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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
2C_866/2019  
 
 
Arrêt du 27 août 2020  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. et Mmes les Juges fédéraux 
Seiler, Président, Aubry Girardin, Donzallaz, Hänni et Beusch. 
Greffière : Mme Vuadens. 
 
Participants à la procédure 
1. A.A.________, 
2. B.A.________, 
tous les deux représentés par Jean-Marc Wasem, expert fiscal diplômé, c/o Société Aubineau Avocats & Associés, 
recourants, 
 
contre  
 
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, 
intimée. 
 
Objet 
Impôt sur la fortune; évaluation de titres non cotés, période fiscale 2008, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, du 27 août 2019 (ATA/1303/2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Les époux B.A.________ et A.A.________ sont domiciliés dans le canton de Genève. A.A.________ détient l'intégralité du capital-actions de la société anonyme Etude A.A.________ SA (ci-après: la Société), non cotée en bourse, qui exploite une étude d'avocats dans le canton de Genève. Dans leur déclaration fiscale 2008, les époux A.A.________ et B.A.________ ont mentionné les titres Etude A.A________ SA à leur valeur nominale, soit 100'000 francs. 
 
B.  
Par bordereau d'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) du 29 octobre 2013, l'Administration fiscale du canton de Genève (ci-après: l'Administration cantonale) a taxé les époux A.A.________ et B.A.________ pour l'année 2008 en fixant la valeur fiscale des actions de la Société à 7'117'900 fr., sur la base du double de la valeur de rendement de la Société, sous déduction de la moitié de la perte reportée. 
 
Le 22 novembre 2013, les contribuables ont formé réclamation contre cette décision. Ils contestaient notamment l'estimation fiscale des actions de la Société, considérant que seule la valeur comptable de la Société devait être prise en considération pour la détermination de leur fortune. 
 
Le 25 juillet 2016, l'Administration cantonale a informé la Société que ses actions étaient évaluées à 8'125'504 fr. 76 fr. au 31 décembre 2008. Ce montant correspondait à la moyenne entre la valeur substantielle de la Société (0 fr.), et sa valeur de rendement (16'251'009 fr. 52) prise en compte une seule fois. Cette dernière valeur était obtenue par la moyenne des résultats de la Société sur trois ans (périodes fiscales 2006 à 2008), capitalisée à 10,5%. 
 
Le 20 septembre 2016, l'Administration cantonale a admis la réclamation des contribuables s'agissant du montant de la créance postposée de l'actionnaire, mais l'a rejetée en tant qu'elle concernait l'évaluation des titres de la Société. 
 
Contre cette décision, les époux A.A.________ et B.A.________ ont recouru, le 19 octobre 2016, auprès du Tribunal administratif de première instance du canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif), demandant à ce que les titres de l'Etude A.A.________ SA soient évalués, aux fins de l'impôt sur la fortune, sur la base de la seule valeur de ses fonds propres au 31 décembre 2008, correspondant à un montant nul. 
 
Par jugement du 28 juin 2018, le Tribunal administratif a rejeté le recours et confirmé l'évaluation à 8'125'500 fr. de l'Administration cantonale. 
 
Le recours des époux A.A.________ et B.A.________auprès de la Cour de justice, Chambre administrative, du canton de Genève (ci-après: la Cour de justice) a été rejeté par arrêt du 27 août 2019. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.A ________ et B.A.________ demandent en substance au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler l'arrêt du 27 août 2019 de la Cour de justice, ainsi que le jugement du 28 juin 2018 du Tribunal administratif et de renvoyer la cause à l'Administration cantonale pour nouveau bordereau de taxation d'impôt cantonal et communal 2008, en lui ordonnant en conséquence de rectifier l'imposition. 
 
La Cour de justice s'en rapporte à justice quant à la recevabilité du recours et persiste dans les considérants et le dispositif de son arrêt. L'Administration cantonale conclut au rejet du recours. Les recourants ont répliqué. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La voie du recours en matière de droit public est ouverte (art. 82 let. a, 86 al. 1 let. d et al. 2 art. 90 LTF), la cause ne tombant sous le coup d'aucune des exceptions prévues à l'art. 83 LTF (cf. également l'art. 73 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes [LHID; RS 642.14]). Le recours a par ailleurs été déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et dans les formes prévus par la loi (art. 42 LTF) par les recourants, qui ont qualité pour recourir (cf. art. 89 al. 1 LTF). Il convient donc d'entrer en matière sous réserve de ce qui suit.  
 
1.2. Comme la Cour de céans l'avait déjà indiqué aux recourants dans la procédure concernant leur taxation 2007 (cf. arrêt 2C_59/2019 du 28 janvier 2019 consid. 5), en raison de l'effet dévolutif complet du recours formé devant la Cour de justice (cf. ATF 136 II 101 consid. 1.2 p. 104), la conclusion tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif est irrecevable.  
 
En revanche, les autres conclusions qui tendent au renvoi de la cause à l'administration cantonale et à ce qu'il lui soit ordonné de rectifier l'imposition, sont admissibles, dès lors que, si les recourants obtenaient gain de cause, le Tribunal fédéral ne serait de toute manière pas en mesure de statuer lui-même sur le fond en fixant le montant de l'impôt sur la fortune dû en 2008, mais devrait renvoyer la cause à l'autorité précédente (cf. ATF 137 II 313 consid. 1.3 p. 317; 136 V 131 consid. 1.2 s. p. 135; 134 III 379 consid. 1.3 p. 383). 
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF toutefois, il ne connaît de la violation des droits fondamentaux, ainsi que de celle de dispositions de droit cantonal et intercantonal, que si ce grief a été invoqué et motivé, c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de façon claire et détaillée (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368). Le Tribunal fédéral examine en principe librement la conformité du droit cantonal harmonisé et de son application par les instances cantonales aux dispositions de la LHID. Cependant, lorsque les dispositions de cette loi fédérale laissent une marge de manoeuvre aux cantons, le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral se limite aux griefs constitutionnels, en particulier à l'arbitraire, invoqués de manière conforme aux exigences de l'art. 106 al. 2 LTF (cf. ATF 134 II 207 consid. 2 p. 209 s.; arrêts 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 4.4 et les références, non publié in ATF 143 I 73).  
 
2.2. Conformément à l'art. 105 al. 1 LTF et sous réserve de l'art. 105 al. 2 LTF, le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 142 II 355 consid. 6 p. 358; 139 II 373 consid. 1.6 p. 377).  
 
3.  
Le litige concerne l'estimation de la valeur des actions de la Société non cotées en bourse dont A.A.________ est actionnaire unique aux fins de l'imposition sur la fortune des recourants pour la période fiscale 2008. 
 
4.   
Selon l'art. 13 al. 1 LHID, l'impôt sur la fortune a pour objet l'ensemble de la fortune nette. Selon l'art. 14 al. 1 LHID, la fortune est estimée à la valeur vénale. Toutefois, la valeur de rendement peut être prise en considération de façon appropriée. 
 
4.1. La valeur vénale est la valeur marchande objective d'un actif à un moment donné. Il s'agit de la valeur qu'un acheteur paierait normalement dans des circonstances normales (cf. arrêts 2C_1057/2018 du 7 avril 2020 consid. 4.1; 2C_450/2013 du 5 décembre 2013 consid. 2.1, in RF 69/2014 p. 216; DZAMKO-LOCHER/TEUSCHER, in Kommentar StHG, 3e éd. 2017, n° 4 ad Art. 14 StHG).  
 
L'évaluation selon la valeur vénale est obligatoire pour les cantons. La LHID ne prescrit toutefois pas au législateur cantonal une méthode d'évaluation précise pour déterminer cette valeur (ATF 134 II 207 consid. 3.6 p. 214; arrêt 2C_277/2018 du 9 mai 2019 consid. 4.1). Les cantons disposent donc en la matière d'une marge de manoeuvre importante pour élaborer et appliquer leur réglementation, aussi bien dans le choix de la méthode de calcul applicable que pour déterminer, sur le vu du caractère potestatif de l'art. 14 al. 1 2e phrase LHID, dans quelle mesure la valeur de rendement doit être prise en considération dans l'estimation (arrêt 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 4.1 non publié in ATF 143 I 73, mais in StE 2017 A 22 Nr. 6; ATF 134 II 207 consid. 3.6 p. 214; 128 I 240 consid. 3.1.1 p. 248). Cela étant, la valeur de rendement ne peut, le cas échéant, être prise en considération que " de manière appropriée " (art. 14 al. 2 LHID). Elle ne saurait justifier n'importe quel écart avec la valeur vénale (ATF 134 II 207 consid. 3.6 p. 214; 124 I 145 consid. 6b p. 159 s.). Eu égard à la large marge de manoeuvre laissée aux cantons en la matière, le Tribunal fédéral ne remet toutefois en cause une évaluation cantonale que dans la mesure des griefs constitutionnels dûment invoqués, et en particulier celui de l'arbitraire (arrêt 2C_953/2019 du 14 avril 2020 consid. 4.1 et l'arrêt cité, in RDAF 2020 II 260). 
 
 
4.2. Dans le canton de Genève, l'impôt sur la fortune est actuellement régi par la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP; RSG D 3 08) et son règlement d'application. La période fiscale litigieuse étant 2008, c'est l'ancienne loi du 22 septembre 2000 sur l'imposition des personnes physiques - Impôt sur la fortune (aLIPP-III) qui est applicable (cf. art. 72 al. 1 2 e phrase LIPP; arrêt 2C_583/2013 du 23 décembre 2013 consid. 3.1.1), de même que l'ancien Règlement d'application du 19 décembre 2001 de la loi sur l'imposition des personnes physiques - Impôt sur la fortune (aRIPP-III).  
L'art. 5 aLIPP-III concerne l'évaluation de la fortune mobilière et son alinéa 2 règle l'évaluation des titres non cotés en bourse. Il prévoit notamment que les actions non cotées en bourse sont évaluées en fonction de la valeur de rendement de l'entreprise et de sa valeur intrinsèque. D'après l'art. 1 aRIPP-III, les instructions concernant l'estimation des titres non cotés en vue de l'impôt sur la fortune sont applicables si elles ne dérogent pas à l'art. 5 aLIPP-III notamment. 
 
4.3. Les instructions mentionnées à l'art. 1 aRIPP-III se réfèrent aux " Instructions concernant l'estimation des titres non cotés en vue de l'impôt sur la fortune ", éditées par la Conférence suisse des impôts (CSI), qui regroupe les administrations fiscales cantonales et l'Administration fédérale des contributions. Celles-ci ont fait l'objet de plusieurs éditions depuis les années 40, dont la dernière, applicable dès la période fiscale 2008, a été publiée dans la Circulaire CSI n° 28 du 28 août 2008 (ci-après: la Circulaire 28; consultable à l'adresse https://www.steuerkonferenz.ch/fr/?Documents:Circulaires; arrêts précités 2C_826/2015 consid. 4; 2C_583/2013 consid. 3.1.2). La Circulaire 28 fait par ailleurs l'objet de Commentaires de la CSI (ci-après: Commentaires de la Circulaire 28, consultables sous le même lien), qui sont mis à jour annuellement pour refléter la pratique et tenir compte de la jurisprudence.  
 
4.4. La Circulaire 28 (précisée par les Commentaires), qui prévoit des règles unifiées d'estimation des titres non cotés en vue de leur imposition sur la fortune, concerne donc un domaine où les cantons jouissent d'un large pouvoir d'appréciation. La jurisprudence a souligné que ladite circulaire poursuivait un but d'harmonisation fiscale horizontale et concrétisait ainsi l'art. 14 al. 1 LHID (arrêts 2C_1057/2018 du 7 avril 2020 consid. 4.2.1; 2C_328/2019 du 16 septembre 2019 consid. 5.2; 2C_826/2015 précité du 5 janvier 2017 consid. 4.3 et les références, non publié in ATF 143 I 73). En tant que directive, ladite circulaire ne constitue cependant pas du droit fédéral ou intercantonal, ne crée aucun droit ni aucune obligation et ne lie donc pas le juge (arrêt 2C_1082/2013 du 14 janvier 2015 consid. 5.3.1, in RF 70/2015 p. 432, et les arrêts cités). Elle est toutefois reconnue, de jurisprudence constante, comme présentant en général une méthode adéquate et fiable pour l'estimation de la valeur vénale des titres non cotés en bourse (arrêts 2C_321/2019 du 1er octobre 2019 consid. 2.3, in StE 2020 B 52.42 11 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'exclut toutefois pas que d'autres méthodes d'évaluation reconnues puissent, isolément, s'avérer appropriées (arrêts 2C_953/2019 du 14 avril 2020 consid. 4.2; 2C_1057/2018 du 7 avril 2020 consid. 4.2.1; 2C_1082/2013 du 14 janvier 2015 consid. 5.3.1 et les arrêts cités).  
 
4.5. La Circulaire 28 rappelle que la fortune est estimée en principe à la valeur vénale (ch. 2). Elle prévoit une méthode d'estimation générale des titres non cotés en bourse, communément appelée " méthode des praticiens ", qui s'applique aux sociétés commerciales, industrielles et aux sociétés de services. Selon cette méthode, la valeur de ces titres correspond à la moyenne pondérée entre la valeur de rendement, doublée, et la valeur intrinsèque déterminée selon le principe de la continuation (ch. 34). La Circulaire 28 réserve toutefois des situations où seule la valeur substantielle de la société est prise en compte, ce qui est le cas des sociétés nouvellement constituées (ch. 32), des sociétés holding, de gestion de fortune et de financement, ainsi que les sociétés immobilières (ch. 38 et 42).  
La pratique envisage par ailleurs une exception à l'application stricte de la méthode des praticiens pour les " sociétés avec valeur de rendement inaliénable, respectivement difficilement aliénable, car dépendante de la performance individuelle de l'actionnaire ". Tel est le cas lorsque le rendement d'une entreprise repose exclusivement ou presque exclusivement sur la performance d'une personne unique détenant la totalité ou la majorité des droits de participation de celle-ci. Le Commentaire de la Circulaire 28 prévoit que, si la création de valeur de l'entreprise est obtenue uniquement par le détenteur d'une participation majoritaire et si l'entreprise n'emploie pas d'autres personnes, hormis quelques personnes occupées à des tâches d'administration et de logistique, l'autorité d'estimation peut, sur demande de l'entreprise, prendre en considération cette situation par une pondération simple de la valeur de rendement (soit non doublée contrairement à ce qu'impose la méthode des praticiens) et de la valeur de substance (Commentaire de la Circulaire, ch. 5; arrêt 2C_1057/2018 du 7 avril 2020 consid. 4.2.2). 
 
5.  
L'arrêt attaqué a confirmé l'évaluation des autorités précédentes, qui ont appliqué la Circulaire 28 et la méthode préconisée par son Commentaire pour les sociétés avec une valeur de rendement inaliénable ou difficilement aliénable. Selon cette méthode, la valeur fiscale des actions de la Société aux fins de l'imposition sur la fortune des recourants était égale à 8'125'500 francs. La position des recourants, qui demandaient que les actions de la Société soient évaluées sur la seule base de la valeur substantielle, au motif qu'elle ne dépendait que de la performance de son actionnaire, ce qui aurait abouti à une valeur nulle, n'a pas été suivie, car la Circulaire 28 prévoyait déjà une méthode de calcul adaptant la méthode des praticiens pour tenir compte des particularités de cette situation. L'arrêt attaqué a par ailleurs écarté le grief d'inégalité de traitement dont se plaignaient les contribuables, par rapport aux études d'avocats organisées en sociétés de capitaux. Selon les juges cantonaux, si celles-ci avaient pu obtenir par le passé et à certaines conditions un accord de l'Administration cantonale, afin que leurs titres soient estimés sur la seule base de la valeur substantielle de la société d'avocats, cette pratique, inspirée de ce qui se faisait dans le canton de Zurich, n'avait actuellement plus cours. Au surplus, A.A.________, alors particulièrement renseigné sur le sujet en tant qu'avocat d'affaires, n'avait accompli aucune démarche pour bénéficier d'un tel traitement. Enfin, les juges précédents ont rejeté l'argumentation subsidiaire des recourants, qui se plaignaient de la prise en compte d'une valeur artificiellement haute de la valeur de rendement de la Société, qui découlait du fait que A.A.________ n'avait perçu aucune rémunération de la Société au cours des exercices 2007 et 2008. Ils ont retenu que la valeur de rendement utilisée découlait des comptes de la Société. Or, ceux-ci ne comportaient aucune violation manifeste du droit comptable, de sorte qu'ils n'avaient pas à être corrigés, pour tenir compte d'un salaire fictif de l'avocat. Au surplus, la Société n'avait pas contesté sa taxation 2008, qui était entrée en force. En outre, les recourants ne pouvaient tirer avantage d'un hypothétique revenu dans le cadre de l'imposition de leur fortune, alors qu'ils ne l'auraient pas déclaré au titre de revenu. 
 
6.  
Les recourants critiquent tout d'abord la méthode d'évaluation appliquée, découlant de la Circulaire 28 et de son Commentaire, sous deux angles. 
 
6.1. Ils soutiennent en premier lieu que cette méthode, qui évalue les titres sur la base d'une valeur de rendement simple, découle d'une modification du Commentaire à la Circulaire 28 intervenue en 2015. Il s'agirait d'un changement de pratique qui ne s'appliquerait pas à l'estimation des études d'avocats organisées en société anonyme et qui ne saurait concerner leur taxation 2008.  
 
6.1.1. Il semble échapper aux recourants que la méthode d'évaluation qui leur a été appliquée tient compte de la situation spécifique de la Société. En effet, comme on l'a vu, l'application stricte de la méthode des praticiens aurait abouti à évaluer la Société sur la base d'une double valeur de rendement. Les Instructions CSI tempèrent cette méthode, en préconisant une évaluation sur la base d'une valeur de rendement simple, pour tenir compte des sociétés dont la valeur de rendement repose exclusivement ou presque exclusivement sur la performance d'une personne unique détenant la totalité ou la majorité des droits de participation, ce qui est le cas de la Société détenue exclusivement par A.A.________. La prise en compte de la méthode tempérée est donc plus favorable aux recourants que si les autorités s'en étaient tenues à la stricte méthode des praticiens.  
 
6.1.2. Au demeurant, les recourants perdent aussi de vue que la méthode d'évaluation qui a été confirmée par les juges précédents était prévue par la Circulaire et son commentaire bien avant 2015 pour valoriser des sociétés " avec valeur de rendement inaliénable car dépendante de la performance individuelle de l'actionnaire " (cf. par exemple le commentaire 2010 de la Circulaire figurant sur le site de la CSI). Il ne se sont donc pas vu appliquer rétroactivement un nouveau mode de calcul.  
 
6.1.3. Dans la mesure où les recourants se réfèrent à la méthode d'évaluation des titres fondée sur la substance de la société dont certains actionnaires de sociétés d'avocats ont pu bénéficier avant 2015, ils demandent l'application d'un système d'évaluation reposant non pas sur la Circulaire 28 et son Commentaire, mais sur des accords négociés avec les administrations fiscales (cf. infra consid. 7.2). Leur grief relève donc moins de l'application de la Circulaire 28 que d'une éventuelle inégalité de traitement, que les recourants invoquent également. Il sera ainsi examiné ci-après.  
 
6.2. En second lieu, les recourants affirment que la méthode de valorisation fondée sur la Circulaire 28 et le Commentaire est inadaptée à leur situation. Ils soutiennent en substance qu'elle ne permet pas de déterminer la valeur vénale des titres de la Société, dès lors que l'on ne peut soutenir qu'un tiers aurait accepté d'acquérir les actions de cette société au prix de 8'125'500 fr., puisque cette valeur dépendait étroitement de la présence de A.A.________. L'Etude A.A.________ n'avait aucune valeur, car elle " ne jouit d'aucune réputation et ne détient aucune clientèle propre " (recours p. 11).  
 
6.2.1. Il n'est pas contesté que l'évaluation des actions de la Société procède d'une application correcte de la méthode des praticiens tempérée, telle que préconisée par les Instructions CSI. Même si cette méthode ne lie pas le juge, elle est réputée constituer une méthode adéquate et fiable pour l'estimation de la valeur vénale des titres non cotés en bourse (cf. supra consid. 4.4). Du reste, le droit cantonal applicable renvoie expressément aux Instructions de la CSI (cf. supra consid. 4.3). Partant, la Cour de céans ne peut remettre en cause l'évaluation opérée sur cette base que dans la mesure où le recourant démontre que celle-ci serait arbitraire ou qu'elle violerait d'autres droits constitutionnels (cf. supra consid. 4.1). A cet égard on peut se demander si l'argumentation des recourants remplit les conditions de l'art. 106 al. 2 LTF, dès lors qu'ils se contentent de discuter l'argumentation de l'arrêt attaqué en opposant la méthode d'évaluation appliquée à celle fondée sur la valeur substantielle, mais sans démontrer, concrètement, en quoi l'évaluation retenue serait arbitraire.  
 
6.2.2. Ainsi, il ne suffit pas d'affirmer que personne n'achèterait la Société au prix des titres tels qu'estimés, pour que l'on puisse en déduire que l'application de la méthode résultant de la Circulaire 28 et de son Commentaire par les autorités cantonales serait insoutenable. Les recourants ont déjà bénéficié d'une méthode d'évaluation qui tient compte des caractéristiques des sociétés offrant des services dont la valeur dépend étroitement de l'activité de leur actionnaire unique, puisque la valeur de rendement n'a été pris en compte qu'une fois, alors qu'elle l'aurait été à double avec la méthode des praticiens. La position des recourants, qui contestent cette évaluation parce que la valeur des titres repose sur l'activité de l'actionnaire avocat, revient ainsi à remettre en cause, de manière générale, la méthode préconisée par la CSI pour toutes les sociétés de services détenues par un actionnaire unique, sans expliquer ni démontrer en quoi cette méthode serait dans son principe même inadéquate.  
 
6.2.3. Il ne suffit pas non plus d'affirmer que la méthode d'évaluation reposant sur la valeur substantielle serait plus appropriée pour que l'on puisse en conclure que le résultat auquel aboutit l'arrêt attaqué serait choquant. D'ailleurs une évaluation reposant exclusivement sur la valeur substantielle aurait pour conséquence de parvenir de manière systématique à une évaluation très faible des titres des sociétés de services dont la valeur dépend de l'activité de leur actionnaire unique (cette valeur est nulle pour les recourants). On peut fortement douter qu'une telle méthode respecterait le principe de l'évaluation à la valeur vénale prévue par l'art. 14 LHID.  
 
6.2.4. Si, en l'espèce, la valeur des titres de 8'125'500 fr. calculée sur la base des comptes de la Société peut certes paraître élevée, il convient de relever qu'elle s'explique notamment par le fait que A.A.________, actionnaire unique de son étude d'avocat, ne s'est pas versé de salaire en 2007 et en 2008. Comme l'ont relevé pertinemment les juges précédents, si l'avocat avait perçu une rémunération en lien avec le bénéfice réalisé par son étude durant les exercices considérés, la valeur de rendement de celle-ci aurait fortement baissé et partant également sa valeur fiscale, ce qui se serait répercuté sur l'imposition des titres dans la fortune des contribuables. La valeur élevée des titres est ainsi une conséquence du choix économique voire fiscal en lien avec l'imposition de leur revenu que les recourants ont adopté et qu'il n'appartient pas à la Cour de céans d'analyser dans la présente procédure. En revanche, les recourants ne sauraient se plaindre d'une évaluation sans lien avec la réalité des titres de la Société lors de l'imposition de leur fortune, alors qu'il est évident qu'une société dont la valeur dépend essentiellement de l'activité de son actionnaire unique voit sa valeur de rendement augmenter lorsque cet actionnaire unique, de manière surprenante, renonce lui-même à se faire rémunérer pour son activité. L'évaluation des titres de la société, n'apparaît ainsi pas sans lien avec la réalité, mais est liée au choix de son actionnaire unique de ne pas percevoir de rémunération, augmentant ainsi la valeur de ses titres.  
 
Par conséquent, les critiques des recourants concernant la méthode d'évaluation appliquée par les autorités genevoises et au résultat obtenu, à supposer qu'elles remplissent les exigences de l'art. 106 al. 2 LTF, doivent être rejetées. 
 
7.  
Les recourants font ensuite valoir que l'arrêt attaqué consacre une inégalité de traitement. Ils soutiennent qu'ils ont droit au même traitement, pour 2008, que celui que les administrations fiscales cantonales zurichoises et genevoises ont accordé, par le passé, à des avocats actionnaires d'études organisées en sociétés anonymes, à savoir une valorisation des actions sur la seule base de la valeur substantielle de leur société. 
 
7.1. Une décision viole le principe de l'égalité prévu à l'art. 8 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente (ATF 140 I 201 consid. 6.5.1 p. 210). En droit fiscal, l'art. 8 al. 1 Cst. est concrétisé à l'art. 127 al. 2 Cst. (cf. ATF 141 I 235 consid. 7.1 p. 239), duquel il découle notamment que les contribuables qui sont dans la même situation économique doivent supporter une charge fiscale semblable (cf. ATF 141 I 78 consid. 9.2 p. 91; 140 II 157 consid. 7.1 p. 160 s).  
 
7.2. En l'occurrence, il ressort de l'arrêt attaqué que, dans le canton de Zurich, des études d'avocats avaient soumis et obtenu de l'administration cantonale des rulings (sur cette notion : arrêt 2C_123/2014 du 30 septembre 2015, in RF 70/2015 p. 971, RDAF 2015 II 563) qui réglaient les conséquences fiscales de la transformation de leur étude en personne morale et en particulier en société anonyme (arrêt attaqué p. 14). Dans le canton de Zurich, l'Ordre des avocats zurichois avait établi un modèle de ruling à soumettre à l'administration cantonale à cet effet (cf. arrêt attaqué p. 6). S'agissant de l'impôt sur la fortune, ce modèle de ruling prévoyait que les parts du capital pourraient être évaluées sur la seule base de la valeur substantielle de la personne morale, si les avocats s'étaient contractuellement engagés à ne les céder qu'à cette valeur (art. 105 al. 2 LTF). Il ressort de l'arrêt attaqué que, dans le canton de Genève, des études avocats organisées en personnes morales avaient obtenu le même traitement fiscal de la part de l'Administration cantonale. Est ainsi reproduit un extrait du procès-verbal d'une réunion qui s'était tenue le 16 février 2016 entre l'Administration cantonale et l'Ordre des avocats genevois, selon lequel :  
 
(...) pour les cabinets qui s'appuient sur le " ruling zurichois ", c'est la valeur substantielle qui est déterminante, et ceci en raison de la structure particulière de ces cabinets où les associés entrants n'acquittent pas de goodwill, pas plus que les associés sortants n'en bénéficient. Pour les autres cas, l'Administration fait normalement usage de la méthode des praticiens telle qu'elle ressort de la Circulaire (...). 
 
L'arrêt attaqué souligne toutefois que cette pratique a été abandonnée, à la suite d'un arrêt rendu le 22 avril 2015 par le Steuerrekursgericht du canton de Zurich, qui concernait l'évaluation des actions d'une société anonyme active dans le conseil fiscal, détenue par une actionnaire unique. Cette actionnaire demandait à être traitée de la même manière que les études d'avocats constituées en sociétés de capitaux qui avaient obtenu un ruling de l'administration cantonale, à savoir une évaluation des titres sur la seule base de la valeur substantielle de la société. Le Steuerrekursgericht a relevé que cette pratique était problématique au regard du principe de la légalité, les études d'avocats devant être qualifiées de sociétés de services. Le Commentaire à la Circulaire 28 rend compte de cet arrêt en ces termes : 
« Les études d'avocats organisées en tant que personnes morales doivent être qualifiées de sociétés de services. Le chiffre 34 des Instructions, applicable dès lors, exige ainsi que la valeur de rendement soit incluse dans le calcul. La transmissibilité restreinte des droits de participation est uniquement à prendre en considération dans le cadre de la déduction forfaitaire selon le chiffre 61. Une politique spéciale de salaires et de dividendes n'aurait également aucune influence sur les principes de l'estimation. Par ailleurs, les règles de base n'interdisent pas aux avocats de créer un goodwill dans leur société [StRK ZH (1 ST.2014.46) du 22.4.2015]). » 
 
Depuis lors, l'Administration cantonale genevoise n'entre plus en matière sur de nouvelles demandes de ruling visant à valoriser les titres d'études d'avocats organisées en personnes morales sur la seule base de la valeur substantielle, comme l'indique l'extrait du procès-verbal de la réunion du 17 mai 2018 entre l'Administration cantonale et l'Ordre des avocats genevois, cité dans l'arrêt attaqué p. 6, qui mentionne que: 
« (...) il se trouve qu'un certain nombre de cabinets d'avocats qui ont adopté la forme de la société de capitaux ont obtenu, lorsqu'ils ont adopté cette forme juridique et avant la modification précitée du commentaire, un accord des autorités fiscales de quelques cantons, dont Genève, portant notamment, sur la valorisation de leurs actions. (...) toute nouvelle demande portant sur l'évaluation des titres non cotés pour l'impôt sur la fortune qui s'écarterait de la circulaire CSI 28 se verra imposer un refus d'entrer en matière de la part de l'AFC-GE ". 
 
 
7.3. Il ressort de ce qui précède que, s'il est arrivé à l'Administration cantonale d'accepter par le passé une valorisation des titres d'une étude d'avocats organisée en personne morale sur la seule base de la valeur substantielle, c'est d'une part parce que les avocats concernés avaient négocié un accord en ce sens avec les autorités fiscales et d'autre part parce que les avocats associés étaient liés par une convention limitant la transmissibilité de leurs titres à cette valeur. Or, les recourants ne peuvent se prévaloir d'aucune de ces conditions. Il ressort de l'arrêt attaqué que les recourants n'ont pas allégué avoir négocié un tel accord ni pris ultérieurement contact avec les autorités fiscales, alors qu'en tant qu'avocat d'affaires, A.A.________ était particulièrement renseigné sur le sujet (cf. arrêt attaqué p. 14 s). En outre, ce dernier, seul détenteur des titres de son Etude, ne peut avoir conclu de convention limitant la transmissibilité de ses titres à une certaine valeur.  
 
Dans ces circonstances, le grief de violation du principe d'égalité de traitement est rejeté, sans qu'il y ait lieu de s'interroger sur la possibilité pour le recourant de se prévaloir, sous l'angle de l'égalité dans l'illégalité (cf. sur cette notion, ATF 139 II 49 consid. 7.1), d'une pratique certes en vigueur en 2008, mais dont la légalité a été considérée comme douteuse et qui a été abrogée depuis lors. 
 
8.  
A titre subsidiaire, les recourants demandent la prise en considération, dans le calcul des valeurs de rendement des exercices 2006 à 2008 (dont la moyenne capitalisée aboutit à la valeur de rendement déterminante pour l'estimation), de l'absence de rémunération de l'avocat au cours des exercices 2007 et 2008. Ils sollicitent une modification des comptes de la S ociété, afin de prendre en considération une telle rémunération. 
 
8.1. Une telle argumentation confine à la témérité. En effet, comme indiqué, A.A.________, actionnaire unique de la Société, a librement choisi de ne pas se verser de salaire en 2007 et 2008 (cf. supra consid. 6.2.4). Les comptes de la Société, sur la base desquels celle-ci a été imposée, ne mentionnent pas de rémunération versée à l'avocat, ce qui est conforme à la réalité. Les recourants n'ont pas non plus déclaré de revenu à ce titre. Dans ces circonstances, on ne voit pas sur quelle base légale ou jurisprudentielle il pourrait être justifié de s'écarter à la fois d'écritures comptables dont rien n'indique qu'elles ne seraient pas conformes au droit commercial, de la taxation de la Société entrée en force et des déclarations faites par les contribuables eux-mêmes aux autorités fiscales, afin de tenir compte d'un revenu fictif en vue de réduire leur imposition sur la fortune.  
L'argumentation subsidiaire des recourants est donc manifestement infondée. 
 
8.2. Mis à part le grief subsidiaire précité, les recourants ne formulent aucune critique - et ne se plaignent a fortiori pas d'un établissement arbitraire de faits - en lien avec la manière dont la valeur de rendement de 16'251'009 fr.52 fr. a été calculée. Le Tribunal fédéral est partant lié par les faits constatés par l'arrêt attaqué sur ce point (art. 105 al. 1 LTF; supra consid. 2.2). De même, il est lié par le constat de la Cour de justice selon lequel la valeur substantielle 2008 de la Société est nulle.  
Il n'y a donc, sous cet angle également, pas de motif justifiant de s'écarter dans le cas d'espèce de l'application de la Circulaire 28 et de son Commentaire en tant qu'elle aboutit, par la moyenne de la valeur de rendement et de la valeur substantielle, à une valeur fiscale des actions de la Société qui s'élève à 8'125'500fr. pour la période fiscale 2008. 
 
9.  
Il en découle que le recours sera rejeté dans la mesure de sa recevabilité. Succombant, les recourants doivent supporter les frais judiciaires, à parts égales et solidairement entre eux (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'est pas alloué de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000, fr. sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au représentant des recourants, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 4ème section, à l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève et à l'Administration fédérale des contributions. 
 
 
Lausanne, le 27 août 2020 
 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
La Greffière : Vuadens