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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_650/2022  
 
 
Arrêt du 13 octobre 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Herrmann, Président, Escher et Bovey. 
Greffière : Mme Achtari. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représentée par Me Philipp Studer, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. B.A.________, 
représenté par Me Mathias Eusebio, avocat, 
2. C.________ SA, 
intimés, 
 
Office des poursuites et des faillites, 
rue de l'Avenir 2, 2800 Delémont 1. 
 
Objet 
commandement de payer, notification au conjoint, 
 
recours contre l'arrêt de la Tribunal cantonal du canton du Jura, Cour des poursuites et faillites, Autorité cantonale de surveillance, du 17 août 2022 (CPF 41/2021). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Le 4 novembre 2019, C.________ SA (ci-après: la banque) a déposé auprès de l'Office des poursuites et faillites de Delémont (ci-après: l'office) une réquisition de poursuite en réalisation de gage immobilier à l'encontre de B.A.________ (ci-après: le débiteur) pour une créance incorporée dans des cédules hypothécaires, avec un capital nominal total de 784'000 fr., grevant les parcelles nos xxx, yyy ss du ban de U.________ et zzz du ban de V.________ (poursuite n°... - domaine W.________).  
Le 8 novembre 2019, le commandement de payer a été notifié au débiteur, qui y a formé opposition totale le 14 novembre 2019. 
La mainlevée provisoire de l'opposition a été prononcée le 22 septembre 2020 pour le droit de gage et les sommes de 744'000 fr., avec intérêts à 5% dès le 1er octobre 2019, respectivement de 9'059 fr. 50. 
La vente du bien immobilier concerné a été requise le 3 novembre 2020. 
 
A.b. Le 1er octobre 2021 A.A.________, épouse du débiteur, a déposé auprès de l'office une requête tendant à ce qu'un exemplaire du commandement de payer précité lui soit également notifié, au motif que la poursuite en cause porte sur une entreprise agricole qu'elle exploite conjointement avec le débiteur et que ladite entreprise ne peut être aliénée qu'avec le consentement du conjoint, à l'instar de ce qui prévaut pour le logement de la famille.  
 
A.c. Par courrier du 8 octobre 2021, l'office a informé A.A.________ qu'il entendait donner une suite favorable à sa requête, dès lors que le logement qu'elle occupe fait partie du domaine W.________ et qu'il peut être considéré comme un logement de la famille, au sens de l'art. 169 CC. Une copie dudit courrier a notamment été transmise à la banque.  
 
A.d. Le 21 octobre 2021, la banque a formé une plainte, concluant à l'annulation de la décision du 8 octobre 2021 de l'office de notifier un double du commandement de payer à A.A.________ dans la poursuite n°... et à ce qu'aucun commandement de payer ne lui soit notifié dans ladite poursuite.  
 
A.e. Par arrêt du 17 août 2022, la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton du Jura, en sa qualité d'autorité cantonale de surveillance, a admis la plainte et, partant, annulé la décision du 8 octobre 2021 et ordonné à l'office de ne pas notifier de commandement de payer à A.A.________ sur la base de l'art. 153 al. 2 let. b LP dans la poursuite n°... dirigée contre B.A.________.  
 
B.  
Par acte rédigé en allemand, posté le 29 août 2022, A.A.________ exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 17 août 2022. Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à sa réforme en ce sens qu'il est ordonné à l'Office des poursuites et faillites de Delémont de lui notifier le commandement de payer dans la poursuite n°... dirigée contre B.A.________. 
Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises. 
 
C.  
Par ordonnance du 15 septembre 2022, le Président de la II e Cour de droit civil a donné suite à la requête d'effet suspensif, subsidiairement de mesures provisionnelles, assortissant le recours, aux fins de maintenir les choses en l'état, en particulier éviter la réalisation forcée de l'immeuble litigieux pendant la procédure fédérale. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. Le recours est interjeté en temps utile (art. 100 al. 2 let. a LTF) à l'encontre d'une décision finale (art. 90 LTF), rendue en matière de poursuite pour dettes (art. 72 al. 2 let. a LTF, en relation avec l'art. 19 LP) par une autorité de surveillance de dernière (unique) instance cantonale (art. 75 al. 1 LTF; art. 19 et 20 LiLP/JU [RSJU 281.1]). Il est ouvert indépendamment de la valeur litigieuse (art. 74 al. 2 let. c LTF). La recourante, qui a participé à la procédure devant la juridiction précédente et a un intérêt digne de protection à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée, a qualité pour recourir (art. 76 al. 1 LTF).  
 
1.2. La recourante procède en allemand. Ce choix n'impose pas de déroger à la règle selon laquelle la langue de la procédure est généralement celle de la décision attaquée (art. 54 al. 1 LTF), à savoir ici le français.  
 
2.  
 
2.1. Le recours en matière civile peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 s. LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Cela étant, compte tenu de l'obligation de motiver qui incombe au recourant en vertu de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, il n'examine pas toutes les questions juridiques qui peuvent se poser, mais seulement celles qui sont soulevées devant lui (ATF 142 III 364 consid. 2.4 et les références). L'art. 42 al. 2 LTF exige par ailleurs que le recourant discute les motifs de la décision entreprise et indique précisément en quoi il estime que l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4 et la référence). En outre, le Tribunal fédéral ne connaît de la violation des droits fondamentaux que si de tels griefs ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation "; art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de façon claire et détaillée (ATF 146 IV 114 consid. 2.1; 144 II 313 consid. 5.1; 142 II 369 consid. 2.1).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Des mesures probatoires devant le Tribunal fédéral (art. 55 LTF) ne sont qu'exceptionnellement ordonnées dans une procédure de recours (ATF 136 II 101 consid. 2; arrêts 5A_741/2021 du 22 avril 2022 consid. 2.3; 5A_699/2021 du 21 décembre 2021 consid. 2.2.2), condition qui n'est en l'occurrence pas remplie et dont la recourante ne se prévaut d'ailleurs même pas; la requête d'interrogatoire des parties est dès lors irrecevable en l'occurrence. Le Tribunal fédéral ne peut s'écarter de l'état de fait de l'arrêt attaqué que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 147 I 73 consid. 2.2; 144 II 246 consid. 6.7; 143 I 310 consid. 2.2 et la référence), ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1 et la référence). Le recourant ne peut pas se borner à contredire les constatations litigieuses par ses propres allégations ou par l'exposé de sa propre appréciation des preuves; il doit indiquer de façon précise en quoi ces constatations sont arbitraires (ATF 133 II 249 consid. 1.4.3). Une critique des faits qui ne satisfait pas à cette exigence est irrecevable (art. 106 al. 2 LTF; ATF 147 IV 73 consid. 4.1.2; 145 IV 154 consid. 1.1; 141 IV 249 consid. 1.3.1).  
 
3.  
La question qui se pose en premier lieu est celle de savoir si c'est par inadvertance ou à dessein que le législateur fédéral n'a, contrairement au logement de la famille, pas posé de règle spécifique, à l'art. 153 al. 2 let. b LP, au sujet de l'entreprise agricole exploitée en commun par les époux. Il s'agit, en d'autres termes, de rechercher si l'art. 153 al. 2 let. b LP comporte ou non une lacune susceptible d'être comblée par le juge lorsque la poursuite en réalisation de gage porte sur une entreprise agricole exploitée en commun au sens de l'art. 40 al. 1 LDFR, en ce sens qu'un exemplaire du commandement de payer devrait être également notifié au conjoint ou au partenaire enregistré du débiteur. La cour cantonale a laissé la question indécise dès lors que le domaine W.________ ne pouvait de toute façon pas être qualifié d'exploitation commune selon ladite disposition. La recourante axe essentiellement sa critique sur cette dernière motivation, considérant en bref que si la cour cantonale avait correctement constaté les faits et apprécié les preuves pertinentes, elle aurait dû retenir que le domaine litigieux remplissait toutes les conditions permettant d'admettre une exploitation commune. Sur la question (principale) susévoquée, la recourante soutient en substance que l'art. 153 al. 2 let. b LP souffre d'une lacune: lors de l'adoption de la LDFR, le législateur aurait omis de modifier en conséquence la LP pour tenir compte de la position du conjoint du propriétaire d'une entreprise agricole exploitée en commun par les époux (art. 40 al. 1 LDFR). Or, selon la recourante, une telle entreprise mériterait à l'évidence de recevoir la même protection que celle expressément donnée au logement de la famille (art. 169 CC) par l'art. 153 al. 2 let. b LP
 
3.1. L'interprétation de la loi peut conduire à la constatation d'une lacune. Une lacune authentique (ou proprement dite) suppose que le législateur s'est abstenu de régler un point alors qu'il aurait dû le faire et qu'aucune solution ne se dégage du texte ou de l'interprétation de la loi. En revanche, si le législateur a renoncé volontairement à codifier une situation qui n'appelait pas nécessairement une intervention de sa part, son inaction équivaut à un silence qualifié. Quant à la lacune improprement dite, elle se caractérise par le fait que la loi offre certes une réponse, mais que celle-ci est insatisfaisante. D'après la jurisprudence, seule l'existence d'une lacune proprement dite appelle l'intervention du juge, tandis qu'il lui est en principe interdit, selon la conception traditionnelle qui découle notamment du principe de la séparation des pouvoirs, de corriger les lacunes improprement dites, à moins que le fait d'invoquer le sens réputé déterminé de la norme ne constitue un abus de droit ou ne viole la Constitution (sur le tout: ATF 148 V 84 consid. 7.1.2; 147 V 2 consid. 4.4.1; 146 V 121 consid. 2.5; 142 IV 389 consid. 4.3.1; 139 I 57 consid. 5.2).  
 
3.2.  
 
3.2.1. La poursuite en réalisation de gage, réglée par les art. 151 ss LP, tend au recouvrement d'une créance garantie par un gage. L'art. 153 al. 2 let. b LP, qui lui est applicable, prévoit la notification d'un exemplaire du commandement de payer non seulement au débiteur poursuivi, mais aussi au conjoint ou au partenaire enregistré de celui-ci lorsque l'immeuble grevé est le logement de famille (art. 169 CC), respectivement, depuis le 1er janvier 2007, le logement commun (art. 14 LPart). Cette notification fait acquérir à ce tiers la qualité de copoursuivi avec tous les droits qui en résultent, en particulier celui de faire opposition au commandement de payer (art. 153 al. 2bis LP), d'invoquer l'inexistence ou l'inexigibilité de la créance en poursuite, d'en contester le montant ou de se prévaloir de l'absence du droit de gage. Il peut également faire valoir que la mise en gage du bien viole les dispositions de l'art. 169 CC (ATF 142 III 720 consid. 4.2.1; cf. aussi arrêts 5A_858/2020 du 1er novembre 2021 consid. 3.1; 5A_825/2020 du 25 mars 2021 consid. 5.1).  
L'art. 153 al. 2 let. b LP a été introduit dans le cadre de la révision de la LP du 16 décembre 1994, entrée en vigueur le 1er janvier 1997. Il n'était pas prévu dans le Message du Conseil fédéral (cf. FF 1991 III 269 [124]) et a été intégré dans la loi sur proposition de la commission du Conseil des Etats (BO 1994 p. 732; arrêt 7B.231/1997 du 10 novembre 1997 consid. 1 et la référence), à laquelle les deux conseils ont adhéré (GILLIÉRON, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, Art. 89-158, 2000, n° 6 ad art. 153 LP). Il s'agissait de tenir compte de l'art. 169 CC, entré en vigueur le 1er janvier 1988, et d'étendre la protection du logement de la famille à la réalisation forcée de l'immeuble (cf. arrêt 7B.231/1997 précité loc. cit.; BERNHEIM/KÄNZIG/GEIGER, in Basler Kommentar, SchKG I, 3ème éd., 2021, n° 2 ad art. 153 LP; GILLIÉRON, loc. cit.). L'art. 169 CC, rattaché aux effets généraux du mariage, est une conséquence de la protection instaurée par le législateur dans le droit de la famille à l'égard du conjoint, contre les actes de disposition de son époux sur le logement familial (arrêts 5A_825/2020 précité loc. cit.; 4P.264/2005 du 17 janvier 2006 consid. 5.2.3.1).  
 
3.2.2. Aux termes de l'art. 40 LDFR, le propriétaire ne peut aliéner une entreprise agricole qu'il exploite avec son conjoint ou une part de copropriété sur ladite entreprise qu'avec le consentement de son conjoint (al. 1). S'il ne peut obtenir ce consentement ou si ce dernier lui est refusé sans motif valable, il peut saisir le juge (al. 2). L'art. 169 du code civil, destiné à protéger le logement familial, est réservé (al. 3). Si l'art. 40 al. 3 LDFR réserve cette disposition, c'est uniquement afin de rendre le consentement du conjoint également nécessaire pour l'aliénation d'une entreprise agricole - dans le cas où la condition de l'exploitation commune, au sens du premier alinéa de la même disposition, n'est pas remplie - lorsque la famille risque de perdre son logement (cf. Message du Conseil fédéral à l'appui de la LFDR, in FF 1988 III 889 ss, 908 et 957; ATF 125 III 425 consid. 3a/dd). Ainsi, si l'exploitation n'est pas commune, l'art. 169 CC peut trouver directement application au cas où le logement familial se trouve dans les bâtiments de l'entreprise agricole (DESCHENAUX/STEINAUER/ BADDELEY, Les effets du mariage, 3ème éd. 2017, n° 212d p. 179).  
L'art. 40 LDFR a été introduit dans le but de compenser l'affaiblissement de la situation juridique du conjoint dans l'intérêt des objectifs de politique agricole de la LDFR, dès lors que, sous l'empire de l'ancien droit (loi fédérale du 12 juin 1951 sur le maintien de la propriété foncière rurale (LPR), abrogée par la LDFR du 4 octobre 1991 entrée en vigueur le 1er janvier 1994), le conjoint disposait d'un droit de préemption alors que, dans la LDFR, il est expressément mentionné que l'aliénation au conjoint constitue un cas de préemption en faveur d'un parent qui entend exploiter à titre personnel au sens de l'art. 42 LDFR (DESCHENAUX/STEINAUER/BADDELEY, op. cit., n° 212e p. 179; STEINAUER, La nouvelle réglementation du droit de préemption, in RNRF 1992 p. 1 ss [14 s.]; STUDER, in Das bäuerliche Bodenrecht - Kommentar zum Bundesgesetz über das bäuerliche Bodenrecht vom 4. Oktober 1991, 2ème éd. 2011, n° 1 ad art. 40 LDFR).  
 
3.3. L'art. 153 al. 2 let. b LP ne fait référence qu'aux art. 169 CC et 14 LPart, relatifs à la protection du logement de la famille ou du logement commun, sans mentionner l'art. 40 al. 1 LDFR concernant l'aliénation de l'entreprise agricole exploitée en commun par les époux. Cette exclusion ne participe manifestement pas d'une inadvertance manifeste du législateur, mais plutôt d'une volonté de ne pas faire bénéficier le conjoint du propriétaire de l'entreprise agricole exploitée en commun par les époux du régime applicable au logement de la famille. Cela ne constitue pas une lacune de la loi. Au contraire, le législateur a bien voulu exclure, expressément, toutes les autres formes de communauté d'intérêts entre époux, notamment économiques, que celle matérialisée dans le logement de la famille, du champ d'application de l'art. 153 al. 2 let. b LP, en raison de la nature primordiale et vitale du logement pour une famille. Une telle interprétation est au demeurant corroborée par le fait que l'art. 40 LDFR mentionne, à son alinéa 3, expressément le logement familial, dans ce sens que l'art. 169 CC demeure expressément réservé. Il s'ensuit, comme l'a pertinemment relevé la cour cantonale, que l'art. 169 CC s'applique en plus de l'art. 40 LDFR. La protection que la recourante entend en définitive se voir appliquer ne s'envisage ainsi que lorsque exploitation agricole commune et logement familial coïncident, à savoir lorsque ledit logement se trouve effectivement dans les bâtiments de l'entreprise agricole, ce qui, conformément aux constatations non contestées de l'arrêt cantonal, n'est pas le cas en l'espèce.  
Le législateur a donc bien apporté une réponse à la question de savoir à qui le commandement de payer doit être notifié dans une poursuite en réalisation de gage immobilier. Même à considérer, comme le soutient la recourante, que cette réponse serait insatisfaisante, il s'agirait d'une lacune improprement dite, qui ne peut être comblée par le juge, selon la jurisprudence susrappelée, dès lors notamment que l'invocation de la règle en cause dans sa portée décrite ci-avant ne constitue dans tous les cas pas un abus de droit, ni n'entraîne une violation de la Constitution. La recourante ne peut en effet être suivie lorsqu'elle soutient que le refus d'interpréter l'art. 153 al. 2 let. b LP en ce sens qu'il vise aussi l'art. 40 al. 1 LDFR par analogie avec l'art. 169 CC viole les art. 6 par. 1 et 13 CEDH ainsi que l'art. 29a Cst. Elle affirme premièrement de manière péremptoire que l'impossibilité qui lui est faite, faute de notification du commandement de payer, de former opposition à la poursuite considérée et d'en influencer la voie viole l'art. 6 par. 1 CEDH en ce qu'elle l'empêche de protéger ses " droits de caractère civil " au sens de cette disposition. Tel qu'il est formulé, un tel grief ne répond à l'évidence pas aux exigences accrues de motivation prévues par l'art. 106 al. 2 LTF. Quoi qu'il en soit, dans la mesure où il est constant que le domaine W.________ ne constitue pas le logement de la famille, la cour cantonale ayant constaté que celui-ci était sis dans le domaine X.________ et avait été attribué sur mesures protectrices à l'intimé (art. 105 al. 1 LTF), on ne voit pas à quel droit la recourante fait référence. S'il s'agit, comme il semblerait, de ses prétentions relatives à la liquidation du régime matrimonial, la recourante alléguant que celle-ci portera sur l'attribution ( Zuweisung) du domaine W.________, elle n'indique pas à quel régime matrimonial les époux sont soumis, ni, à supposer que cela soit celui de la participation aux acquêts, à quel titre elle aurait droit à ce que l'entreprise agricole lui soit entièrement attribuée, sachant qu'il n'est pas contesté qu'elle est la seule propriété de l'intimé, ni en quoi la vente forcée du domaine aurait concrètement un effet sur l'application des art. 212 et 213 CC.  
Deuxièmement, la recourante fait valoir que les art. 13 CEDH et 29a Cst. seraient violés en tant qu'elle a été privée de son droit à un recours effectif contre le refus injustifié de lui notifier un commandement de payer. Or, étant rappelé que l'art. 13 CEDH (droit à un recours effectif), absorbé par l'art. 6 par. 1 CEDH précité, n'offre en principe pas de protection plus étendue que l'art. 29a Cst. (arrêt 2C_495/2021 du 9 février 2022 consid. 4.2 et les références citées), on ne voit pas en quoi la recourante aurait été privée d'accès au juge s'agissant de la question de la notification en ses mains du commandement de payer litigieux, qui a été pleinement examinée par les juges précédents dans le cadre de l'arrêt présentement attaqué. Elle ne l'explicite du reste pas plus avant. 
Il suit de là que l'on ne décèle aucune lacune de la loi qu'il conviendrait de combler. Un tel constat scelle le sort du présent recours, les autres griefs de la recourante portant sur la qualité d'exploitation commune du domaine W.________ au sens de l'art. 40 al. 1 LDFR. Or, compte tenu de ce qui précède, cette disposition est sans pertinence pour le cas d'espèce, respectivement pour juger de la bonne application de l'art. 153 al. 2 let. b LP
 
4.  
En définitive, le recours est rejeté. La recourante, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens aux intimés 1 et 2, qui n'ont pas été suivis sur la question de l'effet suspensif et qui n'ont pas été invités à se déterminer sur le fond (art. 68 al. 1 LTF), ni à l'office (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à l'Office des poursuites et des faillites de Delémont et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal cantonal du canton du Jura. 
 
 
Lausanne, le 13 octobre 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : Achtari