Urteilskopf
145 I 239
15. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit social dans la cause République et canton de Genève contre A. et vice versa (recours en matière de droit public)
8C_530/2018 / 8C_532/2018 du 7 juin 2019
Regeste
Art. 115 lit. b und 116 BGG; Berechtigung eines öffentlich-rechtlichen Arbeitgebers zur Erhebung einer subsidiären Verfassungsbeschwerde.
Die Eigenschaft als Arbeitgeber genügt nicht für die Legitimation des Kantons zur Erhebung einer subsidiären Verfassungsbeschwerde im Bereich des öffentlichen Personalrechts (E. 5.3.3; Beantwortung der in
BGE 142 II 259 offengelassenen Frage).
A.a Le 18 décembre 2014, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a adopté la loi 11545 sur la suspension des augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat (aLSAMPE 2015), qui supprimait pour l'année 2015, sous réserve des dérogations prévues, les annuités des magistrats et des membres du personnel de l'Etat, des établissements publics, du pouvoir judiciaire et des institutions subventionnées régies par les normes salariales de l'Etat (ci-après: les membres du personnel). Son entrée en vigueur était fixée au 1
er janvier 2015 et son abrogation intervenait au 31 décembre 2015.
BGE 145 I 239 S. 240
A.b Le 16 septembre 2015, le Conseil d'Etat genevois a déposé - comme il l'avait fait l'année précédente - un projet de loi PL 11721 sur la suspension des augmentations annuelles dues aux membres du personnel, qui proposait de supprimer les annuités des membres du personnel pour l'année 2016. Ce projet de loi était motivé par le fait que, même sans intégrer le coût de l'annuité du personnel, le projet de budget 2016 présentait un déficit et que des mesures d'économies devaient être prises.
Le 17 décembre 2015, le Grand Conseil a adopté la loi 11721 sur la suspension des augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat (LSAMPE; rs/GE B 5 16), dont le contenu différait du projet initial. L'art. 2 LSAMPE ("Suspension des annuités") supprimait les annuités au sens de l'art. 12 al. 1 de la loi cantonale du 21 décembre 1973 concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'Etat, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers (LTrait; rs/GE B 5 15). L'art. 4 LSAMPE ("Modifications à une autre loi") modifiait les art. 2 al. 4 et 12 LTrait dans le sens d'une suppression de l'automaticité des mécanismes de progression salariale et d'un transfert au Conseil d'Etat de la compétence d'accorder aux membres du personnel tout ou partie de l'augmentation annuelle prévue par l'échelle des traitements, en tenant compte de la situation économique et budgétaire. L'entrée en vigueur de la LSAMPE était prévue au 1er janvier 2016 (art. 3 "Entrée en vigueur").
Le 26 février 2016, le Grand Conseil a adopté la loi 11834 abrogeant la LSAMPE (art. 1). Son entrée en vigueur était prévue le lendemain de sa promulgation par le Conseil d'Etat (art. 2).
A.c Par arrêté du 2 mars 2016, le Conseil d'Etat a promulgué la LSAMPE avec effet au 1
er janvier 2016. Sur la base de cette loi, il a décidé, lors de sa séance du 23 mars 2016, de ne pas accorder d'annuité aux membres du personnel pour l'année en cours.
Par arrêté du 20 avril 2016, le Conseil d'Etat a promulgué la loi 11834, avec effet au lendemain de sa publication, soit le 23 avril 2016.
A.d Le 14 juillet 2016, A., maîtresse dans l'enseignement secondaire, a sollicité l'augmentation annuelle prévue par l'art. 12 al. 1 LTrait. Par suite du refus de l'Office cantonal du personnel de l'Etat et à la demande de la prénommée de recevoir un acte attaquable, le Conseil d'Etat a rendu un arrêté le 22 mars 2017, par lequel il a constaté que cette dernière n'avait pas droit à l'augmentation annuelle de traitement en 2016.
BGE 145 I 239 S. 241
B. Le 8 mai 2017, A. a saisi la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève d'un recours contre l'arrêté du 22 mars 2017, dans lequel elle concluait à la reconnaissance de son droit, en 2016, à l'augmentation annuelle prévue par l'échelle cantonale des traitements, ainsi qu'au versement de celle-ci par le canton.
En cours d'instance, A. a quitté ses fonctions, faisant valoir ses prétentions à la retraite anticipée au 31 août 2017.
Par jugement du 13 juin 2018, la cour cantonale a partiellement admis le recours. Elle a annulé l'arrêté du 22 mars 2017 et renvoyé la cause au Conseil d'Etat pour qu'il rende une nouvelle décision. Les juges cantonaux ont considéré, en résumé, qu'à partir du 23 avril 2016, la décision du Conseil d'Etat de ne pas accorder l'annuité 2016 était devenue contraire au droit supérieur et qu'il ne leur appartenait pas d'examiner la question au regard de l'application des mécanismes financiers et budgétaires prévus par la loi du 7 octobre 1993 sur la gestion administrative et financière de l'Etat (LGAF; rs/GE D 1 05) dans la situation particulière de l'exercice 2016.
C. Tant A. que la République et canton de Genève ont formé un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire contre ce jugement en requérant son annulation.
A. conclut à ce que le canton lui octroie les mécanismes salariaux ordinaires prévus aux art. 2 à 14 LTrait, en particulier les augmentations annuelles prévues à l'art. 12 LTrait, pour toute l'année 2016.
Représenté par la Chancellerie d'Etat, le Conseil d'Etat, agissant au nom et pour le compte du canton, conclut à la confirmation de l'arrêté du 22 mars 2017.
Chaque partie conclut au rejet des recours adverses. A. a répliqué. De son côté, la cour cantonale persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt.
Le Tribunal fédéral a déclaré les recours irrecevables.
Extrait des considérants:
2. Le Tribunal fédéral examine d'office sa compétence (
art. 29 al. 1 LTF) et contrôle librement la recevabilité des recours portés devant lui (
ATF 143 IV 357 consid. 1 p. 358).
3.1 Le recours en matière de droit public (
art. 82 ss LTF), tout comme le recours constitutionnel subsidiaire (
art. 113 ss LTF), est recevable contre les décisions qui mettent fin à la procédure (
art. 90 et 117 LTF), ainsi que contre les décisions préjudicielles et incidentes qui sont notifiées séparément et qui portent sur la compétence ou sur une demande de récusation (
art. 92 et 117 LTF). Selon l'
art. 93 al. 1 LTF (également applicable au recours constitutionnel subsidiaire par renvoi de l'
art. 117 LTF), les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable (let. a) ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse (let. b).
3.2 En l'espèce, les juges cantonaux ont annulé l'arrêté du Conseil d'Etat du 22 mars 2017 et lui ont renvoyé la cause pour nouvelle décision. Le jugement entrepris doit donc être qualifié de décision incidente au sens de l'
art. 93 LTF.
3.3 Selon la jurisprudence, lorsqu'une administration est contrainte par le jugement incident à rendre une décision qu'elle estime contraire au droit et qu'elle ne pourra pas elle-même attaquer, elle peut déférer un tel jugement incident au Tribunal fédéral sans attendre le prononcé du jugement final (
ATF 141 V 330 consid. 1.2 p. 332;
ATF 134 II 124 consid. 1.3 p. 128;
ATF 133 V 477 consid. 5.2 p. 483 ss). Cette éventualité paraît réalisée en l'espèce. En effet, le jugement attaqué a un effet contraignant pour le Conseil d'Etat, dès lors qu'il devra statuer à nouveau sur le droit de A. à l'annuité 2016 tout en étant lié par le jugement cantonal, d'après lequel les augmentations annuelles ont repris de plein droit le 23 avril 2016.
3.4 De son côté, A. ne peut en principe pas se prévaloir d'un préjudice irréparable car rien ne l'empêche, a priori, de faire valoir ses prétentions dans un recours contre la décision finale (
art. 93 al. 3 LTF). Cependant, si le Tribunal fédéral devait entrer en matière sur l'un des recours du Conseil d'Etat (ce qui dépend encore d'autres conditions de recevabilité), il n'y aurait pas lieu de renvoyer la prénommée à agir ultérieurement, au risque de la priver de son droit de recours. En conclusion, l'existence d'un préjudice irréparable permettant un recours immédiat de A. est subordonnée à une entrée en matière sur l'un des recours du Conseil d'Etat.
BGE 145 I 239 S. 243
4.1 La cause relève du droit public, de sorte qu'en principe, la voie ordinaire de recours est celle du recours en matière de droit public (
art. 82 let. a LTF). Cependant, en ce qui concerne les rapports de travail de droit public (lorsque la question de l'égalité des sexes n'est pas en cause), le recours en matière de droit public est subordonné à la double condition que la décision attaquée concerne une contestation pécuniaire et que la valeur litigieuse atteigne au moins 15'000 fr. (
art. 83 let. g LTF en corrélation avec l'
art. 85 al. 1 let. b LTF). Si le seuil requis de la valeur litigieuse n'est pas atteint, le recours est néanmoins recevable lorsque la contestation soulève une question juridique de principe (
art. 85 al. 2 LTF).
4.2 En l'espèce, le litige porte sur le droit de A. à l'augmentation annuelle pour l'année 2016, de sorte que la cause est incontestablement de nature pécuniaire. En cas de recours contre une décision incidente, la valeur litigieuse est déterminée par les conclusions restées litigieuses devant l'autorité compétente sur le fond (
art. 51 al. 1 let. c LTF). Devant la cour cantonale, A. s'est limitée à demander la reconnaissance de son droit à l'annuité 2016 et à en réclamer le versement. Les répercussions potentielles du jugement entrepris sur l'ensemble des membres du personnel de l'Etat ou sur la rente de vieillesse de l'intéressée n'ont donc pas à être prises en compte dans le calcul de la valeur litigieuse. Ceci dit, le jugement attaqué ne mentionne pas le montant de la valeur litigieuse (cf.
art. 112 al. 1 let. d LTF), mais selon les indications concordantes des parties, l'annuité 2016 à laquelle prétend A. s'élève à 1'060 fr. environ, soit un montant bien inférieur au seuil ouvrant la voie du recours en matière de droit public.
4.3 Par ailleurs, la cause ne soulève pas une question juridique de principe au sens de l'
art. 85 al. 2 LTF, contrairement à ce que soutient A. de manière accessoire. En effet, selon la jurisprudence, la contestation soulève une question juridique de principe lorsqu'il est nécessaire, pour résoudre le cas d'espèce, de trancher une question juridique qui donne lieu à une incertitude caractérisée, laquelle appelle de manière pressante un éclaircissement de la part du Tribunal fédéral, en tant qu'autorité judiciaire suprême chargée de dégager une interprétation uniforme du droit fédéral (
ATF 139 III 182 consid. 1.2 p. 185 et les arrêts cités). Lorsque, comme en l'espèce, le litige se rapporte à l'application du droit cantonal, que le Tribunal fédéral ne peut revoir librement (
ATF 138 I 232 consid. 2.3 p. 236), celui-ci ne saurait rendre une décision de principe.
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Reste donc seule ouverte la voie du recours constitutionnel subsidiaire.
5.1 Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels (
art. 116 LTF). Cette voie de recours suppose, entre autres conditions, que la partie recourante ait un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (
art. 115 let. b LTF). La notion d'intérêt juridiquement protégé au sens de l'
art. 115 let. b LTF est étroitement liée aux motifs de recours prévus par l'
art. 116 LTF, en ce sens que la partie recourante doit être titulaire d'un droit constitutionnel dont elle invoque une violation (
ATF 142 II 259 consid. 4.2 p. 262;
ATF 140 I 285 consid. 1.2 p. 290;
ATF 135 I 265 consid. 1.3 p. 270). De tels droits ne sont reconnus en principe qu'aux citoyens, à l'exclusion des collectivités publiques qui, en tant que détentrices de la puissance publique, ne sont pas titulaires des droits constitutionnels et ne peuvent donc pas attaquer, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, une décision qui les traite en tant qu'autorités (
ATF 144 II 77 consid. 5.5 p. 86;
ATF 140 I 285 consid. 1.2 précité). Cette règle s'applique aux cantons, aux communes et à leurs autorités, ainsi qu'aux autres corporations de droit public, qui agissent en tant que titulaires de la puissance publique. La jurisprudence admet toutefois qu'il y a lieu de faire une exception pour les communes et autres corporations de droit public, lorsqu'elles n'intervienent pas en tant que détentrice de la puissance publique, mais qu'elles agissent sur le plan du droit privé ou qu'elles sont atteintes dans leur sphère privée de façon identique ou analogue à un particulier, notamment en leur qualité de propriétaire de biens frappés d'impôts ou de taxes ou d'un patrimoine financier ou administratif. Une seconde exception est admise en faveur des communes et autres corporations publiques lorsque, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, elles se plaignent de la violation de garanties qui leur sont reconnues par les constitutions cantonales ou par la Constitution fédérale, telles que leur autonomie, l'atteinte à leur existence ou à l'intégrité de leur territoire (
ATF 142 II 259 consid. 4.2 et
ATF 140 I 285 consid. 1.2 précités;
ATF 132 I 140 consid. 1.3.1 p. 143;
ATF 129 I 313 consid. 4.1 p. 318 s.; cf. aussi GIOVANNI BIAGGINI, in Basler Kommentar, Bundesgerichtsgesetz, 3
e éd. 2018, n° 1 ad
art. 115 LTF; HANSJÖRG SEILER, in Bundesgerichtsgesetz, 2
e éd. 2015, n
os 11 ss ad
art. 115 LTF; JEAN-MAURICE FRÉSARD, in Commentaire de la LTF, 2
e éd. 2014, n° 13 ad
art. 115 LTF). Pour déterminer si ces conditions sont
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remplies, on n'examine pas d'abord le statut des parties, mais bien la nature juridique du rapport qui est à la base du litige (
ATF 142 II 259 déjà cité consid. 4.2 in fine et les références).
5.2 La jurisprudence concernant la recevabilité du recours en matière de droit public (
art. 82 ss LTF, notamment
art. 89 al. 1 LTF) retient que la collectivité publique, en tant qu'employeur, a un intérêt spécifique digne de protection à l'annulation ou à la modification d'une décision d'un tribunal favorable à son agent; la collectivité publique se trouve en effet dans une situation juridique analogue à celle d'un employeur privé parce que les prestations qu'elle conteste devoir fournir (par exemple un salaire ou une indemnité pour licenciement abusif) pourraient être dues par tout employeur dans une situation comparable (
ATF 142 II 259 consid. 4.1 p. 261 et les arrêts cités). Jusqu'à présent, le Tribunal fédéral n'a pas tranché la question de savoir s'il fallait tenir un raisonnement semblable à celui appliqué à propos de l'
art. 89 al. 1 LTF et admettre la qualité d'une collectivité publique pour former un recours constitutionnel subsidiaire dans le domaine de la fonction publique (
ATF 142 II 259 consid. 4.1 précité in fine et les arrêts mentionnés; dans un sens affirmatif: FRANÇOIS BELLANGER, Le contentieux des sanctions et des licenciements en droit genevois de la fonction publique, in Les réformes de la fonction publique, 2012, p. 245; dans le même sens, DAVID HOFMANN, in Actualités juridiques de droit public 2011, 2011, p. 44 s.; plutôt contra semble-t-il, SEILER, op. cit., n° 13 ad
art. 115 LTF, qui renvoie à l'
ATF 120 Ia 95 relatif à l'ancien recours de droit public; voir également sur cette problématique JENNY CASTELLA, Le recours au Tribunal fédéral en droit de la fonction publique, SJ 2019 II p. 49 s.).
5.3.1 Dans le cas d'espèce, le Conseil d'Etat ne peut pas - au nom du canton - se prévaloir d'autonomie au sens de l'
art. 50 Cst., qui ne garantit que l'autonomie communale dans les limites fixées par le droit cantonal. Se pose alors la question de savoir si, après avoir reconnu la qualité pour recourir à la collectivité publique en tant qu'employeur dans la procédure du recours ordinaire, même dans les cas où l'autonomie communale n'est pas invoquée, le Tribunal fédéral doit également l'admettre pour le recours constitutionnel subsidiaire.
5.3.2 En l'occurrence, le rapport juridique qui fait l'objet de la procédure ne présente pas une structure que l'on pourrait trouver de
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manière identique ou analogue dans des rapports de droit privé. En effet, il ne s'agit pas, en l'espèce, d'examiner le droit à l'annuité au regard de la relation de travail qui liait A. à son employeur. Le Conseil d'Etat fait lui-même valoir que la décision litigieuse ne concerne pas A. en tant que telle mais qu'elle implique tous les membres du personnel soumis à la LTrait. Concrètement, le litige a trait à la portée des lois en matière de traitement du personnel de l'Etat, adoptées successivement en décembre 2015 et février 2016 par le Grand Conseil, et à leurs effets sur la décision du Conseil d'Etat du 23 mars 2016 de ne pas accorder l'annuité 2016 aux membres du personnel étatique. Pour trancher la cause, les juges cantonaux ont recherché la volonté du législateur lors de l'adoption de la LSAMPE et de la loi 11834 en portant leur examen sur les travaux préparatoires de ces lois. Ils en ont conclu que le législateur avait voulu transférer au Conseil d'Etat la compétence décisionnelle en matière d'augmentations annuelles et qu'il n'était pas question d'en supprimer l'octroi, mais uniquement le caractère automatique. Finalement, le législateur avait fait marche arrière en adoptant la loi 11834 dont l'effet voulu était de rétablir la teneur de la LTrait au 31 décembre 2015. Comme la loi 11834 ne remplissait pas les conditions pour avoir un effet rétroactif, les mécanismes salariaux ordinaires avaient repris de plein droit le 23 avril 2016, conformément à la volonté du législateur. Force est de constater, sur la base du jugement attaqué, que la nature juridique du litige se rapporte purement et directement au processus législatif cantonal. Cela ressort également des griefs soulevés par les parties dans leurs recours (violations des principes de la légalité, de la séparation des pouvoirs, de la non-rétroactivité des lois). En outre, même si le canton est atteint dans des intérêts pécuniaires, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'intérêts proprement publics, en lien direct avec des considérations d'ordre budgétaire. L'objet du renvoi consiste précisément en un examen du droit à l'annuité à la lumière des dispositions en matière de gestion administrative et financière de l'Etat. Comme on l'a vu, la voie du recours constitutionnel subsidiaire ne tend toutefois pas à la sauvegarde des intérêts publics (supra consid. 5.1; RHINOW/KOLLER/KISS/THURNHERR/BRÜHL-MOSER, Öffentliches Prozessrecht, 3
e éd. 2014, n. 2105 p. 568). Enfin, l'annulation par la juridiction cantonale de la décision de ne pas accorder l'annuité 2016 à A. ne change rien au fait que le canton intervient dans la présente cause en sa qualité de détenteur de la puissance publique. Cela étant, aussi longtemps qu'il agit dans le cadre de son pouvoir de puissance publique, il n'est pas légitimé à former un recours constitutionnel subsidiaire.
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5.3.3 Même si l'on considérait que le canton se trouve dans une situation analogue à celle d'un employeur privé, la qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire devrait également lui être déniée. En effet, le canton se plaint en l'espèce d'arbitraire dans l'interprétation de l'art. 12 al. 1 LTrait (dans sa teneur sous l'empire de la LSAMPE) et dans l'application de la loi 11834, en relation avec les principes de la légalité et de la non-rétroactivité des lois. Selon la jurisprudence, la prohibition de l'arbitraire ne confère pas, en tant que telle, un intérêt juridiquement protégé. Elle peut néanmoins être invoquée en relation avec l'application d'une norme qui accorde au recourant un droit ou sert à protéger ses intérêts prétendument lésés (
ATF 138 I 305 consid. 1.3 p. 308;
ATF 133 I 185 consid. 6 p. 197 ss). Autrement dit, le recourant doit se trouver dans la sphère de protection de la disposition dont il critique l'application arbitraire (DUBEY/ ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 711 p. 250; THIERRY TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 1373 p. 451). Quant au principe de la légalité, sous réserve de sa signification particulière en droit pénal et en droit fiscal, il ne peut être invoqué directement et indépendamment d'un droit fondamental par la voie du recours constitutionnel subsidiaire (cf.
ATF 129 I 161 consid. 2.1 p. 162 s.; arrêts 8C_832/2016 du 12 octobre 2017; 8D_9/2013 du 11 août 2014 consid. 5.1). Il ne saurait en aller différemment du principe de non-rétroactivité des lois. Cela dit, dans le cas d'espèce, ni l'ancien art. 12 al. 1 LTrait - qui attribuait au Conseil d'Etat la compétence décisionnelle en matière d'annuité du personnel - ni la loi 11834 ne visent à accorder un droit au canton ou à protéger ses intérêts prétendument lésés, étant rappelé que, selon les considérations non contestées du jugement attaqué, les modifications légales n'avaient pas pour objet de supprimer les annuités du personnel. Par conséquent, le canton, qui ne se trouve pas dans la sphère de protection des dispositions qu'il invoque, ne dispose au final que d'un intérêt de fait, de nature économique, à l'annulation ou à la modification du jugement attaqué, ce qui n'est pas suffisant au regard de l'
art. 115 let. b LTF. Aussi, ne se justifie-t-il pas de reconnaître à la collectivité publique, en raison de son seul statut d'employeur, la qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire dans le domaine du droit de la fonction publique. C'est dans ce sens qu'il convient de trancher la question laissée ouverte en dernier lieu à l'
ATF 142 II 259.