Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
5A_350/2024
Arrêt du 3 mars 2025
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux Bovey, Président,
Herrmann et Josi.
Greffière : Mme Gudit-Kappeler.
Participants à la procédure
A.________,
représentée par Me Isaline Ottomano, avocate,
recourante,
contre
Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève,
rue des Glacis-de-Rive 6, 1207 Genève,
1. B.________,
2. C.________,
représenté par Me Sarah Pézard, avocate,
Objet
retrait de la garde et du droit de déterminer le lieu de résidence,
recours contre la décision de la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève du 23 avril 2024 (C/27713/2019-CS, DAS/98/2024).
Faits :
A.
D.________, né en 2019, et E.________, née en 2022, sont les enfants de A.________ et de C.________.
Toute la famille a vécu sous le même toit jusqu'au mois d'août 2023.
B.
B.a. Le 16 août 2023, les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) ont transmis un signalement au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève (ci-après: Tribunal de protection) concernant la mineure E.________.
Celle-ci était hospitalisée depuis le 14 août 2023 dans un contexte d'investigations de lésions cutanées, en vue d'effectuer un bilan de maltraitance. L'enfant présentait, depuis son premier mois de vie, des lésions cutanées et avait été suivie par son pédiatre, des hématologue, immunologue, dermatologue et rhumatologue pour une suspicion de maladie auto-immune, rhumatologique ou hématologique en cours d'investigation.
Au début du mois de juillet 2023, elle avait été hospitalisée à U.________ (Espagne), où la famille se trouvait en vacances, dans un service de soins intensifs, pour une infection "à départ cutané"; elle avait ensuite été transférée au service des soins intensifs des HUG le 22 juillet 2023, puis hospitalisée dans une autre unité jusqu'au 7 août 2023, date à laquelle elle avait pu rentrer à domicile, avec un suivi ambulatoire. Le 14 août 2023, à la suite d'une consultation, il avait été décidé, en accord avec F.________, de l'hospitaliser à nouveau pour une surveillance clinique et afin d'effectuer un bilan de suspicion de maltraitance. Le 15 août 2023, les rapports provisoires des imageries réalisées (IRM du corps entier, IRM cérébral et IRM de la colonne vertébrale) n'avaient pas décelé de lésions pouvant être le signe d'une maltraitance. Le 16 août 2023, les rapports provisoires des radiographies du corps entier (avant-bras, humérus, colonne totale, pieds, jambes, fémurs, crâne, thorax, bassin) avaient mis en évidence deux fractures distinctes, une fracture métaphysaire de l'humérus droit, ancienne, spécifique d'une maltraitance selon les radiologues pédiatres, ainsi qu'une fracture diaphysaire cubitale gauche, ancienne, probablement sur mécanisme de torsion, également suspecte d'une maltraitance. Les HUG avaient contacté le service de radiologie de l'hôpital de U.________, lequel avait attesté de la présence de la fracture métaphysaire de l'humérus droit, ainsi qu'une suspicion de fracture costale. Des photographies du corps de l'enfant étaient jointes au signalement des HUG, montrant l'ampleur des lésions cutanées dont elle souffrait.
B.b. Le 17 août 2023, le Service de protection des mineurs du canton de Genève (ci-après: SPMi) a porté les faits qui précèdent à la connaissance de la police.
Ce service indiquait avoir pris contact le 17 août 2023 avec le Dr G.________, médecin légiste dont l'avis avait déjà été sollicité par l'équipe de la pédiatrie des HUG le 15 août 2023, l'équipe pluridisciplinaire ne parvenant pas à expliquer l'intégralité du tableau clinique de l'enfant, en dépit de plusieurs mois d'investigations. Selon le Dr G.________, les blessures apparentes sur la peau de la mineure pouvaient être dues à des morsures, des coups d'ongles, des préhensions fortes, ainsi que des potentiels jets de liquides chauds ou acides. Selon les informations fournies au Dr G.________ par l'équipe de pédiatrie, les lésions s'aggravaient lorsque l'enfant était prise en charge par ses parents et son état s'améliorait lorsqu'elle était hospitalisée. Le Dr G.________ émettait l'hypothèse d'un Syndrome de Münchhausen par procuration, qui permettait d'expliquer le tableau clinique inhabituel et les améliorations constatées en l'absence des parents. Toujours selon le même médecin, certaines blessures cutanées se trouvaient sur des zones hors d'atteinte de l'enfant, laquelle n'était par ailleurs pas encore en état de marcher. De ce fait et bien que la piste de la maladie n'ait pas été écartée, le faisceau d'arguments concordait avec des faits de maltraitance grave.
B.c. Une procédure pénale a été ouverte à l'encontre des deux parents, qui ont été mis en prévention. Des mesures de substitution ont été instaurées sous la forme d'une interdiction de tout contact avec leurs enfants, sous réserve de l'accord du Ministère public du canton de Genève (ci-après: Ministère public) ou du Tribunal de protection.
B.d. Par décision de mesures superprovisionnelles du 18 août 2023, le Tribunal de protection a retiré à A.________ et à C.________ la garde de leurs deux enfants ainsi que le droit de déterminer leur lieu de résidence, et a ordonné le placement de ceux-ci au sein des HUG; le droit aux relations personnelles avec les deux enfants a été suspendu et diverses curatelles ont été instaurées.
B.e. Par décisions du même jour, B.________, avocate, a été désignée en tant que curatrice des enfants, son mandat étant limité à leur représentation dans le cadre de la procédure pendante devant le Tribunal de protection.
B.f. Dans un courriel du 23 août 2023 adressé au Ministère public, le Dr H.________, spécialiste en médecine légale, chef de clinique, a indiqué que les mutations des gènes impliqués dans l'ostéogenèse imparfaite (maladie des os de verre) avaient été recherchées sur l'enfant E.________ mais qu'aucune anomalie n'avait été détectée, de sorte que l'enfant ne souffrait pas de cette maladie.
B.g. Dans un rapport du 29 août 2023, les HUG ont relaté les faits transmis par l'équipe infirmière concernant le mineur D.________. Ce dernier avait déclaré que "E.________ a beaucoup de bobos sans doute parce que papa tape sur le ventre de E.________, je l'ai vu". L'enfant avait également indiqué que son père le tapait lorsqu'il faisait des bêtises.
D.________ a spontanément répété ces propos, notamment à la curatrice du SPMi le 31 août 2023.
B.h. Le 21 septembre 2023, le SPMi a adressé un rapport au Tribunal de protection. Il en ressort notamment que A.________ et C.________ n'avaient pas été en mesure d'expliquer l'origine des fractures relevées sur leur fille. Il en ressort également que, depuis son hospitalisation, l'état somatique de E.________ s'améliorait et qu'elle n'avait pas présenté de nouvelles lésions. Trois d'entre elles, profondes (épaules et fesse), persistaient et avaient nécessité plusieurs interventions chirurgicales sous narcose complète. L'enfant avait pu passer en "hospitalisation sociale" le 18 septembre 2023. E.________ présentait un bon développement cognitif et un léger retard moteur, qui s'améliorait en lien avec la progression de son état médical. Elle était décrite comme souriante et parvenant à entrer en lien avec l'extérieur. D.________, pour sa part, avait été soumis à une scintigraphie osseuse qui n'avait révélé aucune lésion. Il avait spontanément indiqué, en présence de la curatrice et d'une infirmière, qu'il se faisait taper par ses parents lorsqu'il faisait des bêtises. Il avait verbalisé, tant à l'équipe infirmière qu'auprès de l'Unité de guidance, qui le suivait deux fois par semaine, des gestes de violence de ses parents à son encontre, envers sa soeur et entre eux. Il présentait un bon développement pour son âge et parvenait à verbaliser ses émotions.
Le SPMi a préavisé le maintien du retrait du droit de garde et de déterminer le lieu de résidence des mineurs à l'égard des deux parents, le placement des enfants en famille d'accueil ou en foyer, le maintien de la suspension des relations personnelles entre les mineurs et les parents, le temps qu'une évaluation psychiatrique des parents et une évaluation pédopsychiatrique puissent apporter des pistes pour trouver un lieu adapté à la reprise des relations personnelles; pour le surplus, le SPMi a préconisé le maintien des curatelles existantes et la mise en oeuvre d'une expertise psychiatrique familiale.
B.i. Le Tribunal de protection a tenu une audience le 21 septembre 2023.
A.________ a notamment allégué que le fait d'apprendre que la mineure E.________ présentait des fractures avait été un choc pour elle-même et C.________. Il n'avait jamais été question de maltraitance sur l'enfant avant le 14 août 2023. Elle a contesté qu'elle-même ou le père de l'enfant aient pu être à l'origine des lésions présentées par celle-ci. Selon elle, la seule explication était à rechercher dans une sensibilité particulière de l'enfant, peut-être également au niveau de son squelette. Elle n'imaginait pas non plus que des personnes de leur entourage aient pu être responsables d'actes de maltraitance. Le père a confirmé les dires de la mère et tous deux se sont déclarés favorables à la mise en oeuvre d'une expertise familiale.
Un représentant du SPMi a déclaré être dans l'attente d'une rencontre avec le service de pédopsychiatrie de liaison des HUG, avec lequel la possibilité de rétablir les relations entre les parents, les enfants et les autres membres de la famille allait être examinée.
Selon la curatrice des enfants, une reprise des contacts entre les enfants et les parents n'était pas envisageable et il convenait encore d'investiguer ce que l'enfant D.________ avait à dire.
B.j. Par ordonnance du 21 septembre 2023, le Tribunal de protection a retiré à A.________ et à C.________ la garde et le droit de déterminer le lieu de résidence des enfants D.________ et E.________ (chiffre 1 du dispositif), ordonné le placement de ces derniers en foyer, dans l'attente d'une place en famille d'accueil de transition, et maintenu leur placement en hospitalisation sociale, le temps de leur trouver un foyer ou une famille d'accueil (ch. 2). Il a en outre suspendu le droit aux relations personnelles des deux parents avec les enfants (ch. 3), invité les curateurs du SPMi à préaviser toute possibilité de reprise du droit de visite entre les parents et les enfants (ch. 4), refusé en l'état l'instauration de relations personnelles entre les enfants et les membres de leur famille élargie (ch. 5), instauré une curatelle d'assistance éducative, d'organisation et de surveillance des relations personnelles, d'organisation, de surveillance et de financement des placements, aux fins de faire valoir la créance alimentaire, et de représentation dans le domaine médical, aux fins de gérer les assurance-maladie et les frais médicaux (ch. 6 à 11), confirmé deux intervenants en protection de l'enfant dans leurs fonctions de curateur et de curateur suppléant (ch. 12), donné acte à la mère de son suivi thérapeutique individuel (ch. 13) et au père de son engagement à reprendre son suivi thérapeutique (ch. 14), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 15).
B.k. A.________ et C.________ ont tous deux formé recours contre l'ordonnance du 21 septembre 2023.
B.l. Par ordonnance du 23 novembre 2023, le Tribunal de protection a ordonné la mise en oeuvre d'une expertise familiale, confiée au Dr I.________, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, chef de clinique auprès du J.________, unité de psychiatrie légale, ce praticien étant toutefois autorisé à désigner, sous sa propre responsabilité, un ou plusieurs professionnels de son choix disposant des compétences requises pour effectuer l'expertise.
Les questions posées à l'expert concernaient notamment l'état cognitif et psychique de A.________ et C.________, l'état psychique et somatique de la mineure E.________, ainsi que l'état psychique du mineur D.________; l'expertise portait également sur la relation entre les parents ainsi qu'entre les parents et leurs deux enfants, sur les capacités parentales de la mère et du père et sur les modalités de prise en charge des enfants paraissant les plus appropriées; en outre, l'expert était invité à s'exprimer sur la mise en place de suivis thérapeutiques et médicaux pour les quatre membres de la famille; enfin, l'une des questions concernait la possibilité qu'un membre de la famille élargie soit en mesure d'apporter un soutien fiable, régulier et approprié aux parents dans la prise en charge des enfants. Un délai au 10 mai 2024, prolongé par la suite au 14 juin 2024, a été imparti à l'expert pour le dépôt de son rapport.
B.m. Par décision du 24 novembre 2023, la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève (ci-après: Chambre de surveillance) a rejeté la requête de mesures provisionnelles déposée par C.________ et tendant à l'octroi en faveur des deux parents d'un droit aux relations personnelles avec les enfants.
B.n. Dans ses observations du 30 novembre 2023, le SPMi a conclu à la confirmation de l'ordonnance attaquée. Selon les curateurs, le devoir de protection des deux mineurs devait primer sur la présomption d'innocence. Le SPMi a transmis à la Chambre de surveillance copie de deux courriers de la Dre K.________, cheffe de clinique au sein des HUG, des 23 et 24 août 2023, dont il ressortait notamment que, depuis le début de l'hospitalisation de la mineure E.________, ayant débuté le 14 août 2023, l'équipe médicale avait remarqué une nette amélioration clinique des lésions cutanées, toutes en voie de cicatrisation, et que l'enfant ne présentait pas de nouvelles lésions; lors de son hospitalisation du 22 juillet au 7 août 2023, de nouvelles lésions étaient en revanche apparues après que celle-ci était remontée du jardin où elle avait été en présence de son père et de sa mère; au vu de l'amélioration clinique constatée, associée à la présence de fractures d'âges différents, il était possible d'affirmer que les lésions présentées par l'enfant avaient été infligées par un tiers et qu'il s'agissait de maltraitance.
B.o. Les enfants, représentés par leur curatrice de représentation, ont conclu au déboutement des recourants de toutes leurs conclusions.
B.p. D.________ a été placé au sein du foyer V.________ en décembre 2023 et E.________ a été placée au foyer W.________ le 11 janvier 2024.
B.q. Le 26 janvier 2024, J.________ a rendu un rapport d'expertise, celle-ci ayant été sollicitée par le Ministère public par ordonnance du 17 août 2023. Cette expertise a été confiée au Dr H.________ et le rapport a été lu et approuvé par le Prof. L.________, médecin adjoint agrégé, responsable d'unité au sein de J.________.
Il en ressort notamment que E.________ avait été examinée par l'expert le 16 août 2023 déjà, à la demande du Service de pédiatrie des HUG. Le rapport d'expertise décrit, pour l'ensemble du corps de l'enfant et sur six pages, les lésions constatées, celles-ci étant également documentées par des photographies. L'enfant avait ensuite été revue par l'expert les 24 août, 31 août et 22 décembre 2023, afin d'évaluer l'évolution des lésions. L'expert a constaté une amélioration de l'ensemble de celles-ci, seules des cicatrices résiduelles subsistant lors de l'examen du 22 décembre 2023. L'évolution des lésions a été documentée par des photographies prises lors de chaque examen. Le rapport d'expertise relève qu'aucune lésion, non expliquée par des interventions médicales durant l'hospitalisation, n'était apparue.
Plusieurs diagnostics différentiels avaient été posés, dont celui d'une maladie auto-inflammatoire rare. La consultation au sein des HUG avait révélé des hématomes, dermabrasions, plaies ouvertes parfois linéaires, parfois circulaires. L'analyse de 427 gènes de l'enfant et les différents bilans effectués n'avaient pas révélé d'anomalie, ni permis d'expliquer l'état de la mineure. Un "bilan de maltraitance" avait alors été prévu. Les radiographies du corps entier réalisées le 16 août 2023 avaient montré de multiples signes de fractures de temporalité et localisation différentes, dont certaines qualifiées de "haute spécificité de maltraitance".
Selon l'expert, les éléments suivants permettaient de retenir un diagnostic de maltraitance physique: présence de lésions cutanées traumatiques multiples et étendues sur une grande partie du corps, certaines dans des zones non accessibles à l'enfant, la plupart situées dans des régions non saillantes du corps, certaines évoquant des mécanismes fréquemment rencontrés dans les cas de maltraitance (préhension manuelle ferme, morsures), chez un enfant n'ayant pas encore acquis la marche, qui s'améliorent rapidement après la mise en place de mesures de distanciation; présence de fractures multiples et de localisations différentes, certaines intéressant des régions typiquement retrouvées dans les traumatismes non accidentels (fractures métaphysaires et fractures de côtes postérieures, d'âges différents, chez un enfant n'ayant pas encore acquis la marche); absence de pathologie préexistante connue ou décelée; absence de toute explication crédible aux lésions constatées.
B.r. Par arrêt du 23 avril 2024, la Chambre de surveillance a rejeté les recours interjetés par A.________ et C.________ contre l'ordonnance du 21 septembre 2023.
A ce moment-là, la procédure pénale ouverte contre A.________ et C.________ était toujours pendante.
C.
C.a. Par acte du 3 juin 2024, A.________ interjette un recours en matière civile devant le Tribunal fédéral contre l'arrêt du 23 avril 2024. Elle conclut principalement à la réforme de cette décision en ce sens qu'un droit aux relations personnelles avec ses enfants, à exercer dans un lieu médiatisé, à raison d'une heure minimum par semaine et par enfant, lui soit accordé. Subsidiairement, la recourante conclut à l'annulation de la décision et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
La recourante sollicite également le bénéfice de l'assistance judiciaire et conclut à ce qu'une indemnité appropriée soit allouée au conseil d'office qui lui sera désigné.
C.b. Plusieurs documents ont été produits après le dépôt du recours. Ainsi, les 20 et 25 juin 2024, le SPMi et la Chambre de surveillance ont produit un procès-verbal d'audience du Ministère public du 19 juin 2024; les 28 août et 12 septembre 2024, la curatrice des enfants et l'autorité cantonale précitée ont produit un rapport d'expertise rendu le 24 juillet 2024 par J.________.
C.c. Des déterminations sur le fond n'ont pas été requises.
Considérant en droit :
1.
S'agissant de la nature de la décision de première instance, la cour cantonale a relevé qu'il était surprenant que le Tribunal de protection ait rendu une décision au fond et non provisionnelle, alors que la procédure n'était de toute évidence pas terminée puisqu'une expertise du groupe familial avait été sollicitée et qu'une nouvelle décision serait très vraisemblablement rendue après le dépôt du rapport. Il est effectivement singulier qu'après avoir rendu une décision de mesures superprovisionnelles le 18 août 2023, retirant notamment aux parents le droit de déterminer le lieu de résidence des enfants et suspendant tout droit aux relations personnelles, le Tribunal de protection n'ait pas consécutivement rendu une décision de mesures provisionnelles mais une décision sur le fond. La recourante ne remet toutefois pas en question la qualification de la décision par l'autorité cantonale et elle la définit elle-même de "finale", de sorte que cette qualification sera retenue.
Ainsi, déposé en temps utile (art. 100 al. 1 LTF) et dans la forme légale (art. 42 al. 1 LTF) par une partie qui a qualité pour recourir ( art. 76 al. 1 let. a et b LTF ), le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue sur recours par une autorité supérieure statuant en dernière instance cantonale ( art. 75 al. 1 et 2 LTF ) dans une affaire non pécuniaire, en application de normes de droit public dans une matière connexe au droit civil, à savoir en matière de protection de l'enfant (art. 72 al. 2 let. b ch. 6 LTF). Le recours est donc en principe recevable au regard des dispositions qui précèdent.
2.
2.1. Le recours en matière civile peut être interjeté pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF . Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF). Il n'est donc limité ni par les arguments soulevés dans le recours, ni par la motivation retenue par l'autorité précédente; il peut admettre un recours pour un autre motif que ceux qui ont été invoqués et il peut rejeter un recours en adoptant une argumentation différente de celle de l'autorité précédente (ATF 145 IV 228 consid. 2.1; 144 III 462 consid. 3.2.3). Cela étant, eu égard à l'exigence de motivation contenue à l'art. 42 al. 2 LTF, il n'examine en principe que les griefs soulevés (ATF 148 V 366 consid. 3.1; 142 III 364 consid. 2.4). Le recourant doit par conséquent discuter les motifs de la décision entreprise et indiquer précisément en quoi l'autorité précédente a méconnu le droit (ATF 142 I 99 consid. 1.7.1; 142 III 364 consid. 2.4). Le Tribunal fédéral ne connaît par ailleurs de la violation de droits fondamentaux que si un tel grief a été expressément invoqué et motivé de façon claire et détaillée ("principe d'allégation", art. 106 al. 2 LTF; ATF 148 V 366 consid. 3.3; 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2).
2.2.
2.2.1. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF). Il ne peut s'en écarter que si ces faits ont été constatés de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF (art. 105 al. 2 LTF), et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (art. 97 al. 1 LTF; ATF 146 IV 88 consid. 1.3.1). Le recourant qui soutient que les faits ont été établis d'une manière manifestement inexacte, c'est-à-dire arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 144 III 93 consid. 5.2.2; 140 III 264 consid. 2.3), doit, sous peine d'irrecevabilité, satisfaire au principe d'allégation susmentionné (art. 106 al. 2 LTF; cf.
supra consid. 2.1; ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 I 73 consid. 2.2; 146 IV 88 consid. 1.3.1).
En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 148 IV 39 consid. 2.3.5; 147 V 35 consid. 4.2; 143 IV 500 consid. 1.1; 140 III 264 consid. 2.3).
2.2.2. En l'espèce, la partie intitulée "IV. PREAMBULE" que la recourante présente dans son mémoire sera ignorée s'agissant des faits qui y sont exposés et qui s'écartent de ceux contenus dans l'arrêt attaqué, sans que la recourante ne démontre à satisfaction que, d'une part, leur établissement serait arbitraire ou qu'ils auraient été constatés en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et que, d'autre part, leur correction serait susceptible d'influer sur le sort de la cause.
2.3. En vertu de l'art. 99 al. 1 LTF, aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente.
En l'espèce, divers documents postérieurs à l'arrêt entrepris ont été transmis à la Cour de céans (cf.
supra let. C.b), mais ils sont toutefois irrecevables dès lors qu'il n'apparaît pas que les faits qu'ils sont censés constater résulteraient de la décision attaquée au sens de l'art. 99 al. 1 LTF.
3.
Il ressort de l'arrêt querellé que l'autorité de première instance avait en substance retenu que l'analyse à laquelle avaient procédé plusieurs membres du corps médical après la découverte, sur la mineure E.________, de plusieurs fractures de localisation et temporalité différentes, avait conduit à une très forte suspicion de graves maltraitances commises sur l'enfant. Cette suspicion s'était trouvée renforcée par le fait que, depuis son isolement familial consécutif à sa dernière hospitalisation, l'état de santé général de la mineure s'était grandement amélioré et qu'elle n'avait plus présenté de nouvelles lésions. Dans de telles circonstances, le Tribunal de protection se devait d'appliquer strictement le principe de précaution et de ne prendre aucun risque d'exposer la mineure à de nouvelles maltraitances, ou même de simplement compromettre la procédure pénale et la manifestation de la vérité au sujet des lésions subies par l'enfant. Les parents demeuraient en l'état unis dans une incapacité à envisager une quelconque maltraitance à l'origine des fractures et lésions présentées par leur fille. Toutefois, leur fils D.________ avait fait des déclarations inquiétantes selon lesquelles tant lui-même que sa soeur auraient fait l'objet d'actes de maltraitance de la part de leur père. Sans préjuger de telles déclarations, il paraissait manifeste que le sort du mineur était intimement lié à celui de sa soeur, dont il était témoin des souffrances et des lésions. Il convenait par conséquent de retirer aux parents la garde de leurs deux enfants, à tout le moins dans l'attente d'éclaircissements sur les faits objets de la procédure pénale. Le Tribunal de protection avait également relevé la nécessité de placer les mineurs dans un cadre sécurisant et favorable à leur bon développement, une fois satisfaite l'exigence des soins médicaux pour E.________, ainsi que l'importance de ne pas séparer les enfants à ce stade. Pour le surplus, il convenait de suivre les recommandations du SPMi s'agissant de la suspension de toute relation personnelle entre les parents et leurs enfants, les curateurs étant toutefois invités à préaviser toute opportunité de reprise d'un droit de visite. Dès lors que les suspicions d'actes de maltraitance concernaient toute personne proche des mineurs, la question d'un droit de visite exercé par d'autres membres de la famille élargie devait être réservée.
La cour cantonale a quant à elle rappelé que le Tribunal de protection avait considéré qu'il convenait de suivre les recommandations du SPMi s'agissant de la suspension de toute relation personnelle entre les parents et leurs enfants, tout en invitant les curateurs à préaviser toute opportunité de reprise d'un droit de visite, et a relevé que l'autorité de première instance avait ordonné une expertise familiale, qui était en cours et dont le rapport était attendu dans le courant du mois de juin 2024. Les conclusions et recommandations des experts permettraient de déterminer si et sous quelle forme, ainsi que moyennant quelles modalités et précautions, les relations personnelles parents-enfants pourraient éventuellement reprendre. Or, il convenait de ne pas perturber davantage l'équilibre des mineurs en ordonnant la reprise de relations personnelles qui pourraient potentiellement être à nouveau interrompues après le dépôt du rapport d'expertise. La juridiction cantonale a encore indiqué qu'il appartiendrait au Tribunal de protection, aussitôt le rapport d'expertise reçu, d'examiner la possibilité, par le prononcé le cas échéant de mesures provisionnelles et dans le respect des conclusions des experts, d'ordonner la reprise des relations personnelles entre les parents et leurs enfants.
4.
Lorsque les relations personnelles entre l'enfant et le parent qui ne détient pas l'autorité parentale ou la garde compromettent le développement de l'enfant, le droit d'entretenir ces relations (art. 273 al. 1 CC) peut être retiré ou refusé en tant qu'
ultima ratio (art. 274 al. 2 CC; arrêt 5A_95/2023 du 17 juillet 2023 consid. 4.2.1 et références). Si le préjudice engendré pour l'enfant par les relations personnelles peut être limité par la mise en oeuvre d'un droit de visite surveillé ou accompagné, le droit de la personnalité du parent concerné, le principe de la proportionnalité, mais également le sens et le but des relations personnelles, interdisent la suppression complète du droit auxdites relations (ATF 122 III 404 consid. 3c; arrêt 5A_177/2022 du 14 septembre 2022 consid. 3.1.1); l'une des modalités particulières à laquelle il est envisageable de subordonner l'exercice du droit de visite, par une application conjointe des art. 273 al. 2 et 274 al. 2 CC, peut ainsi consister en l'organisation des visites, avec ou sans curatelle de surveillance, dans un lieu protégé spécifique, tel un Point Rencontre ou une autre institution analogue (arrêts 5A_844/2023 du 16 juillet 2024 consid. 5.1; 5A_759/2023 du 20 mars 2024 consid. 4.1.2.1 et les références).
L'appréciation des circonstances de fait pour fixer le droit aux relations personnelles, c'est-à-dire la détermination de leur portée juridique, est une question de droit. Le Tribunal fédéral s'impose toutefois une certaine retenue. Le juge du fait qui, par son expérience en la matière, connaît mieux les parties et le milieu dans lequel l'enfant évolue, dispose d'un large pouvoir d'appréciation en vertu de l'art. 4 CC (ATF 131 III 209 consid. 3). Le Tribunal fédéral n'intervient que si le juge, sans aucun motif, a écarté des critères essentiels pour la décision sur le droit de visite ou, à l'inverse, s'est fondé sur des éléments dépourvus d'importance au regard du bien de l'enfant ou contrevenant aux principes du droit fédéral (ATF 147 III 209 consid. 5.3 et les références; 142 III 336 consid. 5.3.2).
5.
La recourante se plaint de l'établissement manifestement exact des faits. Elle reproche en outre à l'autorité cantonale d'avoir violé les art. 273 al. 1 et 274 al. 2 CC en lien avec le droit de visite ainsi que le principe de la proportionnalité.
5.1. Sous l'angle des faits et s'appuyant sur plusieurs éléments qu'elle tire du dossier médical des HUG concernant D.________, la recourante fait grief à la juridiction précédente d'avoir omis de constater que, depuis la séparation de l'enfant d'avec ses parents, il se trouverait dans un profond désarroi, alors même qu'il aurait auparavant été décrit comme un enfant souriant, vif et collaborant. Il présenterait un état de tristesse lié au manque de ses parents, refuserait de s'alimenter et cet état psychologique et émotionnel se répercuterait physiquement chez lui par des vomissements et des douleurs diverses. L'enfant présenterait en outre des troubles du sommeil alors que son pédiatre aurait confirmé qu'il n'en aurait jamais rencontré avant d'avoir été séparé de ses parents. La recourante fait ainsi grief à la la cour cantonale de ne pas avoir retenu les éléments relatifs à l'état psychologique et émotionnel des enfants, quand bien même ces éléments seraient d'une grande importance et susceptibles de rétablir un droit de visite.
En l'espèce, les faits invoqués représentent des éléments parmi d'autres à prendre en considération pour l'examen de la situation. Cela étant, ils ne permettent en tous les cas pas d'arriver à la conclusion que l'autorité cantonale aurait abusé de son pouvoir d'appréciation relativement au résultat de la cause (cf.
infra consid. 5.3.2).
5.2. Sur le fond, la recourante rappelle que ses relations personnelles avec ses enfants en bas âge ont été totalement supprimées depuis de nombreux mois et soutient que rien ne justifierait une coupure aussi brutale, qui serait disproportionnée et qui ne devrait être envisagée qu'en
ultima ratio. Elle fait en substance valoir que la mise en oeuvre d'un droit de visite accompagné serait une mesure suffisante, adéquate et proportionnée pour éviter un quelconque danger - pour autant qu'il en existe un - que pourraient craindre les différents intervenants et qui respecterait le principe de proportionnalité imposé par la loi. La recourante reproche en outre à l'autorité cantonale de ne pas se positionner sur les éventuels impacts négatifs concrets que pourrait avoir la mise en place de relations personnelles avec ses enfants dans un milieu protégé et surveillé. Selon elle, un droit de visite médiatisé garantirait le maintien de sa relation avec ses enfants et permettrait à des professionnels compétents en la matière d'observer leur relation et de constater, respectivement déterminer, ses capacités parentales; toutes ces informations seraient de surcroît nécessaires et utiles pour l'élargissement du droit de visite ainsi que pour l'expertise familiale. La recourante fait encore grief à la juridiction précédente de se retrancher derrière la décision de l'autorité de première instance, elle-même fondée sur l'avis du SPMi, ainsi que derrière l'expertise familiale ordonnée par cette autorité au mois de septembre 2023. Elle lui reproche de ne pas se pencher sur les indices concrets de mise en danger des enfants et soutient qu'elle aurait dû s'interroger sur le fondement, la légitimité et la proportionnalité de la mesure, y compris sous l'angle de la durée de la suspension. Elle ajoute qu'il ne peut pas être exclu que la coupure des relations personnelles aura un impact sur le psychisme des enfants, qui pourraient développer un trouble lié à un abandon par leurs parents.
5.3. En l'espèce, les éléments dont se prévaut la recourante ne sauraient occulter ceux extrêmement critiques retenus par l'autorité cantonale.
5.3.1. On rappelle que l'enfant E.________ présente des lésions depuis son premier mois de vie, que celles-ci ont nécessité une hospitalisation aux soins intensifs et qu'elle a également subi plusieurs fractures. Au mois d'août 2023, le Dr G.________, médecin légiste, a mis en évidence un faisceau d'arguments concordant avec des faits de maltraitance grave et a même émis l'hypothèse d'un Syndrome de Münchhausen par procuration. Par ailleurs, par courriers des 23 et 24 août, la Dre K.________, cheffe de clinique au sein de HUG, a fait savoir qu'il était possible d'affirmer que les lésions présentées par E.________ avaient été infligées par un tiers et qu'il s'agissait donc de maltraitance. Dans son rapport d'expertise du 26 janvier 2024, le Dr H.________, spécialiste en médecine légale et chef de clinique, a quant à lui indiqué que de nombreux éléments permettaient de retenir un diagnostic de maltraitance physique chez l'enfant E.________. Les spécialistes concernés ont également relevé que les lésions s'amélioraient rapidement après la mise en place de mesures de distanciation d'avec les parents. Aux considérations qui précèdent s'ajoutent en outre les déclarations du frère aîné de E.________, qui a relaté des violences physiques de la part de ses parents. Il ressort par ailleurs de la décision querellée qu'une procédure pénale a été ouverte pour violation du devoir d'éducation et lésions corporelles graves à l'encontre des deux parents, que ces derniers ont été mis en prévention et que la procédure était toujours pendante au jour où la cause a été gardée à juger devant l'autorité cantonale.
Le présent cas concerne ainsi des soupçons de maltraitance grave et répétée sur un nourrisson, qui s'appuient sur de nombreux éléments pour le moins préoccupants et qui justifient manifestement le retrait du droit de déterminer le lieu de résidence des enfants. Par ailleurs, dans le cas où il devrait être avéré que les parents sont les auteurs de ces maltraitances, cela serait un élément de nature à les priver de tout contact avec leurs enfants.
5.3.2. S'agissant de la possibilité d'instaurer un droit de visite médiatisé en faveur de la recourante, on relèvera que le SPMi a indiqué qu'il convenait de prendre le temps d'évaluer dans quelle structure une reprise du lien serait possible et à quelle fréquence, et que l'apport d'un regard médical psychiatrique et pédopsychiatrique était à cet égard nécessaire. Or, force est de constater qu'aucune expertise n'avait encore été rendue sur ce point au moment où la juridiction cantonale a statué. Celle-ci ne disposait ainsi pas d'éléments sur lesquels elle pouvait se fonder pour prononcer une reprise des relations personnelles, même médiatisée, le seul écoulement du temps ou le fait que les enfants souffriraient de l'éloignement n'étant à cet égard pas prépondérants. Il sied au demeurant de souligner que, tant en première qu'en deuxième instance, la curatrice s'est également dite défavorable à une reprise des contacts entre les enfants et les parents.
5.3.3. Compte tenu des éléments qui précèdent, il n'apparaît pas que l'autorité cantonale aurait abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant de prononcer en l'état une reprise médiatisée des relations personnelles entre la mère et ses enfants, alors même que les investigations entreprises pour faire la lumière sur les faits gravissimes qui sont en cause sont encore en cours et que l'opportunité d'une reprise des relations personnelles n'a pas été confirmée dans le cadre des mesures d'instruction d'ores et déjà ordonnées par l'autorité de première instance, parmi lesquelles une expertise familiale.
Il s'ensuit que le grief est infondé.
6.
En définitive, le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recours étant d'emblée voué à l'échec, la requête d'assistance judiciaire de la recourante ne saurait être agréée (art. 64 al. 1 LTF). Les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 66 al. 1 LTF). Il n'est pas alloué de dépens ( art. 68 al. 1 et 3 LTF ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
La requête d'assistance judiciaire de la recourante est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
4.
Le présent arrêt est communiqué à la recourante, au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant du canton de Genève, à B.________, à C.________, à la Chambre de surveillance de la Cour de justice du canton de Genève et au Service de protection des mineurs.
Lausanne, le 3 mars 2025
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Bovey
La Greffière : Gudit-Kappeler