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Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
{T 7} 
I 244/06 
 
Arrêt du 20 juin 2007 
IIe Cour de droit social 
 
Composition 
MM. les Juges U. Meyer, Président, 
Borella et Kernen. 
Greffière: Mme Gehring. 
 
Parties 
P.________, 
recourant, représenté par Me Monique Gisel, avocate, chemin du Chêne 22, 1052 Le Mont-sur-Lausanne, 
 
contre 
 
Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, 
intimé. 
 
Objet 
Assurance-invalidité, 
 
recours de droit administratif contre le jugement du Tribunal des assurances du canton de Vaud du 7 février 2006. 
 
Faits: 
A. 
A.a P.________, ressortissant étranger né en 1949, a exercé le métier de tailleur à titre salarié (50 %) et indépendant (50 %). Souffrant de céphalées tensionnelles avec composante migraineuse apparues à la suite d'une crise d'angoisse survenue au cours du mois de mai 1988, il a été mis au bénéfice d'une rente servie par la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud au regard d'une incapacité de travail de 50 % (rapport du 8 mai 1989 du docteur F.________ [médecin traitant] et rapport d'expertise pluridisciplinaire établi le 27 novembre 1989 par les docteurs S.________ et B.________ [de la Clinique AA.________] et les rapports de consultation correspondants des 15 novembre 1989 des docteurs O.________ et H.________ [de l'Hôpital X.________] et 15 novembre 1989 des docteurs T.________ et E.________ [de la Clinique psychiatrique Y.________]). Par décision du 19 octobre 1989, l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'office AI) a de son côté rejeté une demande de rente déposée le 21 juin 1989, au motif que P.________ ne remplissait pas les conditions d'assurance. 
A.b A la suite de l'incendie de son atelier de travail survenu le 17 septembre 1991, P.________ a été victime d'importantes brûlures au niveau des deux membres inférieurs et il a cessé toute activité lucrative. Par jugement du 10 juillet 1995, le Tribunal correctionnel du district de BB.________ l'a condamné à deux années de réclusion et dix années d'expulsion du territoire suisse pour incendie intentionnel et escroquerie. Le 25 février 1997, P.________ a déposé une seconde demande de prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi d'une rente. 
 
Procédant à l'instruction de celle-ci, l'office AI a recueilli de nombreux avis médicaux (rapport d'expertise du 1er février 1999 complété le 29 avril 1999 des docteurs A.________, R.________ et L.________ [de l'Hôpital X.________, Service de chirurgie plastique et reconstructive, Centre des Brûlés] et rapports des 29 mars 1997 du docteur F.________, 15 novembre 1996 du docteur K.________ [spécialiste FMH en radiologie], 7 novembre 1996 du docteur C.________ [spécialiste FMH en neurologie], 6 février 1995 du docteur Z.________ [spécialiste en chirurgie plastique et reconstructive et chirurgie de la main], 7 mars 1994 du docteur D.________ [spécialiste en anesthésiologie et antalgie], 7 octobre 1992 du docteur M.________ [spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie] et 30 juillet 1992 du docteur I.________ [spécialiste FMH en chirurgie plastique et reconstructive et chirurgie de la main]). 
 
Par décision du 17 juin 1999, l'office AI a rejeté la demande, considérant qu'au regard d'une pleine capacité de travail comme tailleur, l'assuré ne subissait pas de perte de gain lui ouvrant droit à la prestation. De son côté, l'assureur-accidents de P.________ a supprimé avec effet rétroactif au 1er juin 1999 le versement d'une indemnité journalière, servie depuis le 1er novembre 1992 au regard d'une incapacité de travail de 50 % (décision sur opposition du 24 mars 2000 de la Bâloise Assurances). Par courrier du 24 mars 2000, cette dernière a communiqué sa décision sur opposition à l'office AI et joint en annexe copie d'un rapport d'expertise établi par les médecins de l'Hôpital CC.________ (rapport de synthèse du 15 juillet 1999 des docteurs U.________ [spécialiste en neurologie], Q.________ [spécialiste en psychiatrie] et J.________ [spécialiste en rhumatologie et médecine physique] ainsi que les rapports de consultation correspondants des 28 juin 1999 du docteur U.________, 5 juillet 1999 du docteur Q.________ et 12 août 1999 du docteur J.________]). 
B. 
Par mémoire daté du 17 août 1999, P.________ a recouru contre la décision de l'office AI devant le Tribunal des assurances du canton de Vaud. 
 
En cours de procédure, plusieurs avis médicaux supplémentaires ont été versés au dossier (rapports des 14 septembre 2004 du docteur V.________ [spécialiste FMH en psychiatrie auprès du Service médical régional AI, ci-après : SMR], 17 février 2004 de la doctoresse N.________ [spécialiste FMH en chirurgie plastique, reconstructive et traitement des grands brûlés auprès du SMR], 12 février 2004 du docteur L.________, 27 décembre 1994 et 26 août 1992 du docteur F.________ ainsi que 6 janvier 1995 et 7 juin 1991 du docteur G.________ [médecin-conseil auprès du Service DD.________]). 
 
Par jugement du 7 février 2006, le Tribunal a rejeté le recours. 
C. 
P.________ a interjeté un recours de droit administratif contre ce jugement dont il a requis l'annulation en concluant, sous suite de dépens, à l'octroi d'une rente correspondant à une incapacité totale de travail. A titre subsidiaire, il a conclu au renvoi de la cause pour complément d'instruction. En outre, il a requis le bénéfice de l'assistance judiciaire gratuite totale. 
 
L'office AI a conclu implicitement au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer. 
 
Considérant en droit: 
1. 
La loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est entrée en vigueur le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242). L'acte attaqué ayant été rendu avant cette date, la procédure reste régie par l'OJ (art. 132 al. 1 LTF; ATF 132 V 393 consid. 1.2 p. 395). 
2. 
2.1 La décision litigieuse ayant été rendue le 17 juin 1999, la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA), du 6 octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003 (RO 2002 3371) ne s'applique pas à la présente procédure, étant donné que le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 131 V 242 consid. 2.1 p. 243; RAMA 2001 no U 419 p. 101; voir également ATF 121 V 362 consid. 1b p. 366). Il en va de même des modifications de la LAI du 23 juin 2000, entrées en vigueur le 1er janvier 2001 (RO 2000 2677, 2685), du 6 octobre 2000, entrées en vigueur le 1er janvier 2001 (RO 2002 3371), du 21 mars 2003, entrées en vigueur le 1er janvier 2004 (RO 2003 3837) ainsi que de celles du 16 décembre 2005 entrées en vigueur le 1er juillet 2006 (RO 2006 2003), attendu que le présent recours de droit administratif a été formé avant le 1er juillet 2006 (ch. II let. c des dispositions transitoires relatives à la modification du 16 décembre 2005). 
2.2 Le jugement entrepris expose correctement les dispositions légales et la jurisprudence portant sur l'égalité de traitement entre ressortissants suisses et étrangers (art. 4 de la Convention de sécurité sociale du 20 juin 1996 entre la Confédération suisse et l'étranger [RS 0.831.109.245.1]), la notion d'invalidité, son évaluation pour les assurés actifs, l'échelonnement des rentes, la force probante des rapports médicaux et les conditions auxquelles il est possible de s'en écarter. Il suffit d'y renvoyer sur ces points. 
3. 
Le litige porte sur le droit éventuel du recourant, ressortissant étranger, à une rente de l'assurance-invalidité suisse, singulièrement sur son incapacité de travail et sur le taux d'invalidité fondant le droit à cette prestation. 
3.1 Pour dénier le droit de l'assuré à ladite prestation, les premiers juges ont considéré qu'il disposait d'une capacité entière de travail dans son métier de tailleur en se fondant principalement sur les avis des médecins de l'Hôpital X.________. 
3.2 Le recourant conteste ce point de vue, se prévalant d'une incapacité totale de travail dans toute activité lucrative résultant de migraines et de douleurs aux jambes. A l'appui de son point de vue, il se fonde sur l'avis de son médecin traitant (rapport du 29 mars 1997 du docteur F.________). Il fait également grief aux premiers juges d'avoir ignoré le rapport du 7 mars 1994 du docteur D.________. Il leur reproche en outre de s'être fondés sur le rapport des docteurs A.________, R.________ et L.________ qu'il considère comme dépourvu de toute valeur probante au regard des conclusions contradictoires qu'il contient, les médecins concluant tantôt à une capacité de travail de l'assuré limitée à une activité lucrative s'exerçant alternativement en positions allongée et assise, tantôt à une capacité entière de travail comme tailleur. Enfin, il rappelle être au bénéfice d'une rente servie par la Caisse de pensions de l'Etat de Vaud au regard d'une incapacité de travail de 50 % issue des seules migraines; compte tenu en sus de douleurs au niveau des membres inférieurs, il se prévaut globalement d'une incapacité totale de travail dans toute activité lucrative. 
4. 
Il est constant que l'assuré souffre principalement de céphalées tensionnelles avec composante migraineuse ainsi que des séquelles de brûlures subies au niveau des membres inférieurs sur 40 % dont 15 % de deuxième degré sous forme de cicatrices hypertrophiques et chéloïdiennes. 
4.1 Les céphalées sont apparues à la suite d'une crise d'angoisse survenue au cours du mois de mai 1988. Confronté à une apnée de sanglots de son dernier né, le recourant a en effet subi une sévère décompensation psychique ponctuée par des céphalées. A l'issue de multiples investigations médicales, aucune pathologie organique n'a été mise en évidence, de sorte que ces dernières sont demeurées difficilement objectivables. Le tableau clinique s'est avéré essentiellement dominé par une problématique psychiatrique à laquelle se sont superposées des céphalées de type mixte caractérisées par un fond douloureux chronique constrictif avec des épisodes d'exacerbation entraînant des nausées, des vomissements et des phonophotophobies. En réponse à une personnalité particulièrement insécurisée et un système de défense paranoïaque mal structuré, l'assuré a tenté de combler l'insécurité socio-professionnelle dont il souffrait par voie de somatisation en vue d'obtenir des avantages assécurologiques. Les médecins ont conclu à un trouble somatoforme douloureux chez un patient pré-psychotique à traits paranoïaques subissant une incapacité de travail de 50 % au moins sur le plan psychiatrique (rapports des 27 novembre 1989 des docteurs S.________ et B.________, 15 novembre 1989 des docteurs O.________ et H.________ et 15 novembre 1989 des docteurs T.________ et E.________). 
4.2 Par ailleurs, le recourant présente un status sept ans après des brûlures sur 40 % des membres inférieurs dont 15 % ayant nécessité une intervention chirurgicale et un status post-greffe de peau fine au niveau des membres inférieurs. Selon les constatations médicales, les cicatrices de prise de greffe et les zones greffées sont tout à fait stables, souples et ne semblent pas être le siège de prurit à défaut de lésion cutanée (eczéma, écorchures, traces de grattage). Il n'y a pas de déficit fonctionnel résultant des brides cicatricielles. La mobilité des articulations du genou, des chevilles et des hanches demeure préservée. Aucune parésie, ni trouble moteur majeur ne sont observés. Nonobstant l'évolution favorable des cicatrices, les plaintes exprimées par le recourant ont perduré et nécessité de nombreuses investigations médicales notamment de type neurologique et angiologique dont aucune n'a livré d'explication satisfaisante à la symptomatologie (rapports des 28 juin 1999 des docteurs U.________ et W.________, 15 novembre 1996 du docteur K.________, 7 novembre 1996 du docteur C.________, 6 février 1995 du docteur Z.________, 7 octobre 1992 du docteur M.________ et 30 juillet 1992 du docteur I.________). Les plaintes du patient s'avèrent ainsi dépourvues de substrat cutané et disproportionnées au status et aux lésions subies (rapports des 12 août 1999 du docteur J.________ et 1er février 1999 des docteurs A.________ et R.________). Au regard en outre d'importants conflits émotionnels et de facteurs psychosociaux auxquels le recourant se trouve confronté, les médecins ont conclu à un trouble somatoforme douloureux, estimant les chances de succès d'un traitement psychothérapeutique comme faibles (rapports du 15 juillet 1999 des docteurs J.________, U.________, Q.________ et du 5 juillet 1999 du docteur Q.________). 
5. 
Le diagnostic de trouble somatoforme douloureux est ainsi posé à l'issue de rapports médicaux dûment motivés, établis en considération des plaintes exprimées par le recourant, sur la base d'examens médicaux complets et en pleine connaissance de l'anamnèse ainsi que du dossier médical. La description du contexte médical et l'appréciation de la situation médicale sont claires et non contradictoires. En particulier, les conclusions du rapport d'expertise des docteurs A.________ et R.________ du 1er février 1999 et celles du complément établi le 29 avril suivant par les docteurs R.________ et L.________ - en tant que les premières reconnaissent à l'assuré une capacité de travail en positions allongée et assise tandis que les secondes lui attribuent une capacité totale de travail comme tailleur - ne sont pas contradictoires comme prétendu par le recourant. En effet, les premières expriment la capacité de travail correspondant aux plaintes subjectives de l'assuré tandis que les secondes décrivent la capacité de travail raisonnablement exigible de ce dernier. Au demeurant, ces conclusions ne sont pas décisives pour l'issue du présent litige au regard des considérants 6.2 et 6.3 ci-dessous. 
 
Celles des docteurs D.________ (rapport du 7 mars 1994) et F.________ (rapport du 27 mars 1999) ne le sont pas davantage. Dans le rapport précité, le docteur D.________ indique que les plaintes exprimées par l'assuré sont inhabituelles en ce sens qu'elles traduisent essentiellement des démangeaisons intenses, ne survenant qu'en position verticale ou assise et disparaissant quasiment en position allongée. Il ajoute qu'aucune des mesures médicales préconisées ne s'est révélée efficace, de sorte que la prise en charge par le service d'antalgie a été interrompue. Enfin, il précise que les symptômes sont d'origine partiellement somatique et qu'à son avis, l'intéressé n'est pas simplement à la recherche d'une rente d'assurance malgré une constellation psychologique particulière. De son côté, le docteur F.________ diagnostique dans le rapport précité un status post-ulcère duodénal, une oesophagite peptique de stade I sur hernie hiatale, un "Thoracic Outlet Syndrome" (TOS) du membre supérieur gauche, des céphalées tensionnelles et un status post-brûlures des deux membres inférieurs; il précise que de toutes ces pathologies, les plaintes majeures ressortissent des séquelles dues aux brûlures, soit de cicatrices chéloïdiennes consécutives aux greffes subies avec, anamnestiquement, un important prurit maximum au procubitus entraînant depuis 1991 une incapacité totale de travail dans le métier de tailleur. Ces avis ne sauraient en effet être déterminants pour l'issue du litige dès lors que le premier n'indique aucune incapacité de travail, tandis que le second émane du médecin traitant de l'assuré, dont il est admis de jurisprudence constante, qu'il est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc p. 353). 
 
Sur le vu de ce qui précède, il apparaît que le diagnostic de trouble somatoforme douloureux a été retenu à l'issue de rapports médicaux répondant aux critères jurisprudentiels permettant de leur accorder une pleine valeur probante (ATF 125 V 351 consid. 3a p. 352, 122 V 157 consid. 1c et les références p. 160), de sorte qu'il n'y a pas lieu de s'en écarter. 
6. 
6.1 Parmi les atteintes à la santé psychique, qui peuvent, comme les atteintes physiques, provoquer une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 aLAI, on doit mentionner - à part les maladies mentales proprement dites - les anomalies psychiques qui équivalent à des maladies. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible. Il faut donc établir si et dans quelle mesure un assuré peut, malgré son infirmité mentale, exercer une activité que le marché du travail lui offre, compte tenu de ses aptitudes. Le point déterminant est ici de savoir quelle activité peut raisonnablement être exigée dans son cas. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société (ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 294 consid. 4c in fine p. 298). 
 
Dans un arrêt publié dans la pratique VSI 2000 p. 152, le Tribunal fédéral des assurances a défini, en se fondant principalement sur une étude de Mosimann (somatoforme Störungen : Gerichte und [psychiatrische] Gutachten, in RSAS 1999, p. 1 ss et 105 ss), la tâche du médecin ou de l'expert, lorsque celui-ci doit se prononcer sur le caractère invalidant de troubles somatoformes douloureux. Selon cette jurisprudence, l'expert doit, sur le plan psychiatrique, poser un diagnostic dans le cadre d'une classification reconnue et se prononcer sur le degré de gravité de l'affection. Il doit évaluer le caractère exigible de la reprise par l'assuré d'une activité lucrative. Ce pronostic tiendra compte de divers critères, tels une structure de la personnalité présentant des traits prémorbides, une comorbidité psychiatrique, des affections corporelles chroniques, une perte d'intégration sociale, un éventuel profit tiré de la maladie, le caractère chronique de celle-ci sans rémission durable, une durée de plusieurs années de la maladie avec des symptômes stables ou en évolution, l'échec de traitements conformes aux règles de l'art. Le cumul des critères précités fonde un pronostic défavorable. Enfin, l'expert doit s'exprimer sur le cadre psychosocial de la personne examinée. Au demeurant, la recommandation de refus d'une rente doit également reposer sur différents critères. Au nombre de ceux-ci figurent la divergence entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (VSI 2000 p. 155 consid. 2c). 
6.2 Dans leur rapport du 15 novembre 1989, les docteurs T.________ et E.________ font état d'une superposition entre le fonctionnement psychique du recourant - à savoir celui d'un homme fragile présentant un système de défense paranoïaque mal structuré - et la réalité sociale de ce dernier - soit celle d'un ressortissant étranger se prétendant poursuivi dans son pays d'origine et tentant de trouver sa place dans un environnement dépourvu de ses repères habituels - . Ils expliquent qu'en réponse à une personnalité particulièrement insécurisée et à un système de défense paranoïaque mal structuré, l'assuré tente de combler son insécurité socio-professionnelle par somatisation en vue d'obtenir des avantages assécurologiques. Ils recommandent une prise en charge psychothérapeutique ainsi qu'une assistance sur le plan social afin de favoriser la réinsertion socio-professionnelle de l'intéressé. De son côté, le docteur Q.________ décrit un expertisé confronté à de multiples facteurs de stress psychosociaux ainsi qu'à des conflits émotionnels dont il n'a vraisemblablement conscience que partiellement et qu'il refoule en partie. En particulier, ce médecin souligne le fait que l'assuré ne s'est jamais réellement intégré en Suisse; qu'il n'est pas parvenu à stabiliser sa situation professionnelle; que ses relations sociales ne s'étendent pas au-delà de son cercle familial; qu'au terme de sa peine d'emprisonnement, il sera probablement expulsé du territoire suisse au risque d'être, pour la seconde fois dans sa vie, déraciné et séparé de sa famille contre son gré. Enfin, l'expert précise que même si le recourant a manifesté une attitude méfiante au cours de l'entretien, celle-ci se justifie indiscutablement au regard des épreuves subies dans son pays d'origine et de sa mauvaise intégration en Suisse. Pour autant, il ne considère pas que ce dernier souffre de stress post-traumatique, ni qu'il présente des traits paranoïaques ou pré-psychotiques ou encore un trouble de la personnalité. Il considère qu'une capacité de travail de 50 % est raisonnablement exigible et s'avérerait même bénéfique du point de vue thérapeutique. Il estime en revanche qu'un traitement psychothérapeutique n'entraînerait guère de rémission au syndrome de somatisation (rapport du 5 juillet 1999). 
Cela étant, aucune des pièces médicales ne permet de se convaincre que l'on se trouve en présence d'un trouble somatoforme douloureux invalidant au sens la jurisprudence précitée - ou de celle publiée aux ATF 130 V 352 mais inapplicable en l'espèce conformément aux principes évoqués supra (cf. consid. 2.1) - . Au vu des diagnostics ayant valeur de maladie aux yeux des spécialistes, il y a lieu de nier l'existence d'une co-morbidité psychiatrique d'une acuité suffisamment importante pour admettre qu'un effort de volonté en vue de surmonter la douleur et de réintégrer un processus de travail, n'est pas exigible de la part du recourant. En outre, ce dernier n'a pas épuisé ses ressources adaptatives. En particulier, il n'est pas établi qu'il subisse une perte d'intégration sociale telle qu'il ne puisse réintégrer un processus de travail; au contraire, le docteur Q.________ considère qu'une réinsertion professionnelle s'avérerait favorable sous l'angle thérapeutique et les docteurs S.________ et E.________ recommandent expressément une assistance sociale en ce sens. L'intéressé ne présente pas non plus un état psychique cristallisé sans évolution possible au plan thérapeutique. Il n'y a pas lieu non plus de conclure à l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art. 
6.3 Au regard des critères présidant à l'examen du caractère invalidant de troubles somatoformes douloureux, il n'apparaît pas que ceux-ci se manifestent in casu avec une sévérité telle que, d'un point de vue objectif, ils excluent la mise en valeur de la capacité de travail du recourant. De surcroît, les experts imputent l'incapacité de travail qu'ils constatent essentiellement aux difficultés socio-culturelles rencontrées en Suisse par l'assuré. Or, de telles difficultés constituent des facteurs dont l'assurance-invalidité n'a pas à répondre (ATF 107 V 21; RCC 1991, p. 332 ss consid. 3c). 
7. 
Cela étant et compte tenu en outre du fait que le recourant ne subit aucune limitation fonctionnelle sur le plan strictement organique, la Cour de céans, suivant en cela les premiers juges, considère que nonobstant les conclusions des experts, le recourant présente une capacité totale de travail dans son métier de tailleur. Contrairement au point de vue du recourant, ce prononcé ne s'oppose pas à celui que le Tribunal fédéral des assurances a rendu le 6 juillet 1998 dans la cause opposant P.________ à son assureur-accidents (U 150/97), l'objet de ce dernier litige n'ayant pas porté sur la capacité résiduelle de travail mais sur le montant de son gain assuré. 
8. 
Sur le vu de ce qui précède, le jugement attaqué n'est pas critiquable et le recours se révèle mal fondé. 
9. 
Dans la mesure où le recourant sollicite l'octroi de l'assistance judiciaire gratuite totale, sa requête - en tant qu'elle vise la dispense de payer des frais de procédure - s'avère sans objet au regard de l'art. 134 OJ. Quant à la demande d'assistance gratuite d'un avocat en instance fédérale, les conditions auxquelles l'art. 152 al. 1 et 2 OJ subordonne la désignation d'un avocat d'office sont remplies; l'attention du recourant est cependant attirée sur le fait qu'il devra rembourser la caisse du tribunal, s'il devient ultérieurement en mesure de le faire (art. 152 al. 3 OJ). 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce: 
1. 
Le recours est rejeté. 
2. 
Il n'est pas perçu de frais de justice. 
3. 
L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires (y compris la taxe à la valeur ajoutée) de Me Gisel sont fixés à 2'500 fr. pour la procédure fédérale et seront supportés par la caisse du tribunal. 
4. 
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales. 
Lucerne, le 20 juin 2007 
Au nom de la IIe Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
Le Président: La Greffière: