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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
{T 0/2} 
 
8C_206/2013  
   
   
 
 
 
Arrêt du 18 novembre 2013  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Frésard et Geiser Ch., Juge suppléant. 
Greffier: M. Beauverd. 
 
Participants à la procédure 
P.________, 
représenté par Me Olivier Subilia, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Conseil d'Etat du canton de Fribourg, Rue des Chanoines 17, 1700 Fribourg,  
intimé. 
 
Objet 
Droit de la fonction publique (indemnité de départ), 
 
recours contre le jugement de la Ire Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg du 29 janvier 2013. 
 
 
Faits:  
 
A.   
Par contrat de droit privé du 11 novembre 1991, P.________, né en 1949, a été engagé par Xx.________ (devenue par la suite X.________) en qualité de chef de Yy.________ (devenu le Service Y.________), à compter du 1er janvier 1992. Le 4 septembre 2006, le Conseil d'Etat a édicté une ordonnance soumettant formellement le personnel du Service Y.________ à la loi sur le personnel de l'Etat (du 17 octobre 2001; LPers-FR, RSF 122.70.1). En sa qualité d'employé du Service Y.________, P.________ était affilié auprès de Z.________ - Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire et non à la Caisse de prévoyance du personnel de l'Etat. La nouvelle répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, ayant entraîné la fermeture du Service Y.________, le Conseiller d'Etat chef de X.________ a signifié à P.________, par lettre du 27 juin 2011, que son poste serait supprimé avec effet au 31 décembre suivant et que son engagement prendrait fin à cette date. Au regard de son âge, le droit à un pont pré-AVS de 2'320 fr. par mois lui a été reconnu jusqu'à la naissance du droit à une rente de vieillesse de l'AVS ou à une rente de l'AI. 
 
 Le recours formé contre cette décision par l'intéressé, qui prétendait une indemnité pour suppression de poste de 211'923 fr. en lieu et place d'un pont pré-AVS, a été rejeté par le gouvernement cantonal par prononcé du 6 mars 2012. 
 
B.   
Saisie par P.________ d'un recours contre ce prononcé, la Ire Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg l'a rejeté par arrêt du 29 janvier 2013. 
 
C.   
P.________ interjette recours en matière de droit public contre ce jugement dont il demande la réforme en ce sens qu'une indemnité pour suppression de poste lui soit accordée en lieu et place du prononcé de mise à la retraite anticipée. A titre subsidiaire, il conclut à l'annulation de l'arrêt entrepris avec renvoi à l'instance précédente. 
 
 Sans formuler d'observations sur le recours, le Conseil d'Etat conclut à son rejet. 
 
 
Considérant en droit:  
 
1.   
Selon l'art. 83 let. g LTF, en matière de rapports de travail de droit public (lorsque, comme en l'espèce, la question de l'égalité des sexes n'est pas en cause), le recours en matière de droit public est irrecevable contre les décisions qui concernent une contestation non pécuniaire. Pour que le recours soit recevable, il faut encore, en principe, que la valeur litigieuse minimale de 15'000 fr. soit atteinte (art. 85 al. 1 let. b LTF). 
 
 Vu que la contestation porte sur l'octroi de l'indemnité prétendue par le recourant devant la cour cantonale, s'élevant à 211'923 fr., ce seuil est largement dépassé. 
 
2.   
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - ce qui correspond à la notion d'arbitraire (ATF 136 II 304 consid. 2.4 p. 313; 135 II 145 consid 8.1 p. 153) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF). La violation peut consister en un état de fait incomplet, car l'autorité précédente viole le droit matériel en n'établissant pas tous les faits pertinents pour l'application de celui-ci (ATF 134 V 53 consid. 4.3 p. 62). La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2 LTF seraient réalisées. A défaut d'une telle motivation, il n'est pas possible de prendre en considération un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée, ni des faits qui n'y sont pas contenus (ATF 136 I 184 consid. 1.2 p. 187; 133 IV 286 consid. 1.4 et 6.2 p. 287 s.). Le recourant ne peut d'ailleurs demander une rectification de l'état de fait que si celle-ci est de nature à influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF). 
 
3.  
 
3.1. Aux termes de l'art. 47 de la LPers-FR, en cas de suppression de poste, le collaborateur ou la collaboratrice est transféré-e à un poste disponible correspondant à sa formation et à ses aptitudes (al. 1). Si aucun poste correspondant à la formation et aux aptitudes du collaborateur ou de la collaboratrice n'est disponible, les rapports de service sont résiliés (al. 2). Sous réserve de l'alinéa 5, le collaborateur ou la collaboratrice a droit à une indemnité en fonction de l'âge et des années de service en cas de licenciement ou de transfert, au sens de l'article 35 al. 2, à un poste rémunéré à un niveau inférieur (al. 4). L'indemnité n'est pas due lorsque le collaborateur ou la collaboratrice a refusé une offre de poste équivalant, sur le plan de la rémunération, au poste supprimé; elle n'est pas due non plus lorsque l'Etat a procuré au collaborateur ou à la collaboratrice un emploi auprès d'un autre employeur public ou privé, à des conditions comparables à celles dont il ou elle bénéficiait (al. 5). Les articles 50 à 55 relatifs à la mise à la retraite sont réservés (al. 6).  
 
 En cas de suppression de poste, lorsque le collaborateur ou la collaboratrice remplit la condition de l'article 52 al. 1 let. b, la mise à la retraite peut aussi être prononcée en lieu et place du licenciement consécutif à une suppression de poste (art. 53 al. 1 LPers-FR). L'art. 52 al. 1 let. b LPers-FR prévoit que l'autorité d'engagement peut procéder à une mise à la retraite, entre autres conditions, si le collaborateur ou la collaboratrice a atteint un âge donnant droit à une pension de retraite au sens de la législation sur la Caisse de prévoyance du personnel de l'Etat. Le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à la prise en charge adéquate par l'employeur des désavantages résultant de la mise à la retraite avant l'âge donnant droit à une rente de vieillesse de l'AVS. La prise en charge est au moins équivalente aux prestations octroyées au personnel qui prend volontairement sa retraite avant l'âge donnant droit à une rente de vieillesse de l'AVS (art. 54 al. 1 LPers-FR). 
 
3.2. L'indemnité prévue par l'art. 47 LPers-FR est calculée selon des normes détaillées à l'art. 34 du Règlement du personnel de l'Etat (RPers-FR; RSF 122.70.11). En cas de mise à la retraite consécutive à une suppression de poste, l'Etat participe au remboursement de l'avance AVS consentie par la Caisse de prévoyance du personnel de l'Etat, à raison de 100 % de la rente maximale AVS, pour une activité à plein temps. Ces prestations remplacent l'indemnité prévue à l'article 34 susmentionné (art. 39 al. 4 RPers-FR).  
 
4.  
 
4.1. Le recourant soutient que l'autorité ne pouvait, sans tomber dans l'arbitraire, lui accorder les prestations prévues en cas de mise à la retraite anticipée, en lieu et place de l'indemnité prévue par l'art. 47 LPers-FR. Tout d'abord, il estime que le fait qu'il était affilié à une autre institution de prévoyance que la Caisse de prévoyance de l'Etat de Fribourg empêche que soient appliquées à son cas les dispositions de l'art. 52 al. 1 let. b LPers-FR. Selon lui, la condition de l'âge ne serait pas remplie, le règlement de l'institution de prévoyance à laquelle il est affilié fixant pour l'ouverture du droit à la pension de vieillesse des conditions différentes de celles de la caisse susnommée. On ne voit toutefois pas pourquoi la référence de la loi à une norme contenue dans un autre texte, alors que celui-ci ne s'applique pas à la situation d'un administré, serait dépourvue d'effet.  
 
4.2. L'argumentation du recourant sur ce point revient en réalité à prétendre que l'autorité ne pourrait appliquer les dispositions de l'art. 53 al. 1 LPers-FR qu'à la condition que l'intéressé prenne effectivement une retraite anticipée, ce qui a été expressément exclu par le gouvernement cantonal (décision du 6 mars 2012) et par la cour cantonale (arrêt du 29 janvier 2013), de manière qui ne prête pas le flanc à la critique.  
 
4.3. Le recourant paraît en outre soutenir que l'autorité ne dispose pas de la faculté de choisir entre l'indemnisation et la mise à la retraite anticipée, alors que les instances de recours précédentes ont retenu qu'elle devait se déterminer en opportunité, en tenant compte des principes de l'égalité de traitement et de la proportionnalité, du montant de la pension de retraite du collaborateur, de ses charges de famille ainsi que de son état de santé. Le recourant ne motive toutefois pas sa position sur ce point, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'examiner (art. 106 al. 2 LTF).  
 
4.4. En ce qui concerne le choix du mode d'indemnisation du collaborateur dont le poste est supprimé et qui ne peut être transféré dans un autre poste, le recourant le critique à mesure qu'il aurait été motivé par les autorités précédentes uniquement par le fait qu'il percevait, dans la fonction supprimée, des revenus importants. Il ne peut être suivi car, ce faisant, l'intéressé perd de vue les considérations des premiers juges non seulement sur sa situation durant son activité au Service Y.________, mais aussi sur celle qui pourrait être la sienne en demandant dès maintenant une rente de la prévoyance professionnelle.  
 
4.5. Par ailleurs, P.________ soutient que l'Etat de Fribourg n'aurait eu d'autre choix que de lui octroyer une indemnité pour licenciement car lui servir seulement un pont pré-AVS ne lui donne pas la garantie qu'il ne subira pas de réduction actuarielle de sa rente de vieillesse du deuxième pilier.  
 
 A supposer que ce moyen ne repose pas sur un fait nouveau, au sens de l'art. 99 al. 1 LTF, et qui serait donc irrecevable, force serait de retenir que le recourant n'a jamais démontré dans la procédure, même par indices, qu'il subirait une telle réduction actuarielle de sa pension. A cet égard, la cour cantonale a admis que le recourant semble en mesure de pouvoir continuer à vivre dans de bonnes conditions, malgré son âge proche de la retraite et qu'il n'aura pas nécessairement besoin de demander le versement de sa rente auprès de Z.________. Or, P.________ n'a pas prétendu que ces considérations ne seraient pas pertinentes et il n'existe dès lors pas de motivation suffisante pour permettre au Tribunal fédéral de s'en écarter (cf. art. 105 al. 2 LTF). 
 
5.   
Le recourant se plaint d'être contraint, ensuite de la décision querellée de l'employeur public, de demander une rente de vieillesse anticipée de son institution de prévoyance professionnelle ou alors de faire valoir une prestation de sortie auprès d'elle. Il voit en cela une violation de l'art. 2 al. 1bis LFLP
 
 Ce point de vue est mal fondé. Selon cette disposition, entrée en vigueur le 1 er janvier 2010 (RO 2009 5187), l'assuré a droit à une prestation de sortie s'il quitte l'institution de prévoyance entre l'âge où le règlement lui ouvre au plus tôt le droit à une retraite anticipée et l'âge réglementaire ordinaire de la retraite, et s'il continue d'exercer une activité lucrative ou s'annonce à l'assurance-chômage (première phrase). La volonté du législateur fédéral en édictant cette règle, a été exprimée dans le rapport de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national du 14 janvier 2009, établi à la suite d'une initiative parlementaire et publié dans la Feuille fédérale (2009 929 ss), de la manière suivante:  
 
 « Les institutions de prévoyance peuvent prévoir dans leur règlement qu'un départ à la retraite est possible au plus tôt à l'âge de 58 ans révolus (cf. art. 1i, al. 1 OPP 2). Par ailleurs, les dispositions règlementaires peuvent stipuler que la dissolution des rapports de travail au-delà de cet âge déclenche automatiquement le versement d'une prestation de vieillesse. La nouvelle disposition doit empêcher cet automatisme et garantir que les personnes ayant atteint l'âge règlementaire minimal ouvrant le droit à des prestations de vieillesse qui souhaitent poursuivre l'exercice d'une activité lucrative au-delà de la fin d'un rapport de travail déterminé n'en soient pas dissuadées en raison de faits propres au système de la prévoyance professionnelle ». 
 
 C'est dire que le droit fédéral posé à l'art. 2 al. 1bis LFLP a seulement pour but de garantir à un assuré que la dissolution d'un rapport de travail à un certain âge n'entraînera pas automatiquement le versement d'une rente de vieillesse, mais qu'il pourra poursuivre une activité lucrative ou s'annoncer au chômage. Il n'est toutefois nullement question de lui garantir qu'il n'aura pas à solliciter une telle rente, selon sa situation. Pour le surplus, il y a lieu de renvoyer à la motivation de l'arrêt entrepris (consid. 3). 
 
6.   
Le recourant invoque une violation du principe de l'égalité de traitement. Il pense pouvoir comparer sa situation à celle d'autres collaborateurs du Service Y.________ mentionnés dans la décision du Conseil d'Etat du 6 mars 2012, auxquels l'Etat a versé des indemnités plutôt qu'un pont-AVS parce qu'ils n'auraient touché qu'un montant minime au titre de la rente de retraite. P.________ fait valoir qu'il ne recevrait qu'un pont pré-AVS de 2'120 fr. mensuellement et qu'il y aurait lieu de considérer ce montant également comme minime. 
 
 Ce moyen est manifestement mal fondé. En effet, une décision viole le principe de l'égalité consacré à l'art. 8 al. 1 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui est semblable n'est pas traité de manière identique et ce qui est dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante (ATF 134 I 23 consid. 9.1 p. 42 et la jurisprudence citée). Les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (ATF 129 I 113 consid. 5.1 p. 125; 125 I 1 consid. 2b/aa p. 4; 123 I 1 consid. 6a p. 7 et la jurisprudence citée). Or, en l'occurrence, la rente de retraite qualifiée de minime par le gouvernement cantonal dans le cas de certains collaborateurs du Service Y.________ n'est pas l'avance AVS, mais la rente de vieillesse servie par l'institution de prévoyance professionnelle. Le Conseil d'Etat indique d'ailleurs, au considérant 2c de sa décision du 6 mars 2012, que, compte tenu du salaire annuel qu'il réalisait durant son activité au Service Y.________ (231'188 fr.), le recourant peut bénéficier d'une pension de retraite le mettant à l'abri de la précarité. Les situations que voudrait comparer ce dernier ne sont donc pas du tout identiques. 
 
7.   
Dans un dernier moyen, le recourant se plaint d'une violation du droit d'être entendu au motif que les instances précédentes ont ignoré sa requête tendant à obtenir l'examen de la situation de certains collaborateurs du Service Y.________ qui auraient perçu une indemnité de départ, notamment par la production de leur dossier. 
 
 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., comprend le droit pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier (ATF 126 I 7 consid. 2b p. 10), de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 II 286 consid. 5.1 p. 293; 132 II 485 consid. 3.2 p. 494). Il ne saurait toutefois être question d'exiger de l'autorité qu'elle se penche sur la situation de tiers sans que le grief d'inégalité de traitement ne repose sur des indices ou des soupçons concrets en rapport avec la question litigieuse. Il ne suffit pas d'alléguer, comme le fait le recourant en instance fédérale, « qu'il existe vraisemblablement des dossiers que l'autorité intimée ne souhaite pas transmettre au recourant ». Faute de motivation suffisante, il n'y pas lieu d'examiner ce grief (art. 106 al. 2 LTF). 
 
8.   
Il suit des considérants qui précèdent que le recours doit être rejeté. Vu l'issue du litige, les frais de justice doivent être supportés par le recourant, qui succombe (art. 66 al. 1, première phrase, LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:  
 
1.   
Le recours est rejeté. 
 
2.   
Les frais judiciaires, arrêtés à 3000 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Ire Cour administrative du Tribunal cantonal du canton de Fribourg . 
 
 
Lucerne, le 18 novembre 2013 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente: Leuzinger 
 
Le Greffier: Beauverd