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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1P.710/2001/dxc 
 
Arrêt du 21 février 2002 
Ire Cour de droit public 
 
Les juges fédéraux Aeschlimann, juge présidant la Cour, 
Catenazzi, Fonjallaz, 
greffier Parmelin. 
 
X.________ et Y.________, recourants, représentés par Me Marco Ziegler, avocat, boulevard de Saint-Georges 72, 1205 Genève, 
 
contre 
 
Grand Conseil du canton de Genève, Chancellerie d'Etat, rue de l'Hôtel-de-Ville 2, case postale 3964, 1211 Genève 3. 
 
art. 13 et 29 Cst., art. 8 CEDH (requête en grâce) 
 
(recours de droit public contre la décision du Grand Conseil du canton de Genève du 4 octobre 2001) 
 
Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit: 
1. 
X.________, ressortissant du Kosovo né le 1er août 1977, est arrivé en Suisse en septembre 1995. Il a présenté une demande d'asile qui a été rejetée le 14 décembre 1995. Il a été condamné une première fois le 5 juin 1996 à cinq mois d'emprisonnement, avec sursis pendant quatre ans, et à l'expulsion du territoire suisse pour une durée de sept ans, pour vols et dommages à la propriété. Le 24 octobre 1996, il a fait l'objet d'une nouvelle condamnation pour vol à la peine de quarante jours d'emprisonnement, assortie de l'expulsion du territoire helvétique pour une durée de huit ans. Le 12 janvier 1998, le Procureur général du canton de Genève l'a condamné pour des faits de même nature à une peine de quatre mois d'emprisonnement et ordonné son expulsion pour une durée de neuf ans. 
Le 17 février 2000, X.________ s'est marié à Genève avec Y.________, ressortissante portugaise née le 22 juin 1978, titulaire d'une autorisation d'établissement en Suisse. Il a été expulsé le 27 mars 2000 à destination du Kosovo, où il réside actuellement. 
Le 20 avril 2001, X.________ a adressé une demande en grâce au Grand Conseil du canton de Genève tendant à ce que les trois condamnations à l'expulsion du territoire suisse soient rapportées afin de lui permettre de vivre en Suisse auprès de son épouse. Par décision du 4 octobre 2001, cette autorité a rejeté la requête, sur la base du préavis défavorable de sa commission de grâce. 
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________et Y.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler cette décision et de renvoyer la cause à l'autorité intimée pour qu'elle prononce la grâce relative aux trois expulsions pénales, au sens des considérants; ils concluent subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité intimée pour qu'elle motive sa décision rejetant la demande de grâce. Ils prétendent que le refus non motivé de la grâce violerait leur droit au respect de leur vie familiale, garanti aux art. 13 Cst. et 8 CEDH, et leur droit d'être entendus consacré à l'art. 29 al. 2 Cst. 
Le Grand Conseil du canton de Genève conclut principalement à l'irrecevabilité du recours et subsidiairement à son rejet. 
2. 
Seul le recours de droit public est ouvert à l'encontre d'une décision relative au refus ou à l'octroi partiel de la grâce, à l'exclusion du pourvoi en nullité ou du recours de droit administratif (ATF 118 Ia 104 consid. 1a p. 106; sur l'évolution de la jurisprudence, voir Amédée Kasser, La grâce en droit fédéral et en droit vaudois, thèse Lausanne 1991, p. 213 ss). Suivant une jurisprudence constante, à défaut d'un droit à la grâce, le condamné ne dispose pas de l'intérêt juridiquement protégé nécessaire, selon l'art. 88 OJ, pour former un recours contre le refus de lui accorder une telle mesure (ATF 118 Ia 104 consid. 1b p. 106 et les arrêts cités); en revanche, il peut se plaindre de la violation de ses droits de partie à la procédure cantonale ou de ses droits découlant de l'art. 9 Cst. lorsqu'une telle violation équivaut à un déni de justice formel; s'agissant de la grâce, le condamné ne dispose cependant que de droits procéduraux restreints, en raison de la nature même de cette institution; il peut par exemple se plaindre de ce que l'autorité compétente pour examiner la demande de grâce aurait déclaré à tort celle-ci irrecevable; en revanche, il ne saurait faire valoir une violation de son droit d'être entendu stricto sensu ou de l'absence de toute motivation (ATF 117 Ia 84 consid. 1b p. 86; 106 Ia 131 consid. 1a p. 132). A la rigueur de ces arrêts, le recours devrait être déclaré irrecevable, ce que les recourants admettent d'ailleurs. 
Ces derniers contestent cependant que cette jurisprudence puisse leur être opposée. Se référant à un avis de doctrine (Philip Grant, La protection de la vie familiale et de la vie privée en droit des étrangers, thèse Genève 2000, p. 509/510), ils prétendent tirer un droit à contester au fond le refus de la grâce en tant que celui-ci pourrait porter atteinte à leur droit au respect de leur vie familiale, garanti aux art. 8 § 1 CEDH et 13 al. 1 Cst. en empêchant le maintien de leur relation de couple; il y aurait en outre lieu d'interpréter l'art. 88 OJ en rapport avec l'art. 13 CEDH, qui garantit à toute personne dont les droits reconnus par la Convention ont été violés le droit à un recours effectif devant une instance nationale. 
L'auteur cité par les recourants envisage uniquement l'hypothèse de faits nouveaux relevant du champ d'application de l'art. 8 CEDH, où la grâce constitue l'unique moyen de suspendre les effets d'une expulsion judiciaire et d'éviter ainsi une violation du droit au respect de la vie familiale. Les époux X.________ ne se trouvent pas dans une telle situation puisque leur mariage a été prononcé avant que le recourant ne soit expulsé du territoire suisse. X.________ aurait ainsi pu faire réexaminer la conformité des mesures d'expulsion dont il était l'objet au regard des art. 8 § 1 CEDH et 13 al. 1 Cst. dans le cadre d'un recours de droit administratif dirigé contre la décision d'exécution de l'expulsion judiciaire pour violation du principe de non-refoulement (ATF 121 IV 345 consid. 1a p. 348); il ne se justifie dès lors pas de remettre en cause la jurisprudence du Tribunal fédéral refusant de reconnaître au requérant en grâce débouté la qualité pour agir au fond en l'absence d'un droit à la grâce, dans le cas particulier; ces mêmes considérations conduisent également à écarter le grief tiré d'une violation de l'art. 13 CEDH (ATF 121 IV 345 consid. 1g p. 352). Il n'y a dès lors pas lieu d'entrer en matière sur les griefs tirés d'une violation des art. 8 § 1 CEDH et 13 al. 1 Cst. 
Les recourants se plaignent également en vain d'une atteinte à leur droit d'être entendus garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. Ils perdent en effet de vue que l'autorité compétente en matière de grâce n'a aucune obligation de motiver sa décision, en raison de la nature même de cet acte (ATF 118 Ia 104 consid. 2b p. 107 et les arrêts cités). Le Tribunal fédéral n'a aucune raison de remettre en cause cette jurisprudence confirmée en dernier lieu dans un arrêt non publié rendu le 18 juin 2001 dans la cause 1P.240/2001, auquel se réfèrent expressément les recourants. 
3. 
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est recevable, aux frais des recourants, qui succombent (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens (art. 159 al. 2 OJ). 
 
Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
2. 
Un émolument judiciaire de 1'000 fr. est mis à la charge des recourants. 
3. 
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des recourants et au Grand Conseil du canton de Genève. 
Lausanne, le 21 février 2002 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le juge présidant: Le greffier: