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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
8C_45/2022  
 
 
Arrêt du 3 août 2022  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Wirthlin, Président, 
Maillard et Abrecht. 
Greffière : Mme Betschart. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représenté par B.________ SA, 
recourant, 
 
contre  
 
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA), Division juridique, Fluhmattstrasse 1, 6002 Lucerne, 
intimée. 
 
Objet 
Assurance-accidents (révision; revenu sans invalidité), 
 
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du Valais du 2 décembre 2021 (S2 19 75). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________, né en 1963, travaillait depuis 2002 pour l'entreprise C.________ SA à U.________ en tant que maçon et était, à ce titre, assuré auprès de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) contre le risque d'accidents. Le 13 décembre 2007, il a chuté d'une échelle d'une hauteur de trois à quatre mètres sur son lieu de travail et s'est blessé à la cheville gauche. La CNA a pris en charge le cas. Le 10 novembre 2009, il a subi une arthrodèse sous-astragalienne. Après avoir repris le travail à titre occupationnel en avril 2010, il a été licencié par son employeur pour le 31 juillet 2010, dès lors que son état de santé ne lui permettait pas de reprendre son poste habituel.  
Par décision du 21 mai 2012, la CNA lui a accordé une indemnité pour atteinte à l'intégrité sur la base d'un taux de 15 % ainsi qu'une rente d'invalidité fondée sur un taux de 20 %, après comparaison entre le gain mensuel réalisable en 2012 sans accident auprès de l'ancien employeur, soit 5765 fr. (13e salaire inclus), et le salaire mensuel moyen réalisable dans un poste adapté, soit 4635 fr. (13e salaire inclus). Avec l'aide du service de placement de l'office cantonal de l'assurance-invalidité du Valais (OAI), A.________ a trouvé par la suite un emploi adapté de chauffeur à plein temps auprès de l'entreprise D.________ SA dès le 1er septembre 2013 pour un salaire mensuel de 4650 fr. (versé 13 fois l'an). 
 
A.b. Le 29 août 2018, la CNA a mis en oeuvre une procédure de révision d'office de la rente. Selon les informations obtenues de D.________ SA, l'assuré a perçu en 2018 un salaire annuel brut de 62'075 fr. (4775 fr. par mois, 13 fois l'an). L'ancien employeur C.________ SA a attesté que sans atteinte à la santé, l'assuré aurait gagné en 2018 un salaire annuel brut de 69'810 fr. (5370 fr. par mois, 13 fois l'an) s'il était resté à son service. Cela étant, la CNA a, par décision du 10 avril 2019, réduit la rente d'invalidité à 11 % pour l'avenir, soit à partir du 1er mai 2019.  
 
A.c. Sur opposition de l'assuré, la CNA a recueilli des informations complémentaires auprès des deux employeurs. Selon C.________ SA, l'assuré aurait reçu en 2019 un salaire annuel de 70'850 fr. (5450 fr. par mois, 13 fois l'an), tandis que le salaire qu'il gagnait auprès de D.________ SA restait inchangé. Par conséquent, la CNA a, par décision sur opposition du 27 juin 2019, admis partiellement l'opposition, fixant le taux d'invalidité à 12 %.  
 
B.  
Par jugement du 2 décembre 2021, la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du Valais a rejeté le recours formé par l'assuré contre cette décision sur opposition. 
 
C.  
A.________ interjette un recours de droit public contre ce jugement, en concluant à sa réforme en ce sens qu'il continue de bénéficier d'une rente d'invalidité LAA basée sur un taux de 20 % après le 1er mai 2019. 
La CNA conclut au rejet du recours. Le Tribunal cantonal et l'Office fédéral de la santé publique ont renoncé à se déterminer. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
Le recours est dirigé contre une décision finale (art. 90 LTF) rendue en matière de droit public (art. 82 ss LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100 LTF) et la forme (art. 42 LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable. 
 
2.  
 
2.1. Le litige porte sur le point de savoir si la cour cantonale a violé le droit fédéral en confirmant la décision sur opposition du 27 juin 2019, par laquelle l'intimée a réduit dès le 1er mai 2019 la rente d'invalidité au taux de 12 % au lieu de 20 %. Est litigieux uniquement le calcul du revenu sans invalidité devant être retenu pour la comparaison des revenus dans le cadre de la procédure de révision, l'existence d'un motif de révision n'étant pas contestée sur le principe.  
 
2.2. Le recours en matière de droit public peut être formé pour violation du droit, tel qu'il est délimité par les art. 95 et 96 LTF. Le Tribunal fédéral applique le droit d'office (art. 106 al. 1 LTF) et n'est limité ni par les arguments de la partie recourante, ni par la motivation de l'autorité précédente. Cela étant, le Tribunal fédéral n'examine en principe que les griefs invoqués, compte tenu de l'exigence de motivation prévue à l'art. 42 al. 2 LTF, sauf en cas d'erreurs juridiques manifestes (ATF 145 V 304 consid. 1.1), et ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties (art. 107 al. 1 LTF).  
 
2.3. Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente (art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF).  
 
2.4. Aucun fait nouveau ni preuve nouvelle ne peut être présenté devant le Tribunal fédéral à moins de résulter de la décision de l'autorité précédente (art. 99 al. 1 LTF; sur l'application de cette disposition dans les procédures régies par les art. 97 al. 2 et 105 al. 3 LTF: ATF 135 V 194). En l'occurrence, le recourant fait valoir qu'il a été licencié par D.________ SA pour le 30 juin 2021 ensuite de ses différents problèmes de santé, mais que l'intimée aurait rejeté sa demande de révision subséquente. Cependant, il admet lui-même que cet aspect ne constitue pas l'objet du litige. En outre, il ne l'avait pas invoqué dans la procédure devant la cour cantonale. Il s'agit donc d'un fait nouveau irrecevable.  
 
3.  
 
3.1. Le jugement attaqué expose correctement les principes jurisprudentiels concernant l'établissement du revenu (hypothétique) sans invalidité au sens de l'art. 16 LPGA. Il suffit d'y renvoyer.  
 
3.2. On rappellera toutefois que, selon la jurisprudence, le revenu que pourrait réaliser l'assuré sans invalidité est en principe établi sans prendre en considération les possibilités théoriques de développement professionnel (lié en particulier à un complément de formation) ou d'avancement, à moins que des indices concrets rendent très vraisemblable qu'elles se seraient réalisées (arrêt 9C_439/2020 du 18 août 2020 consid. 4.4). Cela pourra être le cas lorsque l'employeur a laissé entrevoir une telle perspective d'avancement ou a donné des assurances en ce sens. En revanche, de simples déclarations d'intention de l'assuré ne suffisent pas; l'intention de progresser sur le plan professionnel doit s'être manifestée par des étapes concrètes, telles que la fréquentation d'un cours, le début d'études ou la passation d'examens (arrêts 8C_778/2017 du 25 avril 2018 consid. 4.2; 9C_221/2014 du 28 août 2014 consid. 3.2; 8C_380/2012 du 2 mai 2013 consid. 2; 8C_839/2010 du 22 décembre 2010 consid. 2.2.2.2). Ces principes s'appliquent aussi dans le cas de jeunes assurés (arrêt 8C_550/2009, 8C_677/2009 du 12 novembre 2009 consid. 4.2, in: SVR 2010 UV n° 13 p. 52). Le point de savoir si le salaire réel aurait augmenté grâce à un développement des capacités professionnelles individuelles, notamment un changement de profession, doit être établi au degré de la vraisemblance prépondérante (arrêts 8C_380/2012 du 2 mai 2013 consid. 2; U 87/05 du 13 septembre 2005 consid. 2, in: RAMA 2006 n° U 568 p. 67).  
 
4.  
 
4.1. Les premiers juges ont retenu que le salaire du recourant n'était pas soumis à des fluctuations importantes ni n'était supérieur à la moyenne. En outre, aucun élément objectif du dossier ne permettait de retenir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le recourant n'aurait pas continué à travailler pour son employeur indépendamment de la survenance de l'accident. Ainsi, il ressortait des multiples comptes rendus d'entretien que le recourant espérait fortement poursuivre ses relations de travail avec C.________ SA, même à un autre poste que celui de maçon. En plus, rien ne permettait d'affirmer qu'il aurait eu très probablement plus de responsabilités professionnelles. Au contraire, dûment questionné sur ce point, l'ex-employeur avait affirmé que le recourant n'aurait pas exercé un travail avec plus de responsabilités s'il avait pu continuer à travailler en pleine possession de ses moyens. Devaient être écartées également ses allégations sur son potentiel de formation, sa nature de "leader" et sa volonté de prendre des responsabilités. En effet, les formations de cariste et machiniste étaient intervenues après l'accident et le service de réadaptation de l'OAI n'avait pas retenu de formation de type CFC ou AFP envisageable, compte tenu du fait que le recourant n'avait suivi que la scolarité obligatoire primaire. Ainsi, ces affirmations n'étaient que des simples déclarations ne reposant sur aucun indice concret qui aurait permis de tenir pour très vraisemblable que des possibilités théoriques de développement professionnels se seraient réalisées. Enfin, même si le recourant relevait une évolution assez importante de son salaire entre 2007 et 2012, rien n'indiquait que le montant du salaire aurait en réalité augmenté dans une proportion supérieure à celle attestée par l'ancien employeur, dont la quotité reposait sur une convention collective de travail. Dans ces circonstances, l'intimée était fondée à retenir un revenu présumable sans invalidité pour l'année 2019 de 70'850 fr.  
 
4.2. Le recourant reproche en substance à la cour cantonale d'avoir établi les faits de manière erronée voire incomplète en s'appuyant sur les données salariales non fiables de son ancien employeur et en niant qu'il ne se serait pas contenté jusqu'à ce jour d'une activité d'ouvrier en génie civil sans aucune évolution salariale.  
Ce faisant, il répète pour l'essentiel les arguments déjà avancés devant le tribunal cantonal. En tant qu'il fait de nouveau référence à ses formations de cariste et de machiniste et à sa personnalité de "leader naturel" pour démontrer qu'il aurait évolué professionnellement respectivement réalisé un revenu supérieur dans son activité habituelle, on peut renvoyer aux considérants pertinents de la cour cantonale. 
 
4.3.  
 
4.3.1. Le recourant réitère en outre qu'entre 2008 et 2012, le salaire annuel qu'il aurait pu réaliser auprès de C.________ SA aurait évolué de 64'805 fr. à 69'180 fr. (soit une augmentation de 4375 fr.), tandis qu'entre 2012 et 2018 ce salaire n'aurait augmenté que de 630 fr., ce qui équivaudrait à une progression de 0.91 % seulement en six ans. Pendant cette période, il n'aurait ainsi reçu quasiment aucune augmentation salariale, de sorte qu'il serait tout à fait invraisemblable qu'il n'aurait pas changé d'emploi entretemps. De surcroît, dans ce même intervalle, l'indice des salaires nominaux des métiers de la construction serait passé de 101.7 à 103.8 - soit une augmentation de 2.06 % - selon l'indice des salaires nominaux établi par l'Office fédéral de la statistique (OFS; tableau T1.10), ce qui rendrait hautement vraisemblable soit une augmentation de salaire plus conséquente chez son employeur de l'époque, soit un changement d'employeur.  
 
4.3.2. Selon l'arrêt U 66/02 du 2 novembre 2004 qu'invoque le recourant à ce propos, le fait que l'employeur n'augmente pas le salaire à cause de sa situation économique ne constitue en général pas un motif pour l'employé de chercher un nouvel emploi, au moins durant les premières années. Dans un premier temps, il convient donc toujours de s'appuyer sur les renseignements salariaux de l'employeur pour déterminer le revenu sans invalidité. Toutefois, si une telle stagnation du salaire persiste pendant plusieurs années, celui-ci s'écarte de plus en plus des salaires usuels dans la branche, offerts ailleurs. Dans de telles circonstances, l'hypothèse que l'employé n'aurait toujours pas changé d'emploi ne peut plus être considérée comme réaliste, de sorte qu'il est justifié de prendre en compte au moins l'évolution des salaires nominaux ressortant des statistiques de l'OFS (consid. 4.1.1 de l'arrêt mentionné, publié in: RAMA 2005 n° U 538 p. 112).  
 
4.3.3. En l'espèce, rien n'indique que la situation économique de l'ancien employeur C.________ SA ne lui aurait pas permis d'augmenter le salaire du recourant dans une mesure usuelle. En tous les cas, cela ne saurait être déduit de l'allégué du recourant que C.________ SA aurait cessé d'exister, car cette société a uniquement changé sa raison sociale et son siège selon les indications figurant au registre du commerce, qui sont accessibles par internet et constituent des faits notoires que le Tribunal fédéral peut librement prendre en compte (ATF 143 IV 380 consid. 1.1.1; 138 II 557 consid. 6.2 et les références). Comme l'employeur a attesté une augmentation du salaire, on ne peut pas non plus partir d'une stagnation du salaire selon la jurisprudence mentionnée, même si l'évolution salariale a été plus lente que dans la période précédente de 2008 à 2012. Les premiers juges ont d'ailleurs constaté que la quotité de l'augmentation reposait sur une convention collective de travail. Il n'est dès lors pas possible de conclure que le recourant aurait changé d'activité et obtenu des revenus plus élevés. Par conséquent, il n'y a pas non plus lieu de s'écarter du principe que sont déterminants les renseignements concrets du dernier employeur et de s'appuyer au lieu de ceux-ci sur les valeurs statistiques, plus concrètement sur la statistique concernant l'évolution des salaires nominaux. Au demeurant, cette statistique regroupe plusieurs branches économiques et ne reflète ainsi pas forcément la réalité d'une branche d'activité concrète (arrêt 9C_414/2011 du 11 juillet 2011 consid. 4.3).  
 
4.4. Vu ce qui précède, le recours se révèle mal fondé et doit être rejeté.  
 
5.  
Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1 LTF). Bien qu'elle obtienne gain de cause, l'intimée n'a pas droit à des dépens (art. 68 al. 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge du recourant. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du Valais, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique. 
 
 
Lucerne, le 3 août 2022 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Wirthlin 
 
La Greffière : Betschart