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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_731/2016  
   
   
 
 
 
Arrêt du 14 juillet 2017  
 
IIe Cour de droit social  
 
Composition 
Mmes les Juges fédérales Pfiffner, Présidente, Glanzmann et Moser-Szeless. 
Greffier : M. Bleicker. 
 
Participants à la procédure 
Fondation institution supplétive LPP, 
Weststrasse 50, 8036 Zurich, 
représentée par Me Didier Elsig, avocat, 
recourante, 
 
contre  
 
1. Fondation collective LPP d'Allianz Suisse Société d'Assurances sur la Vie, c/o Allianz Suisse, Service juridique PLHRD, 8010 Zurich, 
2. A.________, 
représenté par Me Eric Maugué, avocat, 
intimés. 
 
Objet 
Prévoyance professionnelle (rente d'invalidité), 
 
recours contre le jugement de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 20 septembre 2016. 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ a travaillé en qualité de peintre et nettoyeur pour l'entreprise B.________ (dès le 1 er septembre 2000). A ce titre, il a été affilié auprès de la Fondation collective LPP d'Allianz Suisse, Société d'Assurances sur la Vie (ci-après: l'Allianz), jusqu'au 30 avril 2011. Il a ensuite été assuré - avec effet rétroactif - auprès de la Fondation institution supplétive LPP (ci-après: l'institution supplétive) dès le 1 er mai 2011. L'entreprise B.________ a été déclarée en faillite le 23 septembre 2013, puis radiée d'office du registre du commerce une année plus tard.  
En arrêt (total, puis partiel) de travail depuis le 27 mars 2009, l'assuré a déposé une demande de prestations auprès de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après: l'office AI), le 18 mai 2010. Les docteurs C.________, spécialiste en médecine interne générale (avis du 28 mai 2010), et D.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie (avis du 18 novembre 2011 et du 6 décembre 2011), ont eu l'occasion de se prononcer sur l'état de santé et la capacité de travail de l'assuré. L'office AI a ensuite confié la réalisation d'une expertise pluridisciplinaire à la Policlinique médicale universitaire (PMU). Dans un rapport du 26 mars 2013, les experts ont diagnostiqué - avec effet sur la capacité de travail - des lombalgies chroniques dans le contexte de troubles dégénératifs, un status après ostéosynthèse de la malléole médiale gauche (fracture de la cheville gauche en 1996 avec signes dégénératifs), des attaques de panique et un trouble dépressif récurrent, épisode actuel léger sans syndrome somatique. L'assuré n'était plus capable de travailler dans son activité habituelle, mais disposait d'une capacité de travail entière (100 %) dans une activité adaptée à ses limitations fonctionnelles dès le 1 er janvier 2010. Les experts ont ensuite fixé la capacité résiduelle de travail de A.________ à 50 % dès le 16 novembre 2011, en raison d'un épisode dépressif grave diagnostiqué par la doctoresse D.________, puis à 70 % dès le 26 mars 2013.  
Par décision du 20 novembre 2014, l'office AI a fixé le degré d'invalidité de A.________ successivement à 27 % (dès janvier 2010), à 66 % (dès novembre 2011), à 52 % (dès mars 2013) et à 51 % (dès mai 2014). Il lui a en conséquence octroyé trois quarts de rente (dès le 1er novembre 2011), puis une demi-rente d'invalidité (dès le 1er juin 2013). 
 
A.b. En se fondant sur la décision de l'office AI (du 20 novembre 2014), Allianz a nié le droit de A.________ à des prestations de la prévoyance professionnelle versées par ses soins en raison du défaut d'un lien de connexité matérielle entre l'aggravation de l'état de santé (sur le plan psychique) et les douleurs lombaires diagnostiquées pendant les rapports d'assurance (correspondances du 9 février et du 10 août 2015). L'assuré s'est ensuite adressé à l'institution supplétive (courrier du 2 octobre 2015), qui a également nié son droit à des prestations (correspondances du 24 novembre et du 14 décembre 2015).  
 
B.   
Le 8 février 2016, A.________ a simultanément ouvert une action en paiement contre les deux institutions de prévoyance, concluant au versement par Allianz, subsidiairement par l'institution supplétive, de la somme de 49'215 fr. 80 avec intérêts à 5 % l'an à compter du jour du dépôt de la demande et d'une rente de 595 fr. 85 par mois pour lui-même et de 119 fr. 15 pour chacun de ses enfants, sous réserve d'indexation. Statuant le 20 septembre 2016, la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, a partiellement admis la demande en tant qu'elle était dirigée contre l'institution supplétive, condamné celle-ci à payer au demandeur trois quarts de rente dès le 1er novembre 2011, puis une demi-rente d'invalidité dès le 1er juin 2013, majorées d'un intérêt de 5 % l'an dès le 2 octobre 2015, assorties des rentes pour enfant. Elle a pour le surplus rejeté la demande en tant qu'elle était dirigée contre Allianz. 
 
C.   
L'institution supplétive forme un recours en matière de droit public contre ce jugement dont elle demande l'annulation. Elle conclut au rejet de la demande en paiement dans toutes ses conclusions dans la mesure où celles-ci sont recevables, au rejet des conclusions prises par Allianz dans la mesure où celles-ci sont recevables, et à la condamnation de Allianz à verser à l'assuré trois quarts de rente dès le 1er novembre 2011, puis une demi-rente d'invalidité dès le 1er juin 2013, majorées d'un intérêt de 5 % l'an dès le 2 octobre 2015, respectivement dès le 8 février 2016, assorties des rentes pour enfants. Subsidiairement, l'institution supplétive conclut au renvoi de la cause à l'autorité précédente pour instruction complémentaire. Plus subsidiairement encore, elle demande à ce que les intérêts de 5 % l'an dus à l'assuré courent dès le 8 février 2016. 
Allianz conclut au rejet du recours, tandis que A.________ conclut principalement à son admission, Allianz étant condamnée à lui verser trois quarts de rente d'invalidité dès le 1er novembre 2011, puis une demi-rente d'invalidité dès le 1er juin 2013, majorées d'un intérêt à 5 % l'an dès le 8 février 2016, et subsidiairement à la confirmation du jugement du 20 septembre 2016. L'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à prendre position. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. En tant que la recourante conclut à la condamnation de Allianz au versement de prestations en faveur de A.________, elle prend des conclusions qui ne correspondent en rien à celles formées en instance cantonale. Elles sont par conséquent irrecevables parce que nouvelles (art. 99 al. 2 LTF).  
 
1.2. La LTF ne connaît ensuite pas l'institution du recours joint, de sorte que, s'il entendait contester l'arrêt cantonal, A.________ devait agir dans le délai de recours de l'art. 100 LTF (ATF 138 V 106 consid. 2.1 p. 110). Il s'ensuit que les conclusions de l'assuré sont irrecevables dans la mesure où elles tendent à autre chose qu'au rejet du recours. Au demeurant, il se borne à renvoyer à ses écritures déposées devant l'instance précédente, si bien que sa détermination ne répond pas aux exigences prévues par la loi (art. 42 al. 1 et 2 LTF; ATF 143 V 19 consid. 2.2 p. 23 et la référence). Il n'y a dès lors pas lieu de la prendre en considération.  
 
2.   
Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF), n'étant limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, et ne peut aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF). Il fonde son raisonnement sur les faits retenus par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF) sauf s'ils ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La partie recourante qui entend s'écarter des faits constatés doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions de l'art. 105 al. 2 LTF sont réalisées, sinon un état de fait divergent ne peut être pris en considération (art. 97 al. 1 LTF). 
 
3.  
 
3.1. Est litigieux en l'espèce le point de savoir laquelle des deux institutions de prévoyance est tenue de verser les prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle à A.________.  
 
3.2. Le jugement entrepris expose de manière complète les dispositions légales et les principes jurisprudentiels relatifs au droit à des prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle ainsi qu'à la notion de survenance de l'incapacité de travail, en relation avec la double condition de la connexité matérielle et temporelle nécessaire pour fonder l'obligation de prester d'une institution de prévoyance (ATF 138 V 409 consid. 6.2 p. 419; 136 V 65 consid. 3.1 p. 68; 134 V 20 consid. 3.2 p. 22; 130 V 275 consid. 4.1 p. 275 et les références). Il suffit d'y renvoyer.  
 
4.  
 
4.1. La juridiction cantonale a nié l'existence d'un lien de connexité matérielle entre d'une part l'atteinte à la santé somatique (lombalgies sur spondylose et discarthrose lombaire prédominant L5-S1) ayant conduit à une incapacité de travail dès mars 2009, et d'autre part l'atteinte à la santé psychiatrique (état dépressif majeur d'intensité moyenne avec des troubles de la mémoire et de la concentration importante et crises de panique) qui a conduit à la reconnaissance d'une invalidité de plus de 40 % dès novembre 2011. Elle a en particulier constaté que dans les différents avis médicaux versés au dossier une incapacité de travail due à des affections d'ordre psychiatrique n'avait pas été attestée avant le 16 novembre 2011, date de la première consultation de l'assuré auprès d'un psychiatre (avis du 18 novembre 2011). Or à ce moment-là, selon la juridiction cantonale, l'assuré était affilié auprès de l'institution supplétive, alors que débutait l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité. L'assuré pouvait par conséquent prétendre au versement par celle-ci de prestations d'invalidité de la prévoyance professionnelle.  
 
4.2. L'institution supplétive reproche aux premiers juges d'avoir procédé à une appréciation arbitraire des moyens de preuve en considérant de manière distincte les atteintes de nature rhumatologique et celles de nature psychique. En se fondant sur les avis médicaux versés en cause, en particulier les données anamnestiques recueillies par la doctoresse D.________ et les experts de la PMU, elle soutient que l'apparition des lombalgies (dès 2007) a coïncidé avec celle de l'état dépressif. Elle affirme par ailleurs que la doctrine médicale admet qu'une douleur chronique peut déclencher l'apparition d'un état dépressif, voire s'inscrire comme un facteur de maintien de celui-ci.  
 
5.   
En l'occurrence, les arguments présentés par la recourante pour remettre en cause les constatations de fait de l'autorité précédente et l'appréciation qu'elle en a tirées ne sont pas susceptibles d'en établir le caractère manifestement inexact (supra consid. 2). 
 
5.1. Les premiers juges ont tout d'abord retenu à juste titre et de manière convaincante que même s'il fallait admettre que les troubles psychiques avaient été causés par les souffrances physiques de l'assuré ("situation pesant sur le moral"), il ne s'agissait pas là d'un élément suffisant pour admettre - au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 139 V 176 consid. 5.3 p. 186 et les références) - un lien de connexité matérielle entre ces deux pathologies, en l'absence d'un arrêt de travail documenté pour des motifs psychiques pendant les rapports d'assurance (cf. parmi d'autres: arrêts 9C_691/2016 du 7 mars 2017 consid. 4.1, 9C_658/2016 du 3 mars 2017 consid. 6.3 et la référence). La recourante fait par ailleurs une lecture réductrice de l'arrêt B 3/03 du 31 décembre 2003 cité par les premiers juges. Ainsi que l'a souligné la juridiction cantonale, les effets négatifs de l'atteinte psychique sur la capacité de travail s'étaient en effet déjà manifestés en temps réel dans la cause alors jugée.  
 
5.2. La recourante ne fait ensuite état d'aucun élément clinique ou diagnostique concret et objectif susceptible de mettre en cause les conclusions médicales qui ont conduit les premiers juges à retenir que les affections psychiques de l'assuré s'étaient manifestées de manière décisive seulement dès le 16 novembre 2011. Elle se limite d'ailleurs à donner sa propre appréciation du moment de la survenance de l'état dépressif de l'assuré (dès 2007), laquelle n'est nullement corroborée par les conclusions des psychiatres. Au contraire, les experts de la PMU ont relevé que A.________ disposait d'une capacité de travail entière dans une activité adaptée - tant d'un point de vue somatique que psychiatrique - du 1er janvier 2010 au 15 novembre 2011 (hormis une brève période entre avril et juin 2011 en raison d'une entorse à la cheville). Et la doctoresse D.________ s'est prononcée sur la période courant uniquement dès le 16 novembre 2011, date de la première consultation de l'assuré. A cet égard, on ajoutera que A.________ a consulté la psychiatre parce qu'il avait présenté - selon ses dires - une "dépression" à la suite d'un projet de décision de l'office AI du 7 octobre 2011 (expertise de la PMU, p. 7).  
 
5.3. C'est en vain, enfin, que la recourante cite des extraits d'un ouvrage sur le syndrome douloureux somatoforme persistant (PIERRE-ANDRÉ FAUCHÈRE, Douleur somatoforme, 2007, p. 66 ss et p. 154 ss), puisque ceux-ci ne permettent nullement de remettre en cause les conclusions motivées de l'expertise pluridisciplinaire.  
 
6.   
La recourante se plaint finalement du point de départ des intérêts moratoires qu'elle doit à l'assuré. En matière de rente de la prévoyance professionnelle, l'institution de prévoyance est tenue de verser un intérêt moratoire à partir du jour de la poursuite ou du dépôt de la demande en justice sur le montant dû (cf. art. 105 al. 1 CO; ATF 137 V 373 consid. 6.6 p. 382; 119 V 131 consid. 4c p. 135). 
En fixant le point de départ des intérêts moratoires au jour où l'assuré a interpellé la première fois la recourante (2 octobre 2015), et non à celui du dépôt de l'action (du 8 février 2016), la juridiction cantonale a violé le droit fédéral. La conclusion subsidiaire de la recourante se révèle ainsi fondée. Pour le reste, la recourante ne conteste pas le taux d'intérêt fixé à 5 % l'an par la juridiction cantonale. 
 
7.   
Vu ce qui précède, le recours est partiellement admis. Le chiffre 3 du dispositif de l'arrêt attaqué est réformé en ce sens que l'intérêt de 5 % l'an court dès le 8 février 2016. Le jugement attaqué est confirmé pour le surplus. 
 
8.   
Vu l'issue du litige, il se justifie de mettre les frais judiciaires à la charge de la recourante (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens à A.________ (supra consid. 1.2) (art. 68 al. 1 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours joint est irrecevable. 
 
2.   
Le recours en matière de droit public est partiellement admis. Le chiffre 3 de la décision de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, du 20 septembre 2016 est réformé en ce sens que la Fondation institution supplétive LPP est condamnée à payer à A.________ trois quarts de rente dès le 1 er novembre 2011, puis une demi-rente d'invalidité dès le 1 er juin 2013, majorées d'un intérêt de 5 % l'an dès le 8 février 2016, assorties des rentes pour enfants. Le recours est rejeté pour le surplus.  
 
3.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante. 
 
4.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties, à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre des assurances sociales, et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
 
 
Lucerne, le 14 juillet 2017 
 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Pfiffner 
 
Le Greffier : Bleicker