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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
1A.73/2005 /col 
 
Arrêt du 11 août 2005 
Ire Cour de droit public 
 
Composition 
MM. les Juges Féraud, Président, 
Aeschlimann et Reeb. 
Greffier: M. Jomini. 
 
Parties 
Succession répudiée de A.________, en liquidation par voie de faillite, recourante, 
représentée par Me Viviane J. Martin, avocate, 
 
contre 
 
Commune de Sion, Hôtel de Ville, 1950 Sion, intimée, 
Tribunal cantonal du canton du Valais, Cour de droit public, Palais de Justice, avenue Mathieu-Schiner 1, 
1950 Sion 2. 
 
Objet 
expropriation matérielle, 
 
recours de droit administratif contre l'arrêt de la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du Valais du 18 février 2005. 
 
Faits: 
A. 
Feu A.________ a acheté le 27 juillet 1988 la parcelle n° 15035 du registre foncier, sur le territoire de la commune de Sion, à proximité de l'aéroport de cette ville. Cette parcelle a une surface de 74'531 m². A la date de l'acquisition, l'ancien plan des zones de la commune de Sion, qui avait été adopté en 1963, était en vigueur. D'après ce plan, la parcelle n° 15035 était classée pour partie en zone industrielle (à raison de 26'726 m²) - zone réservée d'une part aux établissements industriels et entrepôts, et d'autre part à la place d'aviation, aux casernes et aux places de tir (art. 68 du règlement communal des constructions de 1963) - et pour le reste en zone agricole. 
B. 
Le conseil municipal (ou municipalité) de Sion a élaboré, puis mis à l'enquête publique en 1987, un nouveau plan d'affectation général (plan d'aménagement local, PAL). Ce plan classe la partie nord de la parcelle n° 15035 (45'825 m², comprenant les 26'726 m² de l'ancienne zone industrielle) en zone d'intérêt général B, le solde étant maintenu en zone agricole. A cet endroit, la zone d'intérêt général B est une bande de terrain qui longe la piste de l'aéroport de Sion. Cette zone est définie ainsi à l'art. 70 du nouveau règlement communal de construction et de zones (RCCZ): 
"Zones d'intérêt général B. 
 
Ces zones délimitent des terrains destinés principalement à des aménagements et installations d'intérêt général spécifique (terrains d'exercice et d'aviation, ainsi que les constructions qui leur sont liées)." 
Dans ce secteur du territoire communal, le nouveau plan d'aménagement local est entré en vigueur le 28 juin 1989, à la date de son homologation par le Conseil d'Etat. 
C. 
Les autorités communales ont envisagé l'établissement d'un plan de structuration du secteur de l'aéroport. A titre conservatoire, elles ont adopté le 8 novembre 1990 une zone réservée, au sens de l'art. 27 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700), qui a déployé ses effets jusqu'au 23 novembre 1992. La parcelle n° 15035, à tout le moins la partie classée en zone d'intérêt général B, était incluse dans le périmètre de cette zone réservée. 
D. 
En 1987, la société anonyme X.________, à Sion, dont A.________ était actionnaire et administrateur, a déposé une demande d'autorisation de construire pour un projet de halles industrielles avec structure d'accueil sur la parcelle n° 15035 (projet dont certains éléments ont été modifiés à plusieurs reprises). Le conseil municipal a suspendu l'examen de cette demande durant la procédure d'élaboration du nouveau plan d'aménagement local. Le 6 décembre 1990, cette autorité a refusé l'autorisation, en invoquant la réglementation de la zone réservée. A.________ a recouru en vain contre cette décision auprès du Conseil d'Etat, qui a statué le 9 octobre 1991. 
E. 
En 1990, la commune de Sion a envisagé d'exproprier la parcelle n° 15035, mais elle a renoncé à cette acquisition. Invitée en 1992 par A.________ à réexaminer la question, la commune lui a répondu, le 25 janvier 1993, que les projets d'extension de l'aéroport étaient différés. 
F. 
Le 19 septembre 1994, A.________ s'est adressé à la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement en demandant l'ouverture d'une procédure dans laquelle il serait statué sur ses prétentions à une indemnité d'expropriation formelle ou matérielle. Cette Commission fédérale est entrée en matière et, par une décision datée des 15 janvier et 24 juin 1996, elle a condamné la commune de Sion à payer à A.________ une indemnité de 4'522'900 fr., plus intérêts et frais, pour expropriation matérielle. La commune de Sion a formé contre cette décision un recours de droit administratif que le Tribunal fédéral a admis par un arrêt rendu le 20 février 1997 (cause E.15/1996); il a prononcé que la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement n'était pas compétente pour statuer sur les prétentions de A.________. Ce dernier a demandé en vain la révision de l'arrêt du Tribunal fédéral (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1E.5/1997 du 8 avril 1997). 
G. 
Le 18 décembre 1998, A.________ a soumis au Conseil d'Etat des conclusions en paiement, par la commune de Sion, d'une indemnité d'expropriation matérielle. Il a précisé ses prétentions le 18 mars 1999 (6'672'000 fr. + 185'000 fr. pour les frais de plans). 
Conformément à l'art. 6 de la loi cantonale du 1er décembre 1887 concernant les expropriations pour cause d'utilité publique (LEx/VS), par renvoi de l'art. 16 al. 2 de la loi cantonale concernant l'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LcAT), une commission d'experts (commission d'estimation) a été désignée par le Conseil d'Etat pour statuer sur ces prétentions. 
A.________ est décédé le 16 août 2000. Le 26 septembre 2001, le Juge de paix de la République et canton de Genève a désigné un curateur de la succession et l'a autorisé à intervenir dans la procédure pendante, par l'intermédiaire de l'avocate auparavant mandatée par le défunt. 
La commission d'estimation a intégralement rejeté les prétentions de feu A.________ par une décision rendue le 30 janvier 2002. Elle a considéré en particulier ce qui suit (consid. 2d): 
"Une grande partie du n° 15035 a passé de la zone industrielle en zone d'intérêt général B. La différence principale entre ces deux zones réside dans le type de construction qui peut y être érigé. Si le RCC de 1963 permettait la création d'établissements industriels ou entrepôts sans autres restrictions, la zone d'intérêt général B n'autorise que la construction d'établissements ou entrepôts liés à l'aviation ou à des terrains d'exercice. Certes, le requérant pouvait avec le régime de 1963 prévoir la construction de n'importe quel type de halles industrielles alors que le PAL ne le lui permet plus. Néanmoins, le requérant n'avait pas fait usage de l'avantage que lui conférait l'ancien règlement. En effet, le projet déposé à l'enquête publique ne prévoit que des constructions de type aéroportuaire, ce que le requérant a toujours admis. La construction d'un hôtel, même si elle a été discutée, n'a jamais fait l'objet d'une requête en autorisation de construire. Comme le relève à juste titre la commune de Sion dans sa réponse, le projet de construction déposé par A.________ est conforme à la nouvelle zone d'intérêt général B. Il ne comporte en effet que des constructions à caractère industriel, liées à l'aéroport. Ainsi, le requérant ne saurait prétendre que l'usage de son terrain est restreint ou interdit de façon particulièrement grave ou que la nouvelle zone l'aurait privé d'une faculté essentielle de son droit de propriété. L'usage futur prévisible qui théoriquement permet à un propriétaire de réclamer, le cas échéant, le versement d'une indemnité est en l'espèce toujours possible." 
La commission d'estimation a par ailleurs exposé que même en retenant l'hypothèse d'une "restriction partielle du droit de propriété, considéré in abstracto", le changement d'affectation intervenu en 1989 - qualifié de refus de classement, et non pas de déclassement, car la zone industrielle de 1963 n'était pas une zone conforme aux prescriptions du droit fédéral sur les zones à bâtir - ne donnait pas lieu au versement d'une indemnité d'expropriation matérielle. 
H. 
Le 20 février 2002, la succession de A.________ a formé une réclamation (demande de révision) contre la décision de la commission d'estimation. En vertu des art. 10 ss LEx/VS, une commission de révision, composée de trois nouveaux experts, a été désignée par le Conseil d'Etat puis chargée de statuer sur cette réclamation. 
Le 18 juin 2002, la liquidation de la succession selon les règles de la faillite a été ordonnée, les héritiers de A.________ l'ayant répudiée. L'assemblée des créanciers a désigné une administration spéciale, qui a décidé le 16 octobre 2002 de poursuivre la procédure devant la commission de révision, en donnant mandat pour cela à l'avocate de la succession. 
La commission de révision a rendu sa décision le 27 août 2004, après une inspection des lieux (le 28 novembre 2003) et l'audition d'un témoin (le 10 mars 2004). Elle a rejeté la demande de révision en considérant en substance que, dès lors que le plan des zones de 1963 n'était pas conforme à la LAT, le changement d'affectation de la parcelle n° 15035 était un refus de classement, au sens de la jurisprudence sur l'expropriation matérielle; une telle mesure n'est constitutive d'expropriation matérielle qu'à certaines conditions, non réalisées en l'espèce. 
I. 
La succession répudiée de A.________ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal cantonal du canton du Valais, en concluant à son annulation ainsi qu'à la condamnation de la commune de Sion à lui payer une indemnité de 6'681'000 fr., avec intérêts dès le 28 juin 1989, pour expropriation matérielle, et 185'000 fr., avec intérêts dès le 1er janvier 1989, au titre du remboursement de frais de plans et d'architecte. La commune de Sion a conclu au rejet du recours. 
La Cour de droit public du Tribunal cantonal a rejeté le recours par un arrêt rendu le 18 février 2005. A l'instar de la commission de révision, la Cour a appliqué les principes jurisprudentiels relatifs à l'expropriation matérielle, notamment au refus de classement. Elle a par ailleurs considéré que, contrairement aux allégations des représentants de la succession, le Tribunal fédéral n'avait pas statué sur ces questions dans son arrêt E.15/1996 du 20 février 1997, qui traitait uniquement de la compétence de la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement. A propos du remboursement des frais de plans et d'architecte, la Cour de droit public a retenu qu'ils avaient été engagés par X.________, société actuellement liquidée (la faillite a été prononcée le 2 mai 1991), et non pas par A.________ personnellement. Enfin, la juridiction cantonale a estimé que la commission de révision avait fait preuve d'un "manque évident de célérité" dans le traitement de l'affaire mais que les droits de la succession n'avaient "nullement été prétérités"; le grief tiré d'un retard à statuer a donc été rejeté. 
J. 
Agissant par la voie du recours de droit administratif, la succession répudiée de A.________, en liquidation par voie de faillite, demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal cantonal et de condamner la commune de Sion à lui payer une indemnité d'expropriation matérielle de 6'681'500 fr. avec intérêts dès le 28 juin 1989, ainsi qu'une indemnité de 185'000 fr., avec intérêts dès le 1er janvier 1989, au titre du remboursement de frais de plans et honoraires d'architecte (au total, ces prétentions représentent selon elle en capital 12'285'775 fr.). Subsidiairement, elle conclut à ce que son recours de droit administratif soit traité comme un recours de droit public, tendant à l'annulation de l'arrêt attaqué, pour violation de droits constitutionnels des citoyens. La recourante se plaint d'une constatation manifestement incomplète des faits pertinents (art. 104 al. 1 let. b et art. 105 al. 2 OJ), d'une violation des règles du droit fédéral sur l'expropriation matérielle, d'une violation de la garantie de la propriété (art. 26 Cst.), d'une violation du droit d'être entendu, en relation avec la motivation de l'arrêt (art. 29 al. 2 Cst.), d'un retard à statuer (art. 29 al. 1 Cst. et art. 6 par. 1 CEDH), d'arbitraire et d'une violation des règles de la bonne foi (art. 9 Cst.). 
La commune de Sion conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet des recours de droit administratif et de droit public. 
Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral du développement territorial ont renoncé à déposer une réponse. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF 131 II 137 consid. 1 p. 140 et les arrêts cités). 
1.1 Aux termes de l'art. 34 al. 1 LAT, le recours de droit administratif au Tribunal fédéral (art. 97 ss OJ) est recevable contre les décisions prises par l'autorité cantonale de dernière instance sur des indemnisations résultant de restrictions apportées au droit de propriété. Cette disposition vise en particulier les jugements relatifs à des demandes d'indemnité pour expropriation matérielle (art. 5 al. 2 LAT, art. 26 al. 2 Cst. - cf. ATF 125 II 1 consid. 1 p. 4). Cette voie de recours a donc été choisie à bon escient dans le cas particulier. Il s'ensuit que la conversion du recours de droit administratif en recours de droit public, moyen par principe subsidiaire en vertu de l'art. 84 al. 2 OJ, est exclue. 
1.2 Dans les cas d'expropriation matérielle, le propriétaire de l'immeuble litigieux a un intérêt digne de protection à l'annulation d'une décision lui refusant une indemnisation et il a donc qualité pour recourir (art. 103 let. a OJ). Il en va de même, en l'espèce, de la succession de l'ancien propriétaire, succession liquidée par voie de faillite (art. 193 LP) au nom de laquelle agit une administration spéciale, qui a donné une procuration expresse à la mandataire auteur de l'acte de recours. Les autres conditions de recevabilité du recours de droit administratif sont manifestement remplies et il y a lieu d'entrer en matière. 
2. 
La recourante soutient que l'arrêt attaqué ne contient pas une motivation permettant de comprendre les motifs pour lesquels son recours contre le prononcé de la commission de révision a été rejeté. Elle reproche au Tribunal cantonal un déni de justice formel, en invoquant les garanties de l'art. 29 Cst. en matière de motivation des décisions. 
Ce grief est manifestement mal fondé. L'arrêt du Tribunal cantonal contient en effet une motivation assez détaillée, en fait et en droit, permettant à la recourante de se rendre compte de la portée de la décision prise à son encontre et de recourir contre elle en connaissance de cause. Les exigences de l'art. 29 al. 2 Cst. ne vont pas au-delà (cf. ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236; 126 I 15 consid. 2a/aa p. 17, 97 consid. 2b p. 102 et les arrêts cités). 
3. 
La recourante prétend avoir droit à une indemnité pour expropriation matérielle à cause du déclassement de la parcelle n° 15035 - plus précisément d'une partie de celle-ci, représentant 26'726 m² - lors de l'homologation par le Conseil d'Etat du nouveau plan d'aménagement local (PAL) de la commune le 28 juin 1989. 
3.1 Selon la jurisprudence, il y a expropriation matérielle au sens de l'art. 26 al. 2 Cst. (correspondant à l'art. 22ter al. 3 aCst.) et de l'art. 5 al. 2 LAT lorsque l'usage actuel d'une chose ou son usage futur prévisible est interdit ou restreint de manière particulièrement grave, de sorte que l'intéressé se trouve privé d'un attribut essentiel de son droit de propriété. Une atteinte de moindre importance peut aussi constituer une expropriation matérielle si elle frappe un ou plusieurs propriétaires d'une manière telle que, s'ils n'étaient pas indemnisés, ils devraient supporter un sacrifice par trop considérable en faveur de la collectivité, incompatible avec le principe de l'égalité de traitement. Dans l'un et l'autre cas, la protection ne s'étend à l'usage futur prévisible que dans la mesure où il apparaît, au moment déterminant, comme très probable dans un proche avenir. Par usage futur prévisible d'un bien-fonds, on entend généralement la possibilité de l'affecter à la construction (ATF 131 II 151 consid. 2.1 p. 155 et les arrêts cités). 
3.2 L'atteinte invoquée dans le recours est le classement d'une partie de la parcelle, auparavant en zone industrielle (selon le plan communal des zones de 1963), dans la zone d'intérêt général B. La recourante soutient que cela a privé le propriétaire foncier d'un attribut essentiel du droit de propriété car, selon elle, dans l'ancienne zone, les bâtiments pouvaient être construits pour servir des intérêts privés tandis que dans la nouvelle zone, les constructions peuvent être édifiées à la condition sine qua non qu'elles répondent à l'intérêt public, ce qui laisserait aux autorités un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou refuser un projet. 
3.2.1 La jurisprudence sur l'expropriation matérielle distingue généralement deux hypothèses, en relation avec une mesure d'aménagement du territoire consistant à interdire la construction sur un bien-fonds (par exemple, par l'affectation en zone agricole ou zone à protéger, ou encore par l'effet d'un plan d'alignements routiers). Il s'agit d'une part du refus de classement en zone à bâtir ("non-classement", "Nichteinzonung"), lorsque la modification d'un plan d'affectation, qui a pour effet de sortir une parcelle de la zone à bâtir où elle se trouvait auparavant (ou de supprimer toute possibilité de construction), intervient pour adapter ce plan aux exigences de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, entrée en vigueur en 1980; l'autre hypothèse est le déclassement ("Auszonung") d'un terrain propre à la construction selon les exigences de cette législation (cf. ATF 131 II 151 consid. 2.6 p. 160; 125 II 431 consid. 3b p. 433; 122 II 326 consid. 4c p. 330). Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal cantonal n'a retenu en l'espèce que l'hypothèse du refus de classement car le plan communal des zones de 1963 ne pouvait d'emblée pas être tenu pour un plan d'affectation conforme à la LAT. Sur cette base, le Tribunal cantonal a examiné les conditions auxquelles la jurisprudence soumet l'octroi d'une indemnité d'expropriation matérielle en cas de refus de classement; il est parvenu à la conclusion qu'aucune indemnité n'était due. 
Le Tribunal cantonal - comme, avant lui, la commission de révision - s'est ainsi abstenu de se prononcer sur la portée du classement du terrain litigieux dans la zone d'intérêt général B, en d'autres termes sur la question de savoir si cette mesure d'aménagement privait le propriétaire d'une faculté essentielle découlant du droit de propriété. Or c'est la première condition mise par la jurisprudence à la reconnaissance d'un cas d'expropriation matérielle. Cette question juridique doit être examinée d'office par le Tribunal fédéral. 
Il convient de préciser d'emblée que, contrairement à ce qui est prétendu dans le recours de droit administratif, cette question n'a pas déjà été résolue dans l'arrêt E.15/1996 du 20 février 1997. Dans cette affaire, le Tribunal fédéral s'était en effet borné à indiquer que, comme les prétentions du propriétaire de la parcelle litigieuse étaient fondées sur une modification du régime juridique applicable à la suite de la révision du plan d'affectation communal en 1989, elles devaient être soumises à l'autorité cantonale compétente, selon le droit cantonal, pour statuer sur les demandes d'indemnité pour expropriation matérielle (consid. 4 de l'arrêt précité). 
3.2.2 L'autorité qui impose une interdiction totale de construire sur un bien-fonds prive en principe son propriétaire d'une faculté essentielle découlant du droit de propriété. En revanche, l'adoption de règles d'affectation qui limitent, même de manière importante, les types de constructions admissibles n'est pas considérée comme une atteinte constitutive d'expropriation matérielle, si une utilisation favorable et économiquement raisonnable de l'immeuble demeure possible (ATF 123 II 481 consid. 6d p. 489; cf. à ce propos Enrico Riva, Commentaire LAT, Zurich 1999, art. 5 n. 164 ss). La date déterminante pour l'évaluation de ces possibilités d'utilisation est celle de l'entrée en vigueur de la restriction (ATF 121 II 417 consid. 3a p. 420; 119 Ib 229 consid. 3a p. 233; Riva, op. cit., art. 5 n. 181). 
3.2.3 Le régime de la zone d'intérêt général B est entré en vigueur, sur la parcelle litigieuse, le 28 juin 1989. Une zone réservée a été adoptée en novembre 1990 afin que l'établissement d'un plan d'affectation spécial (plan de structuration du secteur de l'aéroport) ne soit pas entravée; cette mesure provisoire n'a toutefois duré que deux ans et, en définitive, l'affectation de la parcelle litigieuse n'a ensuite pas été modifiée ni précisée. La date déterminante, du point de vue de l'expropriation matérielle, est donc bel et bien celle du 28 juin 1989. 
Le texte de l'art. 70 RCCZ, qui définit l'affectation de la zone d'intérêt général B, ne prévoit pas que - contrairement à ce qui est affirmé dans le recours - seules les constructions des collectivités publiques, ou servant directement aux collectivités publiques, puissent y être autorisées. La zone est destinée "principalement" à des "aménagements et installations d'intérêt général spécifique". Ce type d'aménagements ou installations n'est pas défini avec précision, mais l'art. 70 RCCZ indique que cette notion comprend les constructions liées à l'aviation. Celles-ci peuvent être édifiées et exploitées par des sociétés du secteur privé, qui utilisent les services de l'aéroport de Sion pour des activités aériennes civiles (transport de passagers et de marchandises). Il est allégué dans le recours de droit administratif qu'à la fin des années 1980, le propriétaire du bien-fonds litigieux, feu A.________, était actionnaire majoritaire et principal bailleur de fonds de la société aéronautique X.________, ayant son siège à Sion; afin de réaliser les infrastructures nécessaires à l'exploitation et au développement de cette société, A.________ projetait de construire un "complexe industrio-aéroportuaire" en bordure de l'aéroport de Sion. De telles constructions semblaient prima facie conformes à l'affectation de la zone d'intérêt général B. 
C'est la conclusion à laquelle est parvenue, dans la présente procédure, la première commission cantonale d'estimation, en se référant à l'interprétation que la commune de Sion avait faite de son propre règlement. Dans sa réponse au présent recours de droit administratif, cette commune cite également, à ce propos, la décision de la commission d'estimation, en déclarant "soutenir l'avis et la position" de cette autorité. Cette commune a du reste constamment exposé, dans ses déterminations sur les prétentions de la partie adverse, que le projet "industrio-aéroportuaire" de feu A.________ ou de X.________ n'était pas incompatible avec la destination de la zone d'intérêt général B, d'autres motifs ayant justifié le refus d'une autorisation de construire (d'abord l'empiétement du projet sur la zone agricole dans laquelle est partiellement classée la parcelle litigieuse, puis les effets de la zone réservée de novembre 1990 à novembre 1992). Cette interprétation de la portée de cette règle du plan d'affectation communal n'est pas contestée de manière concluante dans le recours, qui contient des affirmations contradictoires à ce sujet. 
La recourante fait valoir qu'en 1994 (après la liquidation de X.________), ni la commune ni aucun particulier n'étaient intéressés à acquérir la parcelle litigieuse, les perspectives de développement de l'aéroport s'étant modifiées (en raison notamment de l'abandon du projet d'organisation de jeux olympiques d'hiver). Cela ne signifie pas que le terrain litigieux, dont plus de 4 ha sont classés en zone d'intérêt général B, à proximité directe de l'aéroport, ne peut plus être vendu en vue de la réalisation d'un projet de construction conforme à l'affectation de la zone, définie somme toute en des termes assez larges compte tenu de l'emplacement du terrain. Les circonstances invoquées par la recourante, à propos de l'évolution subséquente de la situation économique ou des besoins en terrains constructibles, ne sont de toute manière pas décisives pour apprécier, à la date déterminante (le 28 juin 1989), les possibilités d'utilisation du bien-fonds. Il s'ensuit que les règles d'affectation ou restrictions entrées en vigueur à cette date n'étaient pas constitutives d'expropriation matérielle puisqu'une utilisation favorable et économiquement raisonnable du terrain litigieux demeurait possible. Cela justifie le rejet des prétentions en paiement d'une indemnité pour la moins-value de la partie de la parcelle litigieuse (26'726 m²) classée en zone d'intérêt général B après avoir été incluse dans la zone industrielle du plan de 1963. 
3.3 Compte tenu des possibilités d'utilisation offertes par la réglementation de la zone d'intérêt général B, l'octroi d'une indemnité d'expropriation matérielle en raison d'un sacrifice particulier, incompatible avec l'égalité de traitement (seconde catégorie de cas d'expropriation matérielle selon la jurisprudence - cf. supra, consid. 3.1), est lui aussi d'emblée exclu. 
3.4 Dès lors qu'il n'y a pas d'expropriation matérielle, et comme le changement d'affectation en 1989 n'empêchait pas la réalisation de bâtiments pour des activités liées à l'exploitation de l'aéroport, le remboursement de frais de plans ou de projets, sur la base de l'art. 26 al. 2 Cst. ou de l'art. 5 al. 2 LAT, n'entre manifestement pas en considération (cf. à ce propos Riva, op. cit., art. 5 n. 179). 
3.5 Il s'ensuit que le Tribunal cantonal n'a pas violé les règles du droit fédéral concernant l'expropriation matérielle (art. 5 al. 2 LAT) en refusant toute indemnité à ce titre. Il importe peu que ce refus soit fondé sur d'autres motifs juridiques, tirés du reste également de la jurisprudence relative à l'art. 5 al. 2 LAT. Les griefs de la recourante à ce sujet sont donc mal fondés. 
4. 
La recourante fait valoir que des assurances auraient été données à feu A.________, par les autorités cantonales et communales, au sujet de la réalisation de son projet de complexe "industrio-aéroportuaire". Elle reproche au Tribunal cantonal d'avoir omis des constatations de fait à ce propos; elle dénonce également une attitude arbitraire des autorités, un abus de droit ainsi qu'une violation des règles de la bonne foi ou du principe de la protection de la confiance. 
Ces griefs doivent être rejetés car ils sont étrangers à l'objet de la contestation. Par son argumentation, la recourante se plaint en réalité du refus d'une autorisation de construire, à laquelle le propriétaire de la parcelle litigieuse avait droit selon elle. Or il n'y a pas lieu, dans une procédure d'expropriation ouverte aux fins de statuer sur des prétentions pécuniaires résultant du changement d'affectation de la parcelle litigieuse en 1989, de se prononcer sur la validité de décisions administratives relatives à des demandes de permis de construire. 
5. 
La recourante se plaint enfin d'une violation de l'obligation de traiter une cause dans un délai raisonnable, en invoquant les art. 6 CEDH et 29 Cst. Elle relève que la première demande d'indemnité pour expropriation matérielle avait été déposée le 19 septembre 1994 devant la Commission fédérale d'estimation, puis que la procédure cantonale a été engagée le 15 décembre 1998, plus de six ans avant l'arrêt du Tribunal cantonal. 
5.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 Cst., toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable. Cette disposition consacre le principe de la célérité ou, en d'autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable. Il faut se fonder à ce propos sur des éléments objectifs; entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes (cf., à propos de l'art. 29 al. 1 Cst. et de la garantie correspondante déduite auparavant de l'art. 4 al. 1 aCst.: ATF 130 I 312 consid. 5.1-5.2 p. 331 s.; 125 V 188 consid. 2a p. 191, 373 consid. 2b/aa p. 375; 119 Ib 311 consid. 5b p. 325; 107 Ib 160 consid. 3c p. 165). L'art. 6 par. 1 CEDH n'offre pas, à cet égard, une protection plus étendue (ATF 130 I 312 consid. 5.1 p. 332). 
5.2 La recourante estime excessive la durée globale de la procédure. Or on ne saurait manifestement prendre en considération, de ce point de vue, la procédure ouverte devant la Commission fédérale d'estimation du 3e arrondissement, qui était incompétente (cf. arrêt E.15/1996 du 20 février 1997). Seule la durée des procédures cantonales successives est déterminante. 
5.3 En l'occurrence, conformément aux règles du droit cantonal de l'expropriation, les prétentions à une indemnité d'expropriation matérielle ont d'abord été annoncées au gouvernement cantonal. Une autorité juridictionnelle spéciale, la première commission d'estimation, a dû être constituée. Après que cette commission a rendu sa décision, la procédure de réclamation a été engagée, à nouveau devant le gouvernement cantonal qui a dû mettre en oeuvre une nouvelle autorité juridictionnelle, la commission de révision. Cette commission a revu l'affaire sans restriction de son pouvoir d'examen. Le droit cantonal prévoit encore une voie de recours au Tribunal cantonal. A cause de ces trois instances juridictionnelles successives, et dès lors que les commissions d'estimation et de révision, constituées de cas en cas, ne sont pas des autorités permanentes, la durée totale d'une procédure jusqu'à la décision cantonale finale, est nécessairement relativement importante. A cela s'ajoutent, dans le cas particulier, le décès du demandeur et la décision de liquider sa succession selon les règles de la faillite, circonstances qui imposaient la suspension de la procédure jusqu'à une prise de position des ayants droit. En tenant compte de l'ensemble de ces éléments, la durée totale de la procédure cantonale - du 18 décembre 1998 au 18 février 2005 - n'apparaît pas excessive. Le grief de violation des art. 29 al. 1 Cst. et 6 par. 1 CEDH est donc mal fondé. 
6. 
Il résulte des considérants que le recours de droit administratif doit être rejeté. 
La recourante, qui succombe, doit supporter les frais de la présente procédure. Un émolument judiciaire, fixé selon le tarif en fonction de la valeur litigieuse, sera donc mis à sa charge (art. 153, 153a et 156 al. 1 OJ). La commune intimée, qui n'a pas mandaté d'avocat, n'a pas droit à des dépens (art. 159 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours de droit administratif est rejeté. 
2. 
Un émolument judiciaire de 20'000 fr. est mis à la charge de la succession répudiée de A.________, en liquidation par voie de faillite. 
3. 
Il n'est pas alloué de dépens. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie à la mandataire de la recourante, à la commune de Sion, au Tribunal cantonal du canton du Valais, à l'Office fédéral du développement territorial, ainsi que, pour information, au Président de la commission cantonale de révision en matière d'expropriation, Me Pierre-Cyril Sauthier, avocat à Martigny. 
Lausanne, le 11 août 2005 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
Le président: Le greffier: