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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_388/2020  
 
 
Arrêt du 2 septembre 2020  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux 
Chaix, Président, Jametti et Haag. 
Greffier : M. Parmelin. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Cinzia Petito, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public du canton de Vaud, 
P rocureur cantonal Strada, 
p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens. 
 
Objet 
Procédure pénale; changement d'avocat d'office, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours 
pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 23 juillet 2020 (577 - PE19.005641-CDT//ACP). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le 20 mars 2019, le Ministère public cantonal Strada a ouvert une instruction pénale contre A.________ pour avoir notamment commis de nombreux vols par effraction dans la région de la Riviera vaudoise. Me Cinzia Petito a été désignée comme défenseur d'office du prévenu. 
Par acte d'accusation du 30 décembre 2019, le Ministère public a renvoyé A.________ en jugement devant le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de l'Est vaudois pour vol par métier, subsidiai rement vol, tentative de vol, recel, dommages à la propriété, violation de domicile, infractions à la loi fédérale sur les armes et à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration et contravention à la loi fédérale sur les stupéfiants. 
Une première audience de jugement fixée les 27 et 28 avril 2020 a été renvoyée à la demande du prévenu au motif qu'il était dans l'attente d'une décision de la juridiction cantonale de recours sur la question de la licéité de ses conditions de détention. Une deuxième audience agendée le 5 juin 2020 a été renvoyée à la requête de la défense qui entendait recourir auprès du Tribunal fédéral contre l'arrêt rendu à ce propos par la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal le 8 mai 2020. 
Le 11 juin 2020, le Tribunal des mesures de contrainte du canton de Vaud a ordonné la prolongation de la détention pour des motifs de sûreté de A.________ pour une durée maximale de quatre mois. Statuant le 6 juillet 2020 sur recours du prévenu, la Chambre des recours pénale a réformé cette ordonnance et a fixé l'échéance maxi male de la prolongation au 12 août 2020. Elle a invité le Tribunal correctionnel à tenir les débats de première instance dans ce délai, même si aucune décision définitive n'était rendue dans l'intervalle sur le caractère licite ou illicite des conditions de détention du prévenu. 
Le 7 juillet 2020, la Présidente du Tribunal correctionnel a fixé d'office les débats de la cause au 31 juillet 2020. 
 
Le 9 juillet 2020, Me Cinzia Petito a informé le tribunal qu'elle était en vacances jusqu'au 6 août 2020, que son collaborateur Me Sébastien Scharl avait un cours de répétition du 27 juillet au 7 août 2020 et que son client refusait d'être défendu par un avocat-stagiaire; elle a requis le report de l'audience à une date ultérieure. 
Le 10 juillet 2020, la Présidente du Tribunal correctionnel a refusé de renvoyer les débats au vu de l'arrêt rendu le 6 juillet 2020 par la Chambre des recours pénale et a imparti un délai échéant le même jour, à 16h00, à Me Cinzia Petito pour lui indiquer si celle-ci ou un autre collaborateur de l'étude se rendait disponible pour l'audience faute de quoi elle serait contrainte de la relever de son mandat et de désigner un autre défenseur d'office. 
Le même jour, Me Cinzia Petito a signal é à la présidente que ses disponibilités n'avaient pas été prises en considération pour fixer les débats comme le prévoyait l'art. 202 al. 3 CPP et précisé que dans l'hypothèse où l'audience de jugement serait maintenue, son avocat-stagiaire Me Matia Trosic, qui disposait d'une très bonne connaissance du dossier, s'y rendrait pour assurer la défense du prévenu. 
Par courrier du 13 juillet 2020, la Présidente du Tribunal correctionnel a informé Me Cinzia Petito que l'audience était maintenue compte tenu de l'arrêt du 6 juillet 2020 lui imposant de fixer d'office l'audience selon l'agenda du tribunal et lui a imparti un délai au 20 juillet 2020 pour lui retourner l'attestation signée par A.________ indiquant qu'il acceptait d'être défendu par l'avocat-stagiaire de l'étude. 
Le 20 juillet 2020, Me Cinzia Petito a inform é la présidente que son mandant maintenait son refus d'être défendu par un avocat-stagiaire lors des débats et qu'il s'opposait à ce qu'elle soit relevée de sa mission de défenseur d'office à moins de dix jours de l'audience de jugement fixée unilatéralement. Elle a ajouté que son secrétariat se tenait à disposition pour lui communiquer ses disponibilités ainsi que celles de son collaborateur. 
Par prononcé du 21 juillet 2020, la Présidente du Tribunal correctionnel a relevé Me Cinzia Petito de sa mission de défenseur d'office et désigné Me Lionel Ducret en remplacement. 
La Chambre des recours pénale a confirmé ce prononcé au terme d'un arrêt rendu le 23 juillet 2020 sur recours du prévenu. 
 
B.   
Agissant par la voie du recours en matière pénale, A.________ demande au Tribunal fédéral de réformer cet arrêt en ce sens que le prononcé de la Présidente du Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois du 21 juillet 2020 est annulé et que le mandat de défenseur d'office de Me Cinzia Petito est maintenu. Il conclut à titre subsidiaire à l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à la Chambre des recours pénale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert l'assistance judiciaire. 
Par ordonnance du 30 juillet 2020, le Président de la Cour de céans a rejeté la demande de mesures superprovisionnelles et provisionnelles du recourant tendant à la désignation de Me Cinzia Petito en qualité de défenseur d'office, Me Lionel Ducret étant relevé de sa mission, à l'annulation de l'audience de jugement du 31 juillet 2020 et à la fixation d'une nouvelle audience à la première date utile mais en tout cas postérieurement au 7 août 2020. 
Le Procureur cantonal Strada et la Chambre des recours pénale ont renoncé à se déterminer et se réfèrent à la décision attaquée. 
Me Lionel Ducret a produit des déterminations spontanées le 26 août 2020. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Conformément à l'art. 78 LTF, une décision relative à la défense d'office dans une cause pénale peut faire l'objet d'un recours en matière pénale. 
De nature incidente, le prononcé de la Présidente du Tribunal correctionnel qui relève Me Cinzia Petito de sa mission de défenseur d'office du recourant et désigne Me Lionel Ducret en remplacement ne met pas un terme à la procédure pénale. Il en va de même de l'arrêt attaqué qui en partage la nature. Le recours au Tribunal fédéral n'est donc en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Cela étant, lorsque le recours est formé contre une décision d'irrecevabilité, cette situation équivaut, sous l'angle de la recevabilité, à un déni de justice formel. Le recours sur ce point particulier est donc ouvert indépendamment d'un préjudice irréparable (ATF 143 I 344 consid. 1.2 p. 346). Seule la question de la recevabilité du recours cantonal peut alors en principe être portée devant le Tribunal fédéral. Toutefois, dans la mesure où la Chambre des recours pénale s'est également prononcée au fond, les griefs développés par le recourant en lien avec la motivation retenue pour écarter son recours sont recevables. 
Pour le surplus, la qualité pour recourir du prévenu est donnée. Le recours a en outre été déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale (art. 80 al. 1 LTF). Partant, il y a lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
La Chambre des recours pénale a considéré que le recours, interjeté par le prévenu uniquement, était irrecevable faute pour celui-ci d'avoir établi le risque que son nouvel avocat d'office ne puisse défendre efficacement ses intérêts. Par surabondance, elle a rejeté le recours aux motifs que les empêchements invoqués n'étaient pas pertinents et qu'une défense efficace n'était plus assurée au vu de l'injonction faite au Tribunal correctionnel de fixer les débats au plus tard le 12 août 2020 pour tenir compte du principe de célérité ancré à l'art. 5 al. 2 CPP. Elle n'a pas davantage souscrit à l'argument du recourant qui faisait valoir que sa défense ne pourrait pas être préparée en dix jours au vu de la complexité de la cause. 
Le recourant soutient que l'irrecevabilité de son recours cantonal violerait les art. 382 al. 1 CPP et 111 al. 1 LTF. Il se prévaut à cet égard de la jurisprudence publiée du Tribunal fédéral qui reconnaît l'existence d'un préjudice irréparable lorsque le changement d'avocat d'office n'est pas requis par la partie assistée mais qu'il est ordonné par l'autorité compétente en matière d'assistance judiciaire contre le gré des intéressés (ATF 139 IV 113 consid. 1.1 p. 116; 135 I 261 consid. 1.2 p. 263 et 133 IV 335 consid. 4 p. 339). Dans un arrêt non publié, postérieur à ces arrêts, la Cour de céans a toutefois précisé que lorsque, comme en l'espèce, le prévenu recourt seul et que l'avocat qui s'est vu relever de sa mission de défense d'office renonce à recourir, le prévenu n'était pas dispensé de démontrer à quel préjudice irréparable il serait exposé par le changement d'avocat ordonné en application de l'art. 134 al. 2 CPP (arrêt 1B_243/2017 du 28 novembre 2017 consid. 1.3 cité par NIKLAUS OBERHOLZER, Grundzüge des Strafprozessrechts, 4è éd., 2020, p. 157). 
 
Ainsi, on peut se demander si, au regard de cet arrêt, la position de la Chambre des recours pénale qui dénie au recourant un intérêt juridique à recourir au sens de l'art. 482 al. 1 CPP faute pour celui-ci d'avoir rendu vraisemblable que le changement d'avocat ne garantissait pas une défense efficace prête flanc à la critique. Cette question souffre de demeurer indécise car la motivation subsidiaire pour confirmer au fond le prononcé de la Présidente du Tribunal correctionnel résiste aux critiques que lui adresse le recourant. 
La jurisprudence rendue en application de l'art. 134 al. 2 CPP admet que la célérité de la procédure puisse imposer un changement d'avocat d'office lorsque le détenu est en détention et qu'une défense efficace ne peut plus être assurée par une autre mesure (cf. arrêts 1B_166/2020 du 25 juin 2020 consid. 3.1.2 et 1B_187/2013 du 4 juillet 2013 consid. 2.2). Tel est précisément le cas en l'espèce. La Chambre des recours pénale a, dans un arrêt du 6 juillet 2020, enjoint le Tribunal correctionnel de fixer l'audience de débats au plus tard au 12 août 2020 faute de quoi la détention avant jugement du prévenu ne serait plus conforme au principe de proportionnalité, conduisant à sa libération immédiate. La Présidente du Tribunal correctionnel devait ainsi impérativement arrêter la date des débats avant le 13 août 2020 pour se conformer aux injonctions qui lui étaient faites, ce qu'elle a fait en fixant d'office l'audience de jugement au 31 juillet 2020 en fonction de l'agenda du tribunal. 
La demande de report de l'audience au-delà du 7 août 2020 était motivée par les vacances de Me Cinzia Petito, par l'indisponibilité de Me Sébastien Scharl en raison du service militaire et par le fait que le prévenu refusait d'être défendu par un avocat-stagiaire de l'étude. Ces circonstances ne justifiaient pas un nouveau renvoi de l'audience de jugement. La procédure pénale ne connaît pas de féries judiciaires (art. 89 al. 2 CPP); aussi, la Présidente du Tribunal correctionnel, au vu de l'arrêt de la Chambre des recours pénale du 6 juillet 2020, n'avait pas à prendre en considération d'éventuelles vacances de l'avocate désignée d'office au recourant pour fixer la date des débats. La Chambre des recours pénale a par ailleurs tenu pour établi, sans que cela ne soit contesté devant la Cour de céans, le fait que l'agenda du tribunal ne permettait pas de fixer une audience après le retour de vacances de Me Cinzia Petito prévu le 6 août 2020 et avant le 13 août 2020. II ne ressort pas davantage des courriers échangés avec la Présidente du Tribunal correctionnel après l'arrêt de la Chambre des recours pénale du 6 juillet 2020 que Me Cinzia Petito aurait suggéré, en accord avec son mandant, la fixation d'une audience de jugement quelques jours après le 12 août 2020 pour lui permettre d'assister son mandant lors des débats. La Présidente du Tribunal correctionnel ne saurait ainsi se voir reprocher de ne pas avoir souscrit à une telle solution ni de l'avoir envisagée et proposée d'office dès lors qu'elle était liée par les injonctions de la Chambre des recours pénale contenue dans son arrêt du 6 juillet 2020 sous peine de violer le principe de la célérité ancré à l'art. 5 al. 2 CPP et du principe de la proportionnalité de la détention déduit de l'art. 212 al. 3 CPP. A cela s'ajoute que le recourant, qui plaide au bénéfice de l'assistance juridique, n'a pas un droit à être défendu par l'avocat qui lui a été désigné le cas échéant selon ses voeux lorsque les circonstances justifient son remplacement en application de l'art. 134 al. 2 CPP, mais qu'il peut tout au plus prétendre à une défense efficace de l'avocat d'office qui lui est désigné. Il importe ainsi peu que le recourant se dise tout à fait satisfait de la défense et de la stratégie adoptée par Me Cinzia Petito et qu'il s'est opposé à son remplacement. Au demeurant, il ne prétend pas que l'affaire en cause est particulièrement complexe au point que l'avocat désigné en remplacement de Me Cinzia Petito n'aurait pas été en mesure d'assurer une défense efficace de ses intérêts et ne s'en prend pas à la motivation retenue sur ce point dans l'arrêt attaqué pour écarter ce grief. 
En considérant que Me Cinzia Petito s' était rendue inapte à assurer la défense des intérêts de son mandant par son indisponibilité à la date retenue pour l'audience de jugement, alors qu'un nouveau report de celle-ci ne se justifiait pas, en la relevant de sa mission de défense d'office du recourant et en nommant un autre défenseur d'office en la personne de Me Lionel Ducret, la Présidente du Tribunal correctionnel a pris une décision conforme au droit fédéral et l'arrêt attaqué qui confirme cette décision résiste à la critique. 
 
3.   
Le recours doit par conséquent être rejeté. Le recourant a demandé l'octroi de l'assistance judiciaire. Les conditions y relatives étant réunies, cette requête doit être admise (art. 64 al. 1 et 2 LTF). Il y a donc lieu de désigner Me Cinzia Petito en tant qu'avocate d'office du recourant et de lui allouer une indemnité à titre d'honoraires, qui seront supportés par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens à Me Lionel Ducret qui s'est déterminé sans y avoir été invité en s'en remettant à justice. 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La requête d'assistance judiciaire est admise; Me Cinzia Petito est désignée comme avocate d'office du recourant et une indemnité de 1500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué à la mandataire du recourant, au Ministère public du canton de Vaud, Procureur cantonal Strada, à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud, ainsi que, pour information, à Me Lionel Ducret, avocat à Vevey, et au Tribunal d'arrondissement de l'Est vaudois. 
 
 
Lausanne, le 2 septembre 2020 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Chaix 
 
Le Greffier : Parmelin