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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
6B_1130/2018  
 
 
Arrêt du 15 novembre 2018  
 
Cour de droit pénal  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, 
Oberholzer et Jametti. 
Greffier : M. Graa. 
 
Participants à la procédure 
X.________, 
représenté par Me Alain Dubuis, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public central du canton de Vaud, 
intimé. 
 
Objet 
Levée du traitement ambulatoire (art. 63a CP), 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale, du 3 octobre 2018 (no 769 PE17.020676-DBT). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Avant 2014, X.________ a été condamné à cinq reprises, notamment pour actes d'ordre sexuel avec un enfant, délit manqué de viol et viol en 2002 et 2009, ainsi que pour des violences physiques sans connotation sexuelle en 2005, 2009 et 2011. 
 
Le 15 février 2011, le Tribunal de police de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a condamné le prénommé à une peine privative de liberté d'ensemble de 18 mois et a ordonné en sa faveur un traitement ambulatoire au sens de l'art. 63 CP. Le 30 mai 2011, X.________ a bénéficié d'une libération conditionnelle assortie de contrôles d'abstinence aux stupéfiants et de la poursuite d'un suivi psychothérapeutique ambulatoire. 
 
B.   
Par jugement du 7 février 2014, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a condamné X.________, pour voies de fait qualifiées, injure, menaces qualifiées, contrainte, contrainte sexuelle, contravention à la LStup et infraction à la LArm, a révoqué la libération conditionnelle octroyée le 30 mai 2011 et a infligé au prénommé une peine privative de liberté d'ensemble de quatre ans et demi, sous déduction de 290 jours de détention avant jugement, à une peine pécuniaire de 20 jours-amende à 10 fr. le jour ainsi qu'à une amende de 600 francs. Le tribunal a en outre ordonné la poursuite du traitement ambulatoire à visées psychothérapeutiques et de traitement des addictions au sens de l'art. 63 CP
 
C.   
Dans le cadre de l'examen de la libération conditionnelle de X.________, le Juge d'application des peines a entendu ce dernier le 31 janvier 2017 et a ordonné une expertise psychiatrique de l'intéressé. 
 
L'expert, le Dr A.________, a rendu ses conclusions dans un rapport du 3 juillet 2017 et un complément du 18 septembre 2017. 
 
Le terme des peines purgées par X.________ a été atteint le 5 novembre 2017. Le prénommé demeure en détention pour des motifs de sûreté. 
 
 
D.   
Par jugement du 15 février 2018, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de la Broye et du Nord vaudois a levé la mesure de traitement psychothérapeutique ambulatoire instaurée en faveur de X.________ par jugement du 15 février 2011 et reconduite par jugement du 7 février 2014, a ordonné à la place une mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l'art. 59 CP ainsi que le maintien en détention de l'intéressé pour des motifs de sûreté. 
 
Par arrêt du 16 mars 2018, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X.________ contre le jugement du 15 février 2018 - dans la mesure où celui-ci était recevable - et a confirmé cette décision. 
 
Par arrêt du 31 juillet 2018 (6B_510/2018), le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours formé par X.________ contre l'arrêt du 16 mars 2018, a annulé celui-ci et a renvoyé la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Il a rejeté le recours pour le surplus. En substance, le Tribunal fédéral a relevé que l'autorité d'exécution n'avait jamais levé le traitement ambulatoire dont bénéficiait le prénommé depuis 2011, de sorte que le juge du fond ne pouvait, en l'état, instaurer une mesure thérapeutique institutionnelle. Il appartenait, dans un premier temps, à l'autorité d'exécution de lever le traitement ambulatoire concerné, avant que, le cas échéant et dans un second temps, la question du prononcé d'une éventuelle mesure thérapeutique institutionnelle puisse être examinée. 
 
E.   
Par ordonnance du 18 septembre 2018, le Juge d'application des peines a levé le traitement ambulatoire ordonné en faveur de X.________ par jugement du 15 février 2011 et reconduit par jugement du 7 février 2014. 
 
F.   
Par arrêt du 3 octobre 2018, la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par X.________ contre cette ordonnance et a confirmé celle-ci. 
 
G.   
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 3 octobre 2018, en concluant, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que la mesure de traitement psychothérapeutique ambulatoire instaurée par jugement du 15 février 2011 et reconduite par jugement du 7 février 2014 est maintenue et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour nouvelle décision. Il sollicite par ailleurs le bénéfice de l'assistance judiciaire. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recourant reproche à l'autorité précédente d'avoir violé les art. 56 al. 6 et 63a al. 2 let. b CP en levant le traitement ambulatoire dont il bénéficie. 
 
1.1. Lorsque l'auteur souffre d'un grave trouble mental, est toxico-dépendant ou qu'il souffre d'une autre addiction, le juge peut ordonner un traitement ambulatoire au lieu d'un traitement institutionnel, si l'auteur a commis un acte punissable en relation avec son état et s'il est à prévoir que cette mesure le détournera de nouvelles infractions en relation avec son état (art. 63 al. 1 CP). La durée des mesures dépend des besoins de traitement de l'intéressé et des perspectives de succès de la mesure (cf. art. 56 al. 1 let. b CP). La mesure est ordonnée sans égard au type et à la durée de la peine prononcée. Sont déterminants l'état des facultés mentales de l'auteur ainsi que l'impact de la mesure sur le risque de commission d'autres infractions (ATF 143 IV 445 consid. 2.2 p. 447; 136 IV 156 consid. 2.3 p. 158 s.). Un traitement ambulatoire selon l'art. 63 CP ne peut en règle générale excéder cinq ans, mais peut être prolongé à chaque fois de un à cinq ans; une telle prolongation est possible aussi souvent que cela est nécessaire. La mesure ne prend pas fin avec l'écoulement du temps, mais dure en principe le temps nécessaire pour que son but soit atteint ou jusqu'à ce qu'il paraisse exclu qu'il puisse l'être (ATF 143 IV 445 consid. 2.2 p. 447; 141 IV 236 consid. 3.5 p. 240; 141 IV 49 consid. 2.1 p. 51 s.).  
 
Une mesure dont les conditions ne sont plus remplies doit être levée (art. 56 al. 6 CP). Ainsi, l'autorité compétente ordonne l'arrêt du traitement ambulatoire si sa poursuite paraît vouée à l'échec (art. 63a al. 2 let. b CP). L'échec du traitement ambulatoire ne doit pas être admis à la légère. La mesure doit apparaître définitivement impossible à exécuter. Une crise provisoire de l'intéressé ne suffit pas. La levée de la mesure doit faire l'objet d'un acte formel (ATF 143 IV 445 consid. 2.2 p. 447; arrêt 6B_253/2015 du 23 juillet 2015 consid. 2.1). 
 
1.2. La cour cantonale a repris à son compte l'appréciation opérée par le Juge d'application des peines. Il en ressortait que le recourant avait pris part au traitement ordonné mais n'était pas en mesure, eu égard en particulier à son trouble de la personnalité, d'investir son traitement ambulatoire. La prise d'un nouvel antidépresseur ne pouvait modifier cette appréciation mais révélait au contraire que le trouble mental diagnostiqué par l'expert judiciaire était toujours d'actualité. En outre, le recourant n'avait pas cessé de consommer du cannabis, même en détention, ce qui n'était pas rassurant, étant rappelé que cette consommation constituait un facteur de risque de décompensation et de passage à l'acte. Le recourant, qui avait par le passé bénéficié d'un traitement ambulatoire, d'une libération conditionnelle sous conditions de poursuite dudit traitement ainsi que de contrôles d'abstinence aux stupéfiants, avait néanmoins récidivé en 2014. Aucun élément au dossier n'indiquait que le traitement ambulatoire avait produit les résultats escomptés par les divers intervenants. Ainsi, les nombreux manquements de l'intéressé, en particulier son incapacité à mieux gérer ses traits caractériels ou à se montrer abstinent, démontraient qu'après sept ans et demi de traitement la mesure ambulatoire n'avait pas atteint ses objectifs, tant sur le plan psychothérapeutique que sur celui du traitement des addictions.  
 
Selon l'autorité précédente, le recourant avait demandé en vain un rapport du médecin qui le suivait, puisque celui-ci ne pouvait - compte tenu du lien thérapeutique le liant à son patient - fournir un avis objectif. Le fait que ce médecin eût déclaré au recourant qu'il y avait eu du progrès en matière de comportement et d'impulsivité, de même que le fait que l'intéressé n'eût plus été sanctionné depuis une année pour des actes de violence physique ou verbale mais uniquement à réitérées reprises pour consommation de stupéfiants, n'infirmait pas le constat d'échec du traitement thérapeutique, fondé notamment sur les conclusions de l'expert judiciaire. La volonté du recourant de poursuivre le traitement ambulatoire n'était pas davantage de nature à infirmer le constat d'échec de la mesure, celui-ci sachant qu'il s'exposerait - cas échéant - au prononcé d'une mesure thérapeutique institutionnelle. En outre, l'absence de volonté ou d'implication de celui-ci dans le traitement était moins déterminante, en l'occurrence, que celle de résultat probant s'agissant d'une mesure instituée depuis de nombreuses années. 
 
La cour cantonale a ajouté que les considérations de l'expert judiciaire ne permettaient pas de retenir que le traitement ambulatoire serait un succès thérapeutique. Celui-ci avait indiqué que l'évolution lente des comportements du recourant - moins oppositionnels - et de sa perception de sa personne - moins installée dans la toute-puissance - constituaient déjà un succès thérapeutique qu'il convenait d'encourager. L'expert avait cependant précisé que cette évolution apparaissait vouée à l'échec dans le cadre d'un traitement ambulatoire et ne pourrait se poursuivre que dans un cadre institutionnel. Il avait exposé que l'évolution en question était encore "insuffisante pour imaginer une gestion autonome du risque dans un cadre ambulatoire" et que le recourant avait besoin "d'un étayage bien identifié, stable, cadrant et sécurisant" correspondant à celui d'une mesure thérapeutique institutionnelle au sens de l'art. 59 CP
 
1.3. Le recourant reproche à la cour cantonale de ne pas avoir demandé un rapport de son thérapeute, lequel aurait été le seul, selon lui, à pouvoir fournir un avis propre à confirmer ou infirmer les considérations développées par le Juge d'application des peines.  
 
On comprend que le recourant entend contester l'appréciation anticipée de la preuve à laquelle s'est livrée la cour cantonale. Celui-ci ne démontre toutefois nullement en quoi le refus de demander un rapport à son thérapeute serait arbitraire et violerait son droit d'être entendu (cf. concernant la jurisprudence relative à l'art. 389 al. 3 CPP l'arrêt 6B_898/2018 du 2 novembre 2018 consid. 1.1 et les références citées). En effet, l'autorité précédente a, pour l'essentiel, conclu à l'échec du traitement ambulatoire sur la base des explications émanant de l'expert judiciaire, soit ses rapports des 3 juillet et 18 septembre 2017. Ces rapports n'apparaissent pas trop anciens pour juger de l'éventuel échec du traitement ambulatoire, à plus forte raison dans la mesure où l'expert a, lors de l'audience tenue par le Tribunal correctionnel le 12 février 2018, confirmé la teneur de son expertise, en précisant que le cadre imposé par un traitement ambulatoire n'était pas suffisant pour l'intéressé. 
 
Dans la mesure où le recourant affirme que, selon son thérapeute, son comportement serait en progrès, il ne contredit en rien l'appréciation de l'expert judiciaire, lequel a cependant ajouté que cette amélioration serait compromise si le traitement devait se poursuivre dans un cadre purement ambulatoire. Pour le reste, compte tenu de l'appréciation de l'expert judiciaire formulée après plusieurs années de traitement ambulatoire, il n'apparaissait pas arbitraire de considérer que l'absence de sanction disciplinaire - depuis une année - en raison d'actes de violence physique ou verbale, ou encore la prise d'un nouvel antidépresseur, auraient fondé une modification de la situation du recourant nécessitant de nouvelles mesures d'instruction. Au demeurant, comme l'a relevé la cour cantonale, un rapport émanant du propre médecin du recourant n'aurait pas été - compte tenu du lien thérapeutique et de confiance existant nécessairement entre les deux intéressés (cf. arrêts 6B_1099/2016 du 1er septembre 2017 consid. 3.3.3; 6B_1101/2013 du 26 mai 2014 consid. 2.4 et les références citées) - à même de reléguer au second plan les constatations de l'expert judiciaire. 
 
1.4. Le recourant soutient que son traitement ambulatoire ne serait pas voué à l'échec.  
 
Il relève tout d'abord avoir été toujours "preneur du traitement ambulatoire" et être disposé à poursuivre celui-ci hors de prison. Il affirme ensuite que le traitement ambulatoire dont il bénéficie depuis 2011 serait un succès. Son argumentation repose sur une lecture biaisée de l'expertise judiciaire. En effet, dans son rapport du 18 septembre 2017, l'expert a évoqué un "succès thérapeutique" non en lien avec la mesure elle-même, mais avec la lente évolution constatée dans le comportement du recourant. Celui-ci a ajouté que cette évolution était cependant "insuffisante pour imaginer une gestion autonome du risque dans un cadre ambulatoire", l'intéressé ayant besoin d'un "étayage bien identifié, stable, cadrant et sécurisant" correspondant à celui d'une mesure à titre de l'art. 59 CP. Cette appréciation ressortait déjà du rapport du 3 juillet 2017, dans lequel l'expert a indiqué ce qui suit (cf. pièce 4/30 du dossier cantonal, p. 17) : 
 
"Les apprentissages [du recourant], bien qu'authentiques, restent superficiels. Il évolue de manière relativement favorable, d'un point de vue comportemental, dans un environnement très protégé tel que le milieu carcéral. Malheureusement, l'expérience nous montre que, faute d'une contenance externe, le risque de commettre de nouveaux actes délictuels est majeur." 
 
L'expert a encore confirmé cette analyse lors de l'audience du 12 février 2018, en déclarant que le traitement ambulatoire ne paraissait pas "apporter un cadre suffisant". Enfin, contrairement à ce que soutient le recourant, la cour cantonale n'a nullement fondé de manière prépondérante son constat d'échec du traitement ambulatoire sur sa consommation persistante de cannabis. L'autorité précédente a au contraire relevé, en se basant sur l'appréciation de l'expert judiciaire à cet égard, que cette consommation n'était pas à la base des passages à l'acte de l'intéressé, en ajoutant qu'il serait de surcroît à craindre - compte tenu de cette appétence pour le cannabis - que le recourant puisse consommer des drogues dures hors d'un milieu fermé. 
 
En définitive, compte tenu des constatations de l'expert judiciaire, selon lesquelles le traitement ambulatoire n'a pas eu pour effet de diminuer le risque de récidive - celui-ci étant important pour des actes de violence et des actes d'ordre sexuel commis avec violence à défaut de contenance externe - et selon lesquelles l'évolution du comportement constatée n'était pas significative et ne pourrait être préservée hors d'un cadre contenant, il apparaît que la mesure dont le recourant bénéficie depuis 2011 est désormais vouée à l'échec. Partant, la cour cantonale n'a pas violé le droit fédéral en levant le traitement ambulatoire instauré par jugement du 15 février 2011 et reconduit par jugement du 7 février 2014. Le grief doit être rejeté. 
 
2.   
Le recours doit être rejeté. Comme il était dénué de chances de succès, la demande d'assistance judiciaire doit être rejetée (art. 64 al. 1 LTF). Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF), dont le montant sera fixé en tenant compte de sa situation financière, laquelle n'apparaît pas favorable. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est rejetée. 
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'200 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 15 novembre 2018 
 
Au nom de la Cour de droit pénal 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Denys 
 
Le Greffier : Graa