Urteilskopf
144 I 208
18. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause A., Association B. et C. contre Département de l'instruction publique, de la culture et du sport de la République et canton de Genève (recours en matière de droit public)
2C_792/2017 du 6 juin 2018
Regeste
Koordination des kantonalen Genfer Einspracheverfahrens betreffend die Verfahrenskosten, Gebühren und Entschädigungen (Art. 87 Abs. 4 LPA/GE) mit dem Bundesgerichtsgesetz.
Beschwerde an das Bundesgericht gegen einen Entscheid des Obergerichts und parallel dazu Einsprache beim Obergericht gegen dessen Entscheid betreffend Auferlegung der Gerichtsgebühr. Materielle Abweisung der Beschwerde durch das Bundesgericht. Danach Einspracheentscheid des Obergerichts und Beschwerde an das Bundesgericht gegen den kantonalen Einspracheentscheid.
Der Entscheid des Bundesgerichts hat den kantonalen Entscheid ersetzt, auch soweit dieser die Verfahrenskosten, Gebühren und Entschädigungen betraf, so dass die Vorinstanz den streitigen Einspracheentscheid nicht hätte erlassen dürfen (E. 3). Wollen die Parteien verhindern, dass das Bundesgericht einen Entscheid erlässt, bevor die Vorinstanz über die Einsprache befunden hat, müssen sie das Bundesgericht über die hängige Einsprache informieren und die Sistierung des bundesrechtlichen Verfahrens bis zum Erlass des Einspracheentscheids beantragen (E. 4). Diese Art der Koordination kommt zur Anwendung, sofern keine anderen Bestimmungen des Bundesrechts das kantonale Einspracheverfahren ausschliessen (E. 5).
A. Par arrêt du 23 août 2016 (ATA/693/2016), la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a rejeté en tant que recevable le recours formé par A., C. et l'Association B. (ci-après: B.) contre un courrier du 15 juin 2016 du Département de l'instruction publique, de la culture et du sport de la République et canton de Genève indiquant que l'instauration de trois heures hebdomadaires d'éducation physique durant la scolarité obligatoire ne pourrait avoir lieu à la rentrée scolaire 2016. Un émolument de justice, fixé à 1'000 fr., a été mis à la charge des recourants, conjointement et solidairement.
B. Contre l'arrêt de la Cour de justice du 23 août 2016, A., C. et B., assistés d'un mandataire professionnel, ont formé un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral en concluant, en substance, à ce que la troisième heure d'éducation physique soit prévue dans le programme scolaire 2016/2017. Ils n'ont pas critiqué l'émolument de justice.
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Parallèlement à leur recours au Tribunal fédéral, les intéressés ont adressé à la Cour de justice une réclamation contre l'émolument de 1'000 fr. mis à leur charge, en sollicitant que celui-ci soit ramené à 200 francs.
Le 5 octobre 2016, la Cour de justice a prononcé la suspension de la procédure de réclamation jusqu'à droit jugé par le Tribunal fédéral sur ce recours.
Par arrêt du 24 mai 2017, le Tribunal fédéral a rejeté le recours dans la mesure de sa recevabilité (arrêt 2C_901/2016).
Le 27 juin 2017, la Cour de justice a prononcé la reprise de la procédure de réclamation contre l'émolument et informé les parties que la cause était gardée à juger. Par arrêt du 2 août 2017, elle a déclaré recevable la réclamation sur émolument élevée le 20 septembre 2016 par les intéressés contre l'arrêt du 23 août 2016, l'a rejetée et dit qu'il n'était pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité.
C. Contre l'arrêt du 2 août 2017, A., C. et B. forment un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Ils concluent à l'annulation de l'arrêt entrepris et au renvoi de la cause à la Cour de justice pour instruction complémentaire. Ils invoquent la violation de leur droit d'être entendu et de l'interdiction de l'arbitraire.
Invitée à se déterminer, la Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants, ainsi que dans le dispositif de son arrêt. Les recourants maintiennent leurs conclusions.
Extrait des considérants:
3. La décision entreprise du 2 août 2017, qui confirme l'émolument mis à la charge des recourants dans l'arrêt de la Cour de justice du 23 août 2016, fait suite à la réclamation formée par les recourants en vertu de l'art. 87 al. 4 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA/GE; rs/GE E 5 10). Selon cette disposition, les frais de procédure, émoluments et indemnités arrêtés par la juridiction administrative peuvent faire l'objet d'une réclamation dans le délai de 30 jours dès la notification de la décision. Comme il s'agit d'une procédure de réclamation, l'instance compétente pour statuer sur celle-ci est la même que celle qui s'est prononcée sur l'affaire au principal. Partant, lorsque la Cour de justice a statué sur le fond, elle est compétente pour se prononcer sur
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l'éventuelle réclamation sur les frais et/ou dépens, alors qu'en parallèle un recours au Tribunal fédéral peut être interjeté. En l'espèce, dès lors que l'arrêt du 23 août 2016 a fait l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, qui l'a rejeté par arrêt du 24 mai 2017, se pose la question de savoir si, eu égard aux exigences découlant de la procédure fédérale, dont le Tribunal fédéral contrôle d'office le respect (cf.
art. 106 al. 1 LTF), la Cour de justice pouvait rendre la décision attaquée.
3.1 Le recours en matière de droit public au Tribunal fédéral est un moyen de droit ordinaire, dévolutif et en principe de nature réformatoire (cf.
art. 107 al. 2 LTF; cf.
ATF 141 II 14 consid. 1.3 et 1.5 p. 23 s.;
ATF 138 II 169 consid. 3.3 p. 171; arrêt 1F_21/2017 du 17 novembre 2017 consid. 1.4). Par conséquent, l'arrêt du Tribunal fédéral, qu'il admette ou rejette le recours, remplace la décision attaquée (cf. arrêts 2C_462/2014 du 24 novembre 2014 consid. 2.2; 2F_14/2013 du 1
er août 2013 consid. 3.2; 2C_810/2009 du 26 mai 2010 consid. 3.1.2; cf. YVES DONZALLAZ, Loi sur le Tribunal fédéral, 2008, n° 1690 ad
art. 61 LTF). Comme la décision sur les frais et dépens a un caractère accessoire et suit, de ce fait, le principal (cf. consid. 1.1 non publié), l'arrêt du Tribunal fédéral remplace également cette partie de la décision attaquée devant lui, même lorsque celle-ci n'était pas contestée spécifiquement sous cet angle. Cela ressort de la lecture a contrario de l'
art. 67 LTF, qui prévoit que le Tribunal fédéral peut répartir autrement les frais de la procédure antérieure lorsqu'il modifie la décision attaquée sur le principal. Quant aux dépens, le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur ce point (cf.
art. 68 al. 5 LTF).
Par ailleurs, les arrêts du Tribunal fédéral acquièrent force de chose jugée le jour où ils sont prononcés (art. 61 LTF). L'autorité de la chose jugée qui en découle interdit de recommencer la procédure sur le même objet (cf. PIERRE FERRARI, in Commentaire de la LTF, 2e éd. 2014, n° 3 ad art. 121 LTF). L'arrêt ayant fait l'objet d'un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral est ainsi absorbé par l'arrêt du Tribunal fédéral, de sorte qu'il n'y a plus de place pour une nouvelle décision de l'autorité précédente sur le même objet.
3.2 La procédure de réclamation prévue à l'
art. 87 al. 4 LPA/GE peut entrer en contradiction avec les règles qui précèdent. La Cour de céans a du reste évoqué récemment la question de la conformité au droit fédéral de cette procédure cantonale (arrêt 2D_35/2016 du 21 avril
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2017 consid. 1.1), en soulignant notamment qu'il serait contraire au principe de l'unité de la procédure que le Tribunal fédéral soit amené à se prononcer deux fois sur le même objet (consid. 1.1). La question avait toutefois pu demeurer indécise, car la décision principale n'avait, contrairement au présent cas, pas fait l'objet d'un recours au Tribunal fédéral (cf. consid. 1.1).
En l'occurrence, en rejetant le recours en matière de droit public formé par les recourants contre l'arrêt du 23 août 2016, le Tribunal fédéral, qui a un pouvoir de réforme, a, implicitement, confirmé celui-ci, y compris en tant qu'il mettait à la charge des recourants un émolument de 1'000 fr., même si ce point n'était pas spécifiquement critiqué (cf. art. 67 LTF a contrario). L'arrêt du Tribunal fédéral s'est ainsi substitué à celui de la Cour de justice du 23 août 2016. L'arrêt du Tribunal fédéral rendu, la Cour de justice ne pouvait donc plus statuer, ainsi qu'elle l'a fait, sur la réclamation formée par les recourants, celle-ci étant devenue sans objet. Force est en conséquence d'annuler l'arrêt entrepris.
3.3 Le Tribunal fédéral ayant statué, seule la voie de la révision (cf.
art. 121 ss LTF) serait ouverte pour remettre en cause l'émolument de justice dont se plaignent les recourants.
Le présent recours ne peut toutefois pas être interprété comme une demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral du 24 mai 2017, dès lors qu'il n'en remplit pas les conditions.
Il n'y a en conséquence pas lieu d'examiner le bien-fondé de l'émolument de 1'000 fr. mis à la charge des recourants.
4. Cette conséquence peut paraître sévère pour les recourants. Elle aurait cependant pu être évitée si le Tribunal fédéral avait été informé de la procédure de réclamation. Il aurait ainsi pu suspendre la procédure fédérale (cf.
art. 6 al. 1 PCF [RS 273], applicable par le renvoi de l'
art. 71 LTF) et, de la sorte, éviter de statuer matériellement sur le recours pendant la procédure de réclamation cantonale.
4.1 La suspension de la procédure fédérale dans l'attente de l'issue de la procédure cantonale est une solution pratiquée pour aménager les voies de droit fédérales et certaines voies de droit cantonales qui peuvent se mener en parallèle. Elle garantit que le Tribunal fédéral ne s'occupe pas d'une affaire tant que, comme en l'espèce s'agissant de l'émolument mis à la charge des recourants, la décision attaquée est susceptible d'être annulée par une autorité cantonale (cf.
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ATF 129 III 727 consid. 1 p. 729) et permet de sauvegarder les voies de droit à disposition des parties (cf.
ATF 83 II 419 p. 421 s.). La suspension de la procédure fédérale est notamment la règle lorsqu'une demande de révision d'un arrêt cantonal est déposée devant l'autorité cantonale, alors qu'un recours contre cet arrêt est pendant au Tribunal fédéral (cf.
art. 125 LTF;
ATF 138 II 386 consid. 7 p. 392), sous réserve des demandes de révision manifestement infondées (cf. ordonnances 2C_382/2017 du 7 février 2018; 2C_659/2016 du 25 juillet 2016; 2C_1103/2015 du 20 avril 2016). Sous l'empire de l'ancienne loi fédérale d'organisation judiciaire du 16 décembre 1943 (OJ; RS 3 521), elle était prononcée lorsque la décision attaquée devant le Tribunal fédéral faisait en même temps l'objet d'un recours en nullité, d'une demande d'interprétation ou de révision devant l'autorité cantonale (cf.
art. 57 al. 1 OJ pour le recours en réforme; cf.
ATF 83 II 419 p. 421 s.; arrêt 4P.108/2006 du 3 août 2006 consid. 1.1; cf.
art. 6 al. 1 PCF en lien avec l'
art. 40 OJ pour les autres recours).
4.2 En ce qui concerne la procédure de réclamation en matière de frais et dépens prévue par l'
art. 87 al. 4 LPA/GE, la suspension de la procédure fédérale dans l'attente de l'issue de la procédure de réclamation devant la Cour de justice se justifie d'autant plus que le contrôle du Tribunal fédéral s'agissant des frais et dépens régis par le droit cantonal est limité à l'arbitraire (cf. consid. 2 non publié), alors que celui de l'autorité cantonale est libre.
4.3 En résumé, pour éviter qu'une situation telle que celle du cas d'espèce se reproduise, il convient de préciser que, dans la configuration spécifique où une partie forme un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral contre un arrêt de la Cour de justice en critiquant le fond et qu'une procédure de réclamation au sens de l'
art. 87 al. 4 LPA/GE est introduite en parallèle devant la Cour de justice, il appartient aux parties devant le Tribunal fédéral d'informer celui-ci de cette réclamation et de requérir la suspension de la procédure fédérale jusqu'au prononcé de la décision sur réclamation (cf., par analogie,
ATF 138 II 386 consid. 7 p. 392; cf. ordonnance 2C_1103/2015 du 20 avril 2016 consid. 2.1). Cela suppose que, contrairement à ce qui s'est produit dans le présent cas, la Cour de justice n'ordonne pas la suspension de la procédure de réclamation lorsqu'un recours au Tribunal fédéral est pendant sur le principal, mais statue sans tarder. Au cas où un recours au Tribunal fédéral serait formé contre l'arrêt de la Cour de justice rendu sur réclamation, la jonction des
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causes pourra être envisagée (cf. arrêt 2C_908/2008 du 23 août 2010). Ce procédé sera en principe applicable, car il permettra de coordonner la procédure de réclamation de l'
art. 87 al. 4 LPA/GE avec les exigences de la procédure devant le Tribunal fédéral.
5. Ce mode de coordination ne vaut cependant que dans les cas où il n'existe aucune autre disposition de droit fédéral susceptible d'entrer en conflit avec la procédure de réclamation de l'
art. 87 al. 4 LPA/GE. Tel est par exemple le cas en matière d'assurances sociales. Dans ce domaine, la procédure de première instance est gouvernée par le principe de célérité (cf. art. 61 let. a de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales [LPGA; RS 830.1]). Comme le Tribunal fédéral l'a relevé à de réitérées reprises, ce principe s'oppose à ce que le droit cantonal de procédure prévoie plusieurs instances de recours, notamment en ce qui concerne les litiges relatifs aux dépens de la procédure cantonale (cf.
ATF 110 V 54 consid. 4b p. 61 s.; cf. arrêts 9C_295/2015 du 10 novembre 2015 consid. 1 et 9C_590/2009 du 26 mars 2010 consid. 1.2 à propos de la procédure de réclamation prévue par le droit de procédure cantonal fribourgeois; cf. arrêt 9C_827/2011 du 13 juin 2012 consid. 1.2 à propos de la procédure de réclamation de l'
art. 87 al. 4 LPA/GE; voir également les arrêts 9C_722/2013 du 15 janvier 2014 consid. 5 et I 1059/06 du 20 décembre 2007 consid. 2.2). Cette jurisprudence garde toute sa portée.