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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 0/2} 
4A_77/2011, 4A_571/2011 
 
Arrêt du 20 décembre 2011 
Ire Cour de droit civil 
 
Composition 
Mmes et M. les Juges Klett, Présidente, Corboz et Rottenberg Liatowitsch. 
Greffier: M. Piaget. 
 
Participants à la procédure 
X.________ SA, représentée par Me François Roux, 
recourante, 
 
contre 
 
Y.________, représenté par Me Eric Kaltenrieder, 
intimé. 
 
Objet 
responsabilité civile du détenteur de véhicule automobile, 
 
recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 19 avril 2011. 
 
Faits: 
 
A. 
Y.________ est né le 4 décembre 1948; marié, il est le père de deux enfants nés en 1977 et 1979. Dès 1973, il a travaillé pour V.________ SA, à ..., successivement en qualité de monteur d'échafaudages, de chef d'équipe et, dès janvier 1989, de directeur technique. Au mois de janvier 1993, Y.________ a réalisé un revenu brut de 5'120 fr. 
Le 8 février 1993, alors qu'il circulait au volant d'un véhicule appartenant à son employeur, Y.________ a été victime d'un accident de la route, heurté à l'avant gauche de son automobile par R.________, qui circulait en sens inverse en faisant preuve d'inattention et qui a dévié à gauche. 
A la suite de l'accident, Y.________ a été admis d'urgence à l'Hôpital de ... pour une fracture ouverte comminutive de la facette externe de la rotule droite sans rupture de l'appareil extenseur. Par la suite, les douleurs antéro-internes du genou droit ressenties par le lésé ont persisté malgré la rééducation entreprise. Le 26 mai 1993, le Dr A.________, chirurgien chef du service d'orthopédie de l'hôpital a pratiqué une arthroscopie du genou droit, laquelle a mis en évidence une lésion chondritique sévère de la rotule et condyle interne. 
L'assureur en responsabilité civile de R.________ était la compagnie Z.________, depuis lors reprise par X.________ SA. 
Il résulte d'un décompte de V.________ SA que Y.________ a perçu un salaire de 5'520 fr. brut en juin 1993. 
Début juillet 1993, Y.________ a pu reprendre à 100% son emploi chez V.________ SA. 
Le 21 juillet 1993, il a été examiné par le Dr B.________, médecin d'arrondissement de la CNA (Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, aujourd'hui SUVA) qui lui a reconnu une capacité de travail réduite; le médecin a précisé qu'après "3 à 4 semaines, cette capacité pourra être augmentée à 75%". 
Le 26 août 1994, le Dr C.________ a établi un rapport au terme duquel il reconnaît au lésé une capacité de travail de 75% dans son activité actuelle. 
Le 30 décembre 1994, Y.________ a perdu son emploi au sein de V.________ SA, soit quelques mois avant la faillite de cette société. 
Dès le 1er janvier 1995, il a été engagé à 100% en qualité de responsable technique par l'entreprise W.________ SA. Il avait la responsabilité de neuf à dix équipes. Son salaire mensuel, déterminé en tenant compte de ses compétences professionnelles reconnues dans le milieu, s'élevait à 7'500 fr. brut (soit 6'500 fr. net), servis treize fois l'an. Le salaire a été fixé, d'entente entre les parties, en tenant compte d'une diminution de rendement de l'employé de l'ordre de 15% en raison des séquelles de l'accident du 8 février 1993. Il a été constaté que, sans cette déduction, le salaire net de Y.________ se serait élevé à 7'475 fr. 
Le 9 janvier 1995, la CNA a rendu une décision dans laquelle elle admettait une diminution de la capacité de gain du lésé de 10%. 
Le 29 mai 1996, W.________ SA a licencié Y.________, avec effet au 31 juillet 1996. La société a informé la CNA de l'aggravation des douleurs ressenties par Y.________. Il a été retenu que le licenciement a été donné en raison du rendement insuffisant du lésé dû aux séquelles de l'accident. Y.________ a alors perçu des prestations de l'assurance chômage. 
Le 4 juillet 1996, il a déposé une demande de prestations de l'assurance-invalidité (AI). 
Il a été hospitalisé, pour diverses interventions, du 23 au 26 juillet 1996 dans le Service d'orthopédie et de traumatologie de l'appareil moteur de l'Hôpital orthopédique de .... Le 19 septembre 1996, le Prof. C.________, chef de ce service, a établi un rapport faisant état d'une incapacité de travail du lésé à 100% depuis le 23 juillet 1996 et à 50% dès le 30 août 1996. 
Y.________ a été hospitalisé, pour une nouvelle intervention, dans le même service du 15 au 20 janvier 1997. Dans un nouveau rapport daté du 21 mars 1997, le Prof. C.________ a indiqué que son patient serait capable de reprendre son ancienne activité, d'abord à 50% pour un mois, puis ensuite à 100%. 
En octobre 1998, Y.________ a retrouvé du travail en tant que chauffeur dans l'entreprise U.________ (activité adaptée à 50% préconisée par les médecins et l'AI). 
Par décision du 1er décembre 1998, la SUVA a indiqué à Y.________ qu'elle admettait un taux d'incapacité de gain de 50% depuis le 1er octobre 1998. Elle lui a en outre alloué un complément d'indemnité pour atteinte à l'intégrité de 10%. 
L'Office d'assurance-invalidité pour le canton de Vaud ayant rejeté sa demande, Y.________ a recouru auprès du Tribunal des assurances. Celui-ci, par jugement du 17 novembre 1999, a admis le recours. Il a reconnu au lésé un taux d'invalidité de 54% et lui a octroyé une demi-rente d'invalidité depuis le 1er mai 1998. 
 
B. 
Par demande du 1er décembre 2003, Y.________ a conclu, avec suite de frais et dépens, à ce que X.________ SA soit condamnée à lui verser la somme de 653'213 fr. 80, intérêts en sus, laquelle se décompose en divers postes de dommages consécutifs à l'accident. 
Dans sa réponse du 19 mai 2004, la défenderesse a conclu au rejet de la demande. 
En cours d'instruction, une expertise médicale a été confiée au Dr D.________ qui a déposé son rapport le 25 août 2006. Il en ressort que l'intimé, dans la profession de chauffeur de taxi (activité adaptée préconisée par le Tribunal des assurances), a une capacité de travail de 50%. Il précise que l'invalidité du lésé est due pour moitié à une mauvaise fonction de l'articulation fémoro-rotulienne (due à l'accident) et pour moitié à l'existence d'une lésion fémoro-tibiale préexistante (qui se serait développée indépendamment de l'accident). 
Une expertise comptable a été confiée à S.________, expert-comptable. Il a déposé son rapport le 11 septembre 2006 et un rapport complémentaire le 8 août 2007. 
Par jugement du 15 janvier 2010, la Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a condamné X.________ SA à payer au demandeur, sous déduction d'un montant de 60'000 fr. déjà versé, les sommes suivantes, assorties de différents intérêts: 396'461 fr. 50 comme perte de gain subie du 1er novembre 1996 au 15 janvier 2010, 86'993 fr. 30 pour la perte de gain future, 10'280 fr. au titre du tort moral éprouvé, et 18'000 fr. s'agissant du dommage encouru en raison des frais d'avocat. 
 
C. 
La compagnie d'assurances a exercé un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010. Elle a conclu, principalement, à sa réforme en ce sens que les conclusions de Y.________ sont rejetées et, subsidiairement, à son annulation et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision. Elle fait grief à la Cour civile d'avoir violé le droit fédéral dans la détermination du dommage en cas de prédisposition constitutionnelle (art. 42 et 44 CO), dans l'application du principe du droit préférentiel du lésé et dans le calcul des honoraires avant procès. Elle lui reproche aussi une appréciation arbitraire des preuves. 
Parallèlement, la recourante a interjeté un recours, prenant des conclusions en réforme et en nullité, auprès de la Chambre des recours du Tribunal cantonal, qui l'a rejeté par arrêt du 19 avril 2011. Elle a alors formé un recours complémentaire en matière civile au Tribunal fédéral, reprenant les conclusions déjà formulées dans son recours contre le jugement de la Cour civile. La recourante, qui estime que la Chambre des recours aurait dû se prononcer sur sa conclusion en réforme, lui reproche également, dans son recours en nullité, une appréciation arbitraire des preuves. 
Dans ses réponses, l'intimé conclut au rejet des recours. 
 
Considérant en droit: 
 
1. 
1.1 Vu leur connexité évidente, les deux recours, l'un dirigé contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010 et l'autre contre l'arrêt de la Chambre des recours du 19 avril 2011, doivent être traités dans un seul et même arrêt. 
 
1.2 Les recours sont interjetés par la partie qui a succombé dans ses conclusions libératoires (art. 76 al. 1 LTF), dans une cause relevant de la matière civile au sens de l'art. 72 al. 1 LTF. Ils sont dirigés contre des décisions finales (art. 90 LTF). Compte tenu des dernières conclusions prises, il s'agit d'une affaire pécuniaire dont la valeur litigieuse atteint largement le seuil de 30'000 fr. (art. 74 al. 1 let. b LTF). Les recours ont été déposés dans la forme requise (art. 42 LTF). 
La recourante considère que la Chambre des recours aurait dû tenir compte de sa conclusion en réforme et contrôler l'application du droit fédéral entreprise par la Cour civile. Dans une longue argumentation, elle tente de démontrer que le délai de l'art. 130 al. 2 aLTF était échu, la Chambre des recours ayant statué le 19 avril 2011, et qu'il en résulte que cette dernière autorité devait, en tant que tribunal de dernière instance (art. 75 al. 1 LTF), examiner complètement le jugement de la Cour civile. On ne saurait la suivre. Dans la présente affaire, le dispositif écrit du jugement de la Cour civile a été adressé aux parties le 27 janvier 2010 déjà, soit avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2011, du nouveau Code de procédure civile suisse (CPC). La communication déterminante selon l'art. 405 al. 1 CPC est donc intervenue en 2010 (de même d'ailleurs que la motivation écrite envoyée le 16 décembre 2010). Il s'ensuit que le jugement de la Cour civile n'est pas susceptible de l'appel prévu par l'art. 308 CPC (ATF 137 III 127 consid. 1 et 2 p. 128 ss). Le recours au Tribunal fédéral est alors recevable au regard de l'art. 75 al. 1 LTF et le délai de recours se calcule selon l'art. 100 al. 1 LTF, ou, le cas échéant, selon l'art. 100 al. 6 aLTF, en vigueur au moment de la communication (cf. ATF 137 III 127 consid. 1 et 2 p. 128 ss; sur l'ensemble de la question: DENIS TAPPY, Le droit transitoire applicable lors de l'introduction de la nouvelle procédure civile unifiée, JdT 2010 III 11, p. 45 s.). 
La recourante s'appuie sur diverses décisions rendues par la IIe Cour civile du Tribunal fédéral (arrêt 5A_162/2011 du 19 avril 2011; arrêt 5A_108/2011 du 27 avril 2011; arrêt 5A_243/2011 du 27 avril 2011; arrêt 5A_459/2011 du 15 août 2011) pour insister sur le fait que, le délai transitoire étant échu, l'art. 75 al. 2 LTF devait être immédiatement respecté par les cantons. Ces précédents ne lui sont d'aucune aide puisque les décisions cantonales alors examinées par le Tribunal fédéral ont toutes été communiquées aux parties après le 31 décembre 2010. 
En l'espèce, les recours ont été formés dans les trente jours à compter de la notification complète de la deuxième décision (art. 48 al. 1, 100 al. 1 LTF et 100 al. 6 aLTF; pour un cas similaire récent: arrêt 4A_239/2011 du 22 novembre 2011 consid. 1.1). 
Les deux recours en matière civile sont donc recevables. L'exigence de l'épuisement des instances cantonales (art. 75 LTF) implique cependant que la recourante ne peut pas invoquer, à l'encontre du jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010, des griefs qu'elle pouvait encore soumettre à la Chambre des recours par la voie du recours en nullité; pour ces griefs, seul l'arrêt de la Chambre des recours du 19 avril 2011 est susceptible d'être attaqué dans le cadre du second recours (cf. ATF 133 III 585 consid. 3 p. 586 ss; arrêt 4A_186/2009 du 3 mars 2010 consid. 1.2). 
 
1.3 Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF
Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Compte tenu de l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 1 et 2 LTF, sous peine d'irrecevabilité (art. 108 al. 1 let. b LTF), le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués; il n'est pas tenu de traiter, comme le ferait une autorité de première instance, toutes les questions juridiques qui se posent, lorsque celles-ci ne sont plus discutées devant lui (ATF 135 III 397 consid. 1.4 p. 400). Par exception à la règle selon laquelle il applique le droit d'office, il ne peut entrer en matière sur la violation d'un droit constitutionnel ou sur une question relevant du droit cantonal ou intercantonal que si le grief a été invoqué et motivé de manière précise par la partie recourante (art. 106 al. 2 LTF). 
 
1.4 Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 314; 135 III 127 consid. 1.5 p. 130, 397 consid. 1.5 p. 401) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). 
La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 133 IV 286 consid. 1.4 et 6.2). 
 
Recours contre l'arrêt de la Chambre des recours du 19 avril 2011 
 
2. 
2.1 La recourante invoque une violation de l'interdiction de l'arbitraire dans l'établissement des faits et l'appréciation des preuves (art. 9 Cst.). Elle souligne avoir déjà développé ce grief dans son recours contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010 et elle y renvoie "dans la mesure utile". 
Les développements juridiques contenus dans le recours doivent porter sur des motifs déterminés de la décision attaquée (arrêt 4A_72/2007 du 22 août 2007 consid. 4.1.1 et la référence citée). La recourante est tenue de développer la motivation dans son mémoire de recours, de sorte qu'un renvoi au recours formé contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010, contre lequel la recourante pouvait encore faire valoir le grief de l'arbitraire à la Chambre des recours, ne suffit pas au regard de l'art. 42 al. 1 et 2 LTF. En effet, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de compléter lui-même l'acte de recours formé contre l'arrêt de la Chambre des recours en sélectionnant, dans le mémoire de recours exercé contre le premier jugement cantonal, les arguments qui seraient encore valables consécutivement à la décision de la Chambre des recours et qui seraient susceptibles de soutenir l'argumentation de la recourante à l'encontre de cette décision (arrêt 4A_186/2009 du 3 mars 2010 consid. 2.1 et les références). Dans la mesure où la recourante renvoie au recours interjeté contre le jugement de la Cour civile, son argumentation ne peut pas être prise en considération. 
 
2.2 La recourante observe que le taux d'invalidité médico-théorique n'a pas été établi par la Chambre des recours. Elle soutient que celle-ci a sombré dans l'arbitraire en se basant sur la capacité de travail subsistante du lésé, constatée par l'expert judiciaire, pour déterminer le taux d'invalidité médico-théorique. Elle souligne qu'il aurait au contraire fallu commencer par fixer ce dernier taux, l'incapacité de travail découlant ensuite de celui-ci. 
2.2.1 En vertu de l'art. 46 al. 1 CO, applicable par le renvoi de l'art. 62 al. 1 LCR, la victime de lésions corporelles a droit au remboursement des frais et aux dommages-intérêts qui résultent de son incapacité de travail totale ou partielle, ainsi que de l'atteinte portée à son avenir économique. 
Le préjudice s'entend au sens économique. Est donc déterminante la diminution de la capacité de gain. Le dommage consécutif à l'invalidité doit, autant que possible, être établi de manière concrète. Le juge partira du taux d'invalidité médicale (ou théorique) - question qui relève du fait (arrêt 4C.101/2004 du 29 juin 2004 consid. 3.2.1) - et recherchera ses effets sur la capacité de gain ou l'avenir économique du lésé; cette démarche l'amènera à estimer le gain que le lésé aurait obtenu dans son activité professionnelle s'il n'avait pas subi l'accident (ATF 131 III 360 consid. 5.1 p. 363 et les arrêts cités; arrêt 4A_169/2010 du 23 août 2010 consid. 4.3.1, in JdT 2010 I p. 551). 
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, la décision n'est arbitraire que si le juge n'a manifestement pas compris le sens et la portée d'un moyen de preuve, s'il a omis, sans raison sérieuse, de tenir compte d'un moyen important propre à modifier la décision attaquée ou encore si, sur la base des éléments recueillis, il a fait des déductions insoutenables (ATF 136 III 552 consid. 4.2 p. 560; 129 I 8 consid. 2.1 p. 9). 
2.2.2 En l'espèce, on observe que l'expert, puis les instances cantonales, font référence à l'incapacité de travail de l'intimé (à savoir 50%, selon l'arrêt de la Chambre des recours p. 12) avant de s'appuyer sur la notion d'invalidité (arrêt attaqué p. 24 selon lequel l'invalidité du lésé "est due pour moitié à l'accident, à hauteur de 25%, et pour moitié à l'existence d'une lésion fémoro-tibiale préexistante"). Même si elles sont parfois utilisées de façon peu rigoureuse (cf. HEINZ REY, Ausservertragliches Haftpflichtrecht, 4e éd. 2008, n. 231a p. 55), les deux notions ne se recoupent pas: l'invalidité théorique représente un critère abstrait qui ne tient pas compte des circonstances personnelles (GHISLAINE FRÉSARD-FELLAY, Le recours subrogatoire de l'assurance-accidents sociale contre le tiers responsable ou son assureur, thèse Fribourg 2007, n. 1502 p. 500; OFTINGER/STARK, Schweizerisches Haftpflichtrecht,, Allgemeiner Teil, Band I, 1995, § 6 n. 121); l'incapacité de travail, constatée médicalement, tient compte de ces circonstances, notamment de la profession exercée par le lésé (OFTINGER/STARK, op. cit., § 6 n. 127; ROLAND BREHM, Berner Kommentar, 3e éd. 2006, no 63 art. 46 CO). 
Il faut toutefois d'emblée ajouter que la terminologie utilisée de manière indifférenciée en l'espèce n'a aucune incidence sur le sort de la cause (cf. art. 97 al. 1 LTF). La détermination de l'invalidité et de l'incapacité de travail relève du fait, ce que la recourante ne conteste d'ailleurs pas. L'expertise médicale, étape généralement nécessaire dans le processus de fixation du dommage lié à une incapacité de travail (cf. arrêt 4P.203/2001 du 18 mars 2002 consid. 5b/bb; BREHM, op. cit., nos 60 et 63 ad art. 46 CO), a bien été effectuée et les magistrats cantonaux l'ont reprise dans leur état de fait. L'expert a estimé l'incapacité de travail de l'intimé à 50%; il s'agit d'un point de fait qui lie le Tribunal fédéral, peu importe à cet égard l'absence de constatation quant au taux d'invalidité théorique (cf. ATF 77 II 296 consid. 2a p. 299). L'expert a en outre confirmé l'existence de l'invalidité, due pour moitié à l'accident et pour moitié à une lésion fémoro-tibiale antérieure (indépendante de l'accident) et l'on comprend aisément qu'une cause déterminée (liée à l'accident) a généré une incapacité de travail au lésé de 25%, et qu'une autre cause (indépendante de l'accident) a eu pour conséquence une incapacité de travail supplémentaire de 25%. 
Les juges cantonaux disposaient donc de toutes les données de fait nécessaires qui leur permettaient d'apprécier l'incidence concrète de l'invalidité sur la capacité de gain du lésé (question de droit) et l'on ne saurait leur reprocher d'avoir fait preuve d'arbitraire. 
 
2.3 La recourante considère que, pour établir le revenu (hypothétique) de valide, il était insoutenable de se fonder sur le salaire réalisé auprès de la société W.________ SA (soit 6'500 fr. mensuel net, versés treize fois l'an), alors même que, suite au licenciement intervenu pour cause de manque de rendement, il était invraisemblable que le lésé perçoive encore un tel revenu. 
2.3.1 Dans la recherche du revenu hypothétique que le lésé aurait réalisé s'il n'avait pas subi l'accident, la situation salariale concrète de la personne concernée avant l'événement dommageable constitue la référence; le juge ne doit toutefois pas se limiter à constater le revenu réalisé jusqu'alors, car l'élément déterminant repose bien davantage sur ce que le lésé aurait gagné dans le futur. Mais, il incombe en particulier au demandeur de rendre vraisemblables les circonstances de fait - à l'instar des augmentations futures probables de son salaire durant la période considérée - dont le juge peut inférer les éléments pertinents pour établir le revenu que le premier aurait réalisé sans l'accident (ATF 131 III 360 consid. 5.1 p. 363; 129 III 135 consid. 2.2 p. 141; arrêt 4A_169/2010 déjà cité consid. 4.3.1; arrêt 4A_463/2008 déjà cité consid. 4.1). Le juge n'admettra une augmentation du revenu due à une promotion ou un changement d'activité que s'il existe des circonstances rendant ces faits vraisemblables (cf. ATF 116 II 295 consid. 3a/aa p. 296 s.; arrêt 4A_239/2011 du 22 novembre 2011 consid. 3.1.1, relatif à une perte de soutien). 
Dire s'il y a eu dommage et quelle en est la quotité est une question de fait qui lie le Tribunal fédéral (cf. art. 105 al. 1 LTF; ATF 131 III 360 consid. 5.1 p. 364; arrêt 4A_481/2009 du 26 janvier 2010 consid. 4.2.1). Celui-ci n'intervient que si l'autorité cantonale a méconnu la notion juridique du dommage ou s'est laissé guider par des critères erronés (ATF 127 III 73 consid. 3c, 543 consid. 2b). 
2.3.2 En l'espèce, la recourante tire moyen de l'art. 9 Cst.; pour démontrer que le montant du revenu hypothétique retenu par la cour précédente était arbitrairement élevé, elle soutient que le licenciement de l'intimé n'avait aucun lien avec l'accident, mais que l'ancien employé n'était tout simplement pas capable d'assumer un poste aux attentes très élevées. 
Selon elle, les juges cantonaux ont fait abstraction du fait que l'intimé a été engagé en qualité de directeur technique; elle en veut pour preuve qu'ils ont affirmé que les problèmes au genou droit du lésé, consécutifs à l'accident, ont rendu son activité de technicien en échafaudages inadaptée à son état de santé. La recourante fait grand cas d'une imprécision introduite involontairement par la cour cantonale qui avait bien en tête la position de directeur technique du lésé, comme cela ressort à maintes reprises du jugement. Il n'est en outre pas douteux que la fonction de directeur technique ne permettait pas à l'intimé d'éviter, ainsi que semble le sous-entendre la recourante, toute sollicitation de ses genoux; la cour cantonale a en effet constaté qu'il appartenait aux tâches du directeur technique de mettre en route les nouveaux chantiers et de les contrôler dans toute la Suisse romande, en contribuant physiquement à ces activités ("avec aide physique au besoin") (arrêt de la Chambre des recours p. 3 s.). 
La recourante, faisant fi des exigences de motivation strictes posées par les art. 105 al. 2 et 106 al. 2 LTF, se limite ensuite à soutenir que la Chambre des recours ne pouvait pas s'écarter de la déclaration de la société W.________ SA (selon laquelle le licenciement n'avait pas de lien avec l'état de santé du lésé), seule cette société étant "en mesure de dire quelle était la cause" du congé. La critique est dès lors irrecevable. Quoi qu'il en soit, on ne voit pas en quoi l'autorité précédente aurait arbitrairement établi les faits en ne se fondant pas sur l'affirmation de l'employeur. Il ne ressort pas des constatations cantonales que l'employeur aurait reproché au lésé son incompétence ou son incapacité (manque de connaissances, etc.) à exercer sa tâche, mais simplement que son rendement était insuffisant. Vu qu'il a été établi que le lésé a éprouvé des problèmes de santé liés à son genou droit dès l'accident qui ont fini par rendre son activité inadaptée à son état de santé, que l'incapacité de travail était alors de 25%, soit supérieure à la réduction de salaire (15%) considérée par les parties, qu'il a été établi que l'employeur lui-même a informé la CNA de l'aggravation de l'état de santé de son employé, on ne saurait retenir qu'il était insoutenable de faire le lien entre les performances professionnelles insuffisantes du lésé et la dégradation de son état de santé (qui découle de l'accident du 8 février 1993). 
La recourante revient à la charge en prétendant que le licenciement n'avait aucun lien avec l'état de santé du lésé, puisque précisément son salaire tenait déjà compte d'une réduction de rendement de 15%. On ne peut la suivre. L'incapacité de travail liée à l'accident, de 25%, étant supérieure à la réduction de salaire convenue entre les parties, il n'était en tout cas pas arbitraire de retenir que l'employeur a fini par licencier l'intimé en raison de son manque de rendement. 
2.3.3 Enfin, la recourante estime qu'il est arbitraire de retenir que, sans l'accident, l'intimé aurait continué à travailler pour le compte de W.________ SA, ce d'autant plus que, fait notoire, cette société a été liquidée et radiée du registre du commerce le 10 décembre 1999. 
On peut se demander si le moyen est recevable, la recourante n'invoquant pas une violation arbitraire de la règle de procédure cantonale pourtant appliquée par la Chambre des recours pour écarter la même critique déjà formulée dans le recours cantonal en nullité. 
Le moyen devrait quoi qu'il en soit être déclaré infondé, l'arrêt cantonal n'étant, quant à son résultat, pas arbitraire. Il résulte des constatations cantonales que le lésé, après avoir perdu son emploi au sein de la société V.________ SA (quelques mois avant la faillite de celle-ci) le 30 décembre 1994, a immédiatement retrouvé un travail (dès le 1er janvier 1995) auprès de W.________ SA, comme directeur technique, avec un salaire plus élevé; les compétences du lésé étaient reconnues dans le milieu et l'arrêt cantonal indique qu'à cette époque un autre employeur (T.________) a également proposé d'engager l'intimé pour un salaire mensuel net d'environ 7'000 fr., servis treize fois l'an. Il n'était ainsi pas arbitraire de retenir qu'il était vraisemblable que le lésé, en l'absence d'accident, aurait continué à percevoir le salaire perçu auprès de W.________ SA (ou un salaire équivalent), si ce n'est auprès de cette société, à tout le moins chez un autre employeur. 
2.3.4 Renvoyant à l'expertise comptable, la recourante insiste sur le fait que le salaire perçu par l'intimé auprès de W.________ SA se situait bien au-delà de la norme. 
La cour cantonale a fixé le revenu hypothétique en tenant compte de la situation concrète du lésé. Il s'agit d'une constatation de fait qui lie le Tribunal fédéral (art. 105 al. 1 LTF; cf. ATF 129 III 135 consid. 4.2.1 p. 152) et qui ne peut être examinée par celui-ci que sous l'angle de l'arbitraire (art. 9 Cst.). 
Il incombe au lésé de rendre vraisemblables les circonstances de fait - à l'instar des augmentations futures probables de son salaire durant la période considérée - dont le juge peut inférer les éléments pertinents pour établir le revenu que le premier aurait réalisé sans l'accident (cf. supra consid. 2.3.1). De son côté, l'auteur du dommage (en l'occurrence son assureur) doit rendre vraisemblable les circonstances de fait dont le juge pourra inférer les diminutions alléguées du salaire du lésé (ATF 129 III 135 consid. 2.2 p. 141). Il incombe également à l'auteur du dommage de rendre vraisemblable que le revenu du lésé pris en compte était extraordinairement élevé en raison de circonstances exceptionnelles (BREHM, op. cit., no 38 ad art. 46 CO). 
Les indications contenues dans l'expertise comptable évoquées par la recourante sont impropres à confirmer sa thèse. En effet, les données ne sont pas comparables, l'expert s'appuyant sur le salaire d'un monteur agissant en qualité de chef de groupe, alors que le lésé, doté d'une expérience professionnelle de plus de vingt ans, avait une responsabilité manifestement plus importante puisque, en tant que responsable technique, il était chargé de contrôler dix équipes (et donc dix chefs de groupe). On ne saurait ainsi reprocher à la cour cantonale d'avoir fait preuve d'arbitraire en jugeant que la recourante n'avait pas rendu vraisemblable que le salaire en question, prétendument situé au-delà de la norme, aurait diminué dès le licenciement par la société W.________ SA. 
 
2.4 La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir tenu compte, pour déterminer le revenu d'invalide, d'une activité de chauffeur de taxi à 50%, alors que l'expert judiciaire a exposé qu'en faisant abstraction de l'atteinte au genou indépendante de l'accident, l'intimé pouvait exercer ce même travail à 75%, respectivement qu'il pouvait se tourner vers une profession plus rémunératrice. Certes, il est vrai que seule la moitié de l'incapacité de travail du lésé est en relation de causalité avec l'accident; les juges cantonaux ne l'ont toutefois pas ignoré puisqu'ils ont dûment pris en compte ce facteur dans le calcul de la perte de gain (cf. infra consid. 3.3.2). Quant à l'affirmation selon laquelle une activité plus rémunératrice aurait dû être exercée par l'intimé, il incombait à la recourante d'en fournir la preuve (arrêt 4C.83/2006 du 26 juin 2006 consid. 6). Elle ne soutient pas l'avoir régulièrement allégué en procédure cantonale ni a fortiori prouvé. Au demeurant, on ne voit pas en quoi le raisonnement de la cour cantonale, qui tient compte d'une activité comme chauffeur de taxi à 50%, serait insoutenable, cette profession ayant été conseillée au lésé par les médecins et l'assurance-invalidité. 
Enfin, la recourante s'étonne de ce que la cour cantonale ait repris l'évaluation du revenu d'invalide tel qu'il a été exposé par le Tribunal cantonal des assurances (hypothèse d'une activité à 100%) pour finalement s'en écarter et se fonder sur le revenu réalisé effectivement par le lésé comme chauffeur de taxi (activité à 50%). On ne discerne pas en quoi le raisonnement de l'instance précédente serait arbitraire, la Cour civile ayant d'ailleurs expressément ajouté que, contrairement à ce que retient l'expert, il convenait de s'écarter du revenu potentiel à 100%, le calcul devant être fondé sur le cas concret et tenir compte de l'incapacité de travail du lésé telle qu'elle ressort de l'expertise judiciaire du Dr D.________. 
Le recours dirigé contre l'arrêt rendu le 19 avril 2011 par la Chambre des recours ne peut donc qu'être rejeté dans la mesure de sa recevabilité. 
 
Recours contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010 
 
3. 
3.1 Dans la partie B de son acte de recours contre le jugement de la Cour civile (p. 9 à 14), la recourante se plaint d'une appréciation arbitraire des preuves sur plusieurs points (s'agissant de la détermination du taux d'invalidité médicale, de l'incapacité de travail, du lien entre l'accident et le licenciement du lésé, de la fixation du salaire de valide, etc.). Comme ce grief pouvait faire l'objet d'un recours en nullité à la Chambre des recours, il n'est pas recevable dans le recours dirigé contre le jugement de la Cour civile du 15 janvier 2010, faute d'épuisement des instances cantonales (cf. supra consid. 1.2). Il s'ensuit que la Cour de céans examinera les violations du droit fédéral dont se prévalent les parties à la seule lumière des faits pertinents ressortant de l'arrêt déféré. 
 
3.2 La cour cantonale a procédé au calcul du dommage actuel en distinguant trois périodes. De la période du 8 février 1993 (jour de l'accident) au 31 octobre 1996 (qui n'est plus litigieuse), la cour cantonale a retenu que l'intimé n'avait subi aucune perte de gain. 
Pour le dommage actuel (toujours litigieux) advenu entre le 1er novembre 1996 et le 31 décembre 2004, l'autorité cantonale a pris en compte le revenu annuel net que le lésé aurait perçu sans l'accident, soit son dernier salaire auprès de la société W.________ SA; elle l'a majoré d'un montant correspondant à la réduction de 15% convenue avec cet employeur (pour la baisse de rendement trouvant sa cause dans l'accident) et elle a tenu compte de l'indexation selon les taux retenus par l'Office fédéral de la statistique pour l'évolution des salaires nominaux; elle a alors fixé le revenu sans invalidité pour la période considérée à 795'800 fr. Elle a soustrait à ce montant le revenu net d'invalide déterminant pour la période concernée, soit, d'une part, le montant de 66'432 fr. perçu à titre d'indemnités de chômage entre le mois de novembre 1996 et le mois de décembre 2004, et, d'autre part, un salaire de U.________ (activité à 50% depuis octobre 1998) à hauteur de 141'987 fr. durant la même période (soit un total de 208'419 fr.). La Cour civile en a déduit que la perte de gain actuelle pour cette période ascendait à 587'381 fr. (795'800 fr. - 208'419 fr.) et conclu que, compte tenu de l'état maladif antérieur, seule la moitié était la conséquence de l'accident du 8 février 1993, soit 293'690 fr. 50. La cour cantonale a alors constaté que, toujours pour la période précitée, la SUVA a versé au lésé des rentes et indemnités pour un montant de 298'545 fr. et que l'AI a fait de même à hauteur de 103'352 fr., soit au total 401'897 fr. Selon la cour cantonale, "il en résulte que les assureurs sociaux ont servi un montant supérieur au dommage non lié à l'accident, par 108'206 fr. 50. En application du principe du droit préférentiel du lésé, la [recourante] n'a ainsi à assumer que la part du dommage lié à l'accident non couverte par les prestations des assureurs sociaux. Dès lors la perte de gain du [lésé] entre le mois de novembre 1996 et le mois de décembre 2004 à charge de la [recourante] est de 185'484 fr. (293'690 fr. 50 - 108'206 fr. 50)". 
Pour le dommage actuel (toujours litigieux) portant sur la période du 1er janvier 2005 au 15 janvier 2010 (jour du jugement), la cour cantonale a pris en compte le revenu annuel net (majoré et indexé, cf. supra) que le lésé aurait perçu sans l'accident; elle a alors fixé le revenu sans invalidité pour la période considérée à 548'814 fr. 50. Elle a soustrait à ce montant le revenu net d'invalide déterminant, partant, le revenu que le lésé, qui a cessé son activité de chauffeur de taxi en juin 2006, aurait pu obtenir en exploitant sa capacité résiduelle de travail (50%) auprès de U.________, soit le montant de 127'726 fr. 50 (après indexation). La Cour civile en a déduit que la perte de gain actuelle pour cette période ascendait à 421'088 fr. (548'814 fr. 50 - 127'726 fr. 50) et conclu que, compte tenu de l'état maladif antérieur, seule la moitié était la conséquence de l'accident du 8 février 1993, soit 210'544 fr. La cour cantonale a alors constaté que, toujours pour la période précitée, le lésé a perçu 81'856 fr. de l'AI et 151'492 fr. de la SUVA, soit au total 233'348 fr. Elle observe que "ce montant excède la part du dommage non liée à l'accident, par 22'804 fr., qui doivent être portés en déduction de celle à charge de la [recourante]. Celle-ci ascende dès lors à 187'740 fr. (210'544 fr. - 22'804 fr.)". 
L'autorité précédente conclut que la perte de gain totale subie par le lésé entre le mois de novembre 1996 et le 15 janvier 2010 à charge de la recourante est de 396'461 fr. 50 [recte: 373'224 fr.] (185'484 fr. + 187'740 fr.). 
En ce qui concerne le préjudice futur, l'autorité cantonale a fixé le revenu (hypothétique) de valide à 111'084 fr. 25 annuellement (montant tenant compte de la majoration de 15%), soit, après capitalisation au facteur 2.5 [recte: 2.75], à 305'481 fr. 70. Pour le revenu d'invalide, elle a tenu compte du salaire potentiel que le lésé aurait réalisé à 50% comme chauffeur de taxi pour parvenir à un montant de 25'852 fr. 50, soit après la multiplication par le taux de capitalisation de 2.75, 71'094 fr. 40. La perte de gain se monte ainsi à 234'387 fr. 30 (305'481 fr. 70 - 71'094 fr. 40), seule la moitié étant la conséquence de l'accident, soit 117'193 fr. 65. La cour cantonale a alors constaté que, pour la période considérée, le lésé percevra des prestations sociales (16'236 fr. de l'AI, 30'048 fr. de la SUVA, 7'314 fr. de rente invalidité Swisslife) capitalisées (au facteur de 2.75) pour un montant de 147'394 fr. Selon la cour cantonale, "ce montant est supérieur à la moitié de la perte de gain nette, par 30'200 fr. 35 (147'193 fr. 65 [recte: 117'193 fr. 65] - 147'394 fr.). En application des principes évoqués précédemment, la perte de gain future à charge de la [recourante] est dès lors de 86'993 fr. 30 (117'193 fr. 65 - 30'200 fr.)". 
 
3.3 La recourante reproche à la Cour civile d'avoir appliqué l'art. 44 CO à la place de l'art. 42 CO. Elle soutient que, selon cette dernière disposition, l'autorité précédente aurait dû exclure du calcul du dommage le préjudice résultant de la prédisposition constitutionnelle du lésé. 
3.3.1 Selon la jurisprudence, un état maladif antérieur peut, selon les circonstances, être pris en considération dans le cadre de l'application des art. 42 à 44 CO. Parmi les cas de prédisposition constitutionnelle, la jurisprudence distingue d'une part ceux où, du fait de l'état maladif antérieur, le dommage se serait certainement ou très vraisemblablement réalisé même sans l'accident et, d'autre part, ceux où le dommage ne serait selon toute probabilité pas survenu sans l'accident (ATF 131 III 12 consid. 4 p. 13 s.; 113 II 86 consid. 3b p. 93 s.). Dans la première hypothèse (prédisposition constitutionnelle indépendante), il faut tenir compte dans le calcul du dommage selon l'art. 42 CO des conséquences patrimoniales d'une atteinte à la santé préexistante qui se serait également produite sans l'événement dommageable; en effet, seul le dommage qui résulte directement de cet événement peut être imputé au responsable, tandis que la part du préjudice liée à l'état préexistant doit être exclue du calcul du dommage réparable (ATF 131 III 12 consid. 4 p. 13; 113 II 86 consid. 3b p. 93 s.; OFTINGER/STARK, op. cit., § 6 n. 11; ROLAND SCHAER, Grundzüge des Zusammenwirkens von Schadenausgleichsystemen, 1984, n. 350 p. 126). Dans la seconde hypothèse (prédisposition constitutionnelle liée), le responsable sur le plan civil doit se voir imputer l'entier du préjudice même si la prédisposition maladive en a favorisé la survenance ou augmenté l'ampleur; toutefois, une réduction de l'indemnité sur la base de l'art. 44 CO pourra alors entrer en considération (ATF 131 III 12 consid. 4 p. 13 et les références citées; 113 II 86 consid. 3b p. 93 s.; arrêt 4C.402/2006 du 27 février 2007, traduit au JdT 2007 I 543 consid. 5.1). Savoir si une prédisposition constitutionnelle est indépendante ou liée est une question de fait (cf. ALEXANDRA RUMO-JUNGO, Haftpflicht und Sozialversicherung, 1998, n. 826 p. 368 note de pied 525). 
La distinction présente une importance pratique en matière de droit préférentiel du lésé, qui tend à prémunir celui-ci contre les suites défavorables d'un dommage non couvert (ATF 131 III 12 consid. 4 p. 14 et les arrêts cités; arrêt 4A_45/2009 du 25 mars 2009 consid. 3.3.3 publié in SJ 2010 I p. 73). En effet, le droit préférentiel de la personne lésée ne trouve application que dans l'hypothèse où la réparation due par le tiers responsable, ou son assurance responsabilité civile, ne suffit pas à satisfaire entièrement les créances directe (du lésé) et subrogatoire (de l'assureur social), soit lorsque la réparation est, notamment pour des motifs juridiques (cf. art. 44 CO), partielle (FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 977 p. 321 s.) et non lorsque la réparation est totale, mais limitée en application de l'art. 42 CO (FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 1041 p. 345; RUMO-JUNGO, op. cit., n. 1012 s. p. 453 s.). 
3.3.2 En l'espèce, le Tribunal cantonal, se fondant sur l'avis de l'expert judiciaire, a retenu que la lésion fémoro-tibiale constituait une prédisposition constitutionnelle indépendante. Contrairement à ce que soutient la recourante, il a clairement indiqué les conséquences des atteintes dues à l'accident sur la capacité de travail de l'intimé puisqu'il a expliqué, toujours sur la base de l'expertise, que l'incapacité de travail de 50% était due pour moitié à l'accident et pour moitié à la prédisposition constitutionnelle indépendante (cf. également supra consid. 2.2.2). Il a en outre tenu compte des conséquences patrimoniales de cette prédisposition dans le calcul du dommage selon l'art. 42 CO (et non en réduisant l'indemnité sur la base de l'art. 44 CO); les magistrats cantonaux n'ont en effet retenu que la moitié du préjudice total subi par l'intimé, relevant que seule cette "moitié [était] la conséquence de l'accident du 8 février 1993" (cf. jugement entrepris p. 40 [perte de gain actuelle entre novembre 1996 et décembre 2004], p. 41 [perte de gain actuelle entre janvier 2005 et le 15 janvier 2010], p. 43 [perte de gain future]). Il est ainsi manifeste que la part du préjudice lié à l'état antérieur a été exclue de la fixation du dommage (pour le même cas de figure: arrêt 4A_481/2009 déjà cité consid. 4.2.7). 
 
3.4 La recourante soutient qu'il n'est pas établi que l'intimé ait subi une quelconque perte de gain liée à l'accident, de sorte que ses prétentions devraient être rejetées. Elle appuie toutefois son raisonnement sur un état de fait qui diverge de celui retenu par la Chambre des recours; elle insiste en particulier sur le fait que le licenciement du lésé (par la société W.________ SA) ne peut être attribué aux suites de l'accident (sur cette question, cf. supra consid. 2.3.2), ce qui n'est pas admissible (cf. supra consid. 1.4). 
Au surplus, il n'importe que le lésé n'ait pas subi de perte de gain les premières années qui ont suivi l'accident (la cour cantonale en a d'ailleurs tenu compte, cf. supra consid. 3.2). Il n'en demeure pas moins qu'il a été constaté, en fait (art. 105 al. 1 LTF), que l'état de santé du lésé s'est péjoré en 1996, que son licenciement (avec effet au 31 juillet 1996) devait être attribué à l'accident et que l'expert judiciaire a indiqué que, même dans la profession de chauffeur de taxi, la capacité de travail du lésé était diminuée de 50% (25% en lien avec l'accident). La cour cantonale a tenu compte de ces éléments lorsqu'elle a calculé le dommage actuel et futur subi par le lésé. Celui-ci ayant été au chômage suite à son licenciement (conséquence de l'accident), il convenait de tenir compte, dans le calcul du revenu d'invalide, des indemnités versées par l'assurance chômage; elle a ensuite, à bon droit, pris en considération le salaire effectif qu'il a réalisé à 50% auprès de l'entreprise U.________ (depuis octobre 1998) et est partie du revenu qu'il aurait pu obtenir, du 1er janvier 2005 au 15 janvier 2010, en exploitant sa capacité résiduelle de travail (50%) auprès de U.________. Dans la détermination de la capacité de gain, on ne discerne donc pas, sur la base de la motivation fournie par la recourante, en quoi la Cour civile aurait violé le droit fédéral. Le grief est infondé. 
La recourante revient à la charge arguant que, même à suivre le raisonnement opéré par la Cour civile sur la base de l'état de fait retenu par l'autorité cantonale, la motivation ne résisterait pas à l'examen. Elle tente alors une démonstration peu claire qui repose, à nouveau, sur des points de fait qui divergent des constatations cantonales sur lesquels la Cour de céans ne peut revenir. Quant à la réduction de salaire de l'ordre de 15% intervenue d'entente avec l'ancien employeur du lésé, que la recourante conteste, elle relève également d'une constatation de fait que la recourante ne saurait remettre en question dans son recours formé contre le jugement de la Cour civile (cf. supra consid. 3.1). Sur la base des faits établis dans le jugement attaqué, on ne voit pas en quoi l'autorité cantonale aurait violé le droit fédéral. Le moyen doit être déclaré mal fondé. 
 
4. 
4.1 La recourante estime que la Cour civile a fait une fausse application du principe du droit préférentiel du lésé, respectivement mis incorrectement ce dernier au bénéfice de ce droit. Elle est d'avis qu'elle aurait dû se contenter d'imputer les prestations versées par les assureurs sociaux qui coïncident matériellement, temporellement et personnellement avec les prestations dont la recourante devrait répondre, soit uniquement les prestations versées à la suite des séquelles de l'accident. 
4.2 
4.2.1 Il est de jurisprudence que les prestations servies au lésé par les assurances sociales sont déduites du dommage qu'il est en droit de réclamer au tiers responsable ou à son assureur. Cette déduction n'entre toutefois en ligne de compte que pour les prestations (nominales) de l'assureur social qui couvrent un dommage similaire aux prétentions en responsabilité que peut faire valoir le lésé contre le responsable. Il faut qu'il existe, entre les prestations sociales pour lesquelles les assurances sont subrogées aux droits du lésé en vertu de la loi (cf., depuis le 1er janvier 2003, art. 72 al. 1 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales [LPGA, RS 830.11]; les règles de subrogation particulières qui existaient déjà auparavant dans les différentes lois spéciales conduisent à un résultat identique: FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 1224 p. 403) et le dommage dont la réparation est demandée à l'auteur, une concordance déjà en raison de l'événement dommageable, qui soit au surplus une concordance matérielle, temporelle et personnelle (Kongruenzgrundsatz: ATF 134 III 489 consid. 4.2 p. 491 s. et les références; 130 III 12 consid. 7.1 p. 16). Ce mécanisme permet notamment d'éviter une surindemnisation du lésé (ATF 131 III 360 consid. 6.1 p. 366; MATTHIAS LEEMANN, Die Rente als Art des Schadenersatzes im Haftpflichtrecht, thèse 2002, p. 168 et les références). 
A défaut de concordance entre les prestations sociales et le dommage dont répond l'auteur (ou l'assurance responsabilité civile), la question du droit préférentiel du lésé ne se pose pas (SCHAER, op. cit. Grundzüge, n. 1114 p. 385). 
En l'occurrence, les prestations sociales ont été servies par l'AI et l'assurance-accidents. Chacun de ces assureurs sociaux est susceptible de fournir des indemnités qui ne sont pas exclusivement liées à l'événement dommageable. 
4.2.2 En effet, l'assurance-invalidité est une assurance finale; elle est ainsi appelée à verser des prestations indépendamment de l'origine de l'événement assuré (ROLAND SCHAER, Modernes Versicherungsrecht, 2007, § 17 n. 63 et § 22 n. 12; cf. THOMAS LOCHER, Grundriss des Sozialversicherungsrechts, 2003, § 51 n. 4 ss). Partant, la rente versée par l'AI tient compte non seulement des conséquences de l'accident subi par le lésé, mais également de l'état antérieur indépendant de celui-ci (cf. RUMO-JUNGO, op. cit., n. 800 p. 357 et n. 982 p. 437). Elle ne saurait ainsi être imputée en entier mais seulement dans la mesure où elle indemnise le dommage dû à l'accident, peu importe à cet égard que sans l'accident (c'est-à-dire uniquement en raison de l'état maladif antérieur) l'invalidité de la personne lésée n'aurait pas ouvert le droit à une rente AI (arrêt 4C.62/2005 du 1er novembre 2005 consid. 5.2; SCHAER, op. cit. Modernes Versicherungsrecht, § 22 n. 59; cf. PETER BECK, Zusammenwirken von Schadenausgleichsystemen, in Schaden, Haftung, Versicherung [Münch/Geiser éd.], 1999, § 6 n. 6.22). 
4.2.3 Quant à l'assurance-accidents, il s'agit d'une assurance sociale causale (cf. RUMO-JUNGO, op. cit., n. 801 p. 357). Plusieurs causes peuvent toutefois être à l'origine des prestations versées par l'assureur-accidents, y compris une prédisposition constitutionnelle indépendante de l'accident (FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 1239 p. 408 s. et n. 529 ss p. 172 ss). La rente d'invalidité n'est pas réduite par l'assureur-accidents (en raison de cette prédisposition) si - comme c'est le cas en l'espèce - celle-ci n'a pas entraîné une diminution durable et importante de la capacité de gain avant l'accident (cf. art. 36 LAA; ATF 121 V 326 consid. 3 p. 330 ss; RUMO-JUNGO, op. cit., n. 803 p. 358 s. et n. 815 p. 363 s.). Doivent alors être imputées uniquement les prestations indemnitaires versées en rapport avec l'accident dont répond l'auteur ou son assurance responsabilité civile (FRÉSARD-FELLAY, op. cit., n. 1239 s. p. 408 s. et l'arrêt cité; cf. SCHAER, op. cit. Grundzüge, n. 1114 p. 385 et note de pied no 2). 
 
4.3 En l'espèce, le lésé a reçu une demi-rente AI (pour un taux d'invalidité de 54%) et des indemnités de la SUVA (pour un taux d'invalidité de 50%). Il résulte des rapports d'expertise (cf. notamment les rapports du 21 juillet 1993 du Dr B.________ et du 26 août 1994 du Dr C.________) fournis à l'AI et à la SUVA que l'atteinte actuelle à la capacité du gain du lésé résulte, d'une part, de son arthrose fémoro-rotulienne au genou droit et, d'autre part, de la détérioration du compartiment fémoro-tibial interne du même genou. L'expert judiciaire n'a pas remis en question les taux admis par les assureurs sociaux; il a clairement mis en évidence que la moitié de l'invalidité était due à l'accident du 8 février 1993 (choc direct générant une mauvaise fonction de l'articulation fémoro-rotulienne) et l'autre moitié à son état antérieur avant l'accident (pathologie du compartiment fémoro-tibial). On voit donc que le 50% des prestations pécuniaires payées par l'AI et la SUVA sont dénuées de toute concordance à raison dudit événement (pour un cas de figure similaire: arrêt 4A_481/2009 déjà cité consid. 4.2.6 qui traite des prestations servies par l'AI; cf. également SCHAER, op. cit. Grundzüge, n. 1114 p. 385 et note de pied no 2). 
 
4.4 Dans le calcul de la perte de gain actuel, le raisonnement de la cour cantonale contrevient aux principes exposés ci-dessus de deux manières. D'une part, elle a soustrait du dommage consécutif à l'accident (qu'elle a pourtant correctement identifié, cf. supra consid. 3.3.2) la totalité des prestations versées par les assureurs sociaux, soit également la part afférente à l'état maladif préexistant. D'autre part, l'autorité précédente, dans la suite de son calcul, a néanmoins pris comme référence implicite, pour la réparation, le préjudice global (soit, pour prendre l'exemple de la période de novembre 1996 à décembre 2004, le montant de 587'381 fr. qui comprend également la perte de gain liée à la prédisposition constitutionnelle) et elle a laissé entendre que la réparation due par l'assureur responsabilité civile n'était que partielle vu que celui-ci ne pouvait répondre que du dommage lié à l'accident (soit le montant de 293'690 fr. 50 pour l'exemple pris en considération). C'est en se fondant sur cette prémisse erronée qu'elle a alors reconnu au lésé un droit préférentiel afin qu'il puisse récupérer en priorité auprès de l'assureur responsabilité civile l'indemnité nécessaire lui permettant d'être dédommagé pour le préjudice global subi (soit y compris la part afférente à l'état maladif antérieur). Or, il n'était pas question ici d'appliquer un droit préférentiel, seul le dommage consécutif à l'accident devant être pris en compte et la réparation due par l'assureur responsabilité civile étant certes limitée à ce dommage, mais néanmoins totale (cf. supra consid. 3.3.1). 
Le procédé suivi par la cour cantonale, contrairement à ce que soutient l'intimé, entraîne bien une surindemnisation. Par exemple, pour la période de novembre 1996 à décembre 2004, il conduit à lui verser 200'948 fr. (401'897 fr. : 2, soit la part des prestations sociales afférentes au dommage; cf. également infra) et, en sus, 185'484 fr. (réparation à charge de l'assureur responsabilité civile selon le jugement cantonal), soit un montant total de 386'432 fr., chiffre supérieur au montant du dommage lié à l'accident (à savoir 293'690 fr. 50). Le moyen étant fondé, le jugement doit être réformé sur ce point. 
Comme les assureurs sociaux ne sauraient exercer un droit de subrogation contre le responsable de l'accident (ou son assurance responsabilité civile) pour ce qu'ils versent au lésé du fait de sa prédisposition constitutionnelle, ce n'est que la moitié des montants alloués par l'AI et la SUVA qui doivent être défalquée du chiffre de 293'690 fr. 50 (période comprise entre le 1er novembre 1996 et le 31 décembre 2004) et du montant de 210'544 fr. (période comprise entre le 1er janvier 2005 et le 15 janvier 2010). 
Il a été constaté (art. 105 al. 1 LTF) que le lésé a perçu, pour la période du 1er novembre 1996 au 31 décembre 2004, au total 401'897 fr. de prestations sociales. La moitié de cette somme, à savoir 200'948 fr. 50, sera imputée sur le montant de 293'690 fr. 50, lequel est ipso facto ramené à 92'742 fr. 
Selon les constatations cantonales, l'intimé a perçu, pour la période du 1er janvier 2005 au 15 janvier 2010, au total 233'348 fr. de prestations sociales. La moitié de cette somme, à savoir 116'674 fr., sera imputée sur le montant de 210'544 fr., lequel est ipso facto ramené à 93'870 fr. 
Ainsi, le lésé a droit à un montant de 186'612 fr. (92'742 fr. + 93'870 fr.) à titre de réparation de la perte de gain subie entre le mois de novembre 1996 et le 15 janvier 2010), étant encore rappelé que la première période considérée par la cour cantonale (absence de perte de gain du 8 février 1993 au 31 octobre 1996) n'est plus litigieuse. 
L'intérêt compensatoire, auquel le paiement de cette somme est assorti, n'est pas contesté. Il courra dès l'échéance moyenne du 8 juillet 2002 (jugement de la Cour civile p. 49). 
 
4.5 Pour la détermination de la perte de gain future, la cour cantonale a également effectué ses calculs selon le même procédé, contraire aux principes exposés plus haut (cf. supra consid. 4.2). 
Selon les constatations cantonales (art. 105 al. 1 LTF), les prestations sociales ascendent, pour la période considérée, à 147'394 fr. La moitié de cette somme, à savoir 73'697 fr., sera imputée sur le montant de 117'193 fr. 65, lequel est ipso facto ramené à 43'496 fr. 65. 
L'intérêt compensatoire, auquel le paiement de cette somme est assorti, n'est pas contesté. Il courra dès le 16 janvier 2010, jour où la capitalisation a été effectuée (jugement entrepris p. 49). 
 
4.6 S'agissant du dommage de rente, la question n'est plus litigieuse. La cour cantonale, se fondant sur l'expertise judiciaire, a retenu que le lésé n'avait subi aucun dommage lié à ce poste. 
 
4.7 Tenant compte de l'incapacité de travail du lésé liée à l'accident (25%), de son hospitalisation et du fait qu'il a dû modifier son orientation professionnelle pour tenir compte des séquelles subies, l'autorité précédente a jugé qu'une indemnité pour tort moral de 20'000 fr. était adéquate au regard des critères fixés par la jurisprudence. Renvoyant à ses explications relatives à la subrogation, elle a soustrait à ce montant l'indemnité pour atteinte à l'intégrité de 9'720 fr. versée par la SUVA. Elle en conclut que le lésé a droit à une indemnité en réparation de son tort moral de 10'280 fr. 
On constate que la cour précédente a directement fixé le montant du tort moral en lien avec l'accident (25% de l'incapacité de travail). Elle a toutefois déduit de ce montant la totalité de l'indemnité versée par la SUVA, alors même que celle-ci est calculée en tenant compte également de l'état maladif antérieur (cf. supra consid. 4.2.3). Le jugement entrepris doit être réformé sur ce point. 
La moitié de l'indemnité pour atteinte à l'intégrité, à savoir 4'860 fr., sera imputée sur le montant de 20'000 fr., lequel est ipso facto ramené à 15'140 fr. 
L'intérêt compensatoire, auquel le paiement de cette somme est assorti, n'est pas contesté. Il courra dès le 8 février 1993, date de l'événement dommageable (jugement entrepris p. 49). 
 
5. 
5.1 Dans un dernier grief, la recourante reproche à la Cour civile d'avoir accordé "ex aequo et bono" la somme de 18'000 fr. au lésé au titre d'honoraires d'avocat avant procès. Elle invoque une violation de l'art. 42 al. 2 CO, la cour cantonale ayant, selon elle, appliqué cette disposition alors même que ses conditions d'application n'étaient pas remplies. 
 
5.2 Constitue une question de droit le point de savoir si les faits allégués, en la forme prescrite et en temps utile, permettent de statuer sur l'indemnisation due à titre d'honoraires d'avocat avant procès réclamée en justice (cf. par analogie ATF 131 III 360 consid. 5.1 p. 364 et les arrêts cités). 
D'après l'art. 42 al. 2 CO, lorsque le montant exact du dommage ne peut être établi, le juge le détermine équitablement en considération du cours ordinaire des choses et des mesures prises par la partie lésée. Cette disposition, si elle instaure une preuve facilitée en faveur du lésé (ATF 122 III 219 consid. 3a), ne le dispense pas de fournir au juge, dans la mesure où on peut l'attendre de lui, tous les éléments de fait constituant des indices de l'existence du dommage et permettant ou facilitant son estimation (ATF 131 III 360 consid. 5.1 et les arrêts cités). 
En droit de la responsabilité civile, le dommage comprend les frais engagés par le lésé pour la consultation d'un avocat avant l'ouverture du procès civil, lorsque cette consultation était nécessaire et adéquate et que les frais ne sont pas couverts ni présumés couverts par les dépens. Il en est de même pour les frais engagés dans une autre procédure, par exemple une procédure pénale ou une procédure en matière d'assurance sociale; si cette autre procédure permet d'obtenir des dépens, même tarifés, le lésé ne peut pas exiger séparément, sur la base du droit fédéral, le remboursement de ses frais de conseil (ATF 133 II 361 consid. 4.1 p. 363; arrêt 4A_573/2010 du 28 mars 2011 consid. 4; MARC SCHAETZLE, Der Schaden und seine Berechnung, in Schaden, Haftung, Versicherung [Münch/Geiser éd.], 1999, § 9 n. 9.102 et la note de pied no 104). 
 
5.3 En l'espèce, les magistrats cantonaux ont fixé ex aequo et bono l'indemnité à 18'000 fr. sur la base du seul montant total (24'748 fr.) inscrit dans la note d'honoraires du 23 novembre 2003. Il est pourtant manifeste que le lésé n'a pas fourni tous les éléments de fait que l'on pouvait attendre de lui. En particulier, il résulte du jugement cantonal que le détail des opérations, justifiant le montant des honoraires, n'a même pas été allégué. Les juges cantonaux ne disposaient donc d'aucune information qui leur aurait permis de déterminer pour quelles démarches le lésé a dû consulter un avocat et engager des frais non inclus dans les dépens. Concernant plus spécifiquement l'activité menée en vue de l'obtention de la rente AI, il convient de rappeler qu'une procédure judiciaire spécifique a été menée et que le lésé a obtenu des dépens, ce qui empêche d'en tenir compte pour le poste du dommage examiné ici. Pour les démarches entreprises en vue de la rente AI indépendantes de la décision du Tribunal des assurances, les frais de représentation ne sauraient raisonnablement atteindre 18'000 fr. 
Le moyen est donc fondé et le jugement doit être réformé sur ce point. Le lésé doit subir l'échec de la preuve à sa charge selon l'art. 42 al. 2 CO. Aucune indemnité ne peut lui être accordée au titre d'honoraires d'avocat avant procès. 
 
6. 
6.1 Il résulte des considérations qui précèdent que le recours doit être partiellement admis et le jugement de la Cour civile annulé. Il convient dès lors de prononcer que la recourante versera à l'intimé: 
186'612 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 juillet 2002, à titre de perte de gain actuelle du 1er novembre 1994 au 15 janvier 2010; 
43'495 fr. 65 avec intérêts à 5% dès le 16 janvier 2010 pour le dommage futur; 
15'140 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 février 1993, au titre du tort moral éprouvé; 
 
Les montants versés par la recourante au lésé (une somme totale de 60'000 fr., soit 10'000 fr. valeur au 30 janvier 1997, 20'000 fr. valeur au 16 février 1998, 30'000 fr. valeur au 11 avril 2002) devront être portés en déduction des montants qui lui sont alloués. 
 
6.2 S'agissant des frais et dépens de l'instance fédérale, on observe que la recourante, qui a pris des conclusions libératoires, a obtenu une réduction de l'indemnité pour perte de gain (de 396'461 fr. 50 à 186'612 fr.), de l'indemnité pour le dommage futur (de 86'993 fr. 30 à 43'495 fr. 65) et la suppression de l'indemnité (fixée à 18'000 fr. par l'autorité cantonale) due à titre d'honoraires avant procès, étant encore précisé que la recourante devra verser 15'140 fr. au titre du tort moral éprouvé (et non 10'280 fr. comme fixé par la cour cantonale). En tenant compte des différents intérêts auxquels ces montants sont assortis, on observe que la recourante est ainsi parvenue à diminuer de moitié environ le montant qu'elle doit verser à l'intimé à titre de réparation du dommage causé par l'accident du 8 février 1993. 
Dans ces conditions, il sied de mettre les frais judiciaires, arrêtés à 7'000 fr., par moitié à la charge de chacune des parties (art. 66 al. 1 LTF) et de compenser les dépens (art. 68 al. 1 et 2 LTF). 
Vu l'issue du litige, la cause sera renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision sur les frais et dépens de l'instance cantonale (art. 67 et 68 al. 5 LTF
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
 
1. 
Le recours formé contre l'arrêt de la Chambre des recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. 
 
2. 
Le recours dirigé contre le jugement de la Cour civile est partiellement admis et le jugement attaqué est annulé. 
 
3. 
Il est dit que X.________ SA versera, sous déduction des sommes de 10'000 fr. (valeur au 30 janvier 1997), de 20'000 fr. (valeur au 16 février 1998) et de 30'000 fr. (valeur au 11 avril 2002), à Y.________ 
186'612 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 juillet 2002, à titre de perte de gain actuelle du 1er novembre 1994 au 15 janvier 2010; 
43'495 fr. 65 avec intérêts à 5% dès le 16 janvier 2010 pour le dommage futur; 
15'140 fr. avec intérêts à 5% dès le 8 février 1993, au titre du tort moral éprouvé. 
 
4. 
Les frais judiciaires, arrêtés à 7'000 fr., sont mis par moitié à la charge des parties. 
 
5. 
Les dépens sont compensés. 
 
6. 
La cause est retournée à la Cour civile pour nouvelle décision sur les frais et dépens de l'instance cantonale. 
 
7. 
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre des recours du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
Lausanne, le 20 décembre 2011 
 
Au nom de la Ire Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: Klett 
 
Le Greffier: Piaget