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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
1C_624/2021  
 
 
Arrêt du 10 janvier 2023  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Kneubühler, Président, 
Chaix, Haag, Müller et Merz. 
Greffière : Mme Sidi-Ali. 
 
Participants à la procédure 
1. A.________, 
2. B.________, 
3. C.________, 
4. D.________, 
tous les quatre représentés par Me Michel Bosshard, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Ville de Genève, Palais Eynard, 
rue de la Croix-Rouge 4, 1204 Genève, 
Département des infrastructures de la République et canton de Genève, chemin des Olliquettes 4, 1213 Petit-Lancy, 
tous les deux représentés par Me Tobias Zellweger, avocat, 
 
Objet 
Réglementation temporaire de la circulation, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice 
de la République et canton de Genève, 
Chambre administrative, du 14 septembre 2021 
(ATA/937/2021 A/4484/2019-LCR). 
 
 
Faits :  
 
A.  
La rue De-Candolle à Genève, orientée selon un axe nord-ouest - sud-est, longe le parc des Bastions en son côté sud-ouest. Elle est approximativement parallèle à la rue de la Croix-Rouge, qui longe aussi ce même parc dans sa partie nord-est. 
 
B.  
Par arrêté du 31 octobre 2019 règlementant la circulation à la rue de la Croix-Rouge et la place des Casemates en ville de Genève, le Département genevois des infrastructures (DI) a adopté, de manière temporaire et à titre de mesure à l'essai, pour une durée de douze mois au maximum, les restrictions de circulation suivantes: 
 
- A la rue de la Croix-Rouge, la place des Casemates et la rue de l'Athénée sur le tronçon compris entre la rue de la Croix-Rouge et le boulevard Emile-Jacques-Dalcroze, pour le sens de circulation en direction de la place de Neuve, la circulation est interdite aux voitures automobiles et aux motocycles; les bus et les taxis ne sont pas soumis à cette interdiction. 
- A la rue Beauregard, sur son tronçon compris entre la rue Tabazan et la rue de la Croix-Rouge, la circulation est interdite aux voitures automobiles et aux motocycles; les bus, les taxis et le train touristique ne sont pas soumis à cette interdiction. 
La décision prévoit par ailleurs dans le détail la mise en place des signaux nécessaires à la concrétisation de ces restrictions. 
Saisi d'un recours de A.________, B.________, C.________ et D.________, domiciliés ou exerçant leurs activités dans les immeubles bordant la rue De-Candolle, le Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (TAPI) a réformé cet arrêté par jugement du 8 avril 2021, soumettant son entrée en force à la condition suspensive, d'une part, de l'actualisation préalable du cadastre le long de la rue De-Candolle et, d'autre part, de l'adoption et l'entrée en force d'un arrêté destiné à compléter l'arrêté litigieux en indiquant les immissions de bruit admissibles ainsi que les mesures à prendre au sens des considérants. 
A.________, B.________, C.________ et D.________, d'une part, et le DI, d'autre part, ont recouru contre ce jugement auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. Statuant par arrêt du 14 septembre 2021, celle-ci a annulé le jugement du TAPI en tant qu'il réformait l'arrêté du 31 octobre 2019 et l'a confirmé pour le surplus. 
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.________, B.________, C.________ et D.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt de la Cour de justice et de statuer à nouveau en ce sens que l'arrêté du 21 [ recte: 31] octobre 2019 est annulé. Subsidiairement, ils concluent à l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice et à la confirmation du jugement du TAPI.  
La Cour de justice se réfère aux considérants et au dispositif de son arrêt. Le DI et la Ville de Genève se déterminent dans un acte commun et concluent au rejet du recours. Consulté, l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) juge l'arrêt attaqué conforme au droit fédéral de l'environnement. Les recourants et les autorités intimées se déterminent dans de nouveaux échanges d'écritures et persistent dans leurs conclusions respectives. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
La voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss LTF) est ouverte contre une décision prise par une autorité cantonale de dernière instance dans une contestation portant sur l'application du droit de l'aménagement du territoire et de la protection de l'environnement. 
 
1.1. A teneur de l'art. 89 LTF, la qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.  
 
1.1.1. Pour satisfaire à ce critère, la partie recourante doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation. Le voisin direct de la construction ou de l'installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir. Le critère de la distance n'est pas le seul déterminant; s'il est certain ou très vraisemblable que l'installation ou la construction litigieuse sera à l'origine d'immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement le voisin, même situé à une certaine distance, celui-ci peut avoir qualité pour recourir (ATF 136 II 281 consid. 2.3.1 et les arrêts cités). Il doit en outre retirer un avantage pratique de l'annulation ou de la modification de la décision contestée qui permette d'admettre qu'il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l'intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée de manière à exclure l'action populaire (ATF 137 II 30 consid. 2.2.3).  
En l'occurrence, les recourants sont riverains d'une route sur laquelle il n'est pas contesté que le trafic des voies subissant les restrictions de circulation est reporté. Ils sont ainsi particulièrement atteints par la décision attaquée, notamment en raison de la vraisemblable augmentation des nuisances induites, et ont un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. 
 
1.1.2. En principe, l'intérêt digne de protection doit exister non seulement au moment du dépôt du recours, mais encore au moment où l'arrêt est rendu. Il est toutefois fait exceptionnellement abstraction de l'exigence d'un intérêt actuel, lorsque la contestation peut se reproduire en tout temps dans des circonstances identiques ou analogues, que sa nature ne permet pas de la trancher avant qu'elle ne perde son actualité et que, en raison de sa portée de principe, il existe un intérêt public suffisamment important à la solution de la question litigieuse (ATF 142 I 135 consid. 1.3.1; 141 II 14 consid. 4.4; 136 II 101 consid. 1.1).  
La Cour de justice a précisé que l'objet du litige était limité à l'arrêté du 31 octobre 2019, le recours ne portant pas sur les arrêtés postérieurs, au contenu similaire, ce que ne contestent pas les recourants. Il se pose dans ce contexte la question de l'intérêt actuel des recourants. Il ressort toutefois de l'arrêt attaqué que le département a depuis régulièrement adopté de nouveaux arrêtés au contenu similaires, de validité limitée (cinq arrêtés successifs depuis l'arrêté litigieux, valables de deux à six mois, reconduits de façon à ce que les mesures demeurent en place sans interruption). Cette manière de faire ne permet pas aux recourants de contester jusque devant le Tribunal fédéral une mesure de restriction de circulation en temps utile avant la fin de validité de l'acte. Il y a ainsi lieu d'entrer en matière, quand bien même l'arrêté contesté n'est plus en vigueur. 
 
1.1.3. Enfin, les recourants ont pris part à la procédure devant l'autorité précédente, de sorte qu'ils ont qualité pour recourir au sens de l'art. 89 al. 1 LTF.  
 
1.2. Sans formellement conclure à l'irrecevabilité du recours, les autorités intimées relèvent que les conclusions des recourants, dès lors qu'elles sont prises en annulation, sont irrecevables. Elles se réfèrent à la jurisprudence du Tribunal fédéral considérant que les conclusions en annulation des décisions des autorités qui n'ont pas statué immédiatement avant le Tribunal fédéral sont irrecevables, vu l'effet dévolutif du recours à l'autorité statuant immédiatement avant le Tribunal fédéral (ATF 136 II 101 consid. 1.2; 126 II 300 consid. 2a; 125 II 29 consid. 1c). Cela étant, les recourants concluent en l'espèce avant tout à "l'annulation" de l'arrêt attaqué, soit l'arrêt de la dernière instance qui a statué et, demandant au Tribunal fédéral de statuer à nouveau, à l'annulation de l'arrêté du département. Dans de telles circonstances on comprend de cette conclusion principale que les recourants souhaitent avant tout que l'arrêt de la Cour de justice soit réformé en ce sens que l'arrêté du département modifiant les règles de circulation est annulé, respectivement en ce sens que le jugement du TAPI est à son tour réformé en ce sens que la décision du département est annulée.  
Les conclusions principales du recours sont ainsi recevables. 
 
1.3. Les autres conditions de recevabilité sont réunies, si bien qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le fond.  
 
2.  
Les recourants se plaignent d'une violation de leur droit d'être entendus couplée à une appréciation arbitraire des preuves faute d'avoir commandé une expertise judiciaire. 
 
2.1. Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit de faire administrer les preuves, pour autant que celles-ci soient requises dans les formes prévues par le droit cantonal et qu'elles apparaissent utiles à l'établissement des faits pertinents (ATF 139 II 489 consid. 3.3; 129 II 497 consid. 2.2). Cette garantie constitutionnelle n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, l'autorité a la certitude que celles-ci ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références).  
Il y a arbitraire (art. 9 Cst.) dans l'appréciation des preuves si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables. 
Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, la partie recourante doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées. Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 145 I 26 consid. 1.3; 141 IV 369 consid. 6.3). 
 
2.2. Les recourants ne font pas valoir avoir demandé en vain une expertise judiciaire qui aurait été refusée. Ils reprochent uniquement aux juges cantonaux d'avoir tenu compte d'une expertise acoustique réalisée dans un autre contexte pour évaluer l'incidence d'un nouveau revêtement phonoabsorbant sur les immissions de bruit. Il n'y a donc pas de violation de leur droit d'être entendus.  
Dans leur acte de recours, les recourants se contentent de dénigrer par principe la valeur d'une "expertise privée", sans procéder à des critiques de fond sur le document auquel s'est référée la cour cantonale. Ils n'exposent pas non plus les motifs pour lesquels les valeurs de réduction de bruit observées dans l'étude en question ne sont pas transposables au cas d'espèce. La seule référence à un arrêt mentionnant, dans l'état de fait uniquement, l'annonce par une commune de la pose d'un revêtement phonoabsorbant pour une diminution de bruit estimée à 1 dB (A) est insuffisante. Dans leur deuxième écriture, les recourants donnent plus de détails sur la nature de leur critique à l'égard des chiffres retenus par la Cour de justice, ce qui constitue un complément de l'argumentation du recours, procédé en soi discutable (cf. ATF 143 II 283 consid. 1.2.3). Point n'est besoin d'approfondir cette question vu les développements qui suivent. Les recourants déplorent qu'une analogie ait été opérée entre un cas dans lequel il s'agissait de mesurer l'impact d'un revêtement similaire sur une route de campagne peu fréquentée, et la présente situation en plein centre-ville. Si cette critique est pertinente, elle ne permet pas pour autant d'invalider l'appréciation de la cour cantonale. En effet, comme le relève à juste titre le département, cette appréciation a été reprise telle quelle de celle du TAPI qui, lui, se référait également au document de l'OFEV énumérant les meilleurs revêtements silencieux posés en agglomération, état au 19 juillet 2019 ( www.bafu.admin.ch/ routes-silencieuses). Ce document recense plus d'une vingtaine d'exemples de poses de revêtements phonoabsorbants avec les gains mesurés par rapport aux nuisances sonores au fil du temps. A sa lecture, il n'apparaît pas critiquable d'avoir retenu un gain approximatif de 8 dB (A) lors de la pose et de 5 dB (A) après 5 ans, ces chiffres s'inscrivant dans l'ordre de grandeur de la vingtaine d'exemples cités. Les recourants qui ne parlent pas de ce document dans leur recours, ne le discutent pas non plus dans leurs déterminations, après que les autorités intimées l'ont pourtant mis en exergue. Le Tribunal fédéral ne voit ainsi pas de raison de s'écarter des valeurs susmentionnées. 
En revanche, il y a lieu de garder à l'esprit qu'il s'agit d'un ordre de grandeur commun aux différents exemples mesurés, et non de valeurs reproduites strictement et invariablement. 
 
3.  
Sur le fond, les recourants se plaignent d'une violation des art. 8, 9, 36 et 37 de l'ordonnance fédérale du 15 décembre 1986 sur la protection contre le bruit (OPB; RS 814.41). 
 
3.1. Selon l'art. 11 al. 2 LPE (RS 814.01), il importe, à titre préventif, de limiter les émissions nuisibles, dont le bruit, dans la mesure que permettent l'état de la technique ainsi que les conditions d'exploitation et pour autant que cela soit économiquement supportable. Outre la réglementation des émissions, la loi prévoit que le Conseil fédéral édicte par voie d'ordonnance des valeurs limites d'immissions applicables à l'évaluation des atteintes nuisibles ou incommodantes (art. 13 LPE), de façon à ne pas gêner de manière sensible la population dans son bien-être (art. 15 LPE). Les installations existantes qui ne satisfont pas aux prescriptions légales seront assainies (art. 16 al. 1 LPE). Des allégements peuvent être accordés lorsque l'assainissement ne répond pas au principe de la proportionnalité, pour autant que les valeurs d'alarme demeurent respectées (art. 17 LPE; cf. également art. 14 de l'ordonnance du 15 décembre 1986 sur la protection contre le bruit [OPB; RS 814.41]).  
 
3.1.1. Conformément à ces prescriptions générales, l'art. 8 OPB exprime les conditions que doit respecter une installation qui serait modifiée : les émissions de bruit des éléments nouveaux doivent être limitées dans la mesure où cela est réalisable sur le plan de la technique et de l'exploitation, et économiquement supportable (art. 8 al. 1 OPB), respectivement, en cas de modification notable - à savoir lorsque la modification entraîne la perception d'immissions de bruit plus élevées (art. 8 al. 3 OPB) -, les émissions de bruit de l'ensemble de l'installation doivent au moins être limitées de façon à ne pas dé-passer les valeurs limites d'immission (art. 8 al. 2 OPB). L'impossibilité de respecter ces conditions dans le cadre d'installations publiques ou concessionnaires donne lieu à une obligation de procéder à l'isolation acoustique des bâtiments existants (art. 10 et 11 OPB).  
En sus de ces dispositions régissant précisément les conditions à respecter pour la modification d'installations fixes existantes, l'art. 9 OPB prévoit que l'exploitation d'installations fixes nouvelles ou notablement modifiées ne doit pas entraîner un dépassement des valeurs limites d'immission consécutif à l'utilisation accrue d'une voie de communication (let. a) ou la perception d'immissions de bruit plus élevées en raison de l'utilisation accrue d'une voie de communication nécessitant un assainissement (let. b). Comme pour l'art. 8 OPB, l'impossibilité de respecter ces conditions dans le cadre d'installations publiques ou concessionnaires donne également lieu à une obligation de procéder à l'isolation acoustique des bâtiments existants conformément aux art. 10 et 11 OPB susmentionnés. 
 
3.1.2. A teneur de l'art. 36 al. 1 OPB, l'autorité d'exécution détermine les immissions de bruit extérieur dues aux installations fixes ou ordonne leur détermination si elle a des raisons de supposer que les valeurs limites d'exposition en vigueur sont déjà ou vont être dépassées. L'art. 36 al. 2 OPB précise qu'elle tient compte des augmentations ou des diminutions des immissions de bruit auxquelles on peut s'attendre en raison de la construction, la modification ou l'assainissement d'installations fixes, notamment si les projets concernés sont déjà autorisés ou mis à l'enquête publique au moment de la détermination (let. a), ou en raison de la construction, la modification ou la démolition d'autres ouvrages, si les projets sont déjà mis à l'enquête publique au moment de la détermination (let. b). Pour les routes, les installations ferroviaires, les aérodromes ainsi que les places d'armes, de tir et d'exercice militaires, l'art. 37 al. 1 OPB impose à l'autorité d'exécution de consigner dans un cadastre (cadastre de bruit) les immissions de bruit déterminées selon l'art. 36 OPB. L'autorité d'exécution veille à ce que les cadastres soient contrôlés et rectifiés (art. 37 al. 3 OPB).  
Dans sa décision concernant la construction, la modification ou l'assainissement d'une installation, l'autorité d'exécution consigne les immissions de bruit admissibles (art. 37a al. 1 OPB). S'il est établi ou à craindre que les immissions de bruit dues à l'installation diffèrent notablement et durablement des immissions consignées dans la décision, l'autorité d'exécution prend les mesures nécessaires (art. 37a al. 2 OPB). L'Office fédéral de l'environnement peut édicter des recommandations afin que les immissions de bruit consignées dans ces décisions soient saisies et présentées de manière comparable (art. 37a al. 3 OPB). 
 
3.2. Le secteur dont les recourants sont riverains se trouve en degré de sensibilité au bruit III, pour lequel les limites d'immissions sont fixées à 65 dB (A) le jour et à 55 dB (A) la nuit. Selon les indications du cadastre routier du bruit fournies par le système d'information du territoire à Genève (SITG), mis à jour au 30 juin 2017, les immeubles situés sur la rue De-Candolle sont exposés à des valeurs de bruit allant de 63 à 65 dB (A) le jour et de 55 à 57 dB (A) la nuit. Un nouveau revêtement phono-absorbant de type "Perrphone 4" a été posé à la rue De-Candolle en 2018.  
La cour cantonale a reconnu que la restriction de circulation litigieuse génère un report de trafic sur la rue De-Candolle. Elle a également repris l'estimation du TAPI d'une augmentation de 66 % de trafic conduisant à une augmentation vraisemblable du bruit de 3 à 4 dB (A). Ces chiffres ne sont pas contestés par les recourants, ni par le département. L'arrêt attaqué retient toutefois que l'augmentation des émissions sonores résultant de la mesure litigieuse n'a pas pour conséquences un dépassement des valeurs limites d'immission applicables, compte tenu de la pose, postérieure à l'établissement du cadastre, du revêtement phono-absorbant et du fait que la mesure était prise à l'essai pour une durée limitée. Par conséquent, d'une part, il rejette l'argumentation des recourants riverains tendant à l'annulation de l'arrêté litigieux en raison du dépassement des valeurs limites. D'autre part, il invalide les conditions suspensives ajoutées par le TAPI déduites des art. 37 al. 3 et 37a al. 2 OPB selon lesquelles le cadastre du bruit devait être actualisé préalablement à l'adoption de la mesure et les immissions de bruit admissibles et les éventuelles mesures à prendre devaient être précisées. 
 
3.2.1. Il résulte du raisonnement tenu par la Cour de justice qu'aux valeurs consignées dans le cadastre de 2017 devraient certes être ajoutés 3 à 4 dB (A) en raison de l'augmentation vraisemblable de bruit liée à la nouvelle mesure de circulation routière. Mais de ces valeurs devraient également être retranchés 8 dB (A) en raison de la pose du nouveau revêtement. Ainsi qu'on l'a vu, quoi qu'en disent les recourants, il est acceptable de retenir de telles valeurs pour la diminution de bruit dans le cas d'espèce, vu, notamment, les nombreuses mesures, référencées par l'OFEV, sur des revêtements phonabsorbants qui s'inscrivent dans cet ordre de grandeur (consid. 2.2 ci-dessus).  
Si l'on reprend les chiffres de l'étude à laquelle se sont référées les instances inférieures, cette diminution de bruit de 8 dB (A) n'est valable que lors de la pose et s'amoindrit au fil du temps; elle est évaluée à 5 dB (A) après 5 ans. Cette tendance est également visible dans les exemples énumérés par l'OFEV. Ainsi, avec la nouvelle mesure de circulation routière, les valeurs du cadastre sont portées, lors de la pose, de 63-65 dB (A) à 59-61 dB (A) de jour et de 55-57 dB (A) à 51-53 dB (A) de nuit. Après cinq ans, elles seraient portées à 62-64 dB (A) de jour et 54-56 dB (A) de nuit. 
L'arrêté litigieux a été adopté pour une durée allant jusqu'à deux ans après la pose du nouveau revêtement. Au vu des chiffres précités, il n'y a pas lieu de s'écarter de l'appréciation de la cour cantonale quant au fait que les valeurs limites sont respectées, malgré la nouvelle mesure de circulation, pendant toute sa durée de validité, soit deux ans au-delà de la pose. Il n'y a ainsi pas de violation des art. 8 et 9 OPB
 
3.2.2. A teneur de l'art. 37a OPB, l'autorité d'exécution consigne, dans la décision, les immissions de bruit admissibles. Les autorités intimées soutiennent que cette étape peut prendre la forme d'une constatation implicite que l'installation respecte les valeurs admissibles. Ce serait le cas ici, les immissions admissibles correspondant aux valeurs limites applicables à la zone. On peut adhérer à l'idée que les immissions admissibles au sens de l'art. 37a OPB soient les valeurs limites applicables à la zone, rien n'imposant que des valeurs différentes soient fixées en l'espèce. Dans une telle configuration, il n'en demeure pas moins que cette "constatation implicite" doit être le fait de l'autorité d'exécution de l'OPB, conformément à la lettre de l'art. 37a al. 1 OPB.  
L'arrêt attaqué ne permet pas de déterminer si tel a bien été le cas, par le biais d'un préavis ou à tout le moins d'une transmission du dossier à cette autorité. Outre que cela pourrait constituer une violation du droit d'être entendu des recourants, question qui, non soulevée, n'a pas à être examinée en l'espèce (art. 106 al. 2 LTF), la consultation de l'autorité d'exécution de l'OPB reste quoi qu'il en soit sans incidence sur la constatation de fond que, durant la validité de l'acte attaqué, les valeurs limites d'immission sont respectées. 
C'est néanmoins dans le cadre d'une telle consultation que l'autorité d'exécution de l'OPB devient désormais également dépositaire du dossier. En cette qualité et en vertu de l'art. 37a al. 2 OPB, il lui appartient alors d'agir si les conditions légales sont remplies. La mesure dans laquelle l'art. 37a al. 2 OPB emporte obligations pour cette autorité diffère légèrement de celle des art. 8 et 9 OPB, puisqu'elle est applicable également lorsqu'il "est à craindre" que les immissions diffèrent notablement et durablement des immissions consignées dans la décision (art. 37a al. 2 OPB). Toutefois, en référence aux mêmes chiffres retenus ci-dessus (consid. 3.2.1), et toujours en lien avec la durée de validité de l'arrêté litigieux, on constate qu'il n'est pas établi, ni à craindre que les immissions de bruit admissibles, à savoir les valeurs limites d'immission, soient dépassées en l'espèce.  
On ne constate en l'état ainsi pas de violation de l'art. 37a OPB
 
3.2.3. Pour le surplus, les art. 36 et 37 OPB s'imposent à l'autorité d'exécution indépendamment de toute décision ou d'autorisation de construire ou modifier une installation fixe. En particulier, l'art. 37 al. 3 OPB impose à l'autorité d'exécution de veiller à ce que les cadastres déjà établis en vertu de l'art. 37 al. 1 OPB - comme celui qui a été établi ici en 2017 - soient contrôlés et rectifiés. Cela implique de procéder périodiquement à des mesures, déjà indépendamment de changements spécifiques de circonstances. Aussi, en cas de changement de circonstances - comme ici, avec tout d'abord la pose d'un nouveau revêtement puis la modification des règles de circulation dans le quartier -, une telle adaptation s'impose-t-elle d'autant plus.  
A cela on ne saurait opposer, comme le font l'OFEV et les autorités intimées, que le cadastre n'aurait que valeur d'inventaire au point de dénier tout caractère impératif à l'art. 37 OPB. Si la portée du cadastre, notamment du point de vue de son opposabilité aux administrés, est vraisemblablement limitée (cf. ATF 130 II 394 consid. 7.4; 126 II 522 consid. 49; cf. également FAVRE ANNE-CHRISTINE, La protection contre le bruit dans la loi sur la protection de l'environnement, 2002, p. 193), elle est sans incidence sur le caractère contraignant de la tenue d'un tel cadastre, conformément à la lettre de l'art. 37 OPB
Il n'en demeure pas moins qu'à l'instar de ce qu'a retenu la cour cantonale, cette question est indépendante de l'objet du litige. Il n'est pas possible de conditionner la mise en vigueur de l'arrêté litigieux à la bonne tenue du cadastre. En revanche, les recourants doivent pouvoir s'adresser directement à l'autorité d'exécution de l'OPB pour s'assurer de son activité en ce sens. 
L'arrêt attaqué ne consacre ainsi aucune violation des art. 36 et 37 OPB
 
3.2.4. Le Tribunal fédéral relève encore qu'avec les chiffres retenus dans l'étude à laquelle se sont référées les instances précédentes, la valeur limite d'immission de 55 dB (A) de nuit serait potentiellement dépassée après cinq ans. Comme on l'a déjà évoqué, il s'agit d'un ordre de grandeur qui ne permet pas de connaître au décibel près l'évolution des effets du revêtement phonoabsorbant. En conséquence, si la détermination et la consignation du bruit ne s'imposent pas pour l'échéance de la décision attaquée, ces démarches s'imposeront néanmoins à court terme, soit avant même l'avènement de ces 5 années, qui ne sont qu'un ordre de grandeur. En d'autres termes, dès qu'il y aura "des raisons de supposer" (art. 36 al. 1 OPB) ou qu'il sera "à craindre" (art. 37a al. 2 OPB) que les valeurs limites seront dépassées, ces dispositions deviendront applicables.  
Il ressort à cet égard de l'état de fait de l'arrêt attaqué que la mesure litigieuse, limitée dans le temps, a déjà nouvellement été adoptée successivement et sans interruption au jour où la cour cantonale a statué, sans que le département ne semble vouloir s'enquérir de son impact effectif sur les immissions de bruit. 
Or en cas d'adoption répétée et ininterrompue d'arrêtés de durée limitée, il cesse d'être pertinent d'opposer à l'applicabilité des art. 36 ss - en particulier de l'art. 37a OPB, directement opposable, comme on l'a vu (consid. 3.2.2), aux autorités dans le cadre de la procédure de modification d'une installation fixe - le caractère temporaire de la mesure. Ce caractère temporaire n'est pas lié à une situation dont on sait qu'elle va nécessairement prendre fin, comme par exemple la réalisation des travaux sur une autre voie publique temporairement fermée à la circulation. Prise à l'essai, la mesure est appelée à être renouvelée et à durer si elle est jugée adéquate. Conformément au principe de limitation des nuisances (cf. art. 11 al. 2 LPE et 8 al. 1 OPB), les immissions de bruit que la mesure implique devraient être l'un des critères à prendre en compte dans une telle évaluation de la situation à l'issue de son application. Ce contexte doit être pris en considération pour déterminer si l'autorité d'exécution doit, conformément à l'art. 37a al. 2 OPB, prendre les mesures nécessaires - et cas échéant quelles mesures - dès lors qu'il serait à craindre que les immissions de bruit différeraient notablement et durablement des immissions consignées (implicitement ou non) dans la décision. 
Le présent litige étant limité au seul arrêté du 31 octobre 2019 dont la validité a pris fin douze mois après son entrée en force, ces questions sont toutefois prématurées en l'espèce. 
 
3.2.5. Il résulte de ce qui précède que l'arrêt attaqué respecte le droit fédéral, en particulier les prescriptions de l'OPB.  
 
4.  
Le recours doit être rejeté, aux frais de ses auteurs, qui succombent (art. 66 al. 1 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 4'000 fr., sont mis à la charge des recourants, solidairement entre eux. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué au mandataire des recourants, au mandataire de la Ville de Genève et du Département des infrastructures de la République et canton de Genève, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, et à l'Office fédéral de l'environnement. 
 
 
Lausanne, le 10 janvier 2023 
 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Kneubühler 
 
La Greffière : Sidi-Ali