Urteilskopf
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3. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 5 mars 1993 dans la cause X. contre Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève (recours en réforme)
Regeste
Art. 311 Abs. 1 Ziff. 1 ZGB; Entziehung der elterlichen Gewalt gegenüber einem für lange Zeit inhaftierten Vater.
Die Verbüssung einer langfristigen Freiheitsstrafe durch den Vater, in einer gewissen Entfernung vom Wohnort der Kinder, kann mit der Ortsabwesenheit im Sinne von Art. 311 Abs. 1 Ziff. 1 ZGB als analogem Tatbestand verglichen werden: sie hindert den Vater, allen Verpflichtungen nachzukommen, welche die elterliche Gewalt mit sich bringt.
Le 12 juillet 1990, X. a tué sa femme. Par arrêt du 14 octobre 1991, entré en force de chose jugée, la Cour d'assises du canton de Genève l'a condamné à treize ans de réclusion: la sortie de prison est prévue pour le 10 octobre 2003; les deux tiers de la peine seront atteints le 10 mai 1999.
b) Le Service de protection de la jeunesse a proposé à la Chambre des tutelles de retirer au père la garde des enfants et de la confier à Y., avec adjonction d'une curatelle de représentation. La Chambre des tutelles a pris une décision conforme à ces propositions.
c) Le 7 décembre 1990, X. a recouru contre cette décision. Il demandait qu'il fût dit: a) que, au moment, de sa libération, la garde de ses filles lui sera restituée et que les fonctions de curateur d'Y. prendront fin; b) que, pendant la durée de la garde et de la curatelle d'Y., il sera consulté sur toutes les affaires importantes; c) qu'il bénéficiera d'un large droit de visite.
Y. ayant pris l'engagement de consulter X. sur toutes les questions importantes relatives à ses filles et de faciliter les visites de celles-ci à la prison, la cause a été suspendue.
d) Le 18 septembre 1992, la Chambre des tutelles a invité l'Autorité cantonale de surveillance à examiner la possibilité de prononcer à l'endroit de X. un retrait de l'autorité parentale.
B.- Par décision du 11 décembre 1992, l'Autorité cantonale de surveillance a retiré à X. l'autorité parentale sur ses deux filles, invité la Chambre des tutelles à statuer conformément à l'art. 311 al. 2 CC et constaté que le recours interjeté contre la décision de la Chambre des tutelles du 7 décembre 1990 était devenu sans objet.
C.- X. a recouru en réforme au Tribunal fédéral. Il demandait, pour l'essentiel, qu'il fût dit qu'il n'y a pas lieu de lui retirer l'autorité parentale.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
Extrait des considérants:
4. Aux termes de l'art. 301 al. 1 CC, les père et mère déterminent les soins à donner à l'enfant, dirigent son éducation en vue de son bien et prennent les décisions nécessaires, sous réserve de sa propre capacité. Ainsi, le droit actuel prévoit que l'autorité parentale est le pouvoir légal des parents de prendre les décisions nécessaires pour l'enfant mineur et constitue la base juridique de l'éducation et de la représentation de l'enfant, et de l'administration de ses biens, par les père et mère (cf. CYRIL HEGNAUER/BERNARD SCHNEIDER, Droit suisse de la filiation, 3e éd., Berne 1990, No 25.02, p. 164; ERIC ECKERT, Compétence et procédure au sujet de l'autorité parentale dans les causes matrimoniales, thèse Lausanne 1990, p. 12/13).
a) L'art. 311 al. 1 ch. 1 CC dispose que, lorsque d'autres mesures de protection de l'enfant sont demeurées sans résultat ou paraissent d'emblée insuffisantes, l'autorité tutélaire de surveillance prononce un retrait de l'autorité parentale lorsque, pour cause d'inexpérience, de maladie, d'infirmité, d'absence ou d'autres motifs analogues, les
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père et mère ne sont pas en mesure d'exercer correctement l'autorité parentale.Il faut se montrer particulièrement rigoureux dans l'appréciation des circonstances, puisque le retrait de l'autorité parentale, qui équivaut à la perte d'un droit élémentaire de la personnalité, n'est admissible que si d'autres mesures pour prévenir le danger que court l'enfant - soit les mesures protectrices (art. 307 CC), la curatelle d'assistance (art. 308 CC) et le retrait du droit de garde (art. 310 CC) - sont d'emblée insuffisantes: le principe de la proportionnalité de l'intervention commande une attention particulière (HEGNAUER/SCHNEIDER, op.cit., No 27.46, p. 193; MARTIN STETTLER, Le droit suisse de la filiation, Traité de droit privé suisse, Volume III, tome II, 1, Fribourg 1987, p. 560; RICHARD FRANK, Grenzbereiche der elterlichen Gewalt, in Festschrift für Cyril Hegnauer, Berne 1986, p. 33 ss, spéc. 40; HENRI DESCHENAUX/PAUL-HENRI STEINAUER, Personnes physiques et tutelle, 2e éd., Berne 1986, No 857, p. 234/235).
b) Selon l'autorité cantonale, aussi longtemps que la condamnation du recourant n'était pas définitive, il pouvait apparaître suffisant de lui retirer la garde de ses enfants et de la confier à Y., assortie d'une curatelle de représentation, mais l'entrée en force de l'arrêt de la Cour d'assises constitue un fait nouveau; en effet, dit-elle, l'incarcération du père pour une longue période peut être assimilée à un "motif analogue" à l'absence, au sens de l'art. 311 al. 1 ch. 1 CC.
Cette manière de voir ne heurte pas le droit fédéral. Le recourant prétend que, s'agissant de l'éducation des enfants, aucune question ne se posera avant qu'elles aient atteint l'âge de douze ans, soit respectivement en 1999 et en 2000, époque à laquelle il bénéficiera d'une libération conditionnelle. Mais il oublie que ses filles, âgées maintenant de six et cinq ans, doivent suivre une école et que, de ce fait, diverses mesures devront être prises par leur représentant légal. Or, comme il se trouve incarcéré à une certaine distance de Genève, pour plusieurs années, il n'est pas en mesure d'assumer lui-même ses obligations de père, tandis que le titulaire actuel de la garde n'est pas habilité à agir comme devrait le faire un père ou une mère.
Le recourant affirme aussi que les visites de ses filles à la prison - visites qui seraient nécessaires à leur développement - ont lieu régulièrement et sans problème: ainsi, dit-il, l'absence pendant la période d'incarcération n'est pas telle que tout contact est coupé. Mais les rencontres alléguées ne ressortent pas de la décision attaquée. Au demeurant, supposé même qu'il fût établi qu'elles ont lieu et sont bénéfiques pour les enfants, il n'en découlerait pas que le
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recourant est en mesure d'exercer l'autorité parentale: sa condition de détenu ne lui permet manifestement pas de faire tous les actes qu'implique ce pouvoir.Ainsi, contrairement à ce que prétend le recourant, l'autorité cantonale n'a pas, en statuant comme elle l'a fait, violé le principe de la proportionnalité à observer dans les mesures de protection de l'enfant.
c) La décision déférée aurait pu aussi être fondée sur le chiffre 2 de l'art. 311 al. 1 CC, qui prévoit le retrait de l'autorité parentale lorsque les père et mère manquent gravement à leurs devoirs envers leurs enfants. En effet, le meurtre par le père de la mère des enfants est un manquement grave aux devoirs des parents.