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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
5A_223/2022  
 
 
Arrêt du 29 août 2022  
 
IIe Cour de droit civil  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Herrmann, Président, 
von Werdt et Schöbi. 
Greffière : Mme de Poret Bortolaso. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________, 
représenté par Me Anne Reiser, avocate, 
recourant, 
 
contre  
 
B.A.________, 
représentée par Me Sandrine Lubini, avocate, 
intimée. 
 
Objet 
effet suspensif (mesures provisionnelles, garde de l'enfant), 
 
recours contre l'ordonnance du Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud 
du 25 mars 2022 (TD21.026584-220320 ES22). 
 
 
Faits :  
 
A.  
Les époux A.________ sont les parents de C.________, né en 2019. 
Séparées, les parties s'opposent au sujet de la garde de leur fils. 
 
B.  
 
B.a. Le 18 juin 2021, A.A.________ a déposé une demande unilatérale en divorce auprès du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte, doublée d'une requête de mesures provisionnelles et superprovisionnelles par laquelle il concluait notamment à l'attribution de la garde exclusive de l'enfant en sa faveur.  
 
B.b. Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 21 juin 2021, la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte (ci-après: la présidente) a confié la garde de l'enfant à son père et constaté qu'il était en l'état impossible de prévoir un droit de visite en faveur de sa mère.  
Le 29 juin 2021, elle a ordonné à titre superprovisionnel au père de rétablir avec effet immédiat les relations personnelles téléphoniques entre C.________ et sa mère. 
Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 21 juillet 2021, la présidente à confié à la Direction générale de l'enfance et de la jeunesse, Unité évaluation et missions spécifiques (ci-après: l'UEMS), un mandat d'évaluation de la situation de l'enfant et a rétabli l'exercice d'un droit de visite avec sa mère par l'intermédiaire de Point Rencontre à raison de deux fois par mois, ainsi qu'en sus, d'entente avec le père. 
Par ordonnance de mesures superprovisionnelles du 29 octobre 2021, la présidente a octroyé à la mère un libre et large droit de visite sur son fils, à exercer d'entente entre les parties, et, à défaut, un week-end sur deux, du vendredi 16h au dimanche 18h ainsi que la moitié des vacances scolaires. 
Dans son rapport du 14 décembre 2021, l'UEMS a préconisé l'attribution de la garde de C.________ à sa mère, avec instauration d'un droit de visite élargi en faveur de son père, selon des modalités précisément décrites. 
Le 11 mars 2022, A.A.________ a indiqué retirer sa demande unilatérale en divorce. 
 
B.c. Par ordonnance de mesures provisionnelles du 18 mars 2022, la présidente a notamment confié la garde exclusive de C.________ à sa mère (III), précisant que son père bénéficierait d'un libre et large droit de visite sur son fils à exercer d'entente entre les parties et à défaut, du vendredi 16h au dimanche 18h ainsi que durant la moitié des vacances scolaires (IV).  
 
B.d. Le 22 mars 2022, A.A.________ a déposé une annonce d'appel ainsi qu'une requête d'effet suspensif portant sur les ch. III et IV du dispositif de l'ordonnance précitée.  
Dans ses déterminations du 23 mars 2022, B.A.________ a indiqué être venue chercher C.________ le 22 mars 2022 à midi chez son père, lequel avait acquiescé au transfert de l'enfant qui se trouvait désormais auprès d'elle à U.________, où il était inscrit auprès de l'Office de la population et à la crèche. 
Par ordonnance du 25 mars 2022, le Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: le juge délégué) a rejeté la requête d'effet suspensif présentée par A.A.________. 
 
C.  
Agissant le 29 mars 2022 par la voie du recours en matière civile au Tribunal fédéral, A.A.________ (ci-après: le recourant) conclut à l'annulation de l'ordonnance du juge délégué et à ce que l'effet suspensif soit octroyé aux chiffres III et IV de l'ordonnance rendue le 18 mars 2022 par la présidente. 
L'intimée conclut au rejet du recours; la cour cantonale se réfère aux considérants de sa décision. 
Les parties n'ont déposé aucune écriture complémentaire. 
 
D.  
Les mesures provisionnelles visant au retour immédiat de l'enfant chez le recourant ont été rejetées par ordonnance présidentielle du 26 avril 2022. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La décision querellée refuse de suspendre l'exécution de plusieurs chiffres du dispositif d'une ordonnance de mesures provisionnelles, contre laquelle un appel a été formé. Elle constitue une décision incidente (arrêts 5A_899/2021 du 6 décembre 2021 consid. 1.1; 5A_853/2021 du 8 novembre 2021 consid. 1.1) en matière civile (art. 72 al. 1 LTF).  
Hormis les décisions mentionnées à l'art. 92 al. 1 LTF, une décision préjudicielle ou incidente ne peut être entreprise immédiatement qu'aux conditions posées par l'art. 93 al. 1 LTF. La décision entreprise est en l'occurrence susceptible de causer au recourant un dommage irréparable (art. 93 al. 1 let. a LTF) dès lors que les droits parentaux sont arrêtés pour la durée de la procédure; même s'il obtient finalement gain de cause au fond, aucune réparation ne sera possible pour la période écoulée (ATF 137 III 475 précité consid. 1 et les références; arrêt 5A_853/2021 précité consid. 1.2.1). 
 
1.2. Les autres conditions de recevabilité du recours en matière civile sont ici réalisées (art. 75 al. 2 LTF [ATF 143 III 140 consid. 1.2; 137 III 475 consid. 1)]; 76 al. 1 let. a et b et 100 al. 1 LTF).  
 
2.  
La décision portant sur l'effet suspensif est une mesure provisionnelle au sens de l'art. 98 LTF (ATF 137 III 475 consid. 2). Seule peut donc être invoquée la violation des droits constitutionnels. Le Tribunal fédéral n'examine de tels griefs que s'ils ont été invoqués et motivés par le recourant (" principe d'allégation ", art. 106 al. 2 LTF), c'est-à-dire s'ils ont été expressément soulevés et exposés de manière claire et détaillée (ATF 147 I 73 consid. 2.1; 146 III 303 consid. 2; 142 III 364 consid. 2.4). En particulier, une décision ne peut être qualifiée d'arbitraire (art. 9 Cst.) que si elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et indiscuté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 145 II 32 consid. 5.1; 144 I 170 consid. 7.3; 141 III 564 consid. 4.1); il ne suffit pas qu'une autre solution paraisse concevable, voire préférable; pour que cette décision soit annulée, encore faut-il qu'elle se révèle arbitraire non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 147 I 241 consid. 6.2.1; 144 I 113 consid. 7.1). 
 
3.  
Le recourant invoque l'application arbitraire de l'art. 315 al. 5 CPC
 
3.1. L'appel n'a en principe pas d'effet suspensif lorsqu'il a pour objet des décisions portant sur des mesures provisionnelles (art. 315 al. 4 let. b CPC).  
 
3.1.1. Selon l'art. 315 al. 5 CPC, l'exécution des mesures provisionnelles peut toutefois être exceptionnellement suspendue si la partie concernée risque de subir un préjudice difficilement réparable. Le préjudice difficilement réparable peut être de nature factuelle; il concerne tout préjudice, patrimonial ou immatériel, et peut même résulter du seul écoulement du temps pendant le procès. Le dommage est constitué, pour celui qui requiert les mesures provisionnelles, par le fait que, sans celles-ci, il serait lésé dans sa position juridique de fond et, pour celui qui recourt contre le prononcé de telles mesures, par les conséquences matérielles qu'elles engendrent (ATF 138 III 378 consid. 6.3 et les références). Saisie d'une demande d'effet suspensif, l'autorité de recours doit faire preuve de retenue et ne modifier la décision de première instance que dans des cas exceptionnels; elle dispose cependant d'un large pouvoir d'appréciation permettant de tenir compte des circonstances concrètes du cas d'espèce (ATF 137 III 475 consid. 4.1; cf. ATF 138 III 378 consid. 6.3).  
 
3.1.2. En matière de garde, des changements trop fréquents peuvent être préjudiciables à l'intérêt de l'enfant. Par conséquent, lorsque la décision de mesures provisionnelles statue sur la garde ou modifie celle-ci de sorte que l'enfant devrait être séparé du parent qui prenait régulièrement soin de lui au moment de l'ouverture de la procédure ayant donné lieu à la décision attaquée, le bien de l'enfant commande alors, dans la règle, de maintenir les choses en l'état et de laisser celui-ci auprès de la personne qui lui sert actuellement de référence. La requête d'effet suspensif du parent qui entend conserver la garde doit ainsi être admise, sauf si le maintien de la situation antérieure met en péril le bien de l'enfant ou encore si l'appel paraît sur ce point d'emblée irrecevable ou manifestement infondé (ATF 144 III 469 consid. 4.2.1; 138 III 565 consid. 4.3.2; arrêt 5A_792/2018 du 6 février 2019 consid. 3.2.2 et les références).  
 
3.2. Le juge délégué a relevé que l'enfant, né fin 2019, a vécu depuis le mois de mars 2021 avec son père, qui s'en est vu confier la garde exclusive en juin 2021. La reprise des relations personnelles avec la mère a été progressive. Dans son rapport du 14 décembre 2021, l'UEMS préconisait l'attribution de la garde exclusive à la mère, tout en relevant cependant que les deux parents disposaient de capacités parentales adéquates, qu'ils avaient chacun un lien d'attachement construit avec l'enfant, étaient attentionnés et à son écoute, en sorte qu'il n'apparaissait pas contre-indiqué que sa garde soit confiée à l'un ou l'autre pendant la procédure d'appel. Relevant néanmoins que la mère était venue chercher l'enfant chez le recourant et qu'il se trouvait désormais auprès de celle-ci, le juge délégué a considéré qu'il devait y demeurer, afin d'éviter des changements trop fréquents qui seraient préjudiciables à son intérêt: un retour chez son père, alors que l'on ne pouvait exclure qu'à l'issue de l'appel, il dût vivre à nouveau avec l'intimée, était ainsi contraire à son intérêt. La garde de C.________ devait ainsi être confiée à l'intimée pendant la procédure d'appel.  
 
3.3. Le recourant souligne que son appel n'apparaissait d'emblée ni irrecevable, ni infondé et qu'un maintien de l'enfant auprès de lui pour la durée de la procédure n'était nullement contraire à son intérêt, ainsi qu'il ressortait du rapport de l'UEMS. Aucune urgence, ni nécessité ne permettait ainsi de cautionner le déplacement immédiat de l'enfant à U.________. Le recourant rappelle avoir été le parent référent de l'enfant depuis la séparation des parties et que l'enfant se trouvait à U.________ depuis à peine une semaine, laps de temps insuffisant pour oublier son cadre de vie précédent. C'est donc arbitrairement que l'instance d'appel avait considéré que l'octroi de l'effet suspensif impliquerait ici pour l'enfant un nouveau changement de garde susceptible de le perturber.  
L'intimée se réfère à l'ordonnance de mesures provisionnelles du 18 mars 2022, selon laquelle " l'intérêt d'un enfant en souffrance justifi[ait] de modifier le régime de garde 'dès ce jour' et que celle-ci [fût] attribué à la mère "; elle souligne par ailleurs que le transfert de garde se serait effectué avec l'assentiment du recourant. En tant que, suite à l'ordonnance précitée, l'enfant était désormais sous sa garde, le refus d'octroyer l'effet suspensif revenait à éviter un nouveau changement dans sa prise en charge jusqu'à droit jugé au fond. Aucune application arbitraire de l'art. 315 CPC n'était à retenir. 
 
3.4. Les critiques du recourant sont fondées. Si, lors du dépôt de sa requête d'effet suspensif, son appel n'avait certes pas encore été déposé et que son issue ne pouvait ainsi être préjugée, il est établi qu'il était, pendant près d'une année, le parent référent de l'enfant - qui n'est âgé que de deux ans et demi - et que celui-ci n'était aucunement en péril auprès de lui. Contrairement à ce qu'affirme l'intimée, l'on ne peut déduire l'accord du recourant au transfert de garde du fait qu'il aurait laissé partir l'enfant avec elle le 22 mars 2022, lorsqu'elle s'est présenté à son domicile pour ce faire, s'appuyant sur l'ordonnance qui venait d'être rendue: le recourant a en effet déposé une requête d'effet suspensif le jour-même. Enfin et surtout, lorsque le juge délégué a statué, à savoir le 25 mars 2022, l'enfant se trouvait chez sa mère à U.________ depuis trois jours seulement. Aucune circonstance ne l'empêchait ainsi de revenir chez son père - comme il l'aurait fait au terme d'un droit de visite usuel - pour attendre l'issue de la procédure d'appel. Ce faisant, le juge délégué s'est écarté sans aucun motif justifié de l'art. 315 al. 5 CPC tel que concrétisé par la jurisprudence rendue dans le contexte particulier de la garde d'enfants ( supra consid. 3.1.2), excluant par ailleurs expressément toute situation d'urgence ou de nécessité appuyant son raisonnement.  
 
4.  
Il n'y a pas lieu d'examiner les autres griefs soulevés par le recourant, l'issue du recours étant scellée par le considérant précédent. 
 
5.  
En conclusion, le recours, bien fondé, doit être admis et l'arrêt attaqué réformé en ce sens que la requête d'effet suspensif assortissant l'annonce d'appel du recourant le 22 mars 2022 est admise. Les frais judiciaires et les dépens sont mis à la charge de l'intimée qui succombe (art. 66 al. 1 et 68 al. 1 et 2 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est admis, l'arrêt cantonal est annulé et réformé en ce sens que la requête d'effet suspensif formée par le recourant le 22 mars 2022 est admise. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de l'intimée. 
 
3.  
Une indemnité de 2'500 fr., à verser au recourant à titre de dépens, est mise à la charge de l'intimée. 
 
4.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud. 
 
 
Lausanne, le 29 août 2022 
 
Au nom de la IIe Cour de droit civil 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Herrmann 
 
La Greffière : de Poret Bortolaso