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Urteilskopf

99 Ia 667


78. Arrêt du 9 mai 1973 dans la cause Fondation X. contre Commission de recours en matière fiscale du canton de Neuchâtel.

Regeste

Besteuerung der Personalfürsorgestiftungen. Interkantonale Doppelbesteuerung. Willkür. Art. 46 Abs. 2 und Art. 4 BV.
Die Aktiven gleicher Art müssen, wo immer sie auch liegen, nach den gleichen Regeln eingeschätzt werden (Erw. 2).
Im vorliegenden Fall verstösst die Verweigerung des Abzugs der versicherungsmathematischen Schulden nicht gegen das Doppelbesteuerungsverbot (Erw. 3).
Der Modus, nach dem die Personalfürsorgeeinrichtungen im Kanton Neuenburg besteuert werden, schafft im Vergleich mit den natürlichen Personen keine rechtsungleiche Behandlung (Erw. 4).
Es liegt auch keine Ungleichheit mit Rücksicht auf die Privatversicherungsgesellschaften vor (Erw. 5).
Umgekehrt liegt eine unzulässige rechtsungleiche Behandlung vor zum Nachteil jener Einrichtungen, die ein Kapital auszahlen, im Vergleich zu jenen, welche Renten ausrichten; indessen bleibt vorliegend diese Ungleichheit praktisch ohne Auswirkungen auf die Besteuerung der Beschwerdeführerin (Erw. 6).
Mit Rücksicht auf das gesamte neuenburgische Steuersystem verstösst die für Gemeindesteuern auf die Personalfürsorgeeinrichtungen anwendbare besondere Regelung nicht gegen Art. 4 BV (Erw. 7).

Sachverhalt ab Seite 668

BGE 99 Ia 667 S. 668

A.- La recourante (ci-après: "la fondation") est une institution de prévoyance en faveur du personnel d'une entreprise, constituée sous forme de fondation. Elle a son siège à Bâle. Elle est organisée selon les principes de la technique d'assurance et comprend une caisse d'assurance et une caisse d'épargne. La première verse aux assurés et ayants droit des rentes d'invalidité, de vieillesse, de veuves et d'orphelins, des indemnités au décès et des prestations supplémentaires allouées selon l'appréciation du conseil de fondation (Ermessensleistungen). La seconde place en compte d'épargne les versements effectués par les épargnants et ceux de l'employeur qui s'y ajoutent, en leur faisant porter intérêt au taux technique d'assurance de la caisse de retraite.
BGE 99 Ia 667 S. 669

B.- La fondation est propriétaire d'un immeuble à Serrières, dans le canton de Neuchâtel. L'Administration cantonale neuchâteloise des contributions l'a taxée, pour l'exercice 1969, sur la base d'une fortune imposable de 1 888 888 fr. pour l'impôt cantonal et de 1 888 000 fr. pour l'impôt communal, fortune déterminée selon les calculs suivants:
Immeubles neuchâtelois: Fr. 2 848 000.--
Immeubles sis hors du canton: Fr. 7 397 000.--
Fortune mobilière sise hors canton: Fr. 65 415 368.--
: Fr. 72 812 368.--
Actif brut total: Fr. 75 660 368.--
./. Passif
Valeur capitalisée (à 10%) des rentes versées: Fr. 25 446 970.--
Dettes diverses et passifs transitoires: Fr. 33 000.--
Fr. 25 479 970.--
Fortune nette totale déterminante pour le taux: Fr. 50 180 398.--
A déduire:
Part proportionnelle des immeubles et autres actifs hors du canton
(50 180 398 x 72 812 368) / 75 660 368: Fr. 48 291 510.--
Fortune imposable dans le canton de Neuchâtel: Fr. 1 888 888.--
Imposition communale, soit Neuchâtel 66'323% de: Fr. 2 848 000.--
Fr. 1 888 000.--
L'impôt cantonal dû devait toutefois être réduit de 99'165% en vertu de l'art. 70 al. 2 de la loi cantonale du 9 juin 1964 sur les contributions directes (LCD), qui dispose que lorsque plus du 30% des bénéficiaires d'une caisse de prévoyance imposée sont domiciliés hors du canton, l'impôt est réduit en proportion.
La fondation a formé contre la taxation un recours que le chef du Département cantonal des finances, par décision du 1er octobre 1970, a rejeté en ce qui concerne l'impôt direct cantonal et admis pour l'impôt direct communal, en réduisant la fortune
BGE 99 Ia 667 S. 670
déterminante pour le taux d'imposition à 998 085 fr. et la fortune nette imposable par la ville de Neuchâtel à 37 570 fr. Selon cette décision, en matière d'impôt communal et faute de dispositions légales sur ce point, les réserves mathématiques doivent être intégralement déduites de la fortune brute, conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral dans la cause Maggi c. Thurgovie (RO 94 I 435 ss.). En revanche, en matière d'impôt cantonal, il y a lieu d'appliquer l'art. 71 LCD, dont il résulte que seule la valeur capitalisée des rentes effectivement versées est déductible de la fortune imposable.
Un recours formé le 21 octobre 1970 par la fondation auprès de la Commission cantonale de recours en matière fiscale a été partiellement admis le 23 mars 1971, mais uniquement en ce qui concerne l'impôt communal. Le total du passif actuariel étant supérieur au montant de l'actif, il a été constaté que la recourante n'avait pas de fortune imposable en matière d'impôt communal. Le recours a été rejeté en ce qui concerne l'impôt cantonal. Cette décision n'a pas fait, à l'époque, l'objet d'un recours de droit public.

C.- Pour l'exercice 1970, la fondation a été taxée sur les bases suivantes par l'Administration cantonale des contributions:
Immeubles neuchâtelois: Fr. 2 848 000.--
Immeubles sis hors du canton: Fr. 9 739 000.--
Fortune mobilière sise hors du canton: Fr. 70 052 410.--: Fr. 79 791 410.--
Fr. 82 639 410.--
./. Passif
Valeur capitalisée (à 10%) des rentes versées: Fr. 28 337 820.--
Dettes diverses et passifs (sic) transitoires. Fr. 48 036.--: Fr. 28 370 820.--: Fr. 54 268 590.--
A déduire:
Part proportionnelle des immeubles et autres actifs hors du canton
(54 268 590 x 79 449 410 (sic)) / 82 639 410: Fr. 52 173 143.--
Fortune imposable dans le canton de Neuchâtel: Fr. 2 095 447.--
Fortune imposable pour la ville de Neuchâtel: Fr. 2 846 000.--
BGE 99 Ia 667 S. 671
La fondation a reçu pour l'impôt cantonal un bordereau, daté du 8 octobre 1970, l'invitant à payer un impôt de 18 fr. 20 et une contribution ecclésiastique de 2 fr. 75, soit un total de 20 fr. 95. Ce montant a été calculé après réduction de 99'131% conformément à l'art. 70 al. 2 LCD. Pour l'impôt communal de la ville de Neuchâtel, la fondation a reçu un bordereau daté du 21 octobre 1970, l'invitant à payer pour une fortune de 2 846 000 fr., au taux de 3‰, un impôt de 8538 fr.
Le 18 juin 1971, le chef du Département des finances a rejeté le recours formé par la fondation contre cette décision, en relevant que l'art. 153 lit. c nouveau LCD (texte du 2 décembre 1969) autorise les communes à faire abstraction de toute dette actuarielle lors de la détermination de la fortune imposable des fonds de prévoyance. Par acte du 5 juillet 1971, la fondation a saisi la Commission cantonale de recours, concluant d'une part à la revision de la décision du 23 mars 1971 concernant l'impôt cantonal de 1969 et d'autre part à la réforme de la décision du chef du Département, en ce sens que, pour l'impôt cantonal et l'impôt communal de 1970, la défalcation proportionnelle du passif actuariel fût admise comme pour l'impôt communal de 1969.
Par décision du 2 novembre 1971, la Commission cantonale de recours a déclaré le recours mal fondé, en bref pour les motifs suivants.
La procédure en revision invoquée par la recourante n'existe pas en droit fiscal neuchâtelois et la décision du 23 mars 1917 est définitive et exécutoire. En ce qui concerne l'année 1970, il est tenu compte, pour l'impôt cantonal, d'une déduction de la valeur capitalisée des rentes effectivement versées, au taux de 10%; en revanche, aucune déduction des dettes actuarielles n'est effectuée en matière d'impôt communal.
Tout en rejetant le recours, la Commission a, dans les considérants de sa décision, rectifié une erreur de calcul concernant la fortune imposable par le canton de Neuchâtel, qu'elle a fixée à 2 094 266 fr., le passif total s'élevant à 28 385 856 fr. (et non
BGE 99 Ia 667 S. 672
28 370 820 fr.) et la fortune nette totale à 54 253 554 fr. (et non 54 268 590 fr.). Cette différence dans les éléments imposables constatés par la Commission cantonale de recours n'entraîne pas de modification du montant de l'impôt.
En revanche, la Commission a laissé subsister une erreur dans le report du montant de la fortune hors du canton (79 449 410 fr. au lieu de 79 791 410 fr.). Cette erreur rectifiée, le compte se serait présenté comme il suit:
(fortune nette): Fr. 54 253 554.--
A déduire:
54 253 554 x 79 791 410) / 82 639 410 = Fr. 52 383 815.--
Fortune imposable dans le canton de Neuchâtel: Fr. 1 869 739.--

D.- Agissant par la voie du recours de droit public, et invoquant les art. 46 al. 2 et 4 Cst., la fondation demande au Tribunal fédéral d'annuler la décision de la Commission cantonale de recours du 2 novembre 1971, de rectifier la taxation et de décider que
a) pour le calcul de la répartition intercantonale des actifs, déterminante pour la défalcation proportionnelle des dettes, les immeubles doivent tous être pris à leur valeur comptable selon bilan;
b) pour le calcul de la fortune imposable, le capital de couverture, déterminé selon les règles de la science actuarielle, doit être intégralement déduit de l'actif, à titre de dette, tant en ce qui concerne l'impôt cantonal que l'impôt communal.

E.- La Commission cantonale de recours conclut au rejet du recours, en se bornant à se référer à sa décision.

F.- Le Tribunal fédéral a soumis le litige au Conseil d'Etat du canton de Bâle-Ville, en l'invitant à se prononcer sur la question de double imposition. Le Conseil d'Etat de ce canton a répondu que la recourante est exempte d'impôts dans le canton de Bâle-Ville et que, par conséquent, le recours est dirigé uniquement contre le canton de Neuchâtel. Tout en demandant que ce dernier point soit constaté expressément, il a renoncé à se déterminer sur la question de la double imposition.
BGE 99 Ia 667 S. 673

Erwägungen

Considérant en droit:

1. Dans son recours cantonal, la fondation a demandé d'une part la revision de la taxation intervenue pour l'année 1969 et d'autre part la modification de la taxation intervenue pour l'année 1970. La Commission de recours a rejeté d'emblée la demande de revision, en affirmant que "la procédure en revision invoquée par la recourante n'existe pas en droit fiscal neuchâtelois". Tout en concluant à l'annulation de la décision du 2 novembre 1971 comme telle, la fondation ne s'exprime, dans son recours de droit public, que sur la taxation relative à l'impôt de 1970 et ne revient pas sur la demande de revision. Dès lors, et dans la mesure où elle entendrait s'en prendre aussi au rejet de cette demande, son recours est en tout cas irrecevable, faute d'être motivé conformément à l'art. 90 al. 1 lit. b OJ. On peut relever cependant que l'affirmation de la Commission de recours est inexacte. Les art. 140 à 142 LCD instituent une procédure de revision, applicable aussi aux décisions des autorités de recours, en vertu de l'art. 31bis de la loi sur les recours en matière fiscale, dans sa teneur du 9 juin 1964. Mais les conditions de la revision ne paraissent pas remplies en l'espèce.

2. La recourante soutient tout d'abord que la Commission cantonale de recours, en rejetant le recours formé contre la décision du Département des finances et en confirmant ainsi le mode de calcul utilisé par le fisc pour établir la répartition intercantonale des dettes qui doivent être déduites de la fortune brute, a violé les principes posés par la jurisprudence du Tribunal fédéral en application de l'art. 46 al. 2 Cst., interdisant la double imposition intercantonale.
a) En réalité, comme l'a fait observer le canton de Bâle-Ville, il ne pourrait s'agir que d'une double imposition virtuelle, la recourante étant exonérée d'impôt dans ce dernier canton et payant dans les autres cantons où elle a des immeubles un impôt réel, frappant les immeubles comme tels, sans égard aux autres éléments de fortune ni aux dettes. Le moyen n'en est pas moins recevable (RO 98 Ia 216 et les arrêts cités). Il importe peu qu'il n'ait pas été soumis aux autorités cantonales (RO 93 I 22). Au demeurant, la recourante semble n'avoir eu connaissance du mode de calcul des autorités neuchâteloises que par la décision du 2 novembre 1971.
b) D'après le bilan de la recourante au 31 décembre 1969, le
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total des actifs de la fondation s'élevait à 82 715 410 fr. 08, dont 12 663 000 fr. pour les immeubles, situés dans les cantons de Bâle-Ville (2 606 000 fr.), Bâle-Campagne (1 943 000 fr.), Neuchâtel (2 924 000 fr.), Vaud (1 079 000 fr.) et Zurich (4 111 000 fr.).
Dans le canton de Bâle-Ville, la recourante est exemptée d'impôts et ses immeubles n'ont dès lors pas fait l'objet d'une taxation fiscale. Dans les cantons de Bâle-Campagne, de Vaud et de Zurich, les immeubles de la recourante ont été frappés d'un impôt foncier basé sur les évaluations fiscales, fixées à 880 860 fr. pour Bâle-Campagne, 1 260 000 fr. pour Vaud et 4 060 000 fr. pour Zurich. Dans le canton de Neuchâtel, la valeur cadastrale de l'immeuble a été fixée à 2 848 000 fr.
Pour la détermination de la fortune imposable (impôt cantonal), l'autorité fiscale neuchâteloise a porté les immeubles en compte à leur valeur comptable figurant au bilan, à l'exception de l'immeuble de Neuchâtel, pris à sa valeur cadastrale. Selon ce procédé, le rapport entre les actifs situés dans le canton de Neuchâtel et l'ensemble des actifs est égal à 3'4463% (2 848 000 / 82 639 410), ce qui donne, pour un total des dettes de 28 385 856 fr., une déduction de 978 261 fr. et une fortune imposable de 1 869 739 fr. (2 848 000 ./. 978 261). En réalité, les chiffres retenus par la Commission, après l'autorité fiscale, sont différents, à la suite de l'erreur de report signalée dans l'état de fait du présent arrêt. La recourante soutient quant à elle que, pour la détermination du rapport entre les actifs situés dans le canton de Neuchâtel et les autres actifs, il faut prendre tous les actifs à leur valeur au bilan, ce qui donnerait un rapport de 3'535% (2 924 000 / 82 715 410), une déduction de 1 003 440 fr. (28 385 856 x 3'535) et une fortune imposable de 1 844 560 fr. (2 848 000 ./. 1 003 440). C'est à ce sujet qu'elle se plaint d'une double imposition contraire à l'art. 46 al. 2 Cst.
c) Les dettes grevant la fortune imposable doivent être réparties entre les cantons dans la même proportion que les actifs. Dans la mesure où ils sont de même nature, ceux-ci doivent donc être estimés selon les mêmes règles, quel que soit leur lieu de situation. Un système permettant de les estimer selon des principes différents pourrait en effet priver le contribuable d'une
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partie des déductions auxquelles il a droit (RO 87 I 124, 74 I 128, 53 I 455/6). L'autorité fiscale doit appliquer son propre droit cantonal, formel et matériel, même aux éléments d'actifs situés hors du canton (ATF du 26 mars 1967 dans la cause X., Archives 36, p. 515/516). Dans le cas particulier, le canton de Neuchâtel n'avait pas, contrairement à ce que soutient la recourante, à prendre tous les immeubles à leur valeur au bilan; il aurait dû déterminer pour les immeubles hors du canton une valeur cadastrale conforme à son droit cantonal. Toutefois, compte tenu de la modicité de l'impôt réclamé (18 fr. 20, plus 2 fr. 75 de contribution ecclésiastique), ce travail était manifestement hors de proportion avec le résultat recherché. Sans doute pourrait-on se demander si, dans ces conditions, la méthode préconisée par la recourante, qui a au mois l'avantage de mettre en oeuvre des valeurs déterminées - du moins en principe - selon des critères identiques, ne doit pas être préférée. Mais toute la question peut en définitive rester indécise en l'espèce. La méthode préconisée dans le recours aurait pour effet de réduire l'impôt dû de quelque 50 centimes. Cela étant, la recourante n'est pratiquement pas lésée et le recours doit être rejeté sur ce point.
Il est vrai qu'en réalité la différence est un peu plus grande, en raison de l'erreur de calcul commise par l'autorité cantonale. Mais cette erreur n'a plus rien à voir avec les principes déduits de l'art. 46 al. 2 Cst.; la recourante aurait pu tout simplement la faire corriger par l'administration (art. 143 LCD). Vu l'existence de ce moyen de droit cantonal, le recours de droit public, qui ne pourrait plus se fonder que sur l'art. 4 Cst., serait irrecevable (art. 87 OJ) dans la mesure où il tendrait à la rectification de cette erreur.

3. Le deuxième moyen de la recourante consiste à dire que c'est à tort que le canton de Neuchâtel n'a, dans le calcul relatif à la déduction des dettes, tenu compte que d'une façon insuffisante (pour l'impôt cantonal) ou n'a pas tenu compte du tout (pour l'impôt communal) du passif actuariel. Elle a invoqué ce moyen devant les autorités cantonales, qui lui ont donné tort.
a) Selon l'art. 71 al. 2 LCD, lors de l'imposition par le canton de la fortune des institutions de prévoyance, "seule la valeur capitalisée des rentes effectivement versées est déductible de la fortune imposable". Le libellé de cette disposition est ambigu. On pourrait croire en effet, à sa lecture, qu'il interdit toute déduction de dettes autres que celles qui correspondent à la
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valeur capitalisée des rentes versées. Mais il résulte des travaux préparatoires de la loi (Bulletin officiel des délibérations du Grand Conseil, 1964-1965, p. 466 et 484) que le législateur a entendu simplement exclure partiellement la déduction des dettes actuarielles, les autres dettes pouvant être intégralement déduites. Telle est du reste l'interprétation que l'administration elle-même donne à cette disposition. Selon l'art. 4 du règlement d'exécution de la loi, du 30 novembre 1965, la capitalisation des rentes effectivement versées se fait au taux de 10% l'an.
Pour l'impôt communal, l'art. 153 lit. b et c de la loi sur les contributions directes du 9 juin 1964 ne contenait aucune disposition semblable à l'art. 171 al. 2. Les communes pouvaient, en ce qui concerne les fonds de prévoyance, frapper de l'impôt sur la fortune les immeubles qui leur appartenaient, "jusqu'à concurrence de leur valeur cadastrale et sous déduction d'une part proportionnelle des dettes". Dans la pratique, seules étaient considérées comme dettes les dettes commerciales et hypothécaires, à l'exclusion des dettes actuarielles. Sur le vu de l'arrêt Pensionskasse Maggi (RO 94 I 437), qui condamnait cette interprétation, le Conseil d'Etat neuchâtelois a proposé au Grand Conseil, le 4 novembre 1969, de modifier la loi sur ce point. Afin d'éviter que les fonds de prévoyance ne soient dès lors exonérés de tout impôt communal, il a proposé de transformer à l'égard de ces fonds l'impôt en question en impôt réel, "sans défalcation aucune des dettes" (Bulletin officiel, 1969-1970, p. 758/59). Le Grand Conseil, amendant le projet de loi présenté par le Conseil d'Etat, a inscrit dans la loi votée le 2 décembre 1969 que l'impôt communal frapperait désormais les immeubles appartenant aux fonds de prévoyance jusqu'à concurrence de leur valeur cadastrale et sous déduction d'une part proportionnelle des dettes, mais "sans défalcation des dettes actuarielles" (Bulletin officiel, 1969-1970, p. 778-780). Cette modification légale (art. 153 lit. c LCD) est entrée en vigueur le 1er janvier 1970 et est donc applicable à l'impôt de 1970.
b) Pour l'impôt cantonal de 1970, le fisc a établi le montant des dettes à déduire de l'actif brut total en tenant compte de la valeur capitalisée des rentes versées à 10%, soit d'un montant total de 28 337 820 fr., auquel s'ajoutent les dettes ordinaires en 48 036 fr. Il n'a pas tenu compte des réserves mathématiques correspondant aux droits dont les assurés et les ayants droit n'ont que l'expectative.
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Pour l'impôt communal, la fortune imposable a été fixée à 2 846 000 fr., les dettes ordinaires ayant seules été déduites, pour une part proportionnelle, de la valeur cadastrale de l'immeuble de la recourante.
La recourante considère qu'à cet égard aussi l'autorité cantonale a violé l'art. 46 al. 2 Cst., car ladite autorité aurait, selon elle, dû tenir compte du passif actuariel total dans le calcul de la répartition intercantonale des dettes. Elle se fonde avant tout sur l'arrêt Pensionskasse Maggi.
Dans sa décision, la Commission cantonale de recours a répondu à cette argumentation qu'"une interprétation raisonnable et objective de cet arrêt démontre que le Tribunal fédéral a seulement précisé qu'en l'absence d'une disposition légale expresse de droit cantonal, les caisses de pension organisées en fondation ou en coopérative et ayant une importance suffisante, sont assimilables aux compagnies d'assurances sur la vie, en ce qui concerne le système adopté pour la déduction des dettes, c'est à savoir que ces caisses de pension doivent déduire de leur fortune imposable la totalité du capital de couverture nécessaire à faire face aux prestations en faveur des assurés, soit les rentes en cours et les rentes non encore échues ou rentes futures".
c) Il appartient premièrement à chaque canton d'appliquer lors de l'imposition d'un contribuable soumis réellement ou virtuellement à une double imposition intercantonale les principes de sa propre législation fiscale. C'est dans la mesure où le contribuable est frappé simultanément d'un impôt portant sur le même objet dans deux cantons (double imposition effective) ou qu'il est frappé d'un impôt incompatible avec les normes qui, d'après la jurisprudence, déterminent sur le plan intercantonal les limites de la souveraineté fiscale des cantons que la taxation qui en résulte doit céder le pas à l'application de l'art. 46 al. 2 Cst. (arrêt du 13 février 1947; cf. LOCHER, Praxis III 1, § 1 II A, no 10).
Pour le surplus, les cantons déterminent en principe librement la façon dont ils frappent d'impôts les personnes ou objets soumis à leur souveraineté fiscale. C'est notamment le cas en ce qui concerne la taxation des immeubles et la défalcation des dettes sur les immeubles. La défalcation de dettes que le droit cantonal admet en principe ne peut pas être refusée, sous forme de défalcation proportionnelle, aux propriétaires d'immeubles habitant ou ayant leur siège hors du canton. Mais il n'en résulte pas que l'on puisse, sur la base de l'art. 46 Cst., imposer à un
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canton le devoir d'accorder à un contribuable, par rapport aux autres, un traitement non pas égal mais plus avantageux, vu l'existence de biens dans un autre canton, en particulier d'autoriser la défalcation d'une dette en raison du domicile extracantonal d'un créancier alors qu'il la refuse aux autres contribuables (RO 55 I 31).
Or la loi neuchâteloise, lorsque, dans l'art. 71 LCD, elle dispose qu'en ce qui concerne l'imposition des fonds affectés à des buts de prévoyance en faveur du personnel, seule la valeur capitalisée des rentes effectivement versées est déductible de la fortune imposable, ne fait pas de différence à cet effet entre les institutions ayant leur siège dans le canton et celles qui ont leur siège en dehors de celui-ci. De même, l'art. 153 LCD, lorsqu'il autorise les communes à imposer les immeubles appartenant aux fonds affectés à des buts de prévoyance en faveur du personnel sans défalcation des dettes actuarielles, ne fait pas non plus une telle différence. Au reste, dans les arrêts dans lesquels il a considéré que les réserves mathématiques des compagnies d'assurances sur la vie ou des caisses de pension devaient être considérées au point de vue fiscal comme des dettes, le Tribunal fédéral a relevé que la situation eût été différente si le droit cantonal n'avait autorisé que la déduction des dettes échues (RO 54 I 397, 74 I 461; implicitement dans RO 94 I 438 consid. 2 b; voir aussi SCHLUMPF, Bundesgerichtspraxis zum Doppelbesteuerungs-Verbot, 3e éd., p. 273).
Il résulte des considérations qui précèdent que le refus de défalcation de dettes actuarielles n'est pas, en l'espèce, contraire à l'interdiction de la double imposition.

4. La recourante allègue que la décision attaquée viole l'art. 4 Cst., en ce sens qu'en refusant de déduire pour une part proportionnelle les réserves mathématiques dans l'imposition sur la fortune, l'autorité cantonale a commis à son égard une inégalité de traitement par rapport à d'autres contribuables.
a) La recourante ne soutient pas que l'autorité cantonale ait violé les dispositions légales applicables. Ses critiques s'adressent à la loi elle-même. Elle aurait pu attaquer celle-ci dans les 30 jours dès sa publication. Ne l'ayant pas fait, elle ne peut plus en demander l'annulation. Elle est certes recevable, à l'occasion d'un recours dirigé contre l'application des dispositions critiquées, à alléguer qu'elles violent ses droits constitutionnels et qu'elles ne peuvent fonder son imposition, mais à la condition
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que le traitement discriminatoire résultant de la loi lui soit effectivement appliqué et qu'elle s'en trouve lésée (RO 96 I 566 consid. 2 et les arrêts cités).
b) Le législateur est lié par l'art. 4 Cst. En matière fiscale, le canton doit observer le principe de l'égalité de traitement résultant de cette disposition constitutionnelle, ainsi que le principe de l'interdiction de l'arbitraire (RO 96 I 576). La loi fiscale viole ces principes lorsqu'elle n'est pas fondée sur une base objective et sérieuse, n'a pas de sens ou établit des distinctions juridiques qui ne trouvent pas de justification raisonnable dans les faits. Mais, à l'intérieur du cadre ainsi établi, le canton conserve une large liberté d'action; l'art. 4 Cst. ne lui impose pas l'application d'une méthode déterminée d'imposition (RO 96 I 566/7 et arrêts cités).
Le canton de Neuchâtel prévoit une méthode d'imposition spéciale pour les institutions de prévoyance en faveur du personnel. Une telle imposition spéciale peut se justifier en tout cas dans la mesure où le traitement spécial a pour but de réduire l'imposition de ces fonds. Depuis longtemps déjà, le législateur, tant sur le plan fédéral que dans les cantons, a adopté des dispositions tendant à réduire l'imposition des fonds de prévoyance ou même à les exonérer totalement d'impôt, en raison du but social poursuivi par ces institutions (cf. VOUMARD, Les fonds de bienfaisance des entreprises privées, RDS 1951, p. 431 a ss., 499 a ss.; E. BLUMENSTEIN, System des Steuerrechts, 3e éd., p. 191). Sur le plan fédéral, les caisses d'assurance-chômage, maladie, vieillesse, invalidité et survivants, à l'exclusion des sociétés d'assurance concessionnaires, ainsi que les fondations dont la fortune est destinée de façon durable à des buts de bienfaisance en faveur du personnel d'une ou de plusieurs entreprises et dont le revenu est affecté exclusivement à ces buts, sont exonérées de l'impôt pour la défense nationale (art. 16, ch. 4 et 4bis AIN). Il en est de même dans beaucoup de cantons (cf. Rapport de la Commission fédérale d'experts chargée d'examiner les mesures propres à encourager la prévoyance professionnelle pour les cas de vieillesse, d'invalidité et de décès, FF 1970 II 648/49). L'art. 34quater nouveau Cst., adopté en votation populaige le 3 décembre 1972, prévoit à son al. 5 que "les cantons peuvent être tenus d'accorder des exonérations fiscales aux institutions relevant de l'assurance fédérale ou de la prévoyance professionnelle, ainsi que des allégements fiscaux aux assurés et à
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leurs employeurs en ce qui concerne les cotisations et les droits d'expectative".
Si donc il est généralement admis que, dans l'intérêt du développement de la prévoyance professionnelle, un traitement plus favorable des institutions de prévoyance est justifié, en revanche il serait difficile d'admettre, sauf motifs pertinents, un traitement moins favorable à leur égard. Certes, alors même que le canton prévoit d'une façon générale l'imposition des institutions de prévoyance selon les règles applicables aux personnes physiques, il n'est naturellement pas tenu d'appliquer auxdites institutions l'ensemble de ces règles. Mais il ne pourrait guère priver les institutions de prévoyance seules du bénéfice de la déduction des dettes, si des motifs raisonnables et sérieux ne l'y autorisaient.
c) Dans sa décision du 2 novembre 1971, la Commission cantonale de recours n'apporte aucune justification à la différence de traitement existant entre institutions de prévoyance et personnes physiques. Elle se borne à déclarer que le principe constitutionnel de l'égalité devant la loi n'interdit pas à un législateur cantonal de soumettre à un régime fiscal distinct les personnes physiques et les personnes morales.
En réalité, l'art. 4 Cst. serait sans doute violé si, seules de tous les contribuables, les institutions de prévoyance, tout en étant frappées des mêmes impôts que les personnes physiques, se voyaient refuser le droit de déduire de leur fortune leurs dettes, sans que ce refus de déduction fût compensé par d'autres avantages. Mais tel n'est pas le cas. Le législateur a, en contrepartie du refus de déduire une partie du passif actuariel des institutions de prévoyance, réduit à 1‰ le taux de l'impôt sur la fortune que doivent payer ces institutions (Bulletin officiel 1964/1965, p. 403 et 429); les personnes physiques sont, quant à elles, appelées à payer sur la fortune des impôts dont le taux réel, progressif, est fixé entre 1 et 3‰ (art. 52 LCD); les sociétés anonymes et à responsabilité limitée paient un impôt sur le capital fixé à 3‰ (art. 67 LCD); les autres personnes morales paient un impôt sur le capital ou la fortune, fixé selon le barème applicable à la fortune des personnes physiques (art. 67 al. 2 et 72 LCD). De plus, les institutions de prévoyance sont, à la différence de la plupart des autres contribuables - personnes physiques ou morales - exemptes de tout impôt sur le revenu ou le bénéfice. Dès lors, les institutions de prévoyance n'étant pas soumises
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aux mêmes impôts que les personnes physiques, le fait que leurs dettes ne sont pas intégralement déductibles ne saurait être considéré comme constituant, à l'égard desdites personnes physiques, une inégalité de traitement interdite par l'art. 4 Cst.

5. a) La recourante se dit aussi victime d'une inégalité de traitement par rapport aux compagnies privées d'assurance sur la vie.
Selon l'art. 61 LCD, la réserve mathématique des sociétés d'assurance concessionnaires est déductible en totalité du capital; pour les institutions de prévoyance, seule est déductible, en vertu de l'art. 71 al. 2 LCD, la valeur capitalisée des rentes effectivement versées. La Commission cantonale de recoursjustifie cette différence de traitement en relevant que d'une part ces sociétés sont imposées à des taux bien supérieurs aux taux prévus pour les fonds de prévoyance et cela tant sur le bénéfice net que sur le capital, et que d'autre part leurs assurés paient l'impôt sur la fortune jusqu'à concurrence de la valeur de rachat de leurs droits (art. 44 LCD), alors que les membres des fonds de prévoyance ne paient aucun impôt sur la valeur de leurs droits d'expectative.
C'est aussi ce dernier argument que le Conseil d'Etat exposait dans son rapport du 4 novembre 1969 à l'appui du projet de loi revisant la loi sur les contributions directes, qui a été à l'origine de la loi du 2 décembre 1969:
"Alors que le propriétaire d'un carnet d'épargne ou d'une police d'assurance-vie est imposé sur la valeur de son bien, le membre actif d'une institution de prévoyance ne paie aucun impôt sur la valeur de son expectative, cela tant et aussi longtemps qu'un véritable droit à une rente ou à une indemnité en capital n'est pas né. Il est juste dès lors que l'institution de prévoyance ne puisse, de son côté, déduire de sa fortune la contre-valeur des droits virtuels (expectatives) de ses membres."
(Bull. off. 1969/70, p. 758)
b) Cette argumentation, qui tend à compenser l'absence de revenu fiscal découlant d'une imposition des expectatives d'assurance chez les assurés des fonds de prévoyance par le refus de déduction des réserves mathématiques dans l'impôt sur la fortune, apparaît dépourvue de justification objective et sérieuse. La Commission et le Conseil d'Etat n'ont pas procédé à une comparaison de la situation objective des deux catégories de contribuables dont la taxation est en cause: les fonds de prévoyance
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d'une part, et les compagnies d'assurance de l'autre. Ils se placent uniquement au point de vue du fisc, en se fondant sur le fait que, par l'imposition des assurés, l'Etat peut retrouver une partie de la fortune qu'il n'impose pas auprès des compagnies d'assurance bénéficiant de la déduction des réserves mathématiques.
D'une part, en appliquant leur raisonnement à la lettre, on serait amené à frapper les fonds de prévoyance d'impôts beaucoup plus élevés que les compagnies d'assurance, et à violer ainsi entre les uns et les autres l'égalité de traitement commandée par l'art. 4 Cst. En effet, une telle différence d'imposition, qui s'appliquerait à deux catégories d'institutions très proches l'une de l'autre par leur activité, ne serait pas fondée sur une différence dans la capactié économique (cf. RO 96 I 567) et pourrait, sans raison objectivement valable, obliger les institutions de prévoyance à appliquer des tarifs plus élevés que les compagnies d'assurance.
D'autre part, contrairement à ce que paraissent croire les autorités cantonales, l'assuré de la compagnie d'assurance ne sera pas toujours imposé sur la valeur de rachat de l'assurance qu'il a contractée; il ne le sera notamment pas lorsque ses dettes excéderont son actif, y compris la valeur de rachat. Il ne le sera que dans une mesure très faible, si ses dettes, sans excéder son actif, atteignent une valeur proche de celle de cet actif. Mais surtout, l'art. 44 LCD interdit au fisc d'imposer les assurances sur la vie qui n'ont pas de valeur de rachat, même si elles ont été contractées auprès d'une compagnie d'assurance concessionnaire. Or, aux termes de l'art. 90 al. 2 LCA, l'assureur n'est tenu de racheter une assurance sur la vie que lorsqu'il est certain que l'événement assuré se réalisera, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit d'assurances telles que l'assurance en cas de décès dite de vie entière, l'assurance réciproque, l'assurance mixte ordinaire, l'assurance à terme fixe; en revanche, ne sont pas soumises aux dispositions légales sur le rachat les assurances en cas de vie, les assurances temporaires au décès, l'assurance de survie (cf. ROELLI-JAEGER, Kommentar, t. III, n. 41-43 ad art. 90; KOENIG, Schweiz. Privatversicherungsrecht, 3e éd., p. 391 ss., 413 ss.).
Si donc les assurés auprès d'une institution de prévoyance n'ont jamais à payer d'impôt sur la fortune pour leur expectative d'assurance, une partie des personnes assurées auprès d'une compagnie d'assurance sur la vie n'ont pas non plus à payer un
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tel impôt, bien que la compagnie doive naturellement constituer des réserves mathématiques pour l'ensemble des contrats d'assurance qui ont été conclus par elle. Au surplus, dans le cas de l'assurance de rentes, les rentes versées sont soumises à l'impôt sur le revenu dans le canton de domicile du bénéficiaire (RO 94 I 440) et non dans le canton où l'institution d'assurance est imposable. On ne saurait donc considérer que l'imposition des assurés dont l'assurance présente une valeur de rachat compense la déduction de la réserve mathématique opérée dans l'imposition des sociétés concessionnaires d'assurance.
c) En revanche, comme le relève à juste titre cette fois la Commission cantonale de recours, la différence de traitement entre institutions de prévoyance et sociétés d'assurance concessionnaires, du point de vue de la déduction des dettes actuarielles, se justifie par le fait que ces sociétés sont imposées à des taux bien supérieurs aux taux prévus pour les fonds de prévoyance en faveur du personnel, et cela tant sur le bénéfice que sur le capital. En effet, elles sont appelées à payer un impôt progressif sur le bénéfice, dont le taux réel peut atteindre 16% - ou 12% pour les sociétés coopératives - (art. 63 et 46 LCD), ainsi qu'un impôt sur le capital fixé à 3‰ - ou pouvant atteindre 3‰ pour les sociétés coopératives - (art. 67 et 52 LCD).
En outre, le législateur neuchâtelois est allé jusqu'au bout de son raisonnement, en prévoyant une réduction de l'impôt exigé des institutions de prévoyance en fonction du domicile des bénéficiaires (art. 70 al. 2 LCD). Par l'application de cette disposition, l'impôt cantonal a été réduit pour la recourante de 99'131%. En ce qui concerne cet impôt, le grief d'inégalité de traitement à l'égard des sociétés d'assurance apparaît ainsi en définitive mal fondé.

6. a) La recourante allègue qu'il y a inégalité de traitement entre les institutions de prévoyance qui ne versent que des rentes, d'une part, et celles qui versent d'autres prestations, et notamment qui, conservant en dépôt des capitaux d'épargne, sont appelées à rembourser ces derniers, d'autre part. Les institutions qui versent des rentes de vieillesse, d'invalidité, de survivants peuvent en effet déduire de leur fortune imposable la valeur capitalisée des rentes dont le service a commencé (art. 71 al. 2 LCD). En revanche, celles qui versent des indemnités au décès, des allocations en cas de besoin et des capitaux d'épargne
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pour le cas de la vieillesse ou du décès ne peuvent faire aucune déduction quelconque.
b) La recourante, qui comprend une caisse d'assurance et une caisse d'épargne, est une institution mixte à cet égard. Sa caisse d'assurance verse des rentes d'invalidité, de vieillesse, de veuves et d'orphelins, des indemnités au décès et des prestations en cas de besoin. Sa caisse d'épargne verse des capitaux. Les versements faits à la caisse d'épargne par les épargnants, ainsi que les intérêts qui s'y ajoutent, sont toujours restitués auxdits épargnants ou à leurs ayants droit, soit en cas de dissolution des rapports de travail, soit en cas de décès (art. 6 et 46 du règlement). L'obligation de restitution du capital résulte d'ailleurs en principe, dans le cas de la dissolution du contrat, de l'art. 343 bis al. 3 anc. CO, en vigueur jusqu'au 31 décembre 1971 (actuellement art. 331 a CO). La caisse n'est dispensée de restituer les versements effectués par l'épargnant que si celui-ci n'a pas laissé d'héritiers ou de légataires; dans ce cas - sans importance pratique - le montant épargné, au lieu de revenir à la collectivité publique désignée en vertu de l'art. 466 CC, entre dans la fortune de la caisse (art. 46 ch. 1 lit. d du règlement). En outre, dans les éventualités prévues par le règlement, soit en cas d'invalidité permanente, de retraite en raison de la survenance de l'âge limite, de licenciement sans faute de la part de l'employé après trente années de service, de décès lorsque l'épargnant laisse un conjoint, des enfants ou une femme divorcée à l'entretien de laquelle il devait contribuer, tout ou partie du capital d'épargne constitué par les versements de l'employeur est alloué aux ayants droit (art. 47 du règlement); le conseil de fondation peut aussi, dans des cas spéciaux, décider de verser ce capital à d'autres parents du défunt (art. 48 du règlement).
Ainsi, bien qu'il ne soit pas à la disposition de l'épargnant dans la même mesure que s'il s'agissait d'un dépôt d'épargne au sens propre du mot, l'avoir de l'épargnant auprès de la caisse d'épargne doit être considéré au point de vue économique comme étant analogue à une créance. Il ne s'agit pas seulement d'une réserve mathématique destinée à assurer le moment venu le paiement de rentes, mais il s'agit de montants accumulés qui doivent être considérés réellement comme de véritables dettes de la fondation, dettes dont les créanciers sont exactement déterminés.
Puisque le canton de Neuchâtel admet la déduction de la
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valeur capitalisée des rentes en cours, il est incompréhensible qu'il n'autorise pas la déduction de capitaux d'épargne accumulés auprès de la caisse, en tout cas dans la mesure où il s'agit de la part de ces capitaux constituée par les épargnants eux-mêmes. Il existe ainsi, entre les institutions de prévoyance qui allouent des rentes aux assurés et celles qui versent des capitaux épargnés, une différence de traitement qui ne paraît justifiée par aucune considération objective et sérieuse et que le canton de Neuchâtel n'a pas tenté de justifier.
c) Cependant, en l'espèce, le bilan technique de la recourante ne comporte qu'un montant très faible correspondant au capital d'épargne des employés épargnants, soit au 31 décembre 1969, un montant de 185 055 fr. sur un passif total de 114 999 386 fr. Le passif actuariel admis par le fisc (valeur capitalisée des rentes) s'élève à 28 337 820 fr. Le capital épargné ne représente donc qu'un peu plus de 6‰ de la valeur capitalisée des rentes, de sorte que l'admission de ce passif ne modifierait le montant du bordereau d'impôt que d'une manière insignifiante. La recourante n'est donc pratiquement pas lésée par l'inégalité de traitement dont elle se plaint et le recours doit aussi être rejeté sur ce point.

7. a) En ce qui concerne l'impôt communal, la recourante se plaint également d'une inégalité de traitement à l'égard des autres catégories de contribuables. De ce point de vue, l'affirmation de la Commission cantonale de recours, selon laquelle les sociétés d'assurance concessionnaires seraient imposées à des taux bien supérieurs aux taux prévus pour les fonds de prévoyance, n'est pas exacte. En ce qui concerne l'impôt sur la fortune ou le capital, le taux d'imposition des fonds de prévoyance est fixé à un montant approximativement égal à celui des sociétés commerciales, soit à un maximum de 3‰, ce maximum étant atteint dès que la fortune totale atteint 500 000 fr. En revanche, contrairement aux sociétés d'assurance concessionnaires, les fonds de prévoyance ne sont pas imposables sur le bénéfice ni, au point de vue communal, sur leur fortune mobilière. Cependant, les sociétés d'assurance sur la vie peuvent déduire, pour le calcul de l'impôt sur le capital, la totalité de leurs réserves mathématiques en matière d'impôt communal tout comme en matière d'impôt cantonal (art. 158 et 61 LCD), alors que les fonds de prévoyance ne peuvent pas déduire leurs dettes actuarielles.
Si l'on n'examine la situation des institutions de prévoyance et
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celle des sociétés d'assurance sur la vie qu'en face de l'impôt communal, on peut se demander si à cet égard le législateur neuchâtelois n'a pas violé l'égalité de traitement qu'il doit sauvegarder en vertu de l'art. 4 Cst. En effet, les institutions de prévoyance n'ont pas pour but de réaliser un bénéfice et elles ne sont ainsi en général guère avantagées par l'exonération de l'impôt sur le bénéfice; en l'espèce, le compte de résultats de la recourante s'est soldé en 1969 par un excédent de 6 944 297 fr. 70, mais cet excédent a été viré à la réserve technique, qui atteint ainsi 82 573 580 fr. 28, alors que, selon les données fournies par la recourante dans sa déclaration d'impôt, le bilan actuariel de la caisse, après bouclement du compte de résultats, présente un déficit technique dont la part attribuée au canton s'élève à 166 571 fr. L'excédent comptable a été ainsi affecté à la réduction d'une dette puisque, d'après la jurisprudence, la réserve mathématique des caisses de pension organisées sous la forme coopérative, dans la mesure où la caisse est assez importante pour pouvoir déterminer selon les règles de la science actuarielle le capital nécessaire pour couvrir les rentes futures, doit être considérée comme une dette (RO 94 I 440). La recourante est constituée non en société coopérative, mais en fondation; il n'y a cependant aucune raison pour que la règle énoncée à l'égard des sociétés coopératives ne s'applique pas aussi aux fondations. En outre, l'essentiel du passif des caisses de pension consiste précisément dans le capital de couverture. La caisse de pension qui possède un immeuble sur le territoire du canton et qui doit payer l'impôt au même taux - ou approximativement au même taux - que la compagnie d'assurance se trouve défavorisée par rapport à celle-ci qui, dans la même situation, en raison de la déduction de la réserve mathématique, n'aurait pas à payer d'impôt communal sur la fortune.
Cependant, si l'on ne se borne pas à comparer la situation de la caisse de retraite et celle de la société d'assurance concessionnaire au regard de l'impôt communal et que l'on examine leur situation d'une façon plus générale au regard du droit fiscal cantonal, on constate que les sociétés anonymes, sociétés à responsabilité limitée, sociétés coopératives et associations sont astreintes sur le plan cantonal, en plus de l'impôt sur le bénéfice et sur le capital, au paiement d'un impôt complémentaire sur les immeubles, au taux de 2%, calculé sur l'estimation cadastrale des immeubles dont elles sont propriétaires (art. 146 LCD). Les
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institutions de prévoyance sont, quant à elles, exemptées de cet impôt. De ce fait, le législateur cantonal a pu, sans violer l'égalité de traitement dont l'observation lui est imposée par l'art. 4 Cst., autoriser les communes à prélever de leur côté un impôt sur la fortune immobilière frappant un certain nombre de personnes ou corporations exonérées de l'impôt complémentaire. En dehors des institutions de prévoyance, l'impôt communal sur les immeubles peut frapper aussi l'Etat, les communes, ainsi que les établissements, entreprises et fonds spéciaux placés sous leur administration et ayant un but de pure utilité publique (art. 153 lit. a LCD), et d'autres personnes morales et fonds exonérés de l'impôt direct cantonal (art. 153 lit. b LCD).
Pour les collectivités publiques, l'impôt communal sur les immeubles est un impôt réel, frappant l'immeuble comme tel, sans déduction des dettes, tandis que pour les personnes morales et fonds tels que les caisses de compensation, caisses d'assurance-chômage, etc., une déduction proportionnelle des dettes peut être effectuée. Il en est de même pour les institutions de prévoyance, sous réserve de la non-déduction des dettes actuarielles.
On ne peut ainsi pas dire, en envisageant les effets de la loi comme un tout, tant pour l'impôt cantonal que pour l'impôt communal, que les fonds de prévoyance soient défavorisés par rapport aux sociétés d'assurance, puisque celles-ci, en plus de l'impôt sur le bénéfice et sur le capital, doivent encore payer l'impôt complémentaire sur les immeubles, fixé d'après la valeur cadastrale sans déduction aucune.
b) La recourante se plaint encore de subir une inégalité de traitement par rapport aux personnes et fonds visés à l'art. 153 lit. b LCD, tels que certaines caisses de compensation, les caisses d'assurance-chômage, accidents et maladie, les personnes morales et fonds dont le revenu et la fortune sont affectés au culte ou à la vie religieuse, à l'instruction, à l'assistance des indigents, des malades, des vieillards et des invalides, ou à d'autres buts de pure utilité publique, ainsi que certaines entreprises de transport concessionnaires, qui, exonérés en principe de l'impôt direct, sont assujettis à un impôt communal sur la fortune frappant leurs immeubles et qui peuvent déduire intégralement leurs dettes.
Les institutions de prévoyance étaient, en ce qui concerne l'impôt communal sur la fortune, soumises antérieurement au
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même régime que ces institutions, mais, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 2 décembre 1969 ayant modifié l'art. 153 lit. c LCD, elles ne jouissent plus de la défalcation d'une partie de leurs dettes, les dettes actuarielles.
Dans son rapport adressé au Grand Conseil le 4 novembre 1969, le Conseil d'Etat a justifié la modification légale de la façon suivante:
"Aux termes de l'article 153, lettre c, de la loi du 9 Juin 1964 en effet, si les fonds de prévoyance affectés à des buts de prévoyance en faveur du personnel sont exonérés de tout impôt communal sur la fortune jusqu'à concurrence de leur valeur cadastrale et "sous déduction d'une part proportionnelle des dettes", à moins qu'il s'agisse d'immeubles affectés directement au but social de ces personnes morales, la loi ne donne toutefois aucune définition de la notion de "dette". Jusqu'ici, en pratique, seules ont été considérées comme telles les dettes au sens ordinaire du terme, à savoir notamment les dettes commerciales et hypothécaires, à l'exclusion toutefois des dettes actuarielles. Si la loi n'est pas modifiée sur ce point, la nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral obligera les communes à déduire de la valeur cadastrale des immeubles appartenant aux fonds de prévoyance une part proportionnelle de la réserve mathématique. Comme, dans la plupart des fonds en question, le passif actuariel est aussi important, voire plus important que l'actif, la formule actuellement en vigueur aboutirait en fait à la suppression totale de tout impôt communal.
Une telle situation serait inadmissible. Sur le plan communal comme sur le plan cantonal, rien ne justifie qu'une forme d'épargne soit fiscalement privilégiée. D'un autre côté, les fonds de prévoyance ont tendance à consacrer une partie importante de leurs capitaux à l'achat d'immeubles. Il est indispensable dès lors de prémunir les communes, notamment les petites communes, contre une disparition de leur matière imposable naturelle."
(Bulletin officiel 1969/70, p. 758/59)
Cette argumentation échappe au grief d'arbitraire. Statuant avec une cognition restreinte, sous l'angle de l'art. 4 Cst., le Tribunal fédéral a statué dans divers arrêts, et notamment dans son arrêt du 4 avril 1935 dans la cause Stiftung Altersfürsorge für die Angestellten der Bally-Schuhfabriken AG, qu'il n'était pas arbitraire de considérer que le capital de couverture des rentes et capitaux qu'une caisse de prévoyance devra verser à ses assurés lors de la survenance de l'événement assuré ne constitue pas au point de vue fiscal un passif de la caisse et ne doit pas être traité par le fisc comme une dette ordinaire. Il a constaté que les assurés n'avaient pas, sur les montants dont il s'agit, les mêmes
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droits que sur un dépôt d'épargne, et que l'on pouvait considérer que les travailleurs n'ayant pas quitté l'entreprise ne pouvaient en disposer. Certes, statuant avec plein pouvoir d'examen, le Tribunal fédéral a jugé, dans la cause Pensionskasse Maggi, que sous cet angle le capital de couverture devait être considéré fiscalement comme une dette. Mais il n'a pas abandonné par là la constatation, qu'il avait faite dans l'arrêt Bally, que le point de vue contraire n'est pas arbitraire. Il résulte de là que la distinction faite par la loi neuchâteloise entre les dettes ordinaires et les dettes actuarielles n'est pas arbitraire. Le Conseil d'Etat a expliqué dans son rapport susmentionné les raisons qui l'ont incité à proposer la modification légale. Les institutions de prévoyance pouvaient devenir propriétaires d'immeubles sans être astreintes au paiement d'impôts communaux ou ne devaient payer que des impôts minimes. A cet égard, leur situation est différente de celle des institutions visées par l'art. 153 lit. b LCD. En refusant de déduire de la valeur de l'immeuble une part proportionnelle des dettes actuarielles, le canton de Neuchâtel ne commet pas une inégalité de traitement violant l'art. 4 Cst.

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Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Rejette le recours en tant qu'il est recevable.

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Sachverhalt

Erwägungen 1 2 3 4 5 6 7

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Referenzen

Artikel: Art. 46 Abs. 2 und Art. 4 BV, Art. 4 BV, art. 140 à 142