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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
9C_586/2018  
 
 
Arrêt du 7 janvier 2019  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Pfiffner, Présidente, Parrino et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Cretton. 
 
Participants à la procédure 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, 
avenue du Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
recourant, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par Me Manuela Ryter Godel, avocate, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (révision), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 12 juillet 2018 (AI 192/16 - 204/2018). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ est né en 1963. Serrurier de formation, il occupait un poste de maître artisan chargé d'entretenir et de réparer le matériel au sein des ateliers de la société B.________. Le 9 septembre 2003, il a sollicité des prestations de l'assurance-invalidité en raison d'une atteinte à l'épaule droite qui l'empêchait d'exercer son métier depuis le 29 août 2002.  
Sur la base des informations recueillies auprès des médecins traitants, qui avaient évoqué une hypoacousie et diverses atteintes à l'épaule droite, opérées, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: l'office AI) avait d'abord retenu une capacité totale de travail dans l'activité adaptée proposée par l'employeur, mais refusée par l'assuré, et avait rejeté la demande de ce dernier (décision du 26 mai 2005). Compte tenu néanmoins de l'aggravation de la situation, alléguée par l'intéressé dans son opposition à ladite décision et attestée par les médecins traitants, le Service médical régional de l'office AI (SMR) a reconnu l'existence de différentes affections (état dépressif sévère, état de stress post-traumatique et retard mental sur le plan psychiatrique; syndrome parkinsonien et syndrome de Meige sur le plan neurologique; status après opérations de la coiffe des rotateurs sur le plan rhumatologique) totalement incapacitantes depuis le mois de février 2006. Se fondant sur ces conclusions, l'office AI a dès lors alloué à A.________ une rente entière d'invalidité à compter du 1er février 2007 (décision sur opposition du 20 juillet 2007). 
L'administration a également pris en charge les coûts concernant deux appareils acoustiques (communication du 13 août 2009). 
 
A.b. Au terme d'une procédure de révision initiée le 22 novembre 2012, durant laquelle les différents médecins traitants consultés ont maintenu leurs conclusions au sujet d'une incapacité totale de travail sur la base de diagnostics pour l'essentiel identiques à ceux posés précédemment (troubles des registres psychiatrique, neurologique et rhumatologique), l'office AI a constaté l'absence d'évolution de la situation médicale de l'assuré et confirmé son droit à une rente entière (communication du 20 décembre 2013).  
 
A.c. Au cours de l'instruction d'une requête d'allocation pour impotent déposée le 28 janvier 2014, l'intéressé a averti l'administration qu'il avait été incarcéré du 12 mai au 25 juillet 2014. Vu les informations recueillies auprès du Ministère public, l'office AI a d'abord suspendu le versement de la rente à compter du 30 avril 2015 par voie de mesures pré-provisionnelles (décision du 24 avril 2015), puis provisionnelles (décision du 23 juin 2015 confirmée par ordonnance du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 3 septembre 2015). Il a ensuite requis un nouvel avis des médecins traitants qui ont pour l'essentiel confirmé leurs précédentes conclusions. Il a également mandaté la Clinique romande de réadaptation (CRR) pour qu'elle réalise une expertise pluridisciplinaire (rhumatologie/médecine interne, neurologie, psychiatrie). Les experts ont diagnostiqué un trouble factice, en plus de la surdité bilatérale et du status post-opératoire de l'épaule, et un possible blépharospasme n'influençant pas la capacité de travail dans une activité adaptée (rapport du 11 février 2016).  
Se référant à l'expertise, l'administration a considéré que A.________ avait simulé les maladies qui lui avaient permis d'obtenir des prestations, ce qui constituait selon elle un fait nouveau, qui justifiait de revenir sur l'octroi de la prestation; elle a supprimé la rente entière avec effet rétroactif au 1er février 2007 (décision du 27 juin 2016). 
 
B.   
L'assuré a interjeté un recours contre la décision administrative auprès de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud. Après avoir fait verser à la procédure le dossier pénal le concernant, la cour a partiellement admis son recours et réformé ladite décision en ce sens que la rente entière d'invalidité était supprimée à partir du 1er février 2012 (jugement du 12 juillet 2018). 
 
C.   
L'autorité administrative requiert l'annulation de ce jugement et conclut à la confirmation de sa décision du 27 juin 2017, par la voie du recours en matière de droit public. 
 
D.   
Le recours formé par A.________ contre le jugement du 12 juillet 2018 a été déclaré irrecevable par arrêt 9C_622/2018 du 5 décembre 2018. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par celle-ci (art. 105 al. 1 LTF) mais peut les rectifier et les compléter d'office si des lacunes et des erreurs manifestes apparaissent d'emblée (art. 105 al. 2 LTF). En principe, il n'examine que les griefs motivés (art. 42 al. 2 LTF), surtout s'ils portent sur la violation des droits fondamentaux (art. 106 al. 2 LTF). Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Le recourant peut critiquer la constatation des faits qui ont une incidence sur le sort du litige seulement s'ils ont été établis en violation du droit ou de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF). 
 
2.  
 
2.1. La juridiction cantonale a réformé la décision administrative litigieuse en ce sens que la rente allouée initialement a été supprimée rétroactivement avec effet au 1er février 2012 et non au 1er février 2007.  
Pour aboutir à cette conclusion, elle a rappelé les situations médicales qui existaient lors de la décision du 20 juillet 2007 et de la communication du 20 décembre 2013, ainsi que pendant la procédure ayant conduit le 29 avril 2015 à la condamnation pénale de l'intimé pour vol, vol en bande et par métier, dommage à la propriété, recel, violation de domicile et infractions à la loi fédérale sur les armes. Au contraire de ce qu'avait conclu l'office recourant, elle a considéré que les renseignements médicaux recueillis à l'époque de la décision et de la communication mentionnées ne permettaient pas d'exclure que les troubles constatés initialement aient cédé le pas à un contexte de simulation. Dès lors, le trouble factice retenu par les médecins de la CRR ne constituait pas un fait nouveau légitimant une révision au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA. La cour cantonale a aussi relevé que le trouble factice ne justifiait pas plus une reconsidération au sens de l'art. 53 al. 2 LPGA. Elle a encore apprécié le rapport d'expertise et l'a confronté aux autres rapports médicaux récoltés. Elle en a déduit une amélioration notable de l'état de santé de l'assuré au sens de l'art. 17 al. 1 LPGA et a fixé la survenance de cette amélioration au mois de février 2012 au regard du développement des activités délictueuses. 
 
2.2. L'administration soutient que les constatations réalisées par les experts constituent un fait nouveau justifiant une application de l'art. 53 al. 1 LPGA de sorte que la rente doit être supprimée avec effet au 1er février 2007.  
Elle prétend que les experts ont clairement établi l'absence de trouble incapacitant quelle que soit la période examinée. Elle invoque d'autres indices (dont l'exagération et la production consciente de symptômes ainsi que l'activité délictuelle) démontrant selon elle que la situation médicale n'avait jamais été celle manifestée et revendiquée par l'assuré. Elle nie en outre avoir été en mesure de déceler l'existence du trouble factice étant donné le déroulement de la procédure administrative. Par ailleurs, elle reproche au tribunal cantonal d'avoir arbitrairement fixé la modification notable de la situation médicale de l'intimé à février 2012.  
 
2.3. Compte tenu des motifs du recours, est litigieux le point de savoir si la juridiction cantonale était en droit de nier l'existence d'un motif de révision procédurale au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA et de supprimer la rente entière de l'assuré depuis le mois de février 2012 au lieu de février 2007.  
L'acte attaqué expose les normes et la jurisprudence indispensables à la résolution du cas, en particulier celles concernant la révision des décisions administratives (art. 17 et 53 al. 1 LPGA; cf. également ATF 127 V 353 consid. 4b p. 358 et ATF 134 V 131 consid. 3 p. 132 s.; 133 V 108 consid. 5 p. 110 ss; 130 V 343 consid. 3.5 p. 349 ss), le rôle des médecins (ATF 132 V 93 consid. 4 p. 99 s.), l'appréciation des preuves et la valeur probante des rapports médicaux (ATF 134 V 231 consid. 5.1 p. 232 s.; 125 V 351 consid. 3 p. 352 s.). Il suffit d'y renvoyer. 
 
3.  
 
3.1. La révision au sens de l'art. 53 al. 1 LPGA implique la découverte postérieure à la décision principale de faits nouveaux importants ou de nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient pas être produits auparavant. Comme l'a déjà indiqué le Tribunal fédéral, les maladies ne peuvent être différenciées clairement les unes des autres en fonction de leurs symptômes de sorte qu'il ne serait pas judicieux de voir dans chaque modification ou correction a posteriori d'un diagnostic un motif justifiant une révision procédurale au sens de la disposition légale citée (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.3.4). Dans ce contexte, les nouveaux résultats d'examen peuvent toutefois constituer un fait nouveau et entrer en considération comme motif de révision s'ils démontrent que, dans la procédure initiale, le médecin examinateur et l'autorité compétente auraient dû exercer leur pouvoir d'appréciation d'une façon nécessairement différente et parvenir à un autre résultat (cf. arrêt 9C_955/2012 du 13 février 2013 consid. 3.1 et 3.3.4; à titre d'exemple de résultats d'examen justifiant une révision procédurale, arrêt 8C_120/2017 du 20 avril 2017 consid. 2).  
Or de tels éléments font défaut en l'espèce. Les médecins de la CRR ont certes relevé qu'aucune des hypothèses diagnostiques qui avaient été émises depuis dix ans et justifié l'allocation des prestations n'avait pas résisté au temps ni à l'analyse critique. Ils en ont inféré l'existence d'un trouble factice englobant les plaintes dépressives, les symptômes de l'état de stress post-traumatique, les manifestations théâtrales et histrioniques ainsi que la symptomatologie exprimée sur le versant somatique, au lieu des différents troubles retenus sur les plans psychiatrique ainsi que neurologique. Il s'agit d'une déduction reposant sur une analyse a posteriori de l'absence d'évolution de la situation médicale au regard des diagnostics posés originellement et de l'échec des traitements entrepris. A cet égard, les experts n'ont pas conclu - ou du moins pas expressément - à la présence du trouble factice dans la procédure initiale déjà. On ne retrouve nulle part dans leur rapport des conclusions indiquant clairement que l'intimé n'avait jamais présenté d'atteintes à la santé. Si leur analyse sur le plan neurologique de la composante organique, qui devait être niée ou du moins minimisée selon eux, ou de la production de certains symptômes, qu'ils qualifiaient d'artefactuelle, laisse supposer que des troubles de ce registre n'ont jamais existé, tel n'est manifestement pas le cas de leur analyse des affections psychiatriques. Les médecins de la CRR font effectivement état de leurs observations au moment de la réalisation de l'expertise, qui leur permet de nier l'existence actuelle de troubles de ce registre. Mais ils ne se prononcent aucunement sur l'évolution ou la crédibilité des pathologies diagnostiquées à l'époque (singulièrement, sur l'évolution de la gravité des épisodes dépressifs ou de la crédibilité des symptômes de l'état de stress post-traumatique tels qu'ils avaient été rapportés par les médecins traitants de l'époque). 
Compte tenu des conclusions médicales, l'administration ne peut pas être suivie lorsqu'elle fait remonter les effets - ou l'absence d'effet - du trouble factice sur la capacité de travail au moment de la décision initiale déjà. Son point de vue ne trouve pas appui sur une constatation fondée sur des éléments concrets établissant que ladite décision comporterait des défauts objectifs comme l'exige la jurisprudence citée par le tribunal cantonal pour admettre l'application de l'art. 53 al. 1 LPGA (cf. ATF 127 V 353 consid. 5b p. 358). 
 
3.2. Il reste à examiner le grief relatif à la date à laquelle la juridiction cantonale a fixé la suppression de la rente. En tant que le recourant invoque des faits remontant à l'année 2008 (vol et revente de bijoux) pour justifier la suppression de la rente au 1er février 2007, son argumentation est incohérente et ne peut être suivie. Par ailleurs, la juridiction cantonale a pris en considération les faits survenus en 2008 mais constaté que l'essentiel des activités délictuelles s'était déroulé à partir de 2012. Il n'apparaît dès lors pas insoutenable d'avoir fixé à ce moment-là seulement la période à partir de laquelle l'assuré était entièrement capable de travailler.  
L'argumentation de l'administration est donc entièrement mal fondée. 
 
4.   
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires sont mis à la charge de l'office recourant ( art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires arrêtés à 800 fr. sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 7 janvier 2019 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Cretton