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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
4A_170/2021  
 
 
Arrêt du 2 juin 2021  
 
Ire Cour de droit civil  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales 
Hohl, Présidente, Kiss et May Canellas. 
Greffière: Mme Raetz. 
 
Participants à la procédure 
A.________ SA, 
représentée par Me Jean-Emmanuel Rossel, 
recourante, 
 
contre  
 
1. B.________, 
2. C.________, 
tous deux représentés par Me Christophe Wilhelm, 
intimés. 
 
Objet 
institution d'un contrôle spécial (art. 697a ss CO), 
 
recours contre le jugement rendu le 28 janvier 2021 par le Juge délégué de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (CS20.041274; 4/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ SA, dont le siège se trouve à..., est une société anonyme sans but lucratif active dans l'exploitation de différents établissements et centres d'enseignement. B.________ et C.________ en sont tous les deux actionnaires.  
 
A.b. Le 1er mars 2018, C.________ a déposé, avec d'autres actionnaires, une requête de contrôle spécial devant la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud, afin d'obtenir différentes informations sur la situation financière de la société.  
Cette requête a été rejetée par jugement du 28 mars 2018. 
 
A.c. Par courriers des 7 et 21 juillet 2020, C.________ a enjoint le conseil d'administration de A.________ SA d'ajouter plusieurs points à l'ordre du jour de l'assemblée générale fixée au 24 juillet 2020. Il a également requis la présence du réviseur lors de cette assemblée.  
Le 21 juillet 2020, C.________ a adressé un courriel au conseil d'administration, en déclarant user de son droit d'actionnaire à être renseigné (art. 697 CO). Il a posé plusieurs questions. 
Il n'est pas établi que A.________ SA ait répondu à ce courriel. 
 
A.d. L'assemblée générale ordinaire s'est tenue le 24 juillet 2020, sans la présence du réviseur.  
Par courriel du 25 juillet 2020 au conseil d'administration, C.________ a réitéré ses questions par écrit. Il a expliqué que lors de l'assemblée générale, le conseil d'administration n'y avait pas répondu, ou que partiellement. Il a requis l'institution d'un contrôle spécial. 
 
B.  
Le 21 octobre 2020, C.________ et B.________ ont déposé auprès de la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud une requête tendant à l'institution d'un contrôle spécial et ont formulé une liste de questions auxquelles l'expert devait être chargé de répondre. 
Par jugement du 28 janvier 2021, le Juge délégué de la Cour civile a ordonné le contrôle spécial de A.________ SA, a désigné D.________ en qualité de contrôleur spécial et a dit que la mission de celui-ci était de répondre à huit questions précisément libellées. 
 
C.  
A.________ SA (ci-après: la recourante) a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral, assorti d'une requête d'effet suspensif. Elle a conclu en substance à la réforme du jugement entrepris en ce sens que les conclusions de la requête de contrôle spécial soient rejetées. 
Invités à se déterminer sur la requête d'effet suspensif, B.________ et C.________ (ci-après: les intimés) ont conclu à son rejet. L'autorité précédente ne s'est pas prononcée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
La requête tendant à l'institution d'un contrôle spécial donne lieu à une procédure indépendante d'une éventuelle action en responsabilité, de sorte que la décision rendue à son sujet doit être considérée comme une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (arrêt 4A_385/2020 du 8 septembre 2020 consid. 1.1 et les références citées). 
Les conditions de recevabilité du recours sont réalisées sur le principe, notamment celle afférente au délai de recours (art. 100 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. Le recours peut être exercé pour violation du droit fédéral (art. 95 let. a LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine que les griefs invoqués, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 140 III 115 consid. 2). Le recourant doit discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 140 III 86 consid. 2). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, le Tribunal fédéral n'examine la violation d'un droit constitutionnel que si le grief a été invoqué et motivé de façon détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 135 III 397 consid. 1.4 in fine).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut rectifier ou compléter les constatations de l'autorité précédente que si elles sont manifestement inexactes ou découlent d'une violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). " Manifestement inexactes " signifie ici " arbitraires " (ATF 140 III 115 consid. 2; 135 III 397 consid. 1.5). Encore faut-il que la correction du vice soit susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). La critique de l'état de fait retenu est soumise au principe strict de l'allégation énoncé par l'art. 106 al. 2 LTF (ATF 140 III 264 consid. 2.3 et les références). La partie qui entend attaquer les faits constatés par l'autorité précédente doit expliquer clairement et de manière circonstanciée en quoi les conditions précitées seraient réalisées (ATF 140 III 16 consid. 1.3.1 et les références).  
 
3.  
En l'espèce, sous le titre " Faits ", la recourante se limite à alléguer que le jugement du 28 mars 2018 n'a pas été reproduit en entier dans le jugement attaqué, notamment s'agissant des questions proposées, alors que plusieurs de ces questions étaient les mêmes que dans la présente cause. Ce faisant, la recourante n'invoque pas, ni a fortiori ne démontre, que l'instance précédente aurait établi les faits de manière arbitraire en ne retranscrivant pas certains points du jugement du 28 mars 2018. 
 
4.  
Ensuite, la recourante dénonce une violation de son droit d'être entendue au sens de l'art. 29 al. 2 Cst., en lien avec la reproduction seulement partielle du jugement précité. 
On peine à discerner de quel aspect du droit d'être entendu se plaint la recourante. Quoi qu'il en soit, il est parfaitement légitime qu'un juge résume un document ou le reproduise partiellement, en se limitant aux points qui, sans arbitraire, lui paraissent utiles pour la décision à rendre (arrêt 4A_152/2011 du 6 juin 2011 consid. 2.2.1). Pour autant qu'il soit recevable, ce grief doit être rejeté. 
 
5.  
Dans le reste de son argumentation, la recourante mêle les faits et le droit. Elle n'invoque ni l'arbitraire, ni la violation de dispositions légales. On comprend néanmoins qu'elle fait valoir une transgression de l'art. 697b al. 2 CO dans la mesure où un contrôle spécial a été ordonné. 
 
5.1. L'art. 697b CO prévoit que si l'assemblée générale ne donne pas suite à la proposition d'instituer un contrôle spécial, certains actionnaires peuvent, dans les trois mois, demander au juge la désignation d'un contrôleur spécial (al. 1); les requérants y ont droit lorsqu'ils rendent vraisemblable que des fondateurs ou des organes ont violé la loi ou les statuts et qu'ils ont ainsi causé un préjudice à la société ou aux actionnaires (al. 2).  
 
5.2. La recourante commence par se prévaloir d'une incohérence entre les deux jugements rendus par l'autorité précédente. Elle se contente d'affirmer que certaines questions de la seconde requête étaient les mêmes que lors de la première, et que le juge avait alors refusé d'ordonner un contrôle spécial en niant la vraisemblance de violations de la loi et d'un éventuel dommage pour les actionnaires. La recourante ajoute que le résultat comptable lors de la seconde requête était bénéficiaire. Or, dans le jugement attaqué, l'instance précédente a indiqué qu'il ne s'agissait pas des mêmes questions, en détaillant leur objet, et que la situation de la société était différente de celle qui prévalait lors de la première procédure. Elle a en outre expliqué avec soin quelles dispositions légales n'étaient vraisemblablement pas respectées par la société dans le cadre de la seconde procédure. Les seules affirmations auxquelles se livre la recourante, pour autant qu'elles soient recevables, ne sont pas propres à remettre en cause le bien fondé des considérations de l'instance précédente.  
La recourante allègue ensuite que les intimés n'avaient pas d'intérêt protégé à obtenir un contrôle spécial. En effet, ils connaissaient les réponses à leurs questions puisque C.________ avait été administrateur de la société et qu'elle avait répondu à toutes les questions dans son écriture déposée devant l'instance précédente. Dans son recours, elle a brièvement commenté ces réponses. Toutefois, contrairement à ce que soutient la recourante, les quelques indications qu'elle a formulées dans son écriture auprès de l'instance précédente ne permettent pas de considérer que des réponses complètes auraient été données aux questions posées par les intimés. Au surplus, elle ne s'en prend pas clairement à la motivation de l'instance précédente, laquelle a détaillé les raisons l'ayant amenée à conclure à l'absence de réponses satisfaisantes données par le conseil d'administration. Il en va de même s'agissant des explications de l'instance précédente selon lesquelles B.________ n'avait jamais été membre du conseil d'administration et C.________ n'y siégeait plus depuis trois ans, de sorte que leur position ne leur permettait pas de connaître déjà les réponses aux questions litigieuses. 
Enfin, dans les quelques lignes que consacre la recourante aux autres chapitres de son recours, elle ne répond pas non plus aux exigences de motivation prévalant devant le Tribunal fédéral, puisqu'elle se limite à de simples affirmations, sans discuter les motifs du jugement attaqué. 
 
6.  
Au vu de ce qui précède, le recours, manifestement mal fondé aux termes de l'art. 109 al. 2 let. a LTF, doit être rejeté, dans la faible mesure de sa recevabilité. 
La requête d'effet suspensif se trouve dès lors privée d'objet. 
La recourante, qui succombe, prendra en charge les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). De plus, elle versera une indemnité de dépens aux intimés pour leur détermination sur la requête d'effet suspensif (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 5'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
La recourante versera aux intimés une indemnité de 300 fr. à titre de dépens. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 2 juin 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Hohl 
 
La Greffière : Raetz