un gain fictif.
En revanche, les recourants peuvent avec raison se fonder sur la jurisprudence précitée pour soutenir que l'autorité dont la décision est attaquée a interprété in casu de manière arbitraire l'art. 5 al. 2 LIGIP, en se tenant strictement à la valeur
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fiscale de l'immeuble au moment du décès, alors que celle-ci était manifestement inférieure à la valeur vénale de ce bien.
3. En l'espèce, Georges Rosset avait acquis l'immeuble sis chemin des Kybourg 13 à Fribourg en 1961 pour le prix de 185 000 fr. Il y fit exécuter des transformations importantes dont le coût s'est élevé à environ 370 000 francs. L'autorité fiscale cantonale ne conteste pas ces chiffres et admet également que la valeur fiscale du moment du décès, de 335 000 fr., ne correspondait pas, même approximativement, à la valeur vénale de l'immeuble à la même époque. Elle estime toutefois pouvoir faire totalement abstraction de cette dernière et appliquer strictement l'art. 5 al. 2 de la loi de 1960. Elle n'aurait pu le faire que si l'estimation fiscale avait été relativement proche de la valeur vénale, ce qui n'est d'évidence pas le cas en l'espèce. Dans ces conditions, l'application de l'art. 5 al. 2 LIGIP, tel qu'il a été interprété par l'autorité de recours, implique une inégalité de traitement que rien ne justifie et heurte le sentiment du droit.
La Commission cantonale de recours en matière d'impôt est ainsi tombée dans l'arbitraire en se tenant strictement à la valeur fiscale, alors qu'elle aurait dû, pour déterminer le prix d'acquisition, procéder à l'estimation de la valeur vénale du bien au moment du décès. C'est en vain qu'elle souligne que si l'estimation fiscale est basse, cela est dû à l'insuffisance des informations qui parviennent au fisc et à l'attitude des contribuables qui, dans l'optique de l'impôt ordinaire, voient d'un mauvais oeil toute augmentation de cette valeur. Une telle argumentation ne peut en effet être retenue, ainsi que l'a déjà relevé le Tribunal fédéral dans l'arrêt publié au RO 95 I 137. On ne saurait reprocher au contribuable une estimation fiscale trop basse, alors que c'est à l'autorité de fixer cette valeur conformément aux règles légales. L'admission d'un tel point de vue serait par ailleurs la source d'inégalités de traitement. Enfin, il ne paraît pas admissible de suppléer, par le biais de l'impôt sur les gains immobiliers, à une imposition insuffisante de l'immeuble au titre de l'impôt sur la fortune.
Le grief d'arbitraire soulevé par les recourants est donc fondé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Admet le recours et annule la décision attaquée.
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