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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_507/2022  
 
 
Arrêt du 28 novembre 2022  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Heine et Abrecht. 
Greffière : Mme Betschart. 
 
Participants à la procédure 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Division juridique, Fluhmattstrasse 1, 6002 Lucerne, 
recourante, 
 
contre  
 
A.________, 
représenté par Me Jean-Philippe Anthonioz, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-accidents (rente 
d'invalidité, revenu d'invalidité), 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 21 juin 2022 (A/4087/2020 ATAS/590/2022). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1956, a travaillé comme délégué commercial jusqu'au 31 janvier 2017. Depuis février 2017, il s'est retrouvé au chômage et était assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) contre le risque d'accidents. Le 20 juin 2017, il a glissé sur un sol mouillé et est tombé dans les escaliers. Cette chute a provoqué une fracture du pied droit et a nécessité une intervention chirurgicale sous forme d'ostéosynthèse du Lisfranc. Les suites postopératoires se sont compliquées par une infection entrainant une persistance de la douleur à la marche. La CNA a pris en charge le cas.  
Après un examen personnel de l'assuré le 8 janvier 2020, le docteur B.________, spécialiste en chirurgie orthopédique et médecin d'arrondissement de la CNA, a considéré dans son rapport du 10 janvier 2020 ainsi que dans son appréciation du 24 mars 2020 que l'état de santé de l'assuré était actuellement stabilisé. Par rapport à la capacité de travail, il a retenu que le travail antérieurement exercé n'était plus exigible, la conduite automobile étant très limitée et peu sûre. L'exigibilité se ferait par contre à temps complet sur un travail exercé essentiellement en position assise, activité sédentaire avec peu de phases debout, peu de phases nécessitant de la marche, sans montée ni descente d'escaliers, sans terrain accidenté. 
 
A.b. Se fondant sur les avis de son médecin d'arrondissement, la CNA a, par courrier du 25 mars 2020, informé l'assuré qu'elle allait mettre fin au paiement des soins médicaux et de l'indemnité journalière avec effet au 1er juin 2020 (sous réserve de la prise en charge de deux consultations annuelles de contrôle, de semelles ou chaussures adaptées et d'éventuels médicaments antalgiques à doses modérées ainsi que - le cas échéant - d'une arthrodèse discutée par les médecins traitants) et qu'elle allait examiner son droit à une rente dans une prochaine décision.  
 
A.c. Par décision du 10 juin 2020, la CNA a nié le droit de l'assuré à une rente d'invalidité, le taux d'invalidité ne s'élevant qu'à 3 %, mais lui a alloué une indemnité pour atteinte à l'intégrité basé sur un taux de 20 %. Par décision sur opposition du 12 novembre 2020, la CNA a rejeté l'opposition formée par A.________.  
 
A.d. Parallèlement à la procédure devant l'assurance-accidents, A.________ a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité. Par décision du 20 octobre 2020, l'Office cantonal de l'assurance-invalidité (ci-après: l'Office AI) lui a octroyé une rente entière dès le 1er août 2019 sur la base d'un taux d'invalidité de 100 %.  
 
B.  
Par arrêt du 21 juin 2022, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève a partiellement admis le recours formé par A.________ contre la décision sur opposition de la CNA; elle a annulé cette décision en tant qu'elle fixait le taux d'invalidité à 3 %, a fixé le taux d'invalidité à 13 %, compte tenu d'un abattement de 10 %, et a renvoyé le dossier à la CNA pour nouveau calcul de la rente d'invalidité. 
 
C.  
La CNA interjette un recours en matière de droit public contre cet arrêt, en concluant à sa réforme en ce sens que la décision sur opposition du 12 novembre 2020 soit confirmée en tant qu'elle nie tout droit à une rente d'invalidité à l'intimé. 
A.________ conclut au rejet du recours. Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre un arrêt final (art. 90 LTF) rendu en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
Le recours en matière de droit public peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique d'office le droit fédéral (art. 106 al. 1 LTF), sous réserve des exigences de motivation figurant à l'art. 106 al. 2 LTF. A moins que la décision attaquée contienne des vices juridiques manifestes, il s'en tient aux arguments juridiques soulevés dans le recours (cf. art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 135 II 384 consid. 2.2.1; 134 III 102 consid. 1.1). Toutefois, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs de l'autorité précédente ni par les moyens des parties; il peut donc admettre le recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par le recourant, comme il peut le rejeter en opérant une substitution de motifs (ATF 135 III 397 consid. 1.4). Il n'est pas tenu de revoir les questions de droit qui ne sont plus soulevées devant lui (ATF 140 V 136 consid. 1.1). 
 
3.  
 
3.1. Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en reconnaissant à l'intimé le droit à une rente fondée sur un taux d'invalidité de 13 %. Est uniquement litigieux le revenu avec invalidité devant être pris en compte pour la comparaison des revenus, plus particulièrement l'abattement de 10 % opéré sur le salaire statistique par la cour cantonale.  
 
3.2. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF).  
 
4.  
 
4.1. L'arrêt attaqué expose correctement les dispositions légales et les principes jurisprudentiels applicables en l'espèce, s'agissant notamment des conditions du droit à une rente d'invalidité (art. 18 al. 1 LAA), de la notion d'invalidité (art. 8 LPGA) et de la méthode générale de la comparaison des revenus pour évaluer le taux d'invalidité (art. 16 LPGA). Il suffit par conséquent d'y renvoyer.  
 
4.2. A l'instar de la recourante, la cour cantonale s'est fondée sur le salaire annuel de 69'600 fr. réalisé en dernier lieu par l'intimé dans son activité habituelle de délégué commercial, qu'elle a indexé à 2020 pour retenir au final un revenu de valide de 70'438 fr. Quant au revenu d'invalide, la cour cantonale s'est fondée sur le salaire statistique de l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ESS) publiée par l'Office fédéral de la statistique pour l'année 2018, indexé à 2020, pour un homme exerçant une activité de niveau de compétence 1, soit 68'446 fr. Ces valeurs ne sont pas remises en cause.  
Cependant, la cour cantonale s'est écartée de la décision sur opposition en opérant un abattement de 10 % sur le revenu d'invalide, pour prendre en compte les limitations fonctionnelles que présente l'intimé ainsi que son âge de 63 ans et 10 mois au moment de la naissance du droit à la rente (soit le 1er juin 2020). Elle a notamment considéré que les limitations fonctionnelles de l'intimé combinées à sa situation personnelle concrète auraient des effets pénalisants au niveau salarial aux yeux d'un potentiel employeur. Ce dernier devrait accepter d'engager un homme se trouvant à moins d'un an et demi de la retraite et souffrant d'atteintes à la santé ayant pour conséquence diverses limitations fonctionnelles. Rien dans le cas présent ne pourrait par ailleurs compenser les effets particulièrement pénalisants de l'état de santé et de l'âge de l'intimé aux yeux d'un potentiel employeur. 
 
4.3. La recourante reproche essentiellement à la cour cantonale d'avoir substitué sa propre appréciation sans motif pertinent à celle de l'administration et d'avoir ainsi violé le droit fédéral. Au vu du parcours professionnel de l'intimé, de l'expérience acquise au fil des ans et des ressources ainsi démontrées, ce dernier disposerait d'une certaine expérience professionnelle pouvant compenser les effets pénalisants au niveau salarial aux yeux d'un potentiel employeur, respectivement d'une capacité d'adaptation sur le plan professionnel. Il serait donc en mesure, le cas échéant, de compenser les désavantages compétitifs liés à son âge, surtout dans le domaine des emplois non qualifiés, qui sont en règle générale disponibles indépendamment de l'âge de l'intéressé sur un marché équilibré du travail.  
 
5.  
Vu l'âge avancé de l'intimé, il convient d'abord d'examiner si l'art. 28 al. 4 OLAA est applicable en l'espèce. 
 
5.1. Sur la base de la délégation législative de l'art. 18 al. 2 LAA, le Conseil fédéral a édicté l'art. 28 OLAA, qui contient des prescriptions particulières pour l'évaluation de l'invalidité dans des cas spéciaux. L'art. 28 al. 4 OLAA dispose que si, en raison de son âge, l'assuré ne reprend pas d'activité lucrative après l'accident ou si la diminution de la capacité de gain est due essentiellement à son âge avancé, les revenus de l'activité lucrative déterminants pour l'évaluation du degré d'invalidité sont ceux qu'un assuré d'âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser.  
 
5.1.1. Cette disposition vise deux situations: Premièrement, elle s'applique si l'assuré, en raison de son âge, ne reprend plus d'activité lucrative après l'accident (variante I). Les conditions de cette variante sont remplies lorsque l'assuré dispose, au terme du traitement médical, d'une capacité de travail résiduelle au moins partielle, mais ne la met plus en valeur à cause de son âge. C'est notamment le cas si l'assuré atteint l'âge légal de la retraite (arrêts 8C_209/2012 du 12 juillet 2012 consid. 5.3; 8C_452/2011 du 12 mars 2012 consid. 4.1) pendant la période entre l'accident et la fin du traitement médical (THOMAS FLÜCKIGER, in Basler Kommentar, Unfallversicherungsgesetz, 2019, N. 83 ad art. 18 LAA; MARC HÜRZELER/CLAUDIA CADERAS, in Marc Hürzeler/Ueli Kieser [éd.], Kommentar zum schweizerischen Sozialversicherungsrecht, UVG, 2018, N. 41 ad art. 18 LAA; les deux avec références). La deuxième situation est celle où l'atteinte à la capacité de gain a principalement pour origine l'âge avancé de l'assuré (variante II). Cette variante est également applicable lorsque l'âge avancé n'est pas un facteur qui a une incidence sur l'exigibilité, mais qu'il est malgré tout un obstacle à la mise en valeur de la capacité résiduelle de gain, notamment parce qu'aucun employeur n'est disposé à engager un employé présentant des atteintes à la santé pour un laps de temps très court avant l'ouverture de son droit à une rente de l'AVS (arrêts 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2, destiné à la publication; 8C_799/2019 du 17 mars 2020 consid. 3.3.2; 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.2.2; 8C_346/2013 du 10 septembre 2013 consid. 4.2; 8C_806/2012 du 12 février 2013 consid. 5.2.2; HÜRZELER/CADERAS, op. cit., N. 42 ad art. 18 LAA).  
 
5.1.2. L'assuré qui remplit l'un ou l'autre cas de figure ne touchera alors une rente d'invalidité que dans la mesure où une telle rente serait octroyée dans les mêmes conditions à un assuré d'âge moyen présentant les mêmes capacités professionnelles et les mêmes aptitudes personnelles. Ce système repose sur la considération qu'une même atteinte à la santé peut entraîner chez une personne âgée des répercussions bien plus importantes sur la capacité de gain que chez une personne d'âge moyen pour diverses raisons (difficultés de reclassement ou de reconversion professionnels, diminution des capacités d'adaptation et d'apprentissage), alors que l'âge en tant que tel n'est pas une atteinte à la santé dont l'assureur-accidents doit répondre (ATF 122 V 418 consid. 3a; arrêt 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.1; voir également PETER OMLIN, Die Invalidität in der obligatorischen Unfallversicherung, 1995, p. 235 ss.; ANDRÉ GHÉLEW/OLIVIER RAMELET/JEAN-BABTISTE RITTER, Commentaire de la loi sur l'assurance-accidents [LAA], 1992, p. 103). Il s'agit d'empêcher l'octroi de rentes d'invalidité qui comporteraient, en fait, une composante de prestation de vieillesse (cf. OMLIN, op. cit., p. 249 avec les références). On rappellera que les rentes ont un caractère viager (cf. toutefois le nouvel art. 20 al. 2ter LAA, en vigueur depuis le 1er janvier 2017). L'âge moyen est de 42 ans ou, du moins, se situe entre 40 et 45 ans, tandis que l'âge avancé est d'environ 60 ans; il ne s'agit toutefois que d'un ordre de grandeur et non d'une limite absolue (ATF 122 V 418 consid. 1b; arrêts 8C_205/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.4; U 106/89 du 13 août 1990 consid. 4d et e, in RAMA 1990 n° U 115 p. 389). La comparaison des revenus d'un assuré d'âge moyen comprend aussi bien le revenu sans invalidité que le revenu d'invalide (ATF 114 V 310 consid. 2 in fine; arrêt 8C_554/2017 du 4 juillet 2018 consid. 3.3.1; OMLIN, op. cit., p. 256; voir également arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2, destiné à la publication).  
 
5.1.3. Selon la jurisprudence mentionnée ci-dessus, il faut prendre en considération l'application de l'art. 28 al. 4 OLAA si l'assuré a environ 60 ans. Toutefois, cela ne signifie pas que cette disposition soit applicable dans tous les cas où l'assuré a atteint cet âge avancé. Elle s'applique seulement lorsqu'il y a des indices concrets que l'âge de l'assuré revêt une importance prépondérante par rapport aux autres facteurs à l'origine de l'incapacité de gain (cf. ATF 122 V 418 consid. 4c; arrêts 8C_307/2017 du 26 septembre 2017 consid. 4.2.2; 8C_205/2016 du 20 juin 2016 consid. 3.4; 8C_517/2016 du 8 mai 2017 consid. 5.3).  
 
5.2.  
 
5.2.1. Dans le cadre de l'analyse qu'il a faite en matière d'assurance-invalidité (cf. lettre A.d supra), l'Office AI s'est basé sur le fait que des mesures de réadaptation professionnelles auraient pu être mises en oeuvre pour l'intimé, mais qu'elles n'étaient ni simples ni adéquates, de sorte que le critère de la proportionnalité n'était pas respecté dans le cas d'une réadaptation et qu'on peinait à imaginer qu'un employeur consentirait à engager l'assuré qui se trouvait à un âge proche de la retraite. C'est également en raison de l'âge de l'assuré et de l'absence de temps de formation que lui consacrerait un employeur que l'Office AI a retenu que sa capacité de travail résiduelle n'était pas exploitable. Ainsi, des mesures professionnelles ne permettraient pas d'atteindre le but visé, à savoir une amélioration de la capacité de gain.  
 
5.2.2. Il s'ensuit que, l'intimé ayant 63 ans et 10 mois au moment de l'ouverture du droit éventuel à une rente d'invalidité de l'assurance-accidents, l'absence de reprise de travail résulte principalement de son âge avancé. Force est donc de constater que l'on est en présence d'un cas d'application de l'art. 28 al. 4 OLAA, cette disposition s'appliquant également lorsqu'un employeur n'est pas disposé à engager un employé pour un laps de temps très court avant l'ouverture de son droit à une rente de l'AVS.  
 
6.  
 
6.1. L'application de l'art. 28 al. 4 OLAA étant admise, il sied d'examiner les revenus avec et sans invalidité devant être pris en compte pour fixer le taux d'invalidité. On rappellera que selon cette disposition, sont déterminants les revenus qu'un assuré d'âge moyen dont la santé a subi une atteinte de même gravité pourrait réaliser et que la comparaison des revenus d'un assuré d'âge moyen comprend aussi bien le revenu sans invalidité que le revenu d'invalide (ATF 114 V 310 consid. 2 et 4a; cf. consid. 5.1.2 supra, arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2 destiné à la publication).  
 
6.2. Le revenu sans invalidité retenu par la cour cantonale est incontesté, de sorte qu'il n'y a pas lieu de s'en écarter et de le remplacer - au détriment de l'intimé - par le revenu d'un assuré d'âge moyen.  
En ce qui concerne le revenu avec invalidité, la cour cantonale l'a déterminé en appliquant les valeurs statistiques de l'ESS, ce qui n'est pas contesté non plus. Il sied toutefois d'examiner si la cour cantonale a opéré à juste titre un abattement de 10 % à cause des limitations fonctionnelles ainsi que de l'âge de l'intimé. 
 
6.3. Selon la jurisprudence, la mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/ catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation). Une déduction globale maximale de 25 % sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 135 V 297 consid. 5.2; 134 V 322 consid. 5.2; 126 V 75 consid. 5b/aa-cc). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3; 126 V 75 précité consid. 5b/bb; arrêts 8C_766/2017 du 30 juillet 2018 consid. 8.3.1; 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 3.1).  
Le point de savoir s'il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d'autres facteurs) est une question de droit qui peut être examinée librement par le Tribunal fédéral; en revanche, l'étendue de l'abattement sur le salaire statistique dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation, qui est soumise à l'examen du juge de dernière instance uniquement si la juridiction cantonale a exercé son pouvoir d'appréciation de manière contraire au droit, soit si elle a commis un excès positif ("Ermessensüberschreitung") ou négatif ("Ermessensunterschreitung") de son pouvoir d'appréciation ou en a abusé ("Ermessensmissbrauch"), notamment en retenant des critères inappropriés, en ne tenant pas compte de circonstances pertinentes, en ne procédant pas à un examen complet des circonstances pertinentes ou en n'usant pas de critères objectifs (ATF 137 V 71 consid. 5.1). 
 
6.4. Une réduction au titre du handicap dépend de la nature des limitations fonctionnelles présentées et n'entre en considération que si, sur un marché du travail équilibré, il n'y a plus un éventail suffisamment large d'activités accessibles à l'assuré (cf. arrêts 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.1; 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.1; 8C_118/2021 du 21 décembre 2021 consid. 6.3.1).  
En l'occurrence, force est de constater que les limitations fonctionnelles présentées par l'intimé (activité exercée essentiellement en position assise, activité sédentaire avec peu de phases debout, peu de phases nécessitant de la marche, sans montée ni descente d'escaliers, sans terrain accidenté) ne sont pas inhabituelles et ne requièrent pas des concessions irréalistes de la part d'un employeur. Au regard des activités physiques ou manuelles simples que recouvrent les secteurs de la production et des services (ESS 2018, tableau TA1_skill_level, niveau de compétence 1), un nombre suffisant d'entre elles correspondent à des travaux légers respectant les limitations fonctionnelles de l'intimé. A cela s'ajoute, comme le relève à juste titre la recourante, que l'intimé a exercé divers métiers comme directeur, gérant/associé et responsable commercial et délégué commercial dans divers domaines ce qui montre un potentiel d'adaptation à différents postes, et qu'il a acquis des compétences en lien avec le contact à la clientèle. Au vu de ces qualités il n'y a aucune raison d'inférer qu'il ne pourrait pas répondre auxexigences d'une activité issue du secteur de la production et des services. Une déduction sur le salaire statistique ne se justifie donc pas pour tenir compte des circonstances liées à son handicap. 
 
6.5. Par rapport à la question de l'abattement à cause de l'âge, le Tribunal fédéral a retenu dans un arrêt récent que l'art. 28 al. 4 OLAA commande, pour atteindre son objectif, qu'on calcule le taux d'invalidité sur la base des revenus (sans et avec invalidité) hypothétiques que pourrait obtenir un assuré d'âge moyen, et que - contrairement à l'art. 16 LPGA - l'on fasse ainsi abstraction de l'incapacité de travail due à l'âge avancé de l'assuré (arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 7.2 et 8.5 destiné à la publication; consid. 6.2 supra). Or, dès lors que l'on doit s'appuyer sur les valeurs salariales d'un assuré d'âge moyen, une influence pénalisante de l'âge avancé sur le salaire ne peut par définition pas entrer en ligne de compte. Il s'ensuit qu'un abattement à cause de l'âge avancé d'un assuré ne peut pas être envisagé lorsqu'on est en présence d'un cas d'application de l'art. 28 al. 4 OLAA (arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 8.5 destiné à la publication).  
Il sied de préciser qu'en dehors du champ d'application de cette disposition, le point de savoir si, dans le domaine de l'assurance-accidents obligatoire, l'âge avancé peut constituer un critère d'abattement ou si l'influence de l'âge sur la capacité de gain doit être prise en compte uniquement dans le cadre de la réglementation particulière de l'art. 28 al. 4 OLAA, n'a pas encore été tranché par le Tribunal fédéral (cf. arrêt 8C_186/2022 du 3 novembre 2022 consid. 6.2.2, où l'art. 28 al. 4 OLAA n'a pas été appliqué à un assuré de 63 ans; voir également arrêts 8C_219/2022 du 2 juin 2022, consid. 6.7.2; 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 4.3.2; 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.2; 8C_597/2020 du 16 juin 2021 consid. 5.2.5; 8C_227/2017 du 17 mai 2018 consid. 5, in: SVR 2018 UV n° 40 p. 145). 
En l'espèce, comme l'art. 28 al. 4 OLAA s'applique (cf. consid. 5.2.2 supra), la cour cantonale n'était pas fondée à prendre en compte l'âge avancé de l'intimé dans la fixation de l'étendue de l'abattement. 
 
6.6. Pour autant que l'intimé invoque d'autres critères justifiant selon lui un abattement, notamment le manque de formation, les effets secondaires liés à la prise régulière d'antalgiques et un état dépressif, on retiendra que la cour cantonale les a écartés à juste titre. Par ailleurs, même si l'on admettait le droit à une rente, l'art. 20 al. 2ter LAA ne serait pas applicable en l'espèce, contrairement à ce que soutient l'intimé (cf. al. 2 des dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015; arrêt 8C_716/2021 du 12 octobre 2022 consid. 8.4, destiné à la publication; DAVID IONTA, Revenu d'invalide selon l'ESS - une mise à jour, in Jusletter 21 novembre 2022, ch. 231 ss.). Finalement, il convient de rappeler que l'évaluation de l'invalidité par les organes de l'assurance-invalidité n'a pas de force contraignante pour l'assureur-accidents (et vice-versa, cf. ATF 133 V 549 et 131 V 362 consid. 2.3; arrêt 8C_374/2021 du 13 août 2021 consid. 5.6), de sorte que l'intimé ne saurait rien déduire en sa faveur du fait que l'Office AI lui a octroyé une rente entière.  
 
6.7. Il s'ensuit que la juridiction cantonale a opéré à tort un abattement de 10 % sur le revenu d'invalide. Le recours se révèle dès lors bien fondé. Par conséquent, l'arrêt attaqué doit être réformé en ce sens que la décision sur opposition du 12 novembre 2020 est confirmée et qu'il n'est pas alloué de dépens pour la procédure cantonale (cf. art. 68 al. 5 LTF).  
 
7.  
L'intimé, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'elle obtienne gain de cause, la recourante n'a pas droit à une indemnité de dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis. L'arrêt de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 21 juin 2022 est réformé en ce sens que la décision sur opposition du 12 novembre 2020 est confirmée et qu'il n'est pas alloué de dépens pour la procédure cantonale. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 28 novembre 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Betschart