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Urteilskopf

138 I 131


11. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public dans la cause Comité d'initiative Sauver Lavaux et consorts contre Neyroud et consorts, Grand Conseil et Conseil d'Etat du Canton de Vaud (recours en matière de droit public)
1C_578/2010 et autres du 20 décembre 2011

Regeste

Art. 34, 36 Abs. 2 und 3, Art. 49 BV; Art. 33 RPG; Gültigkeit der kantonalen Volksinitiative "Sauver Lavaux".
Die Initiative zielt insbesondere auf die unmittelbare Anwendbarkeit der im kantonalen Gesetz vom 12. Februar 1979 über den Schutzplan für das Gebiet von Lavaux enthaltenen Grundsätze und der dazugehörigen Karte ab. Sie schafft überdies eine Planungszone für den Zeitraum der Anpassung der Karte. Es handelt sich daher um eine einem Nutzungsplan vergleichbare Massnahme, die den Anforderungen von Art. 33 RPG untersteht (E. 4).
Die Initiative sieht keinerlei Einsprache- und Beschwerderecht gegen diese Planungsmassnahmen vor. Das demokratische Gesetzgebungsverfahren kann jedoch als Ersatz für die öffentliche Auflage dienen (E. 5.1-5.3). Art. 33 RPG ist ausserdem unmittelbar anwendbar, so dass gegen sich aus der Initiative ergebende Massnahmen eine Beschwerdemöglichkeit an eine Behörde mit freier Prüfungsbefugnis eingerichtet werden muss (E. 5.4).
Weder die Festlegung der Freihaltezone noch die Einrichtung einer Planungszone verletzen Bundesrecht (E. 6).
Der Eingriff in die Gemeindeautonomie ist im vorliegenden Fall zulässig (E. 7).
Mangels offensichtlichen Widerspruchs zum übergeordneten Recht muss die Initiative in Anwendung des Grundsatzes "in dubio pro populo" als zulässig erklärt werden.

Sachverhalt ab Seite 132

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A. Le 14 août 2009, le Département de l'intérieur du canton de Vaud a constaté l'aboutissement de l'initiative populaire intitulée "Sauver Lavaux". Celle-ci tend à modifier la loi cantonale sur le plan de protection de Lavaux du 12 février 1979 (LLavaux; RSV 701.43). Les dispositions modifiées de la loi (ci-après: nLLavaux) sont notamment les suivantes:
Art. 1er (modification des buts de la loi comprenant désormais l'intégration des exigences découlant de l'inscription au patrimoine mondial de l'UNESCO)
Art. 4 (nouveau)
1 La présente loi et la carte annexée sont directement applicables.
2 Les règlements et plans communaux qui ne s'y conforment pas sont nuls.
3 Aucun permis de construire, démolir ou transformer ne peut être accordé si le projet ne respecte pas strictement les dispositions de la présente loi.
4 Les communes peuvent adopter des dispositions plus restrictives.
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(Selon l'art. 4 actuel, la loi et la carte annexée ont force obligatoire pour les autorités uniquement, le statut juridique de la propriété étant régi par les plans et règlements communaux, sous réserve des dispositions transitoires) (...)
Art. 18
Le territoire des villages et hameaux est régi par les principes suivants:
(let. a à e: sans changement)
f) (nouveau) Les bâtiments existants sont protégés dans la mesure où ils présentent un caractère architectural traditionnel; leur démolition peut être autorisée à titre exceptionnel si elle est justifiée par des motifs objectifs s'opposant à leur conservation.
g) (nouveau) A l'exception des constructions souterraines (par ex. parkings, hangars viticoles) toute construction nouvelle est exclue. Les reconstructions ne peuvent être autorisées que dans les limites des volumes existants et doivent respecter le caractère de l'ensemble; des exceptions de peu d'importance peuvent être consenties pour autant qu'elles répondent à des besoins avérés et prépondérants de l'exploitation viticole.
h) (nouveau) Les espaces extérieurs (jardins, potagers, cours) sont dans la règle protégés.
Art. 19
Le territoire de centre ancien de bourgs est régi par les principes suivants:
(let. a à e: sans changement;
let. f, g, h nouveaux, comme la disposition précédente)
Art. 20 (nouveau)
1 Dans les territoires d'agglomérations I et II, les secteurs n'ayant pas encore été colloqués en zone à bâtir, n'ayant pas encore fait l'objet d'un plan partiel d'affectation ou d'un plan de quartier ou dont ces derniers n'ont pas fait l'objet d'un commencement d'exécution ou encore, les secteurs n'étant pas équipés lors de l'adoption du principe constitutionnel de sauvegarde inscrit à l'article 52a de la Constitution du 14 avril 2003 sont en principe inconstructibles et soumis aux articles 15 et 16 de la présente loi.
2 Les secteurs des territoires d'agglomération I et II qui ont été colloqués en zone à bâtir ou équipés avant l'adoption du principe constitutionnel de sauvegarde inscrit à l'article 52a de la Constitution du 14 avril 2003 sont régis par les principes suivants:
a) Dans le territoire d'agglomération I: ils sont destinés à l'habitat en prédominance et peuvent accueillir toutes les activités compatibles avec cette fonction ainsi que les équipements collectifs nécessaires. Les constructions nouvelles ont une hauteur maximum de trois niveaux, y compris les parties dégagées par la pente.
b) Dans le territoire d'agglomération II: ils sont destinés à l'habitat en prédominance; les équipements collectifs et les activités y sont tolérés dans
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la mesure où ils sont compatibles avec le voisinage. L'implantation des constructions nouvelles est adaptée à la configuration du sol; leurs volumes ne présentent pas de lignes saillantes dans le paysage. Le site naturel ainsi que l'arborisation en particulier sont prédominants, dans toute la mesure compatible avec la culture de la vigne, par rapport au site construit. Les constructions nouvelles ont une hauteur maximum de deux niveaux, y compris les parties dégagées par la pente. La configuration générale du sol est maintenue. (...)
Art. 34 (nouveau)
Les dispositions et décisions d'application de la présente loi peuvent faire l'objet d'un recours à la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal qui exerce un libre pouvoir d'examen.
Art. 35 Dispositions transitoires et finales (nouveau)
1 La carte annexée à la loi du 12 février 1979 sur le plan de protection de Lavaux reste en vigueur.
2 Elle sera révisée conformément à la présente loi dans un délai de 5 ans à compter de son acceptation par le peuple.
3 Les terrains non encore construits ne peuvent pas être bâtis jusque là, sauf s'ils font l'objet d'une autorisation donnée par le Département à titre exceptionnel et s'il s'agit de petites extensions ou dépendances.
4 Les procédures de planification en cours sont suspendues jusqu'à l'adoption du plan révisé.
5 Le plan révisé est soumis à la procédure de l'article 73 LATC.

B. Dans son préavis du mois de décembre 2009 au Grand Conseil, le Conseil d'Etat vaudois proposait de constater la nullité de l'initiative, car elle ne respectait pas le droit supérieur (...).

C. Par décret du 8 juin 2010, le Grand Conseil vaudois a, contrairement à la proposition du Conseil d'Etat, constaté la validité de l'initiative. Cette décision a fait l'objet de trois recours auprès de la Cour constitutionnelle du Tribunal cantonal du canton de Vaud. (...)

D. Par arrêt du 16 novembre 2010, la Cour constitutionnelle a admis les recours. Telle que modifiée par l'initiative, la nLLavaux constituait matériellement un plan d'affectation. Or, les intéressés ne disposaient pas du droit de se prononcer, puis de recourir contre les mesures d'aménagement prévues, contrairement à l'art. 33 LAT (RS 700). Le recours prévu à l'art. 34 nLLavaux ne concernait que les mesures d'application et non la planification elle-même. Le recours à la Cour constitutionnelle contre la loi ne satisfaisait pas aux exigences de l'art. 33 al. 2 let. b LAT, faute d'un pouvoir de libre examen. L'institution d'une zone réservée (art. 35 nLLavaux) se heurtait aux mêmes objections et ne respectait pas le principe de la proportionnalité
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puisqu'elle s'appliquait de manière générale. Le manque de contrôle judiciaire violait aussi les art. 6 CEDH, 29 al. 2 Cst. et 82 al. 2 LTF. Les art. 18, 19 et 20 nLLavaux empêchaient, par leur caractère schématique, une pesée globale des intérêts pertinents, et ne laissaient pas à l'autorité de planification une liberté d'appréciation suffisante. Amputée de ses dispositions problématiques (soit les art. 4, 18 à 20 et 35 nLLavaux), l'initiative s'en trouverait totalement dénaturée, de sorte qu'elle devait être entièrement invalidée.

E. Cet arrêt fait l'objet de plusieurs recours en matière de droit public (...) tendant à l'annulation ou à la réforme de l'arrêt de la Cour constitutionnelle et à la validité de l'initiative "Sauver Lavaux". (...)
Le Tribunal fédéral a admis les recours, a annulé l'arrêt attaqué et a confirmé le décret de validation du Grand Conseil.
(extrait)

Erwägungen

Extrait des considérants:

4. Les recourants contestent les motifs d'invalidation retenus par la Cour constitutionnelle. Ils reprochent à cette dernière d'avoir méconnu qu'une initiative populaire doit s'interpréter dans le sens le plus favorable à ses auteurs. Ils rappellent que la protection de Lavaux a fait l'objet d'une disposition dans l'ancienne Constitution vaudoise (art. 6bis ). Celle-ci n'ayant pas été reprise dans la Constitution de 2003, une initiative populaire avait été lancée et largement acceptée afin d'ajouter l'art. 52a Cst./VD, lequel pose des principes de protection du site dans les termes suivants:
Art. 52a
1 La région de Lavaux, de la Lutrive à Corsier, est déclarée site protégé.
2 Toute atteinte à sa protection peut être attaquée sur le plan administratif ou judiciaire par ceux qui sont lésés et par les associations de protection de la nature et celles de la protection du patrimoine.
3 La loi d'application respecte strictement le périmètre en vigueur, notamment par le maintien de l'aire viticole et du caractère traditionnel des villages et hameaux.
Selon les recourants, la loi actuelle ne serait pas suffisamment contraignante pour prévenir les nombreux abus, de sorte que la protection actuelle devrait être renforcée. Les recourants contestent ensuite que la nLLavaux, en tant que simple mesure de renforcement de la protection découlant de la loi actuelle, puisse être considérée comme un plan d'affectation auquel s'appliqueraient les exigences de l'art. 33
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LAT
. En l'état, l'initiative ne fait que prévoir des principes qui se trouvent d'ailleurs déjà dans la loi actuelle, sans régir exhaustivement l'utilisation du sol. La carte doit être adaptée par la suite, et l'initiative réserve la planification communale. L'instauration d'une zone réservée - ou d'une mesure de caractère provisionnel - s'expliquerait précisément dans l'attente d'une planification future. Les recourants soutiennent ensuite que la publication de la loi et la possibilité d'un recours à la Cour constitutionnelle permettraient d'assurer une protection juridique suffisante. Les propriétaires concernés pourraient aussi agir lors de l'adoption de la nouvelle carte, ou à l'encontre de décisions d'application.

4.1 Selon l'art. 14 LAT, les plans d'affectation règlent le mode d'utilisation du sol (al. 1). Ils délimitent en premier lieu les zones à bâtir, les zones agricoles et les zones à protéger (al. 2). Ils peuvent aussi prévoir d'autres zones d'affectation comme des zones non affectées ou des territoires dont l'affectation est différée (art. 18 al. 1 et 2 LAT). Au contraire des plans directeurs qui n'ont force obligatoire que pour les autorités (art. 9 al. 1 LAT), les plans d'affectation ont force obligatoire pour chacun (art. 21 LAT); ils conditionnent notamment l'octroi des autorisations de construire (art. 22 al. 1 let. a LAT).

4.2 L'actuelle LLavaux et la carte annexée n'ont, selon l'art. 4, force obligatoire que pour les autorités. Le "statut juridique de la propriété" est régi par les plans et règlements communaux. Les territoires mentionnés dans la LLavaux et les principes applicables doivent, selon l'art. 7, être transposés dans les plans et règlements communaux. Matériellement, il s'agit donc d'un plan directeur cantonal (ATF 113 Ib 229 consid. 2b p. 301/302).
L'initiative tend en revanche à rendre "directement applicables" la LLavaux et la carte annexée (art. 4 al. 1 nLLavaux). Ces instruments deviendraient alors obligatoires pour chacun; les plans et règlements cantonaux qui ne s'y conforment pas seraient nuls et aucun permis de construire, de démolir ou de transformer ne pourrait être accordé si le projet ne respecte pas strictement les dispositions de la loi. L'initiative prévoit aussi (art. 35 al. 3 nLLavaux) que les terrains non encore construits ne peuvent être bâtis tant que la carte n'a pas été révisée et crée ainsi une zone réservée, au sens de l'art. 27 LAT. Le but poursuivi par l'initiative est ainsi un changement de régime de la LLavaux, laquelle disposerait d'une force obligatoire généralisée et déploierait alors des effets directs sur l'aménagement du secteur concerné.
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Sur le vu des mesures suffisamment précises et détaillées qu'elle contient, la modification de la LLavaux proposée par les initiants doit être assimilée matériellement à un plan d'affectation. En effet, comme un plan d'affectation (art. 14 al. 1 LAT), elle détermine de façon contraignante le mode, le lieu et la mesure de l'utilisation admissible du sol (cf. ATF 135 II 328 consid. 2.2 p. 333; ATF 123 II 91 consid. 1a/aa p. 91; WALDMANN/HÄNNI, Raumplanungsgesetz, 2006, n° 3 ad art. 14 LAT; MOOR, in Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 1999, n° 1 ad art. 14 LAT et les références citées). Même si la carte annexée à la loi est destinée à être adaptée, selon la procédure prévue à l'art. 73 de la loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les constructions (LATC [RSV 700.11]; art. 35 al. 5 nLLavaux), elle demeure en vigueur (art. 35 al. 1) et est déclarée d'application immédiate (art. 4 al. 1). Par ailleurs, la disposition transitoire de l'art. 35 al. 3 nLLavaux empêche entretemps l'octroi d'autorisations de construire sur les terrains non encore bâtis. La Cour constitutionnelle y voit avec raison la création d'une zone réservée au sens de l'art. 27 LAT, ce qui constitue une mesure d'aménagement assimilable à un plan d'affectation puisqu'elle détermine l'utilisation du sol durant une certaine période.
Partant, une telle réglementation est soumise aux exigences de l'art. 33 LAT en matière de protection juridique.

5. Selon l'art. 33 LAT, les plans d'affectation sont mis à l'enquête publique (al. 1). Le droit cantonal prévoit au moins une voie de recours contre les décisions et les plans d'affectation fondés sur la LAT (al. 2). Il doit en outre prévoir que la qualité pour recourir est reconnue au moins dans les mêmes limites que pour le recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, et qu'une autorité de recours au moins ait un libre pouvoir d'examen (al. 3). Le but de cette disposition est de satisfaire aux exigences des art. 6 CEDH et 29a Cst. en garantissant, dans le domaine du droit de l'aménagement du territoire et des constructions, une protection juridique globale (ATF 135 II 286 consid. 5.3 p. 295). Doivent être mis à l'enquête publique non seulement les plans d'affectation représentés sous forme de carte, mais aussi la réglementation sur les zones et les constructions qui les accompagne.

5.1 Les buts de la mise à l'enquête sont de permettre à chacun de prendre connaissance du projet, de servir de point de départ de la procédure d'opposition et de permettre l'exercice du droit d'être
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entendu (ATF 135 II 286 consid. 5.3 p. 295; AEMISEGGER/HAAG, Commentaire LAT, 2009, n° 25 ad art. 33 LAT). L'art. 33 LAT ne comportant pas de précision sur ce point, c'est au droit cantonal qu'il appartient d'indiquer les modalités pratiques de la mise à l'enquête. Lorsque l'adoption des plans de zones est du ressort du législateur, la procédure d'opposition peut avoir lieu devant cette autorité qui dispose d'un libre pouvoir d'examen (ATF 108 Ib 479 consid. 3c p. 484).

5.2 Lorsque le droit cantonal ne l'exclut pas, une mesure concrète d'aménagement du territoire peut être proposée par voie d'initiative populaire (ATF 123 I 175; arrêt 1P.387/2006 du 19 septembre 2007 consid. 3.2; MOOR, Commentaire LAT, introduction n° 139; n° 24 ad art. 14 et les références citées à la note 27). Tel est le cas en droit vaudois, la loi du 16 mai 1989 sur l'exercice des droits politiques (LEDP; RSV 160.01) ne posant aucune restriction quant à l'objet du droit d'initiative. Dans un tel cas, une mise à l'enquête préalable n'est pas possible, et l'information au public est celle qui est donnée à la population en vue de la votation, ou celle qui résulte de la publication officielle (lorsque le Grand Conseil approuve le projet, sans référendum; art. 102 LEDP). Le processus législatif et démocratique peut alors tenir lieu de mise à l'enquête. Il est admis en effet que la procédure de recours puisse s'ouvrir après l'adoption de la mesure de planification par l'organe compétent. Dans la mesure où la loi, une fois adoptée, fait l'objet d'une information auprès des intéressés, il est suffisant que ces derniers puissent se défendre pour la première fois devant une autorité de recours, sans avoir eu la possibilité de le faire déjà devant l'autorité de planification (ATF 114 Ia 233 consid. 2c/cc p. 239; AEMISEGGER/HAAG, op. cit., n° 19 ad art. 33 LAT).

5.3 Il n'est pas contesté que la procédure d'adaptation de la carte annexée à la loi, dans le délai fixé à l'art. 35 nLLavaux, satisfait aux exigences de l'art. 33 LAT. En effet, selon l'art. 35 al. 5 nLLavaux, cette adaptation doit avoir lieu conformément à l'art. 73 LATC, soit selon la procédure ordinaire d'enquête et d'adoption des plans d'affectation cantonaux.

5.4 Selon la cour cantonale, la violation des garanties de procédure concerne avant tout le régime transitoire résultant d'une part du nouveau régime juridique de la nLLavaux (soit l'application directe et contraignante pour chacun des principes énoncés dans la loi) et, d'autre part, de la création d'une zone réservée au sens de l'art. 27 LAT, dans le délai d'adaptation de la carte. L'initiative ne prévoit, en effet, aucune protection juridique à l'encontre de ces différentes
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mesures; l'instauration d'une zone réservée immédiatement applicable n'est pas soumise à la procédure applicable aux plans d'affectation, comme le prévoit l'art. 73 al. 5 LATC. Sur ce point, la nLLavaux constitue une lex specialis par rapport à cette dernière disposition.
L'argument principal à l'encontre de l'initiative tient donc à l'impossibilité d'exercer un droit de recours contre la loi elle-même (en particulier les mesures prévues à ses art. 4 et 35), auprès d'une autorité disposant d'un libre pouvoir d'examen. Les parties s'accordent à considérer que l'art. 34 nLLavaux, qui permet de recourir auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal, ne se rapporte qu'aux mesures d'application et non à la loi elle-même.

5.4.1 Selon l'art. 3 de la loi du 5 octobre 2004 sur la juridiction constitutionnelle (LJC; RSV 173.32), la juridiction constitutionnelle statue sur la conformité au droit des lois et décrets du Grand Conseil, par le biais de requêtes formées dans les vingt jours dès la publication officielle de l'acte attaqué (cf. art. 136 al. 1 let. a Cst./VD). Comme le relève la Cour constitutionnelle, les art. 8 et 13 LJC limitent le pouvoir d'examen aux griefs invoqués, sauf en cas de violation manifeste du droit supérieur. Il est vrai également qu'en vertu de l'art. 4 LJC, sont soustraits au contrôle de conformité les plans d'affectation cantonaux et communaux, les règlements qui les accompagnent, de même que les décisions assimilées à des plans d'affectation cantonaux et communaux en vertu de la loi qui leur est applicable.

5.4.2 L'autorité judiciaire cantonale de recours ordinaire en matière de plans d'affectation est la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal vaudois (art. 60 LATC). Celle-ci doit être saisie dans les trente jours qui suivent la notification de l'acte attaqué (art. 95 de la loi vaudoise du 28 octobre 2008 sur la procédure administrative [LPA/VD; RSV 173.36]). C'est d'ailleurs cette juridiction qui est chargée, selon l'art. 34 nLLavaux, de statuer sur les recours dirigés contre les "dispositions et décisions d'application" de la loi. Le droit cantonal ne prévoit toutefois pas de recours auprès de cette autorité à l'encontre d'une loi cantonale portant sur un plan d'affectation et adoptée selon la procédure de l'initiative législative. Cela semble exclure tout recours qui serait dirigé directement contre la nouvelle loi.

5.4.3 S'il devait en résulter un défaut de protection juridique, cela ne serait toutefois pas le fait de l'initiative elle-même, mais des dispositions du droit cantonal de procédure qui se révèlent inadaptées lorsqu'une mesure d'aménagement n'est pas adoptée selon la
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procédure ordinaire, mais en vertu d'une initiative populaire. Or, l'art. 33 LAT s'applique de manière directe et autonome dans la procédure cantonale, sans qu'il soit besoin d'adopter une législation cantonale d'exécution (ATF 111 Ib 13 consid. 3b p. 15; AEMISEGGER/HAAG, op. cit., nos 5-6 ad art. 33 LAT). Les cantons doivent certes prévoir les dispositions d'organisation judiciaire et de procédure nécessaires, mais en tant que norme de droit fédéral d'application directe, l'art. 33 LAT doit primer sur les dispositions contraires - ou lacunaires - du droit cantonal (WALDMANN/HÄNNI, Raumplanungsgesetz, 2006, n° 3 ad art. 33 LAT).

5.4.4 Il appartiendra dès lors aux autorités cantonales d'assurer une protection juridique suffisante en désignant quelle juridiction cantonale sera compétente pour statuer sur les recours qui pourront être formés directement après l'adoption de la nLLavaux, et les traiter avec un plein pouvoir d'examen comme l'exige l'art. 33 al. 2 LAT. La juridiction saisie devra en outre tenir compte des principes constitutionnels déduits des art. 9 et 29 al. 1 Cst., ainsi que du principe de coordination (art. 25a LAT), qui nécessite notamment l'intervention d'une instance cantonale avant le Tribunal fédéral (cf. art. 86 al. 2 LTF; ATF 123 II 231 concernant l'ancien art. 98a OJ).
Le silence du texte de l'initiative sur la protection judiciaire ne saurait, par conséquent, constituer un motif d'invalidation. Les objections tirées du droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst. et 6 CEDH) doivent être rejetées dans la même mesure.

6. La cour cantonale considère également que les art. 18 à 20 nLLavaux auraient un caractère "détaillé et schématique" qui empêcherait l'autorité de planification d'effectuer la pesée d'intérêts exigée par l'art. 3 LAT. Cette objection ne résiste pas non plus à l'examen.

6.1 La cour cantonale admet avec raison qu'il est possible au regard de l'art. 15 LAT de déclarer inconstructible une partie de la zone à bâtir existante, pour des motifs tenant notamment à la protection du paysage. Rien n'empêche par ailleurs l'autorité cantonale de planification de déterminer elle-même les intérêts publics prépondérants qui doivent présider à l'élaboration des plans d'affectation. Or, la volonté des initiants est de faire prévaloir un objectif de protection générale de l'ensemble du site de Lavaux, ce qui est conforme au principe d'aménagement prévu à l'art. 3 al. 2 LAT. Si, dans certains cas particuliers, l'interdiction générale de bâtir qui découle de l'art. 35 al. 3 nLLavaux devait apparaître contraire à certains principes
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d'aménagement, les personnes concernées disposeront, comme cela est relevé ci-dessus, d'occasions suffisantes pour faire valoir leurs objections dans le cadre de la protection juridique imposée par l'art. 33 LAT.

6.2 L'institution d'une zone réservée, selon l'art. 35 al. 3 nLLavaux, ne viole pas non plus le droit fédéral. La période prévue, de cinq ans (art. 35 al. 2 nLLavaux), est en effet conforme à ce qu'autorise l'art. 27 al. 1 LAT. La cour cantonale s'interroge certes sur les conséquences d'un dépassement de ce délai, mais s'il devait en résulter une situation non conforme au droit fédéral, cela ne serait pas le fait de l'initiative elle-même.
Il est vrai que la zone concernée par le moratoire est d'une étendue considérable puisqu'elle couvre le territoire de plusieurs communes. Les conditions posées à l'art. 27 LAT n'en sont pas moins réalisées. En effet, l'instauration d'une zone de planification suppose réunies trois conditions matérielles, soit une intention de modifier la planification (qui fait en l'occurrence l'objet même de l'initiative), une délimitation exacte des territoires concernés (en l'espèce clairement définis par la carte actuelle) et le respect du principe de la proportionnalité: la délimitation des zones concernées ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire au maintien d'une situation en vue de la nouvelle planification. Ce principe est respecté dès lors que la zone réservée couvre l'ensemble du territoire concerné par la future carte (RUCH, in Commentaire LAT, 2009, n° 30 ad art. 27 LAT). L'art. 35 al. 3 nLLavaux permet d'ailleurs certaines exceptions, limitées aux petites extensions et dépendances, afin d'atténuer la rigueur de la disposition.
L'instauration d'une zone réservée ne saurait dès lors être considérée en soi comme disproportionnée, et la protection juridique imposée par l'art. 33 LAT doit, sur ce point également, permettre aux personnes qui estiment subir une atteinte excessive, de faire valoir leurs objections.

7. Les intimés se prévalent de l'autonomie communale garantie à l'art. 139 Cst./VD. Ce grief n'a pas été examiné par la cour cantonale, et doit donc l'être à ce stade. Alors que la loi actuelle charge les communes d'élaborer les plans d'affectation, l'initiative empêcherait de prévoir des nouvelles constructions dans les zones de village et hameaux et de centres anciens de bourgs, et ne laisserait aux communes que la possibilité d'adopter des dispositions plus restrictives.
BGE 138 I 131 S. 142

7.1 L'art. 50 al. 1 Cst. dispose que l'autonomie communale est garantie dans les limites fixées par le droit cantonal. Selon la jurisprudence, une commune bénéficie de la protection de son autonomie dans les domaines que le droit cantonal ne règle pas de manière exhaustive, en lui laissant une liberté de décision relativement importante. L'existence et l'étendue de l'autonomie communale dans une matière concrète sont déterminées essentiellement par la constitution et la législation cantonales (ATF 128 I 3 consid. 2a p. 8; ATF 124 I 223 consid. 2b p. 226 et 227 et les arrêts cités).
Selon l'art. 138 al. 1 Cst./VD, les communes assument, outre les tâches propres qu'elles accomplissent volontairement, celles que la loi ou la Constitution leur attribuent. Selon l'art. 139 Cst./VD, les communes vaudoises disposent d'autonomie en particulier dans la gestion du domaine public et du patrimoine communal (let. a) et en matière d'aménagement local du territoire (let. d).

7.2 Sur le territoire concerné par la LLavaux, les compétences communales en matière d'aménagement sont déjà fortement restreintes. Selon l'art. 52 al. 2 Cst./VD, les zones et régions protégées sont définies par la loi. La LLavaux et la carte actuelles - qui équivalent à un plan directeur régional, ordinairement de la compétence des communes intéressées selon l'art. 42 LATC - sont contraignantes pour les autorités, et les communes doivent déjà obligatoirement transposer dans leurs plans et règlements les principes fixés dans la loi (art. 4, 6 à 8 LLavaux). Au demeurant, dans la mesure où l'autonomie communale est définie et précisée par la législation cantonale, celle-ci peut retirer aux communes une compétence spécifique, sans que cela ne viole l'autonomie constitutionnellement reconnue aux communes (arrêt P.741/1985 du 17 décembre 1986 consid. 2, in Jurisprudence administrative bernoise [JAB] 1987 p. 165). L'art. 45 LATC prévoit d'ailleurs expressément que l'Etat peut adopter des plans d'affectation cantonaux lorsqu'il s'agit, comme en l'espèce, de protéger les paysages, les sites, les rives de lacs ou de cours d'eau ou les ensembles méritant protection. Les communes disposent dans ce cadre d'un droit d'être entendues, puis de former opposition (art. 73 al. 1 LATC) et, le cas échéant, de recourir en invoquant leur autonomie. Dans ces conditions, l'initiative ne viole pas l'autonomie communale.

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