Avis important:
Les versions anciennes du navigateur Netscape affichent cette page sans éléments graphiques. La page conserve cependant sa fonctionnalité. Si vous utilisez fréquemment cette page, nous vous recommandons l'installation d'un navigateur plus récent.
 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 1/2} 
5P.432/2005 /frs 
 
Arrêt du 3 mars 2006 
IIe Cour civile 
 
Composition 
M. et Mmes les Juges Raselli, Président, 
Nordmann et Hohl. 
Greffier: M. Braconi. 
 
Parties 
Gardy Immobilière SA, 
recourante, 
 
contre 
 
Fondation pour les Terrains Industriels de Genève, 
intimée, représentée par Me Jean-Jacques Martin, avocat, 
1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3, 
 
Office des faillites du canton de Genève, 1227 Carouge GE. 
 
Objet 
art. 9 Cst., etc. (faillite), 
 
recours de droit public contre l'arrêt de la 1ère Section 
de la Cour de justice du canton de Genève du 13 octobre 2005. 
 
Faits: 
A. 
A.a Par acte authentique des 28 et 30 octobre 1974, la Fondation des terrains industriels Praille et Acacias a octroyé à la société Appareillages Gardy SA un droit de superficie sur diverses parcelles contre le versement d'une rente (i.e. 10 fr./m2) et d'une taxe d'aménagement/ exploitation (i.e. 1 fr.85/m2); ces sommes étaient payables semestriellement et d'avance, avec échéances au 1er janvier et au 1er juillet de chaque année. Le paiement de la rente était garanti par une hypothèque en second rang pour trois annuités totalisant 626'407 fr.20. Par la suite, la société Appareillages Gardy SA a changé sa raison sociale en Gardy Immobilière SA (ci-après: Gardy SA), et la Fondation pour les terrains industriels Praille et Acacias a modifié la sienne en Fondation pour les Terrains Industriels de Genève (ci-après: FTI). 
A.b Le 6 septembre 2000, la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève (ci-après: la Fondation de valorisation) a fait notifier à Gardy SA, dans une poursuite en réalisation d'un gage immobilier, un commandement de payer fondé sur quatre cédules hypothécaires au porteur pour un capital de 16'500'000 fr. au total; ces titres servaient de garantie au remboursement d'un prêt accordé antérieurement, grevant le droit de superficie constitué en droit distinct et permanent. Cette poursuite a été frappée d'opposition. Après avoir fait appel du prononcé de mainlevée provisoire, Gardy SA a introduit une action en libération de dette, que le Tribunal fédéral a définitivement rejetée le 13 novembre 2003 (arrêt 4C.195/2003). 
A.c Le 4 avril 2004, la Fondation de valorisation a requis la vente du gage, qui a été fixée au 22 avril 2005. En plus des sommes dues à la prénommée (i.e. 21'790'828 fr.70), l'état des charges comprenait une somme de 626'407 fr.20 correspondant à une hypothèque légale inscrite en deuxième rang en faveur de la FTI. Le droit de superficie a été adjugé à la Fondation de valorisation pour le prix de 13'500'000 fr., qui a été acquitté par compensation. Le 15 septembre 2005, l'office des poursuites a informé les intéressés qu'il n'était pas encore en mesure d'établir le tableau de distribution, mais il a confirmé que la créance de la FTI était entièrement couverte par le prix de vente de l'immeuble. 
B. 
Auparavant, à savoir le 17 septembre 2002, la FTI avait fait notifier à Gardy SA un commandement de payer les sommes de 104'160 fr. plus intérêts à 5 % dès le 1er janvier 2002 et de 104'160 fr. plus intérêts à 5 % dès le 1er juillet 2002, au titre des rentes de superficie impayées pour l'année 2002, auquel la poursuivie a fait opposition. Après l'octroi de la mainlevée provisoire et le rejet de l'action en libération de dette, la FTI a requis la continuation de la poursuite; Gardy SA s'est ainsi vu notifier une commination de faillite le 1er novembre 2004. La débitrice n'ayant versé aucune somme dans le délai imparti par cet acte, la FTI a déposé le 14 juin 2005 une réquisition de faillite. 
 
Par jugement du 11 août 2005, le Tribunal de première instance du canton de Genève a prononcé la faillite de Gardy SA, avec effet dès ce jour à 14 h.16. Statuant le 13 octobre suivant sur l'appel interjeté par la débitrice, la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève a confirmé cette décision. 
C. 
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral pour violation des art. 9 et 29 al. 2 Cst., Gardy SA conclut à l'annulation de cet arrêt. 
 
Des observations sur le fond n'ont pas été requises. 
D. 
Par ordonnance présidentielle du 16 décembre 2005, l'effet suspensif a été attribué au recours. 
 
Le Tribunal fédéral considère en droit: 
1. 
Interjeté en temps utile contre une décision qui confirme un prononcé de faillite en dernière instance cantonale (ATF 118 III 4 consid. 1 p. 5; 119 III 49 consid. 2 p. 51), le présent recours est ouvert sous l'angle des art. 84 al. 2, 86 al. 1, 87 et 89 al. 1 OJ. 
2. 
Après avoir rappelé que les motifs permettant d'annuler le jugement de faillite étaient énoncés de manière limitative par l'art. 174 LP, l'autorité cantonale a retenu qu'aucune des conditions posées par cette disposition n'était réalisée, en sorte que, «pour ce premier motif», l'ouverture de la faillite devait être confirmée. Quoi qu'il en soit, «voulût-on entrer en matière sur les objections [de la débitrice] que la solution ne serait pas différente». En effet, la créance de l'intimée inscrite à l'état des charges dans le cadre de la poursuite en réalisation de gage introduite par la Fondation de valorisation (i.e. 626'407 fr.20) concerne la période du 30 juin 2002 au 30 juin 2005 (cf. art. 779i al. 1 CC). Or, la créance réclamée dans la présente poursuite - et pour laquelle la faillite a été demandée - couvre la période du 1er janvier au 31 décembre 2002. Il subsiste, par conséquent, un «découvert de garantie pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2002, découvert qui n'a pas été payé et auquel le créancier poursuivant n'a pas renoncé». 
2.1 Selon la jurisprudence constante, lorsque la décision attaquée est fondée sur plusieurs motifs indépendants (alternatifs ou subsidiaires), le recourant doit démontrer - sous peine d'irrecevabilité - que chacun d'eux viole ses droits constitutionnels (cf. notamment: ATF 129 I 185 consid. 1.6 p. 189; 122 III 488 consid. 2 p. 489; 117 II 630 consid. 1b p. 631; 113 Ia 94 consid. 1a/bb p. 95/96 et les références citées dans ces arrêts). 
2.2 Dénonçant une violation de son droit à une décision motivée, au sens de l'art. 29 al. 2 Cst., la recourante qualifie de «problématique» le motif subsidiaire de la cour cantonale. Il ressort, toutefois, de son grief tiré de l'omission arbitraire «d'éléments de preuve pertinents» qu'elle a parfaitement compris le sens et la portée de l'arrêt déféré (cf. ATF 114 Ia 233 consid. 2d p. 242). 
2.3 La recourante reproche en outre à la cour cantonale de n'avoir pas tenu compte du fait qu'une gérance légale avait été instituée, en sorte qu'elle se trouvait dans l'impossibilité de verser à l'intimée la somme de 626'407 fr.20, correspondant (en capital) aux rentes de superficie réclamées. Si les juges cantonaux avaient retenu ce fait, ils auraient admis que la dette avait été acquittée et que l'absence de paiement ne tenait pas au comportement ou à l'inaction de la débitrice. 
 
Il ressort des constatations de la juridiction précédente que la créance de l'intimée inscrite à l'état des charges est intégralement couverte par le prix de vente de l'immeuble (supra, let A.c). Il n'est pas nécessaire de rechercher s'il s'agit là d'un «paiement» au sens de l'art. 174 al. 2 ch. 1 LP (sur cette notion: Giroud, Basler Kommentar, vol. II, n. 12 ss ad art. 172 LP), dès lors que la recourante n'a pas valablement réfuté le second motif (subsidiaire) de la cour cantonale. En effet, l'intéressée se borne à affirmer en termes généraux que sa dette est éteinte, mais elle ne démontre pas en quoi il était arbitraire de retenir que la créance afférente à la période du 1er janvier au 30 juin 2002 (i.e. 104'160 fr. en capital) - non couverte par le produit de la réalisation - n'avait pas été payée (art. 90 al. 1 let. b OJ; supra, consid. 2.1). 
3. 
En conclusion, le recours doit être déclaré irrecevable, aux frais de son auteur (art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a pas lieu d'allouer de dépens à l'intimée, qui n'a pas été invitée à répondre sur le fond et s'est opposée à tort à l'octroi de l'effet suspensif (arrêt 5P.291/2004 du 22 septembre 2004, consid. 6, in: ZZZ 2004 p. 428 et la jurisprudence citée). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est irrecevable. 
2. 
La faillite de Gardy Immobilière SA prend effet le 3 mars 2006 à 14 h.45. 
3. 
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de la recourante. 
4. 
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office des faillites du canton de Genève. 
Lausanne, le 3 mars 2006 
Au nom de la IIe Cour civile 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: Le Greffier: