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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
2C_781/2018  
 
 
Arrêt du 28 août 2019  
 
IIe Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Seiler, Président, 
Zünd et Donzallaz. 
Greffier : M. Dubey. 
 
Participants à la procédure 
Secrétariat d'Etat au x migrations, 
recourant, 
 
contre  
 
A.A.________, 
représenté par Me Pierre Bayenet, avocat, 
intimé. 
 
Objet 
Révocation de l'autorisation d'établissement et renvoi de Suisse, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 1ère section, du 7 août 2018 (ATA/799/2018). 
 
 
Faits :  
 
A.   
A.A.________, ressortissant américain né en 1952, est entré en Suisse le 10 janvier 1979. Il s'est marié en 1979 avec une ressortissante suisse, B.________l. Deux enfants sont nés de cette union en 1983 et en 1985. La fille aînée s'est mariée et vit dans le canton de Genève; le fils vit aux Etats-Unis. Le 30 août 1984, A.A.________ a obtenu une autorisation d'établissement. 
 
Par jugement du Tribunal correctionnel du 7 mars 2014, confirmé par la Cour de justice du canton de Genève le 24 octobre 2014, puis par le Tribunal fédéral, le 28 octobre 2015, A.A.________ a été reconnu coupable d'actes d'ordre sexuel avec des enfants (art. 187 ch. 1 al. 1 CP), de contrainte sexuelle (art. 189 al. 1 CP), de tentative de viol (art. 22 al. 1 et 190 al. 1 CP), d'instigation à tentative d'encouragement à la prostitution (art. 22 al. 1, 24 al. 1 et 195 CP) et de conduite en état d'ébriété qualifiée (art. 91 al. 1, 2 ème phrase aLCR) et a été condamné à une peine privative de liberté de 3 ans et 6 mois, sous déduction de la détention subie avant jugement, ainsi qu'au paiement à la victime mineure de ses honoraires d'avocat (2'779 fr.) et, conjointement et solidairement avec la mère de la victime, de la somme de 15'000 fr. plus intérêts à titre de réparation du tort moral. 
 
En substance, il était reproché à A.A.________ de s'être mis d'accord, en été 2009, avec la mère d'une jeune fille mineure, âgée de 14 ans, sur le prix d'un rapport sexuel avec la fille de celle-ci, alors qu'il savait qu'elle était âgée de moins de 16 ans. Il avait ensuite, le 13 août 2009, conduit la mère et la fille dans un appartement inoccupé proche de son domicile, s'était enfermé à clé dans une chambre avec l'enfant en lui expliquant, alors vêtu d'un simple sous-vêtement, qu'il avait donné de l'argent à sa mère pour l' "avoir". Après l'avoir déshabillée, ne lui laissant que son slip et ignoré ses pleurs et ses appels à l'aide adressés à sa mère, restée au salon, il lui avait fait subir des attouchements sexuels, sans toutefois la pénétrer, s'étant rendu compte qu'elle avait ses règles. Il l'avait alors contrainte à lui prodiguer une fellation, puis avait laissé sortir la jeune fille, en échange de 700 fr. remis à la mère. Il avait alors conclu avec cette dernière un nouveau contrat portant sur un autre rapport sexuel supposé avoir lieu le samedi suivant et avait cherché dans les semaines et mois suivant le 13 août 2009, sans succès, à organiser l'exécution de ce contrat. Par ailleurs, il avait circulé en février 2013 au volant de son véhicule automobile alors qu'il présentait une alcoolémie de 2,92 o/oo. 
 
Avant la commission de ces infractions, le casier judiciaire de l'intéressé était vierge et il n'avait pas non plus émargé à l'aide sociale. 
 
Après que l'intéressé a déclaré s'y opposer, le Département de la sécurité et de l'économie du canton de Genève a prononcé la révocation de son autorisation d'établissement par décision du 15 juillet 2016. 
 
Par jugement du 23 mars 2017, le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève a rejeté le recours que l'intéressé avait déposé contre la décision rendue le 15 juillet 2016 par le Département de la sécurité et de l'économie du canton de Genève. 
 
Le 10 mai 2017, A.A.________ et B.A.________ ont recouru auprès de la Cour de justice du canton de Genève contre le jugement rendu le 23 mars 2017 par le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève. Ils ont produit à l'appui de leur mémoire quatre lettres de soutien rédigées par des amis, une attestation de l'université de Genève indiquant que l'intéressé avait suivi une formation continue en patrimoine et tourisme portant notamment sur l'histoire de Genève et environs, des certificats médicaux en lien avec le traitement de [.........], un autre certificat mentionnant [........] et des problèmes de [.........] et un rapport positif de l'établissement pénitentiaire de Witzwil. En réplique, ils ont produit une expertise fondée sur l'utilisation d'outils spécialisés du risque de récidive sexuelle rédigée par un criminologue indépendant selon lequel l'intéressé présentait un risque de récidive faible. Sur requête du juge délégué, les intéressés ont produit en mars 2018 divers documents actualisés sur leur situation personnelle et familiale et sur la situation pénale de l'intéressé : un certificat attestant que leur fille avait donné naissance à une petite fille en février 2018; le curriculum-vitae de l'expert en criminologie; deux certificats médicaux attestant du suivi téléphonique régulier en lien avec le traitement de l'addiction à l'alcool; une pièce indiquant le versement de 9'600 fr. correspondant à la moitié de l'indemnité pour tort moral (15'000 fr.) à laquelle il avait été condamné conjointement et solidairement avec la mère de la victime, y compris les intérêts moratoire (2'100 fr.); la preuve du paiement des frais de justice en faveur de la victime; trois rapports d'évaluation de l'établissement pénitentiaire de Witzwil attestant que les objectifs fixés avaient été atteints; plusieurs formulaires de sorties accordées. Les parties ont été entendues en audience. 
 
B.   
Par arrêt du 7 août 2018, après avoir entendu oralement A.A.________ et procédé à l'examen des circonstances exceptionnelles du cas, la Cour de justice du canton de Genève a admis le recours dans la mesure de sa recevabilité, annulé le jugement rendu le 23 mars 2017 par le Tribunal administratif de première instance du canton de Genève ainsi que la décision du Département de la sécurité et de l'économie du canton de Genève du 15 juillet 2016 et a adressé un avertissement à l'intéressé. 
 
C.   
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, le Secrétariat d'Etat aux migrations demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu le 7 août 2018 par la Cour de justice du canton de Genève et de confirmer la décision rendue le 15 juillet 2016 par le Département de la sécurité et de l'économie du canton de Genève. Il se plaint de la violation de l'art. 96 LEtr et 8 § 2 CEDH
 
La Cour de justice du canton de Genève renonce à déposer des observations sur recours. A.A.________ et B.A.________ concluent au rejet du recours sous suite de frais et dépens. Le Secrétariat d'Etat aux migrations a renoncé à répliquer. Le Département de la sécurité et de l'économie du canton de Genève conclut à l'admission du recours. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. D'après l'art. 83 let. c ch. 2 LTF, le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions relatives à une autorisation de droit des étrangers à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit. Il est recevable contre les décisions révoquant, comme en l'espèce, une autorisation d'établissement, parce qu'il existe en principe un droit au maintien de cette autorisation (ATF 135 II 1 consid. 1.2.1 p. 4; arrêt 2C_1118/2016 du 26 avril 2017 consid. 1).  
 
1.2. En vertu de l'art. 14 al. 2 de l'ordonnance fédérale du 17 novembre 1999 sur l'organisation du Département fédéral de justice et police (Org DFJP; RS 172.213.1), le Secrétariat d'Etat a qualité pour recourir devant le Tribunal fédéral (art. 89 al. 2 let. a LTF), dans le domaine du droit des étrangers, contre une décision qui infirme la révocation de l'autorisation d'établissement de l'intimé.  
 
1.3. Au surplus, le recours est dirigé contre un jugement final (art. 90 LTF) rendu dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) par un tribunal supérieur de dernière instance cantonale (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF). Déposé dans le délai (art. 100 al. 1 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi, le recours est recevable.  
 
2.  
 
2.1. Le Tribunal fédéral statue en principe sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), sous réserve des cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Le recourant ne peut critiquer les constatations de fait ressortant de la décision attaquée que si celles-ci ont été effectuées en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF ou de manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 314), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 137 III 226 consid. 4.2 p. 234). Conformément à l'art. 106 al. 2 LTF, le recourant doit expliquer de manière circonstanciée en quoi ces conditions seraient réalisées.  
 
Lorsque, comme en l'espèce, la partie recourante s'en prend à l'appréciation des preuves et à l'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a procédé à des déductions insoutenables (ATF 133 III 393 consid. 7.1 p. 398; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). Il appartient toutefois à la partie recourante d'invoquer ce grief et de le motiver d'une manière suffisante (art. 106 al. 2 LTF). Elle doit donc préciser en quoi l'appréciation attaquée serait arbitraire, ne reposerait sur aucun motif sérieux et objectif, apparaîtrait insoutenable ou heurterait gravement le sens de la justice (ATF 133 II 396 consid. 3.2 p. 400; 128 I 295 consid. 7a p. 312). Les faits et les critiques invoqués de manière appellatoire sont irrecevables (ATF 137 II 353 consid. 5.1 p. 356). Par ailleurs, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut en principe être présenté devant le Tribunal de céans (art. 99 al. 1 LTF). 
 
2.2. Le recourant présente les faits de la cause dans un chapitre ad hoc de son mémoire sans exposer en quoi les conditions de l'art. 97 al. 1 LTF seraient remplies. Il n'y a pas lieu d'en tenir compte.  
 
Pour le surplus, dans le chapitre en droit de son mémoire (ch. 11), le recourant s'écarte indûment des faits retenus dans l'arrêt attaqué en affirmant que l'intimé était déjà sous le coup d'une condamnation à une peine de trois ans et six mois de privation de liberté lorsqu'il a conduit en état d'ébriété en 2013, puisqu'une seule condamnation a été prononcée à son encontre le 7 mars 2014. Enfin, sous les chiffres 12 ss du chapitre en droit de son mémoire, le recourant critique le poids accordé par l'instance précédente à l'audition de l'intimé et à son bon comportement en prison : en tant qu'il s'en prend à l'appréciation des preuves par l'instance précédente, ses griefs doivent être écartés puisqu'il n'expose pas en quoi l'appréciation de ces moyens de preuve serait insoutenable. En tant qu'il remet en cause la pondération des critères dans l'examen du respect du principe de proportionnalité, ses griefs seront examinés ci-dessous. 
 
3.  
 
3.1. En raison de sa condamnation à trois ans et six mois de peine privative de liberté, l'intimé remplit la condition de la peine de longue durée de l'art. 62 al. 1 let. b de la loi du 16 décembre 2005 sur les étrangers et l'intégration (LEI; RS 142.20, nouveau titre dès le 1er janvier 2019 [RO 2017 6521]), par renvoi de l'art. 63 al. 1 let. a et al. 2 LEI, justifiant la révocation de son autorisation d'établissement (cf. ATF 139 I 16 consid. 2.1 p. 18). Les parties ne le contestent pas. Le recourant s'en prend uniquement, sous l'angle des art. 96 al. 1 et 8 § 2 CEDH, à la pesée des intérêts effectuée par l'instance précédente, qui aurait, selon lui, rendu une décision violant le principe de proportionnalité.  
 
3.2. Seule se pose donc la question de savoir si l'annulation de la révocation de l'autorisation d'établissement de l'intimé par la Cour de justice est proportionnée au sens de l'art. 96 al. 1 LEI et 8 § 2 CEDH. La pesée globale des intérêts requise par l'art. 96 al. 1 LEI est analogue à celle requise par les art. 8 par. 2 CEDH et 13 al. 1 Cst. et peut être effectuée conjointement à celle-ci (cf. arrêt 2C_806/2018 du 20 mars 2019 consid. 6.1 et les références citées).  
 
4.  
 
4.1. En vertu de l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration.  
 
4.2. De jurisprudence constante, rendue en application des art. 96 al. 1 LEI et 8 § 2 CEDH, il y a lieu, lors de l'examen de la proportionnalité, de prendre concrètement en considération la gravité de la faute commise, le temps écoulé depuis l'infraction, le comportement de l'auteur pendant cette période, le degré de son intégration, la durée du séjour en Suisse, ainsi que le préjudice que l'intéressé et sa famille auraient à subir du fait de la mesure contestée, la nationalité des diverses personnes concernées, la situation familiale du requérant et, le cas échéant, la durée de son mariage, ainsi que d'autres facteurs témoignant de l'effectivité d'une vie familiale au sein d'un couple, la question de savoir si le conjoint avait connaissance de l'infraction à l'époque de la création de la relation familiale, le point de savoir si des enfants sont issus du mariage et, dans ce cas, leur âge, la gravité des difficultés que le conjoint risque de rencontrer dans le pays vers lequel le requérant doit être expulsé, l'intérêt et le bien-être des enfants, en particulier, la gravité des difficultés que ceux-ci sont susceptibles de rencontrer dans le pays vers lequel l'intéressé doit être expulsé, la solidité des liens sociaux, culturels et familiaux avec le pays hôte et avec le pays de destination (ATF 139 I 31 consid. 2.3.1 p. 33; 139 I 16 consid. 2.2.1 p. 19; 135 II 377 consid. 4.3 p. 381; arrêt 2C_365/2013 du 30 août 2013 consid. 2.3 non publié in ATF 139 I 325 et les références citées).  
 
4.3. Lorsque la mesure de révocation est prononcée en raison de la commission d'une infraction, la peine infligée par le juge pénal est le premier critère à utiliser pour évaluer la gravité de la faute et pour procéder à la pesée des intérêts (cf. ATF 139 I 16 consid. 2.2.1 p. 19 s.; 135 II 377 consid. 4.3 p. 381 s.; arrêt 2C_970/2017 du 7 mars 2018 consid. 4.1). Pour évaluer la menace que représente un étranger condamné pénalement, le Tribunal fédéral se montre particulièrement rigoureux en présence d'infractions à la législation fédérale sur les stupéfiants, d'actes de violence criminelle et d'infractions contre l'intégrité sexuelle (ATF 139 II 121 consid. 5.3 p. 126; arrêt 2C_121/2014 du 17 juillet 2014 consid. 3.2). Lors d'infractions pénales graves, il existe, sous réserve de liens personnels ou familiaux prépondérants, un intérêt public digne de protection à mettre fin au séjour d'un étranger afin de préserver l'ordre public et à prévenir de nouveaux actes délictueux. S'agissant du risque de récidive, il est de toute façon attendu du délinquant qu'il se comporte de manière adéquate durant l'exécution de sa peine (ATF 139 II 121 consid. 5.5.2 p. 128).  
 
4.4. La durée de présence en Suisse d'un étranger constitue un autre critère très important. Plus cette durée est longue, plus les conditions pour prononcer l'expulsion administrative doivent être appréciées restrictivement (cf. ATF 135 II 377 consid. 4.4 et 4.5 p. 382 s.). La révocation de l'autorisation d'établissement d'un étranger qui séjourne depuis longtemps en Suisse doit se faire avec une retenue particulière, mais n'est pas exclue en cas d'infractions graves ou répétées même en présence d'un étranger né en Suisse et qui y a passé l'entier de sa vie. On tiendra alors particulièrement compte de l'intensité des liens de l'étranger avec la Suisse et des difficultés de réintégration dans son pays d'origine (ATF 139 I 145 consid. 2.4 p. 149; 139 I 16 consid. 2.2.1 p. 19 ss; 139 I 31 consid. 2.3.1 p. 33 ss).  
 
C'est à la lumière de ces principes qu'il convient d'examiner la proportionnalité de la mesure prononcée par le Département. 
 
5.  
 
5.1. En l'espèce, l'intimé a été condamné en mars 2014 à une peine privative de liberté de 3 ans et 6 mois pour actes d'ordre sexuel, contrainte sexuelle, tentative de viol et d'instigation à tentative d'encouragement à la prostitution sur une mineure de 14 ans en 2009 ainsi que de conduite d'un véhicule en état d'ébriété qualifiée en 2013. Hormis le caractère objectivement grave de la conduite en état d'ébriété aggravé, il y a lieu de qualifier d'odieux le comportement pleinement responsable de l'intimé jouissant d'une bonne situation personnelle et sociale à l'égard, d'abord, d'une mère faible parce que dépendante de la drogue mais surtout à l'encontre d'une enfant de 14 ans. Le développement et le devenir d'adulte de cette dernière a été gravement mis à mal pour des motifs égoïstes, d'autant plus détestables que l'intimé, qui n'est pas parvenu à ses fins une première fois, a tenté de faire respecter un deuxième contrat identique et qu'il a essayé, au cours de la procédure pénale, de nier et de minimiser ses actes. Quand bien même il a, à ce jour, réglé la totalité de l'indemnité pour tort moral due à sa victime ainsi que les frais de justice de celle-ci et lui a écrit une lettre d'excuses, tout en respectant l'interdiction qui lui a été faite d'entrer en contact avec elle, il n'en demeure pas moins que son comportement a porté atteinte grave à l'intégrité sexuelle d'une enfant mineure, ce qui constitue une faute très lourde et une infraction pour laquelle le législateur a entendu se montrer intransigeant (cf. art. 121 al. 3 let. a Cst. et 66a al. 1 let. h CP). Dans ces circonstances, seuls des éléments exceptionnels permettraient de faire pencher la balance en la faveur de l'intéressé.  
 
5.2. Parmi les circonstances qui doivent être prises en considération, figurent, il est vrai, l'absence de casier judiciaire de l'intimé avant sa condamnation et l'absence de toute nouvelle infraction jusqu'à son incarcération le 13 décembre 2016. Il ressort également des rapports notamment des 4 mai 2017 et 13 mars 2018 de l'établissement pénitentiaire, de la décision du Service de l'application des peines et mesures du 19 décembre 2017 et du procès-verbal de comparution personnelle de l'intimé devant l'instance précédente le 17 avril 2018 ainsi que des conclusions du rapport d'expertise sur le risque de récidive de juillet 2017 que l'intimé se montre engagé et coopératif dans l'élaboration des plans d'exécution de sa sanction, dont les objectifs ont été atteints jusqu'à ce jour; ils montrent également que l'intimé est ponctuel, adéquat, motivé, amical et correct, qu'il a la volonté de ne plus commettre d'infraction, qu'il a du remord et qu'il a reconnu la gravité de sa faute et la nécessité d'entreprendre toutes démarches utiles pour que cet acte grave mais isolé ne se reproduise plus et qu'il présente un faible risque de récidive.  
 
5.3. Il est vrai aussi, sur le plan personnel, que l'intimé est arrivé en Suisse en janvier 1979 et qu'il y vit depuis plus de 40 ans de son travail et n'a jamais eu recours à l'aide sociale. C'est le lieu de souligner toutefois que l'intimé a néanmoins vécu les 27 premières années de sa vie aux Etats-Unis, dont il maîtrise encore la langue et connaît le mode de vie et où vit son fils.  
 
5.4. Il est vrai enfin, sur le plan familial, que l'intimé entretient en Suisse de bonnes relations avec sa fille majeure, sa petite-fille et sa belle-soeur de même qu'avec son épouse, malgré les difficultés et l'incarcération, de sorte que la révocation de l'autorisation d'établissement aurait pour effet de mettre l'épouse de l'intimé dans la situation de devoir se séparer de son mari ou de quitter sa famille en Suisse, en particulier sa soeur, sa fille et sa petite fille récemment née, ses amis et son réseau de soins médicaux. Il faut cependant également constater que, pour avoir travaillé au service de U.________, l'épouse de l'intimé a toutefois l'habitude de changer de lieu de vie et que les soins dont elle et l'intimé ont besoin en raison de leur âge avancé et de leur état de santé physique et psychique pourraient aussi bien être dispensés aux Etats-Unis. Ils y retrouveraient d'ailleurs leur fils tandis que le contact avec le reste de la famille pourrait être maintenu par les moyens de communications modernes et des voyages.  
 
5.5. Enfin, la situation de l'intimé peut être rapprochée de celle d'un ressortissant allemand, également au bénéfice d'une autorisation d'établissement, qui avait été condamné à une peine privative de liberté de vingt-quatre mois pour des actes sexuels sur sa fille et qui a dû quitter la Suisse, alors qu'il était né dans ce pays, y avait de la famille et y était intégré socialement et professionnellement (cf. arrêt 2C_787/2015 du 29 mars 2016). Elle peut aussi être rapprochée de celle d'un ressortissant italien condamné à une peine de deux ans et neuf mois pour contrainte sexuelle et actes d'ordre sexuel avec des enfants qui lui a aussi valu révocation de son autorisation d'établissement (arrêt 2C_976/2017 du 8 février 2018).  
 
5.6. Au vu de l'ensemble des circonstances, de la jurisprudence dans des causes comparables et de l'extrême gravité de l'atteinte à l'intégrité sexuelle d'une enfant mineure, l'intérêt public à éloigner l'intimé de la Suisse l'emporte sur son intérêt privé à rester en Suisse. Il y a lieu d'admettre le recours.  
 
6.   
Les considérants qui précèdent conduisent à l'admission du recours et à l'annulation de l'arrêt rendu le 7 août 2018 par la Cour de justice du canton de Genève. Le jugement du 23 mars 2017 du Tribunal de première instance est confirmé. Le dossier est renvoyé au Département de la sécurité, afin qu'il fixe un nouveau délai de départ à l'intimé. 
 
Succombant, l'intimé doit supporter les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Aucun dépens n'est alloué au Secrétariat d'Etat aux migrations, qui obtient gain de cause dans l'exercice de ses attributions officielles (art. 68 al. 1 et 3 LTF). L'affaire est en outre renvoyée à la Cour de justice afin qu'elle fixe à nouveau les frais et dépens de la procédure cantonale (cf. art. 67 et 68 al. 5 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est admis. L'arrêt du 7 août 2018 de la Cour de justice est annulé et le jugement du 23 mars 2017 du Tribunal administratif de première instance rétabli. Le Département de la sécurité et de l'économie est chargé de fixer un nouveau délai de départ. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimé. 
 
3.   
Il n'est pas alloué de dépens. 
 
4.   
La cause est renvoyée à la Cour de justice, afin qu'elle fixe à nouveau les frais et dépens de la procédure cantonale. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué au Secrétariat d'Etat aux migrations, au mandataire de l'intimé, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative, 1ère section, et au Département de la sécurité et de l'économie (DSE) de la République et canton de Genève, Genève. 
 
 
Lausanne, le 28 août 2019 
Au nom de la IIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Seiler 
 
Le Greffier : Dubey