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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_254/2020  
 
 
Arrêt du 10 août 2020  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari, Muschietti, van de Graaf et Koch. 
Greffier : M. Graa. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me C.________ et Me Gaétan Droz, avocats, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de la République et canton de Genève, 
intimé. 
 
Objet 
Arbitraire; ordonnance pénale; retrait de l'opposition, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours, du 23 janvier 2020 (ACPR/60/2020 P/17156/2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Par ordonnance pénale du 10 mai 2019 - no xxx________ -, le Service des contraventions genevois a condamné A.________ à une amende de 750 fr., ainsi qu'à un émolument de 150 fr., en raison d'une infraction aux règles de la circulation routière. 
 
Le 23 mai 2019, le prénommé a formé opposition contre cette ordonnance pénale. 
 
Par ordonnance du 20 août 2019, le Service des contraventions genevois a maintenu son ordonnance pénale et a transmis la cause au Tribunal de police de la République et canton de Genève. Cette ordonnance précisait, en caractères gras, que l'opposition serait considérée comme retirée en cas de paiement du montant réclamé. 
 
Le 4 octobre 2019, l'avocat d'A.________ a consulté le dossier de la cause auprès du Tribunal de police. 
 
Le même jour, l'amende et les frais de l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 ont été payés. Selon l'avis de crédit, la somme de 900 fr. a été versée par "B.________et C.________", avec pour référence "N. xxx________ M. A.________". 
 
B.  
Par ordonnance du 11 octobre 2019, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a pris acte du retrait de l'opposition formée contre l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 et a dit que celle-ci était assimilée à un jugement entré en force. 
 
Le 15 octobre 2019, l'avocat d'A.________, invoquant une erreur de sa part, a demandé au Tribunal de police l'annulation de son ordonnance du 11 octobre 2019, ce qui a été refusé. 
 
C.  
Par arrêt du 23 janvier 2020, la Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a rejeté le recours formé par A.________ contre l'ordonnance du 11 octobre 2019. 
 
D.  
A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 23 janvier 2020, en concluant, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance du 11 octobre 2019, à ce qu'il soit fait ordre au Tribunal de police ou au Service des contraventions d'entrer en matière sur l'opposition formée contre l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 et à ce qu'une indemnité de 1'332 fr. 80 lui soit allouée pour ses dépens dans la procédure cantonale. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recourant critique tout d'abord l'établissement des faits. 
 
1.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'elles n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, soit pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat. Le Tribunal fédéral n'entre pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 p. 155 s. et les références citées).  
 
Déterminer ce qu'une personne a su, voulu, envisagé ou accepté relève du contenu de la pensée, à savoir de faits "internes" qui, en tant que tels, lient le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF), à moins qu'ils aient été retenus de manière arbitraire (cf. ATF 141 IV 369 consid. 6.3 p. 375). 
 
1.2. La cour cantonale a exposé que le montant total figurant sur l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 avait été payé après que le recourant eut fait opposition contre celle-ci. Le recourant avait indiqué que le paiement était intervenu par le fait de son avocat, à la suite d'une "erreur de manipulation de factures". Selon l'autorité précédente, le paiement comportait pourtant le nom du recourant et la référence à l'ordonnance pénale en question. Il n'avait donc pas été établi que l'avocat se fût trompé dans le libellé, par exemple, du nom du client ou du numéro d'ordonnance pénale alors qu'il aurait entendu payer l'amende d'un autre client. Le paiement "accidentel" n'avait donc pas été rendu plausible.  
 
1.3. Le recourant se plaint d'un état de fait incomplet. Il indique qu'il s'est opposé, par courrier du 1er mai 2019 adressé à l'autorité compétente, au prononcé d'une mesure administrative en contestant les éléments ressortant du rapport de police sur lequel est fondée l'ordonnance pénale du 10 mai 2019, obtenant ainsi la suspension de la procédure administrative. Il ajoute que son avocat a consulté le dossier de la cause, en mains du Service cantonal des véhicules, le 17 mai 2019. Le recourant en déduit que l'ensemble de son comportement dans la procédure démontrerait sa volonté de s'opposer à l'ordonnance pénale du 10 mai 2019, de sorte que le paiement effectué le 4 octobre 2019 n'aurait pu être qu'accidentel.  
 
Cette argumentation est appellatoire, partant irrecevable. Il n'était pas insoutenable, pour la cour cantonale, de retenir, sur la base du libellé du paiement, que l'avocat du recourant avait bien voulu payer le montant figurant sur l'ordonnance pénale du 10 mai 2019, cette opération n'ayant pas été accidentelle. Le fait que le recourant estime "désagréable" la mise en cause des explications fournies par son avocat aux autorités pénales n'y change rien, le principe en matière d'établissement des faits demeurant celui de la libre appréciation des preuves (cf. art. 10 al. 2 CPP). 
 
Contrairement à ce que soutient le recourant, on ne distingue donc, dans l'arrêt attaqué, aucun établissement arbitraire des faits ni violation de l'art. 112 LTF. Le grief doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Le recourant conteste que le paiement du montant total figurant sur l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 pût être considéré comme un retrait de son opposition. 
 
Il convient tout d'abord de préciser que le recourant admet, comme l'a signalé la cour cantonale, que le comportement de son avocat lui était imputable. Ainsi, sur la base de l'état de fait de l'autorité précédente, dont le recourant n'a pas démontré l'arbitraire (cf. consid. 1 supra), il apparaît que le paiement du 4 octobre 2019 a été sciemment et valablement opéré pour le compte de celui-ci. 
 
La question à trancher est donc celle de savoir si, comme l'a considéré l'autorité précédente, ce paiement pouvait être considéré comme un retrait, par acte concluant, de l'opposition à l'ordonnance pénale du 10 mai 2019. 
 
2.1. Aux termes de l'art. 356 CPP, lorsqu'il décide de maintenir l'ordonnance pénale, le ministère public transmet sans retard le dossier au tribunal de première instance en vue des débats. L'ordonnance pénale tient lieu d'acte d'accusation (al. 1). Le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition (al. 2). L'opposition peut être retirée jusqu'à l'issue des plaidoiries (al. 3). Si l'opposant fait défaut aux débats sans être excusé et sans se faire représenter, son opposition est réputée retirée (al. 4).  
 
2.2. L'art. 356 al. 3 CPP ne précise pas quelle forme doit revêtir le retrait de l'opposition.  
 
La doctrine s'exprimant sur la question à propos du CPP - et non des anciennes procédures pénales cantonales - admet en général qu'un tel retrait peut être effectué par acceptation de l'ordonnance pénale concernée, soit par acte concluant, notamment par le paiement de l'amende ou de la peine pécuniaire comprise dans cet acte procédural (cf. GILLIÉRON/KILLIAS, in Commentaire romand, Code de procédure pénale suisse, 2e éd. 2019, n° 10 ad art. 356 CPP; MOREILLON/PAREIN-REYMOND, Petit commentaire, Code de procédure pénale, 2e éd. 2016, n° 12 ad art. 356 CPP; FRANZ RIKLIN, in Basler Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 4 ad art. 356 CPP; CHRISTIAN SCHWARZENEGGER, in Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2e éd. 2014, n° 2a ad art. 356 CPP; ANASTASIA FALKNER, in Kommentierte Textausgabe zur Schweizerischen Strafprozessordnung, 2008, p. 349; cf.  contra  MICHAEL DAPHINOFF, Das Strafbefehlsverfahren in der Schweizerischen Strafprozessordnung, 2012, p. 620 s.).  
 
Cet avis doit être suivi. Le fait que le CPP ne soumette le retrait de l'opposition au sens de l'art. 356 al. 3 CPP à aucune forme plaide déjà pour une acceptation d'une telle manifestation de volonté par acte concluant. Un cas particulier de retrait de l'opposition par acte concluant - soit le défaut à une audition ou aux débats - est même prévu aux art. 355 al. 2 et 356 al. 4 CPP. Certes, concernant la fiction de retrait de l'opposition prévue par ces dernières dispositions, la jurisprudence exige que l'opposant ait effectivement eu connaissance de la citation à comparaître ainsi que des conséquences du défaut et, en outre, que l'on puisse déduire de bonne foi du défaut non excusé un désintérêt pour la suite de la procédure, lorsque l'intéressé a conscience des conséquences de son omission et renonce à ses droits en connaissance de cause (cf. ATF 146 IV 30 consid. 1.1.1 p. 32 s.). Cette problématique, spécifique à la garantie constitutionnelle (cf. art. 29a Cst.) et conventionnelle (art. 6 par. 1 CEDH) de l'accès au juge, ne se pose pourtant pas en des termes identiques dans le cas d'un acte concluant positif, à l'instar du paiement de l'amende ou de la peine pécuniaire, ainsi que des frais, compris dans l'ordonnance pénale. Un tel comportement actif doit en principe être interprété comme l'acceptation de l'ordonnance pénale et, par conséquent, comme la manifestation d'un désintérêt de l'opposant s'agissant d'une éventuelle poursuite de la procédure. 
 
Un paiement partiel des montants réclamés à l'opposant serait ambigu et pourrait obliger le ministère public, respectivement le tribunal, à interpeller celui-ci afin de clarifier sa volonté. En l'espèce, le recourant a payé non seulement l'amende mais encore les frais qui lui étaient réclamés, manifestant ainsi sans équivoque sa volonté de mettre un terme à la procédure et d'accepter l'ordonnance pénale du 10 mai 2019. Il ne serait pas expédient ni conforme à la logique de l'art. 356 al. 3 CPP - qui permet à l'opposant de retirer sans motivation ni forme particulière son opposition jusqu'à l'issue des plaidoiries - de contraindre le tribunal - respectivement le ministère public selon le stade procédural concerné - à interpeller la personne s'étant acquittée de l'amende ou de la peine pécuniaire ainsi que des frais afin de savoir si cette dernière entend bien accepter l'ordonnance pénale en question, aucun intérêt juridique au maintien de l'opposition ne subsistant alors pour elle. 
 
Ce qui précède n'est aucunement contredit par l'arrêt 6B_372/2013 du 23 août 2013, dont se prévaut le recourant. En effet, dans cet arrêt, le Tribunal fédéral avait jugé que les autorités pénales étaient contrevenues au principe de la bonne foi en estimant que l'opposant avait retiré son opposition par acte concluant - soit en payant l'amende et les frais ressortant de l'ordonnance pénale -, car l'intéressé ne l'avait pas fait volontairement mais uniquement par crainte de voir les mises en garde concernant le lancement de poursuites, respectivement l'exécution de la peine privative de liberté de substitution, se matérialiser. Tel n'a pas été le cas en l'espèce, puisque le recourant a payé les montants ressortant de l'ordonnance pénale du 10 mai 2019 tandis que la procédure suivait son cours et en l'absence de toute commination de la part des autorités. Il ne ressort d'ailleurs aucunement de l'arrêt attaqué que le recourant aurait craint la moindre conséquence négative en cas de non-paiement des sommes concernées à l'époque où le versement a été effectué. 
De manière générale, les autorités pénales restent tenues de se conformer au principe de la bonne foi (cf. art. 5 al. 3 et 9 Cst., ainsi qu'art. 3 al. 2 let. a CPP), de sorte qu'elles ne sauraient considérer que l'opposant a retiré son opposition si l'ensemble de son comportement plaide contre un désintérêt pour la suite de la procédure. C'est dans ce sens qu'il convient de comprendre l'arrêt 6B_372/2013 précité ainsi que les auteurs - cités par le recourant - ayant évoqué cette jurisprudence (cf. ANDREAS DONATSCH, Die Anklage in besonderen Verfahren - Strafbefehlsverfahren, abgekürztes Verfahren, Verfahren gegen Schuldunfähige, Forumpoenale 3/2017, p. 163 ss, 165; FRANZ RIKLIN, StPO Kommentar, Schweizerische Strafprozessordnung mit JStPO, StBOG und weiteren Erlassen, 2e éd. 2014, no 2 ad art. 355 CPP, cet auteur affirmant par ailleurs qu'un retrait de l'opposition peut intervenir par acte concluant, notamment par le paiement de l'amende ou de la peine pécuniaire, cf. no 3 ad art. 356 CPP). De ce point de vue, l'opposant payant librement le montant de la sanction et des frais judiciaires compris dans l'ordonnance pénale ne manifeste pas moins clairement son désintérêt pour la suite de la procédure que celui faisant défaut à une audition (cf. art. 355 al. 2 CPP), respectivement aux débats sans être excusé ni se faire représenter (cf. art. 356 al. 4 CPP), auxquels il a été convié et alors qu'il a connaissance des conséquences d'une telle attitude. 
 
Pour le reste, le recourant ne saurait tirer argument d'une comparaison avec le retrait d'un recours - réglé par l'art. 386 al. 2 et 3 CPP -, dès lors que l'opposition ne constitue pas une voie de recours (cf. ATF 140 IV 82 consid. 2.6 p. 86; plus récemment arrêt 6B_19/2019 du 19 juin 2019 consid. 1.3.2) et qu'elle est soumise à ses propres normes (cf. art. 354-356 CPP). 
 
2.3. En définitive, sur la base de l'état de fait de la cour cantonale, il apparaît que le recourant a bien, par le paiement des montants ressortant de l'ordonnance pénale du 10 mai 2019, manifesté sa volonté de retirer son opposition. La cour cantonale pouvait, de bonne foi, interpréter cet acte concluant comme un retrait au sens de l'art. 356 al. 3 CPP.  
 
Au demeurant, à supposer même que le paiement des montants concernés eût été accidentel, on peut noter que la situation du recourant n'est pas différente de celle dans laquelle il se serait trouvé - au regard de l'art. 356 al. 4 CPP - si son avocat avait par erreur omis de se présenter en son nom aux débats tenus par le tribunal de première instance (cf. à cet égard ATF 143 I 284 consid. 1.3 p. 287). 
 
3.  
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 10 août 2020 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Graa