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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_95/2021  
 
 
Arrêt du 27 mai 2021  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Maillard, Président, 
Wirthlin et Abrecht. 
Greffière : Mme Elmiger-Necipoglu. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Maîtres Stefano Fabbro et Cedric Pope Krähenbühl, avocats, 
recourante, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, du 10 décembre 2020 (AA 150/18 - 187/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, née en 1970, était employée depuis le 9 octobre 2010 comme ouvrière polyvalente par l'entreprise B.________ SA et, à cet titre, assurée de manière obligatoire contre le risque d'accident auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après: CNA). Le 3 janvier 2017, elle a chuté dans un escalier, ce qui a entraîné une fracture-luxation trimalléolaire de la cheville gauche, traitée par voie chirurgicale. Depuis lors, elle a été en incapacité de travail à 100 %. L'assurée a séjourné une première fois à la Clinique de réadaptation C.________ du 28 mars au 10 mai 2017. En raison d'une ostéopénie marquée et d'une consolidation précaire du péroné distal, le docteur D.________, spécialiste en chirurgie et médecin d'arrondissement de la CNA, a proposé un nouveau séjour à la Clinique de réadaptation C.________, qui a eu lieu du 3 janvier au 30 janvier 2018 (rapport du 21 février 2018).  
 
A.b. Le 2 mai 2018, le docteur D.________ a procédé à l'examen final et a retenu que malgré les séjours à la Clinique de réadaptation C.________, il n'avait pas été possible d'infléchir un processus d'invalidité qui s'était rapidement installé après l'accident chez une patiente qui présentait une sorte d'exclusion fonctionnelle de son pied gauche. Dans ces conditions, la reprise d'un traitement de physiothérapie n'avait pas de sens. Dans une activité respectant les limitations qui avaient été décrites lors du deuxième séjour à la Clinique de réadaptation C.________, la capacité de travail était entière, étant précisé que l'impossibilité de reprendre l'activité habituelle avait été mise essentiellement sur le compte de facteurs non médicaux. Il a en outre évalué le taux de l'indemnité pour une atteinte à l'intégrité (IPAI) de 10 %.  
Sur la base de ces éléments, la CNA a informé l'assurée par avis du 6 juin 2018 qu'elle allait mettre un terme au paiement des soins médicaux et de l'indemnité journalière au 30 juin 2018. Après avoir instruit le cas sur le plan économique, elle a rendu le 27 juillet 2018 une décision par laquelle elle lui a reconnu le droit à une IPAI de 10 %; en revanche, en l'absence d'une diminution notable de la capacité de gain, elle a nié le droit à une rente d'invalidité. Cette décision a été confirmée le 29 août 2018 sur opposition de l'assurée. 
 
A.c. De son côté, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après: office AI) a rejeté la demande de prestations de l'assurée (décision du 14 janvier 2019).  
 
B.  
L'assurée a déféré la décision sur opposition de la CNA à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois, en concluant principalement à sa réforme en ce sens que des prestations d'assurances (indemnités journalières et rente entière d'invalidité) lui soient octroyées dès le 1er juillet 2018. Subsidiairement, elle a conclu à l'annulation de la décision et à la mise en oeuvre d'une expertise orthopédique. 
Helsana Assurances SA, l'assurance-maladie de l'intéressée, a été admise à participer à la procédure. Elle a conclu principalement à la réforme de la décision sur opposition de la CNA en ce sens que l'entier des frais médicaux soit pris en charge par celle-ci jusqu'au 4 septembre 2019, et subsidiairement à l'annulation de cette décision suivie de la mise en oeuvre d'une expertise orthopédique par la cour respectivement par la CNA. A l'appui de son recours, elle a produit un avis médical du 27 janvier 2020 du docteur E.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, qui a indiqué que le cas n'était pas stabilisé à la fin juin 2018, mais au plus tard le 4 septembre 2019. 
Par arrêt du 10 décembre 2020, la cour cantonale a rejeté le recours de l'assurée contre la décision sur opposition de la CNA. Par arrêt du même jour, elle a également rejeté le recours interjeté par l'assurée contre la décision de l'office AI du 14 janvier 2019. 
 
C.  
A.________ forme un recours en matière de droit public contre l'arrêt rendu en matière d'assurance-accidents, en concluant à son annulation et au renvoi de la cause à l'intimée pour qu'une expertise complémentaire pluridisciplinaire soit ordonnée sur le plan psychique et somatique. 
L'intimée conclut au rejet du recours. L'office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer. 
 
D.  
Par arrêt de ce jour, le Tribunal fédéral a rejeté le recours de l'assurée dirigé contre l'arrêt du 10 décembre 2020 en matière d'assurance-invalidité (cause 8C_96/2021). 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en confirmant que la recourante n'avait plus droit aux indemnités journalières au delà du 30 juin 2018 et qu'à partir de cette date, elle était apte à travailler à plein temps dans une activité adaptée.  
 
2.2. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Cela étant, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF.  
 
2.3. La présente procédure porte sur l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, de sorte que le Tribunal fédéral n'est pas lié par l'état de fait constaté par la juridiction précédente (art. 97 al. 2 et art. 105 al. 3 LTF).  
 
3.  
 
3.1. L'arrêt entrepris expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs aux prestations de l'assurance-accidents (art. 6 al. 1 LAA), au traitement médical (art. 10 LAA), au droit à l'indemnité journalière (art. 16 LAA), à la rente d'invalidité (art. 18 al. 1 et art. 19 al. 1 LAA) et à l'appréciation des rapports médicaux (ATF 135 V 465 consid. 4.7; 125 V 351 consid. 3b/bb). Il suffit par conséquent d'y renvoyer.  
 
3.2. On rappellera cependant que selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à une rente d'invalidité prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de santé de l'assuré et qu'aucune mesure de réadaptation de l'assurance-invalidité n'entre en considération; il appartient alors à l'assureur-accidents de clore le cas en mettant fin aux frais de traitement ainsi qu'aux indemnités journalières, en examinant le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité. L'amélioration de l'état de santé se détermine notamment en fonction de l'augmentation ou de la récupération probable de la capacité de travail réduite par l'accident (ATF 134 V 109 consid. 4.1). L'utilisation du terme "sensible" par le législateur montre que l'amélioration que doit amener une poursuite du traitement médical doit être significative. Ni la possibilité lointaine d'un résultat positif de la poursuite d'un traitement médical ni un progrès thérapeutique mineur à attendre de nouvelles mesures - comme une cure thermale - ne donnent droit à sa mise en oeuvre (arrêt 8C_142/2017 du 7 septembre 2017 consid. 4 et la référence citée). Il ne suffit pas non plus qu'un traitement physiothérapeutique puisse éventuellement être bénéfique pour la personne assurée (arrêt 8C_736/2017 du 20 août 2018 consid. 4.1 et la référence citée). Dans ce contexte, l'état de santé doit être évalué de manière prospective (arrêt 8C_235/2020 du 15 février 2021 consid. 2.3).  
 
4.  
 
4.1. Sur la base des rapports jugés probants établis par la Clinique de réadaptation C.________ et du docteur D.________, la juridiction cantonale a considéré qu'au moment où l'intimée avait mis fin à la prise en charge du traitement médical et au versement des indemnités journalières, il n'y avait plus à attendre de la poursuite du traitement une amélioration notable de l'état de santé de la recourante. Les rapports produits par celle-ci et par Helsana Assurances ne permettaient pas de mettre sérieusement en doute les constatations de l'intimée. En ce qui concernait la capacité de travail, les rapports de la Clinique de réadaptation C.________ et du docteur D.________ permettaient également de constater qu'elle était de 100 % dans une activité adaptée, c'est-à-dire une activité permettant d'éviter la marche prolongée, en particulier en terrain irrégulier, les montées et les descentes répétitives d'escaliers, la position accroupie prolongée et le port de charge supérieur à un port de charge léger entre 5 et 10 kg. Si la recourante était dans l'impossibilité de maintenir une position assise statique sans tendre sa jambe et la poser sur un repose-pied, il convenait de constater que les plaintes et les limitations fonctionnelles observées chez elle dépassaient, selon les médecins de la Clinique de réadaptation C.________, ce qui était objectivement explicable par les atteintes à la santé.  
 
4.2.  
 
4.2.1. La recourante se plaint d'une appréciation arbitraire des preuves et d'une constatation inexacte des faits. S'agissant de la stabilisation de son état de santé, elle reproche à la cour cantonale d'avoir suivi les avis du docteur D.________ et des médecins de la Clinique de réadaptation C.________, sans avoir procédé à des investigations complémentaires sous forme d'une expertise médicale, alors même que les médecins traitants avaient attesté qu'une certaine amélioration pouvait encore être espérée notamment par une bonne prise en charge physiothérapeutique sous forme de lymphodrainage, par l'amélioration du chaussage, par le port de bas de contention ou encore par l'adaptation du traitement antalgique. Par ailleurs, le médecin-consultant de l'assurance-maladie avait retenu qu'une stabilisation de l'état de santé à la fin juin 2018 était trop précoce.  
 
4.2.2. Au moment où l'intimée a mis fin aux indemnités journalières, le 30 juin 2018, il ressortait des pièces médicales versées au dossier, en particulier du rapport du docteur D.________ du 2 mai 2018, qu'il n'y avait plus de traitement médical susceptible d'améliorer de manière notable l'état de santé de la recourante. On ne saurait ainsi suivre la recourante lorsqu'elle soutient que les autres médecins consultés avaient un avis divergent. Certes, le docteur F.________, spécialiste FMH en médecine interne générale, a relevé dans son rapport du 6 juillet 2018 que l'on pouvait avec le temps espérer encore une certaine amélioration; toutefois, il n'a pas pu indiquer une thérapie spécifique qui puisse améliorer de manière sensible l'état de sante de la recourante, dans la mesure où celle-ci connaissait les différents exercices à faire. Quant au rapport du 26 octobre 2018 de la doctoresse G.________, médecin associée au Département de l'appareil locomoteur du Service d'orthopédie et traumatologie de l'Hôpital H.________, il confirme qu'au moment de la clôture du cas, il n'existait pas d'indication à une réintervention chirurgicale. S'agissant en outre des traitements suggérés par la spécialiste (séances de piscine, drainages, amélioration de la marche par des chaussures appropriées), il y a lieu de constater qu'il s'agit de traitements dont la pratique considère qu'ils sont tout au plus aptes à augmenter le bien-être de la personne assurée, mais ne sont pas de nature à améliorer de manière considérable son état de santé. Il en va de même de la détermination du docteur E.________, dans laquelle il renvoie au rapport du 21 février 2019 de la doctoresse G.________, qui fait état d'une situation radiologique inchangée depuis octobre 2018 mais constate une légère amélioration grâce à la physiothérapie. Dans ces conditions, l'arrêt attaqué n'est pas critiquable en tant qu'il confirme que l'intimée était fondée à clore le cas avec effet au 30 juin 2018.  
 
4.3.  
 
4.3.1. La recourante fait ensuite grief à la cour cantonale d'avoir retenu sur la base du rapport du docteur D.________ qu'elle était apte à exercer une activité adaptée à plein temps. Elle estime que cette appréciation est contredite par le rapport des ateliers professionnels de la Clinique de réadaptation C.________, dans lequel il est indiqué que lors du maintien de la position assise statique, la recourante tend sa jambe et la pose sur un repose-pieds.  
 
4.3.2. Ce faisant, la recourante semble perdre de vue qu'il s'agit-là d'un descriptif de son comportement lors du séjour à la Clinique de réadaptation C.________ rendu par les spécialistes de la réadaptation professionnelle, et non pas d'une appréciation médicale de sa capacité de travail. Par ailleurs, à l'instar de la cour cantonale, il sied de relever que les médecins de la Clinique de réadaptation C.________ ont constaté l'existence de facteurs contextuels qui jouaient un rôle important dans les plaintes et les limitations fonctionnelles rapportées par la patiente et influençaient défavorablement le retour au travail; la patiente était très focalisée sur ses douleurs et avait sous-estimé de manière importante ses propres capacités fonctionnelles.  
 
4.3.3. Cela étant, en ce qui concerne l'évaluation de la capacité de travail résiduelle de la recourante, il n'existe aucun motif de s'écarter de l'exigibilité fixée par le docteur D.________, ni d'ordonner une expertise. En effet, le dossier ne contient aucun avis médical dont il faudrait inférer que les limitations fonctionnelles retenues par le médecin d'arrondissement ne tiendraient pas suffisamment compte des atteintes objectives en lien avec l'accident du 3 janvier 2017.  
Contrairement à ce que soutient la recourante, le docteur F.________ n'a pas i ndiqué dans son rapport du 6 juillet 2018 qu'une activité adaptée serait uniquement envisageable à temps partiel. Il a seulement relevé qu'une telle activité ne pouvait pas d'emblée être exercée à plein temps. Or, dans la mesure où ce praticien n'explique pas pour quel motif un temps d'adaptation serait indispensable pour que la recourante puisse exercer une activité adaptée ne nécessitant pas de manière accrue la sollicitation de la cheville gauche (cf. consid. 4.1 supra), c'est à juste titre que la cour cantonale n'a pas tenu compte de cette remarque. Quant à la détermination du docteur F.________ du 21 janvier 2019, produite en cours de procédure cantonale, dans laquelle il atteste désormais une incapacité de travail totale dans toute activité, force est de constater que ses conclusions n'emportent pas la conviction. Outre le fait qu'il est admis de jurisprudence constante que le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 135 V 465 consid. 4.5; 125 V 351 consid. 3a/cc), on relèvera qu'il s'est essentiellement fondé sur les douleurs de la recourante et n'a pas mis en évidence un élément objectif nouveau par rapport au rapport du 2 mai 2018 du docteur D.________. 
 
4.4. Par conséquent, c'est à raison que les juges cantonaux ont nié le droit de la recourante à des indemnités journalières au-delà du 30 juin 2018 et ont retenu qu'à partir de ce moment-là, celle-ci était apte à exercer à plein temps une activité adaptée aux limitations fonctionnelles de sa cheville gauche. Il n'y avait pas non plus lieu pour eux d'ordonner une expertise. L'arrêt attaqué ne prête ainsi pas le flanc à la critique en tant qu'il confirme le refus d'une rente d'invalidité à la recourante, dès lors que celle-ci ne conteste pas, comme déjà au stade de la procédure cantonale, la comparaison des revenus avec et sans invalidité à laquelle l'intimée a procédé et dont il ne résulte pas de perte de gain.  
 
5.  
En définitive, le recours, mal fondé, doit être rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 27 mai 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : Elmiger-Necipoglu