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Eidgenössisches Versicherungsgericht 
Tribunale federale delle assicurazioni 
Tribunal federal d'assicuranzas 
 
Cour des assurances sociales 
du Tribunal fédéral 
 
Cause 
{T 7} 
I 493/04 
 
Arrêt du 13 avril 2005 
IIIe Chambre 
 
Composition 
Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Kernen. Greffier : M. Piguet 
 
Parties 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant, 
 
contre 
 
P.________, intimé 
 
Instance précédente 
Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne 
 
(Jugement du 10 février 2004) 
 
Faits: 
A. 
P.________, né en 1963, travaillait en qualité d'employé d'exploitation au service X.________. Le 22 septembre 1998, il a été victime d'une chute sur son lieu de travail, qui a entraîné une contusion au genou gauche motivant une intervention chirurgicale. Il n'a plus travaillé depuis lors, si ce n'est durant une tentative de reprise à mi-temps du 22 décembre 1998 au 4 janvier 1999. 
Le 26 novembre 1999, P.________ a présenté une demande de prestations de l'assurance-invalidité, tendant à l'octroi d'une orientation professionnelle, d'un reclassement dans une nouvelle profession et, subsidiairement, d'une rente. Il alléguait souffrir de problèmes cardiaques. Procédant à l'instruction de la demande, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'office AI) a recueilli divers avis médicaux, dont deux rapports établis à la demande du service médical de X.________. Selon le docteur B.________, spécialiste en médecine interne et médecin attitré du service X.________, l'assuré souffrait de douleurs thoraciques atypiques, pouvant correspondre à un trouble somatoforme douloureux, probablement associé à un état dépressif, ainsi que d'une hypertension artérielle, d'un bloc de branche droit plus hémibloc antérieur gauche limite, d'une obésité et d'une suspicion d'hypothyroïdie subclinique; à son avis, les raisons pour lesquelles l'assuré était incapable de travailler, étaient principalement d'ordre psychologique (rapport du 17 mai 2000). Le docteur G.________, spécialiste en psychiatrie, a, quant à lui, diagnostiqué un trouble panique (F41.0), un épisode dépressif moyen (F32.1) et un trouble somatoforme (F45.9); en l'état, l'assuré disposait d'une capacité de travail quasiment nulle (rapport d'expertise du 28 novembre 2000). 
Après avoir soumis le cas pour appréciation au Service médical régional AI (SMR), pour qui il n'y avait pas de limitations fonctionnelles justifiant une incapacité de travail dans l'activité d'employé d'exploitation du service X.________, l'office AI a rejeté le 13 juin 2001 la demande de prestations. 
B. 
P.________ a déféré la décision de l'office AI au Tribunal des assurances du canton de Vaud. En cours de procédure, la juridiction cantonale a fait produire un nouveau rapport du docteur B.________, duquel il ressortait que la situation médicale de l'assuré n'avait pas évolué depuis le 17 mai 2000; l'incapacité de travail était « totale et durable, si ce n'est définitive » (rapport du 27 décembre 2001). 
Par jugement du 10 février 2004, notifié à l'assuré le 10 août 2004, la juridiction cantonale a admis le recours et renvoyé le dossier à l'office AI pour nouvelle décision au sens des considérants. Elle a estimé que l'incapacité de travail était totale et que l'assuré avait droit à une rente entière d'invalidité. 
C. 
L'office AI interjette recours de droit administratif contre ce jugement, dont il requiert l'annulation, concluant à ce que soit ordonné la mise en oeuvre d'une expertise pluridisciplinaire. 
P.________ conclut, implicitement, au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
Considérant en droit: 
1. 
Le litige porte sur le droit de l'assuré à une rente de l'assurance-invalidité, singulièrement sur le degré d'invalidité qu'il présente. 
2. 
Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales, dans leur teneur en vigueur au jour de la décision litigieuse, à savoir le 13 juin 2001, et les principes jurisprudentiels relatifs à la notion d'invalidité (art. 4 LAI), l'échelonnement des rentes selon le taux d'invalidité (art. 28 al. 1 LAI), ainsi que la valeur probante des rapports et expertises médicaux (ATF 125 V 352 consid. 3a et les références). Il convient donc d'y renvoyer. 
On précisera que la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA), entrée en vigueur le 1er janvier 2003, de même que les dispositions de la novelle du 21 mars 2003 modifiant la LAI (4ème révision), entrée en vigueur le 1er janvier 2004, ne sont pas applicables au présent litige (ATF 129 V 4 consid. 1.2, 398 consid. 1.1 et les références). 
3. 
Au regard de l'ensemble de la documentation médicale figurant au dossier, il ressort que l'assuré ne souffre d'aucune atteinte à la santé physique propre, à elle seule, à entraîner une incapacité de travail et de gain d'une certaine importance. Il s'agit d'examiner en l'espèce si l'assuré présente une atteinte invalidante à la santé psychique. 
4. 
4.1 Selon le docteur G.________, l'assuré ressentait des douleurs rétrosternales perçues comme un serrement, accompagnées de difficultés respiratoires et d'un sentiment de manquer d'air; à cela s'ajoutait une fatigue intense, une perte de force subite et des pulsations cardiaques accélérées, avec des fourmillements dans les membres inférieurs et supérieurs. Lorsque l'assuré se promenait, il pouvait arriver qu'il se sente soudainement très mal; les crises duraient environ une demi-heure à une heure et survenaient entre deux fois par jour et deux fois par semaine. Sur la base de ces éléments, le docteur G.________ a estimé que l'incapacité de travail de l'assuré s'expliquait principalement par une symptomatologie d'attaques de panique qui faisaient suite à une série d'événements traumatiques (accident de la circulation, à la suite duquel son épouse était devenue hémiplégique et hémianopsique; décès de sa mère), à laquelle s'ajoutait une symptomatologie de douleurs thoraciques atypiques et une humeur dépressive. L'assuré disposait en l'état d'une capacité de travail quasiment nulle. 
4.2 Sur la base de cette expertise, la juridiction cantonale a conclu que l'assuré était incapable de travailler et qu'il avait droit à une rente entière d'invalidité. Elle a estimé d'une part, que l'assuré souffrait d'un trouble panique qui en soi était invalidant et d'autre part, que les conditions posées par la jurisprudence pour la reconnaissance d'une incapacité de travail due à un trouble somatoforme étaient remplies: en effet, la présence d'une comorbidité psychiatrique d'une acuité et d'une durée importantes était établie sous la forme principalement d'un trouble panique, et, en second lieu, d'un état dépressif. 
4.3 De son côté, l'office AI conteste la pertinence du rapport d'expertise du docteur G.________, en s'appuyant sur la prise de position des docteurs B.________, V.________ et I.________, médecins au SMR. Selon eux, le diagnostic de trouble panique retenu par le docteur G.________ devait être écarté; l'assuré présentait uniquement les éléments constitutifs d'un trouble somatoforme douloureux, qui, en l'absence de tout autre pathologie indépendante et invalidante, ne pouvait être considéré comme invalidant. 
5. 
En l'espèce, c'est à juste titre que la juridiction cantonale a retenu les conclusions du docteur G.________, dont le rapport d'expertise remplit toutes les conditions auxquelles la jurisprudence soumet la valeur probante d'un tel document. 
A cet égard, le rapport des médecins du SMR n'est pas de nature à remettre en cause ce point de vue. Ce rapport se limite en effet à expliquer de manière très sommaire les raisons pour lesquelles il y aurait lieu, à la lumière de la Classification internationale des troubles mentaux et des troubles du comportement CIM-10 établie par l'OMS, d'écarter certains diagnostics posés par le docteur G.________ et de ne retenir au final que l'existence d'un trouble somatoforme douloureux. Cette appréciation ne repose toutefois sur aucune analyse circonstanciée de la situation médicale de l'assuré, qui tiendrait compte des plaintes exprimées ou de constatations objectives ressortant du dossier médical. Insuffisamment motivée, elle ne saurait avoir une quelconque valeur probante pour porter un jugement valable sur le droit litigieux. Si sur la base de cette analyse médicale, l'office AI doutait de la pertinence des conclusions de l'expertise psychiatrique, il lui incombait de procéder à un complément d'instruction sous la forme d'une nouvelle expertise. L'office AI semble d'ailleurs l'avoir bien compris, puisqu'il requiert une telle mesure devant la Cour de céans. Or, dans le cas particulier, il n'existe aucun indice au dossier susceptible de mettre en doute la crédibilité des constatations et conclusions de l'expert, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise. 
Partant, le jugement entrepris n'est pas critiquable et le recours se révèle mal fondé. 
6. 
6.1 Le docteur G.________ a indiqué dans son rapport d'expertise qu'un traitement pharmacologique ciblé sur le trouble panique devait être instauré, éventuellement de concert avec une thérapie cognitivo-comportementale. De l'avis de ce médecin, ce n'est qu'à la suite de ce traitement thérapeutique que l'on pourrait juger de l'amélioration symptomatique et estimer, en fonction de l'état de santé de l'assuré et d'une symptomatologie résiduelle éventuelle, la possibilité de la reprise d'une activité professionnelle et des éventuelles limitations à prendre en considération. 
6.2 Il est admis dans la littérature médicale que le traitement préconisé par le docteur G.________ (thérapie cognitivo-comportementale associée à un traitement médicamenteux) est propre à soulager de manière importante une personne atteinte d'un trouble panique (voir notamment Hell/Endrass/Vontobel, Kurzes Lehrbuch der Psychiatrie, Berne 2003, p. 135 ss; Margraf/Becker, Angststörungen, in Psychische Störungen und ihre Behandlungen, Berne 1997, p. 256 ss). Or, selon la jurisprudence, un assuré doit, avant de requérir des prestations, entreprendre de son propre chef tout ce qu'on peut raisonnablement attendre de lui, pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité (sur ce principe général du droit des assurances sociales, voir ATF 123 V 233 consid. 3c, 117 V 278 consid. 2b, 400 consid. 4b et les arrêts cités; Riemer-Kafka, Die Pflicht zur Selbstverantwortung, Fribourg 1999, p. 57, 551 et 572; Landolt, Das Zumutbarkeitsprinzip im schweizerischen Sozialversicherungsrecht, thèse, Zurich 1995, p. 61). 
6.3 Compte tenu de ces éléments, on peut raisonnablement exiger que l'assuré se soumette à une mesure thérapeutique, qui est susceptible de lui faire retrouver une capacité de travail et de gain importante et lui permettrait de réintégrer le monde du travail encore durant plus de vingt ans. Bien que le docteur B.________ ait émis d'importantes réserves sur la réussite d'une telle mesure, il n'en demeure pas moins qu'il est à l'heure actuelle prématuré de poser un pronostic professionnel définitif dans le sens d'une incapacité de travail totale et irrémédiable, alors même qu'aucun traitement thérapeutique n'a été sérieusement entrepris. 
Il appartient dès lors à l'office AI de demander à l'assuré qu'il entreprenne les mesures thérapeutiques préconisées par le docteur G.________. En cas de refus de sa part, il mettra en oeuvre la procédure de sommation prévue à l'art. 21 al. 4 LPGA (applicable à ce jour), en vertu de laquelle les prestations peuvent être réduites ou refusées temporairement ou définitivement si l'assuré se soustrait ou s'oppose, dans les limites de ce qui peut être exigé de lui, à un traitement raisonnablement exigible et susceptible d'améliorer notablement sa capacité de travail ou d'offrir une nouvelle capacité de gain (voir aussi ATF 122 V 218). 
Il n'en reste pas moins que pour la période écoulée, l'assuré a acquis un droit à une rente entière de l'assurance-invalidité, qui subsistera aussi longtemps que l'incapacité de gain n'a pas été effectivement supprimée, ou diminuée, dans une mesure sensible pour le droit à la rente par des mesures thérapeutiques appropriées, ou jusqu'à ce que, sur la base de la procédure de sommation, on puisse sanctionner le refus d'entreprendre ces mesures (voir VSI 1997 p. 43 consid. 5c). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce: 
1. 
Le recours est rejeté au sens des considérants. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
3. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 13 avril 2005 
Au nom du Tribunal fédéral des assurances 
La Présidente de la IIIe Chambre: Le Greffier: