Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
9C_516/2018  
 
 
Arrêt du 17 octobre 2018  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes et M. les Juges fédéraux Pfiffner, Présidente, 
Glanzmann et Parrino. 
Greffier : M. Cretton. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par Me Jean-Michel Duc, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
1. Office cantonal AI du Valais, 
avenue de la Gare 15, 1950 Sion, 
 
2. Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, rue Mathieu Schiner 1, 1950 Sion, 
intimés. 
 
Objet 
Assurance-invalidité (représentation en procédure), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, du 15 juin 2018 (S3 18 36 - S3 18 35). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A._______ est né en 1990. Il a requis des prestations de l'Office cantonal AI du Valais (ci-après: l'office AI) pour la première fois le 12 janvier 2006. Un déficit intellectuel (QI 59) ayant été diagnostiqué le 7 avril 2006, il a bénéficié d'une formation professionnelle initiale. Au terme de celle-ci, il a obtenu une attestation de formation professionnelle (AFP) en qualité d'aide-menuisier.  
 
A.b. L'assuré travaillait comme aide-charpentier lorsqu'il a été victime d'un accident le 16 août 2016. Amputé de la partie distale d'un pouce, il ne semblait plus capable de reprendre son métier. Il s'est dès lors à nouveau annoncé à l'office AI le 16 mai 2017. Il a sollicité le bénéfice de l'assistance juridique gratuite le 21 décembre 2017. L'administration a rejeté cette requête (décision incidente du 14 mars 2018).  
 
B.   
A.________ a recouru contre cette décision incidente auprès du Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales. Il a conclu à l'octroi de l'assistance juridique pour la procédure administrative. Il a en outre requis l'allocation de l'assistance judiciaire pour la procédure de recours. Le tribunal cantonal a rejeté le recours et la requête d'assistance judiciaire (jugement du 15 juin 2018). 
 
C.   
A.________ a interjeté un recours en matière de droit public à l'encontre de ce jugement. Il en sollicite l'annulation et conclut, principalement, à l'octroi de l'assistance juridique pour la procédure administrative et de l'assistance judiciaire pour la procédure cantonale de recours ou, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à la juridiction de première instance pour nouvelle décision. Il requiert également le bénéfice de l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale. L'office AI a conclu au rejet du recours. Le tribunal cantonal et l'Office fédéral des assurances sociales ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Est en l'occurrence litigieux le point de savoir si la juridiction cantonale était en droit - d'une part - de confirmer le refus d'assistance juridique pour la procédure administrative et - d'autre part - de rejeter la demande d'assistance judiciaire pour la procédure de recours. 
 
2.  
 
2.1.  
 
2.1.1. S'agissant du premier point litigieux, on relèvera qu'un jugement cantonal qui, comme en l'espèce, a pour seul objet le refus (ou l'octroi) de l'assistance juridique pour une procédure administrative en matière d'assurance sociale est une décision incidente au sens de l'art. 93 LTF (cf. ATF 136 V 600 consid. 2.2 p. 602 s.). Le recours dirigé contre une telle décision incidente n'est dès lors recevable que si celle-ci entraîne un préjudice irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF), la seconde hypothèse prévue à l'art. 93 al. 1 let. b LTF n'étant manifestement pas pertinente.  
 
2.1.2. Dans le cas particulier, le jugement entrepris est susceptible de causer un préjudice irréparable au recourant. En effet, contrairement à ce que le Tribunal fédéral a jugé dans un cas similaire (ATF 139 V 600 consid. 2.3 p. 603 s. et la référence), la procédure administrative pour laquelle l'assistance juridique a été refusée est loin d'être terminée. Au contraire, entre le dépôt de la nouvelle demande de prestations le 16 mai 2017 et le rejet de la demande d'assistance juridique le 14 mars 2018, l'office intimé s'est pour l'essentiel borné à évaluer l'opportunité de mettre en oeuvre des mesures d'intervention précoce dans l'attente des conclusions de l'assureur-accidents concernant l'état de santé de l'assuré et d'initier l'instruction médicale de la cause sur le plan psychiatrique. Par ailleurs, si on écarte les courriers de nature administrative rédigés par un premier mandataire, le travail accompli par le représentant actuel du recourant n'a consisté qu'en la rédaction de la demande d'assistance juridique et en la production des pièces justificatives s'y rapportant. Dans ces circonstances, le risque que l'assuré ne puisse pas correctement faire valoir ses droits en raison du refus de l'assistance juridique constitue un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF. Il convient dès lors d'entrer en matière sur ce point du recours.  
 
2.2. Le recours en matière de droit public (au sens des art. 82 ss LTF) peut être formé pour violation du droit (circonscrit par les art. 95 et 96 LTF). Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est limité ni par l'argumentation de la partie recourante ni par la motivation de l'autorité précédente. Il statue sur la base des faits établis par celle-ci (art. 105 al. 1 LTF) mais peut les rectifier et les compléter d'office si des lacunes et des erreurs manifestes apparaissent d'emblée (art. 105 al. 2 LTF). En principe, il n'examine que les griefs motivés (art. 42 al. 2 LTF), surtout s'ils portent sur la violation des droits fondamentaux (art. 106 al. 2 LTF). Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Le recourant peut critiquer la constatation des faits qui ont une incidence sur le sort du litige seulement s'ils ont été établis en violation du droit ou de manière manifestement inexacte (art. 97 al. 1 LTF).  
 
2.3. Le jugement entrepris cite de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs à l'octroi de l'assistance gratuite d'un conseil juridique dans les procédures administratives en matière d'assurance sociale (art. 37 al. 4 LPGA; voir aussi ATF 132 V 200 consid. 4 p. 200 s. et les références; arrêt 9C_105/2007 du 13 novembre 2007). Il suffit donc d'y renvoyer.  
 
2.4.  
 
2.4.1. Le tribunal cantonal a rejeté le recours de l'assuré et confirmé la décision incidente du 14 mars 2018. Il a considéré que la demande d'assistance juridique était prématurée dès lors que le dossier était en cours d'instruction et qu'il était impossible de dire avec certitude quelles prestations entraient en considération. Il a constaté que l'issue de la procédure reposait sur l'examen d'éléments médicaux mais qu'un tel examen ne permettait pas de présumer d'une complexité du cas supérieure à la moyenne. Il a en outre relevé que le déficit intellectuel du recourant ne l'avait pas empêché de mener à bien une formation professionnelle ni de travailler jusqu'à son accident de sorte qu'on ne pouvait en déduire une incapacité à accomplir les démarches administratives en lien avec sa demande. Il a encore noté que l'assuré n'avait pas été empêché de faire appel à des organismes sociaux gratuits et que l'intervention de son mandataire dans d'autres procédures n'était pas déterminante au stade de la procédure administrative.  
 
2.4.2. Le recourant fait grief à la cour cantonale d'avoir nié la nécessité de l'assistance gratuite d'un conseil juridique, au sens de l'art. 37 al. 4 LPGA. Il soutient plus particulièrement que l'assistance d'un avocat était en l'espèce justifiée en raison de la complexité de sa cause découlant sur le plan médical de la nature - psychique et somatique - des troubles dont il souffrait, de la dépendance aux opiacés engendrée par le traitement de son atteinte à la santé et du traitement antidépresseur compensatoire instauré par la suite. Il prétend en outre que seule une connaissance approfondie en droit des assurances sociales permet d'appréhender l'ensemble des conditions d'octroi des mesures d'ordre professionnel dans la mesure où, selon la 5e révision de l'AI, la notion d'invalidité en matière de réadaptation ne serait pas la même que celle applicable en matière de rente. Il considère encore ne pas avoir la capacité de s'orienter dans la procédure en raison de sa formation, de sa symptomatologie dépressive ou de son déficit intellectuel et nie que l'on puisse inférer une capacité à saisir la portée des actes de la procédure de l'absence de difficultés à mener une vie quotidienne ordinaire. Il conteste par ailleurs la compétence d'assistants sociaux ou d'autres représentants d'association à comprendre les difficultés particulières de la procédure en cause. Il souligne aussi que son avocat le représente déjà auprès de l'assurance-accidents et de l'assurance-chômage de sorte que le recours à un tiers pour défendre ses intérêts entraînerait une perte de temps considérable. Il soutient finalement que la demande d'assistance juridique ne pouvait être qualifiée de prématurée au moment de son dépôt dans la mesure où les éléments disponibles démontraient déjà la complexité de la cause.  
 
2.4.3. L'argumentation de l'assuré est bien fondée.  
En effet, le point de savoir si l'assistance gratuite d'un conseil juridique est exigée doit effectivement être examiné à l'aune des circonstances concrètes du cas d'espèce, de la particularité des règles de procédure applicables et des spécificités de la procédure administrative en cours. Il s'agit notamment de tenir compte de la complexité des questions de fait ou de droit et des circonstances qui tiennent à l'assuré, comme sa capacité de s'orienter dans la procédure (cf. arrêt I 127/07 du 7 janvier 2008 consid. 4.3 et les références). L a complexité de la cause est une question de droit que le Tribunal fédéral examine librement (art. 95 let. a et 106 al. 1 LTF; arrêts 9C_786/2017 du 21 février 2018 consid. 3 et les références). 
Or le recourant présente en l'occurrence un déficit intellectuel avec un QI de 59. Ce retard mental est très conséquent. Si celui-ci a certes permis à l'assuré de mener à bien une formation et de travailler normalement jusqu'au jour de l'accident, comme l'a relevé la juridiction cantonale, il ne lui a néanmoins pas permis de conduire à terme une formation complète, sanctionnée par l'obtention d'un certificat fédéral de capacité (CFC), mais seulement une formation simplifiée, adaptée à ses capacité intellectuelles, dans laquelle il était fortement encadré, sanctionnée par l'obtention d'une attestation de formation professionnelle (AFP). Malgré cela, le recourant a rencontré des difficultés tant sur le plan théorique que pratique. Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal cantonal, ces éléments démontrent que, sans l'assistance soutenue de son maître d'apprentissage et du service de réadaptation de l'administration, l'assuré n'aurait pas pu obtenir son diplôme de fin d'apprentissage. On relèvera en outre que le fait que le recourant a pu travailler normalement jusqu'à son accident ne démontre rien d'autre que le fait qu'il était capable d'exercer la profession pour laquelle il avait été formé, en tout cas pas qu'il était capable de mener à bien des démarches administratives. Les dettes contractées durant cette période et la saisie sur salaire postérieure confirment plutôt le contraire. 
Par ailleurs, si la procédure d'octroi ou de refus de prestations de l'assurance-invalidité ne peut a priori être qualifiée de particulièrement complexe, les éléments médicaux disponibles laissent augurer un certain degré de complexité pour une personne telle que l'assuré. En effet, à une atteinte somatique (amputation de la partie distale d'un pouce [à la base de l'ongle]) qui peut sembler relativement peu incapacitante même pour une activité manuelle, s'ajoutent des atteintes psychiques en cours d'investigations (état de stress post-traumatique, épisode dépressif moyen) dont les symptômes pourraient être fortement incapacitants pour une personne qui ne dispose pas des ressources intellectuelles pour y faire face et les surmonter. 
On ajoutera au demeurant que, dans les circonstances évoquées ci-dessus, imposer au recourant de faire appel à un assistant social ou à un autre organisme de protection des intérêts des assurés au lieu du mandataire déjà actif dans une procédure parallèle contre l'assureur-accidents engendrerait une perte de temps et entraînerait des frais supplémentaires inutiles, comme l'a déjà admis le Tribunal fédéral (cf. arrêt 9C_668/2009 du 25 mars 2010). 
 
2.5. Compte tenu de ce qui précède, il apparaît que la cour cantonale a indûment confirmé le refus par l'office intimé de l'assistance gratuite d'un conseil juridique. En conséquence, le jugement entrepris ainsi que la décision litigieuse doivent être annulés. On ajoutera que, vu les documents médicaux disponibles au moment du refus de l'assistance juridique, la mise en oeuvre de mesures d'ordre professionnel ne pouvait être exclue d'emblée, de sorte que les conclusions de l'assuré dans ce sens n'étaient pas manifestement vouées à l'échec. De plus, étant donné l'absence de salaire (l'assuré avait été licencié pour le 13 février 2017), la saisie de 750 fr. opérée sur les indemnités journalières versées par l'assureur-accidents et la prise en compte des données relatives au recourant dans la fixation du montant de l'aide sociale attribuée à sa famille, il est très vraisemblable que celui-ci était déjà indigent au moment du dépôt de la requête d'assistance juridique. Son droit à l'assistance juridique en procédure administrative doit dès lors lui être reconnu.  
Compte tenu de l'issue de la procédure, la juridiction cantonale aurait dû reconnaître le droit de l'assuré à l'assistance juridique pour la procédure administrative et, dans la mesure où il aurait dû obtenir gain de cause sur ce point, il aurait dû recevoir des dépens pour la procédure cantonale, de sorte que sa demande d'assistance judiciaire devenait sans objet. 
 
3.   
Vu l'issue du litige, les frais judiciaires et les dépens doivent être mis à la charge de l'office intimé (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 LTF). La demande d'assistance judiciaire formulée par le recourant pour la procédure fédérale est dès lors sans objet. 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. La décision de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, du 15 juin 2018 et la décision de l'Office cantonal AI du Valais du 14 mars 2018 sont annulées. La demande du recourant tendant à l'octroi de l'assistance juridique gratuite pour la procédure administrative est admise. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 500 fr., sont mis à la charge de l'office intimé. 
 
3.   
L'office intimé versera à l'avocat du recourant la somme de 2800 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral. 
 
4.   
La cause est renvoyée à la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais pour nouvelle décision sur les frais et les dépens de la procédure antérieure. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 17 octobre 2018 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Cretton