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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1B_446/2020  
 
 
Arrêt du 27 avril 2021  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président, Chaix, Jametti, Haag et Merz. 
Greffier : M. Kurz. 
 
Participants à la procédure 
ASLOCA, Association Genevoise des Locataires, représentée par Me Jean-Jacques Martin, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, représenté par Me Marc-Alec Bruttin, avocat, 
B.________ SA, représentée par Me Nicolas Jeandin, avocat, 
intimés, 
 
Ministère public de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy. 
 
Objet 
Procédure pénale; qualité de partie plaignante, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de 
la République et canton de Genève, Chambre 
pénale de recours, du 17 juillet 2020 
(P/2462/2019, ACPR/494/2020). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Au mois de février 2019, l'Asloca-Genève a déposé plainte pénale pour faux dans les titres commis dans l'exercice de fonctions publiques (art. 317 CP) et obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP; procédure P/2462/2019). Elle exposait que, dans un acte notarié établi en 2009 par le notaire genevois A.________, il était indiqué que l'immeuble concerné était dès sa construction soumis à un régime comparable à la PPE, ce qui avait permis la revente d'appartements par lots séparés, selon les règles de la loi genevoise du 25 janvier 1996 sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation (LDTR; RS/GE L 5 20). L'Asloca s'était opposée dans une procédure administrative à certaines de ces ventes et la société propriétaire B.________ SA lui réclamait par la voie civile des indemnités pour le retard causé dans ces transactions. En réalité, l'immeuble n'était pas soumis à un régime analogue à la PPE dès sa construction, de sorte que les ventes n'auraient pas dû être autorisées. B.________ SA a déposé plainte pénale contre l'Asloca pour dénonciation calomnieuse, calomnie et diffamation (procédure P/19545/2019). Appelée à se déterminer sur sa qualité de partie civile dans la procédure P/2462/2019, l'Asloca a indiqué que, dans la procédure administrative, elle s'estimait lésée et garante de l'application de la LDTR; elle était aussi victime en tant que personne visée par la plainte pour atteinte à l'honneur. 
Par ordonnance du 21 avril 2020, le Ministère public a refusé à l'Asloca la qualité de partie plaignante: elle n'avait aucun lien avec l'immeuble ou l'acte notarié, et sa qualité pour recourir reconnue dans l'application de la LDTR n'avait aucune influence en matière de procédure pénale. Son seul intérêt était en lien avec la procédure civile qui l'opposait à B.________ SA, et il s'agissait d'un intérêt indirect. Par une seconde ordonnance du même jour, le Ministère public a suspendu la procédure P/19545/2019 jusqu'à droit connu dans la procédure P/2462/2019. L'Asloca a recouru dans un même acte contre ces deux ordonnances. 
 
B.  
La Chambre pénale de recours de la Cour de justice genevoise a statué séparément sur ces deux recours. Dans un premier arrêt du 7 juillet 2020, elle a rejeté le recours dirigé contre la suspension de la procédure (cause 1B_445/2020 devant le Tribunal fédéral). Par un second arrêt, du 17 juillet 2020, elle a rejeté le recours formé par l'Asloca contre l'ordonnance de refus de qualité de partie plaignante. La recourante n'était pas directement lésée - notamment dans ses intérêts patrimoniaux - par la production de l'acte notarié qui avait permis la vente individualisée d'appartements. L'action civile dont elle faisait l'objet n'était pas directement fondée sur cet acte notarié. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière pénale, Asloca-Genève demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du 17 juillet 2020 et de lui reconnaître la qualité de partie lésée dans la procédure P/2462/2019. Elle demande par ailleurs que B.________ SA soit également reconnue comme partie à cette même procédure et requiert la jonction des deux procédures pénales. Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause à l'instance cantonale ou au Ministère public pour nouvelles décisions dans le sens de ses conclusions principales. 
La Chambre des recours pénale se réfère à son arrêt, sans observations. Le Ministère public conclut au rejet du recours. B.________ SA s'en rapporte à justice, tout en s'opposant à ce quelle soit déclarée partie à la procédure P/2462/2019. A.________ conclut à l'irrecevabilité du recours - faute de prétentions civiles élevées par la recourante, ainsi qu'en raison de ses conclusions -, subsidiairement à son rejet. La recourante (qui a produit une jurisprudence cantonale nouvelle du 15 décembre 2020), puis l'intimé A.________ persistent dans leurs conclusions. La recourante a produit une nouvelle écriture spontanée le 25 janvier 2021. Elle revient sur l'arrêt cantonal du 15 décembre 2020 qui confirmerait le caractère trompeur de l'acte notarié et se détermine sur les dernières écritures des intimés. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La décision attaquée a été rendue dans le cadre d'une procédure pénale par une juridiction statuant en tant que dernière instance cantonale et peut donc faire l'objet d'un recours en matière pénale au sens des art. 78 ss LTF. La recourante se voit dénier la qualité de partie plaignante et se trouve dès lors définitivement écartée de la procédure pénale. Le prononcé entrepris revêt donc à son encontre les traits d'une décision finale au sens de l'art. 90 LTF (ATF 139 IV 310 consid. 1 p. 312). Eu égard au statut de partie plaignante qui lui est refusé, la recourante peut se plaindre d'une violation de ses droits de partie et dispose ainsi de la qualité pour recourir au Tribunal fédéral, indépendamment des éventuelles conclusions civiles qu'elle pourrait faire valoir (art. 81 LTF; ATF 141 IV 1 consid. 1.1 et 1.2; arrêt 1B_40/2020 du 18 juin 2020 consid. 1). Pour le surplus, le recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF). 
 
1.1. Les conclusions tendant à la reconnaissance de la qualité de partie plaignante sont recevables au regard de l'art. 107 al. 2 LTF. Il n'en va pas de même de celles qui tendent, d'une part, à attraire Scope Immo dans la procédure pénale P/2462/2019 et, d'autre part, à la jonction des deux procédures en cours: ces deux conclusions vont clairement au-delà de l'objet du litige et sont dès lors irrecevables.  
Sous cette dernière réserve, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
1.2. La recourante demande la jonction de la présente cause avec la cause 1B_445/2020 concernant la décision de suspension. Cette dernière concerne toutefois, comme on l'a vu, une procédure distincte. Les parties sont également différentes, de même que les questions à traiter. Une jonction ne se justifie donc pas.  
 
1.3. En réplique puis dans son écriture spontanée du 25 janvier 2021, la recourante a produit un arrêt de la Chambre administrative de la Cour de justice genevoise statuant sur une demande de révision d'un arrêt de 2013 confirmant des autorisations d'aliéner. Cet arrêt de révision constaterait que l'acte notarié de 2009 contient des informations fausses. Il s'agit toutefois d'une pièce nouvelle, irrecevable en vertu de l'art. 99 al. 1 LTF. En outre, elle est dénuée de pertinence puisque la présente cause porte non pas sur la réalité des infractions dénoncées par la recourante (en particulier la véracité du titre), mais uniquement sur la qualité de partie plaignante de cette dernière.  
 
2.  
Invoquant implicitement l'art. 105 al. 2 LTF et se plaignant d'arbitraire, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir omis certains faits. Entendue dans la procédure civile, l'avocate de B.________ SA aurait reconnu qu'il y avait "quelque chose de contradictoire dans l'acte notarié", ce qui démontrerait l'existence d'une infraction commise au détriment de la recourante. L'arrêt attaqué passerait aussi sous silence la plainte pénale déposée par B.________ SA contre la recourante en raison des allégations de cette dernière concernant les profits réalisés sur la base d'un acte faux. La cour cantonale aurait encore ignoré que, dans sa plainte pénale, la recourante désignait nommément B.________ SA comme l'auteur possible d'une infraction d'utilisation - et non d'obtention - d'un titre faux (utilisation également commise dans le cadre de la plainte déposée contre la recourante), de sorte qu'il ne s'agirait pas, comme l'a retenu la cour cantonale d'un acte postérieur non punissable. 
 
2.1. Le Tribunal fédéral est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1 LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1 et 105 al. 2 LTF, à savoir pour l'essentiel de façon arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation, mais aussi dans son résultat (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 143 IV 241 consid. 2.3.1). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables. Le Tribunal fédéral n'entre ainsi pas en matière sur les critiques de nature appellatoire (ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 142 III 364 consid. 2.4 et les références citées).  
 
2.2. La question de savoir si la recourante a la qualité de partie plaignante dépend comme on le verra de l'existence d'une atteinte directe découlant de l'infraction telle qu'elle est dénoncée. Dans ce contexte, la cour cantonale a bien examiné la question de l'utilisation du titre prétendument faux puisqu'elle mentionne sa production dans la procédure administrative (consid. 3.4) ainsi qu'une utilisation au sens de l'art. 252 al. 2 CP. La déclaration de l'avocate de B.________ SA est censée démontrer l'utilisation par cette société (dans la procédure administrative) d'un titre faux. On ne voit toutefois pas en quoi cette utilisation serait propre à modifier l'appréciation de la cour cantonale s'agissant de l'atteinte directe que devrait subir la recourante. Quant à la plainte déposée par B.________ SA contre la recourante, elle est dûment mentionnée dans la partie en fait (B.d) de l'arrêt attaqué; elle fait l'objet de la procédure parallèle P/19545/2019 et la recourante y a évidemment la qualité de partie. Si la cour cantonale a considéré que l'utilisation du titre dans une procédure civile dirigée contre la recourante constituait un acte postérieur non punissable, le même raisonnement pouvait être tenu s'agissant de la plainte pénale pour atteinte à l'honneur. Celle-ci est d'ailleurs fondée non pas sur l'utilisation proprement dite du titre en question mais sur les allégations de faux de la recourante. Il n'y a par conséquent aucun arbitraire dans l'établissement des faits.  
 
3.  
La recourante relève que la qualité de partie plaignante s'apprécie en fonction des allégués figurant dans la plainte et qu'une mise en danger du patrimoine peut constituer une atteinte directe. Elle cite à ce propos l'arrêt 1B_549/2013 du 24 février 2014. Elle estime que les prétentions civiles soulevées à son encontre par B.________ SA (plus d'un demi-million de francs) constitueraient une telle atteinte. Elle relève qu'elle ne dénonçait pas la participation volontaire à la création d'un titre faux, mais son utilisation délibérée, de sorte que les considérations relatives à la punissabilité d'un acte postérieur seraient erronées. La cour cantonale aurait par ailleurs méconnu que l'acte notarié n'est pas utilisé que pour attenter à son patrimoine, mais aussi à son honneur par le biais de la plainte pénale. La recourante estime que les trois utilisations du titre (dans la procédure administrative, la procédure civile et la procédure pénale) la léseraient directement, les biens juridiques protégés pa r l'art. 253 CP étant tant collectifs qu'individuels. La recourante se prévaut enfin de l'art. 45 al. 5 LDTR qui lui confère un rôle dans l'application de cette loi. 
 
3.1. Selon l'art. 118 al. 1 CPP, on entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil. La notion de lésé est définie à l'art. 115 al. 1 CPP. Il s'agit de toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction (ATF 145 IV 491 consid. 2.3; 143 IV 77 consid. 2.2 et les arrêts cités). Lorsque la norme ne protège pas en première ligne les biens juridiques individuels, seule est considérée comme lésée la personne qui est affectée dans ses droits par l'infraction sanctionnée par la norme en cause, pour autant que l'atteinte apparaisse comme la conséquence directe du comportement de l'auteur. Il suffit, dans la règle, que le bien juridique individuel dont le lésé invoque l'atteinte soit protégé secondairement ou accessoirement, même si la disposition légale protège en première ligne des biens juridiques collectifs. En revanche, celui dont les intérêts privés ne sont atteints qu'indirectement par une infraction qui ne lèse que des intérêts publics, n'est pas lésé au sens du droit de procédure pénale (ATF 145 IV 491 consid. 2.3.1; 141 IV 454 consid. 2.3.1). Pour être directement touché, le lésé doit en outre subir une atteinte en rapport de causalité directe avec l'infraction poursuivie. Les personnes subissant un préjudice indirect ou par ricochet ne sont donc pas lésées et sont des tiers n'ayant pas accès au statut de partie à la procédure pénale (ATF 141 IV 454 consid. 2.3.1; arrêt 1B_40/2020 du 18 juin 2020 consid. 3 et les arrêts cités). Tel est le cas du simple dénonciateur au sens de l'art. 301 al. 1 CPP, qui n'a pas de droit de procédure hormis celui d'être informé, à sa demande, de la suite qui a été donnée à sa dénonciation (art. 301 al. 2 et 3 CPP).  
 
3.2. A côté des parties mentionnées à l'art. 104 al. 1 CPP, l'art. 104 al. 2 CPP précise que la Confédération et les cantons peuvent reconnaître la qualité de partie, avec tous les droits ou des droits limités, à d'autres autorités chargées de sauvegarder des intérêts publics. Les autorités en question peuvent être cantonales (conseils communaux, autorités d'assistance sociale ou de protection de l'environnement, autorité chargée du recouvrement des pensions alimentaires - art. 217 al. 2 CP) ou fédérales (Ministère public de la Confédération, Chancellerie et départements fédéraux; BENDANI, Commentaire romand CPP, 2e éd. 2019 n° 27 ss ad art. 104). La notion d'autorité au sens de cette disposition doit être comprise dans un sens restrictif (ATF 144 IV 240 consid. 2; OBERHOLZER, Grundzüge des Strafprozessrechts, 4e éd. 2020, n° 372). Le législateur fédéral a renoncé à accorder le droit de partie aux associations ayant pour but de protéger des intérêts généraux (par exemple la lutte contre le racisme ou la protection de l'environnement). C'est en effet au Ministère public qu'il incombe de représenter et de faire valoir d'office les intérêts de la communauté. Les associations en question peuvent certes agir en tant que dénonciatrices, mais en reconnaissant la qualité de partie à un trop grand nombre d'acteurs habilités à intervenir activement dans la procédure, le déroulement de celle-ci s'en trouverait alourdi ou compliqué dans une mesure disproportionnée avec les avantages obtenus (Message CPP, FF 2006 pp. 1141 s.; BENDANI, op. cit. n° 30 ad art. 104; JEANNERET/KUHN, Précis de procédure pénale, 2e éd. 2018 n° 7030 p. 220).  
Exceptionnellement, certaines associations peuvent certes se voir reconnaître la qualité de lésé - même en l'absence d'atteinte directe à leurs intérêts - dans la mesure où elles ont qualité pour déposer plainte pénale (art. 115 al. 2 CPP). Cette qualité n'est toutefois là aussi reconnue que de manière exceptionnelle, pour autant qu'il existe une base légale spécifique autorisant expressément une association à agir au plan pénal. Tel est le cas de l'art. 23 al. 2 de la loi fédérale sur la concurrence déloyale (LCD, RS 241) qui octroie le droit de déposer plainte aux associations professionnelles ou de protection des consommateurs (MAZZUCCHELLI/POSTIZZI, Commentaire Bâlois CPP, 2e éd. n° 36 ad art. 115). 
 
3.3. La plainte pénale déposée par la recourante le 7 février 2019 mentionne les infractions de faux dans les titres commis dans l'exercice de fonctions publiques (art. 317 CP) et d'obtention frauduleuse d'une constatation fausse (art. 253 CP). Elle concerne l'acte notarié passé le 14 octobre 2009 pour la vente séparée de huit appartements, qui précisait que l'immeuble était dès son origine soumis à un régime analogue à la PPE. Cette indication aurait permis l'octroi des autorisations correspondantes ainsi que leur confirmation par les instances cantonales de recours.  
Selon la jurisprudence, l'infraction de faux dans les titres vise non seulement à protéger la confiance du public dans l'exactitude d'un titre mais encore la confiance spéciale dont jouissent les actes officiels de l'État et aussi l'intérêt de l'État à une gestion fiable par ses fonctionnaires (ATF 95 IV 113 consid. 2b; 81 IV 285 consid. 1.3). Le faux dans les titres peut cependant également porter atteinte à des intérêts individuels; une personne peut être considérée comme lésée par un faux lorsque celui-ci vise précisément à lui nuire (arrêt 1B_40/2020 du 18 juin 2020 consid. 6.2; DUPUIS ET AL., Petit Commentaire, Code pénal, 2e éd. 2017, n° 1 ad art. 317 CPP; OBERHOLZER, op. cit. n° 544; voir également ATF 140 IV 155 consid. 3.3.3). 
En l'espèce, la création alléguée d'un faux par le notaire ou les parties à l'acte n'avait manifestement pas pour but de nuire directement à la recourante en portant atteinte à son patrimoine ou à son honneur. La délivrance d'autorisations d'aliéner le cas échéant sur la base de faux documents portait ainsi atteinte, exclusivement, à l'intérêt collectif poursuivi par la législation cantonale sur l'aliénation de logements. Quant aux procédures civile et pénale dirigées contre la recourante et susceptibles de porter atteinte à son honneur ou à son patrimoine, elles ne sont pas la conséquence directe de la création et de l'utilisation du titre, de la manière définie dans la plainte: la recourante évoquait en effet uniquement l'utilisation de l'acte notarié pour obtenir des autorisations de ventes séparées. Le préjudice qui pourrait être causé à la recourante en raison de l'usage du titre en question à l'appui de démarches ultérieures, ne constitue là aussi qu'un préjudice indirect. 
 
3.4. Compte tenu des principes rappelés ci-dessus, la recourante ne peut pas non plus se fonder sur le droit de recours qui lui est reconnu en droit cantonal par l'art. 45 al. 5 LDTR. Cette disposition a la teneur suivante:  
 
"Ont la qualité pour recourir auprès du Tribunal administratif de première instance et de la Chambre administrative de la Cour de justice contre les décisions prises en vertu de la présente loi les personnes visées à l'article 60 de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985, ainsi que les associations régulièrement constituées d'habitants, de locataires et de propriétaires d'importance cantonale, qui existent depuis 3 ans au moins, et dont le champ d'activité statutaire s'étend à l'objet concerné." 
 
Il en ressort que le droit d'intervention de la recourante est strictement limité au domaine de la procédure administrative. Pour autant que cela soit admissible au regard du caractère restrictif du droit fédéral, la disposition cantonale en question n'habilite nullement la recourante (qui n'est pas une autorité au sens de l'art. 104 al. 2 CPP) à déposer plainte au sens de l'art. 115 al. 2 CPP et à intervenir en tant que partie à la procédure pénale. 
C'est dès lors à juste titre que la qualité de partie plaignante a été déniée à la recourante, laquelle bénéficie uniquement du statut de dénonciatrice. 
 
4.  
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est recevable. Conformément à l'art. 66 al. 1 LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante. Celle-ci devra en outre verser à l'intimé A.________ une indemnité de dépens (art. 68 al. 2 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à B.________ SA, dès lors que celle-ci s'en est rapportée à justice. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
3.  
Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée à l'intimé A.________, à la charge de la recourante. Il n'est pas alloué d'autres dépens. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties, au Ministère public de la République et canton de Genève et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale de recours. 
 
 
Lausanne, le 27 avril 2021 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
Le Greffier : Kurz