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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
8C_13/2020  
 
 
Arrêt du 3 février 2021  
 
Ire Cour de droit social  
 
Composition 
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Heine et Abrecht. 
Greffière : Mme von Zwehl. 
 
Participants à la procédure 
A.________, 
représentée par Me Ezio Tranini, 
recourante, 
 
contre  
 
Commune de Chêne-Bougeries, 
route de Chêne 136, 1224 Chêne-Bougeries, 
représentée par Me Thomas Barth, avocat, 
intimée, 
 
B.________, 
représenté par Me Robert Assaël, avocat, 
 
Objet 
Droit de la fonction publique, 
 
recours contre le jugement de la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 12 novembre 2019 (A/1724/2019-FPUBL ATA/1672/2019). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. A.________ est entrée au service de la Commune de Chêne-Bougeries (ci-après: la Commune) le 1er mars 2010 en qualité de coordinatrice "Prévention et Sécurité" avec la tâche notamment de réorganiser le corps des agents de police municipale (ci-après: APM). Une année plus tard, la Commune a engagé B.________ en tant que chef de poste des APM, adjoint à A.________. A la suite de la réorganisation de l'administration communale mise en place à l'automne 2015, A.________ a occupé le poste de coordinatrice jeunesse "Prévention et Sécurité". B.________ n'était ainsi plus l'adjoint de A.________, mais devait collaborer avec elle en sa qualité de coordinatrice. La communication s'est alors tendue entre les deux prénommés et des courriels démontrant une incompréhension mutuelle ont été échangés, avec copie à des conseillers administratifs de la Commune.  
 
A.b. Par courrier du 30 octobre 2017, A.________ a déposé plainte pour harcèlement psychologique auprès de la Commune contre B.________. Une enquête administrative a été ouverte. Dans son rapport d'enquête du 19 décembre 2018, l'enquêtrice a conclu qu'un harcèlement psychologique à l'encontre de la plaignante n'était pas établi, mais que celle-ci avait été subjectivement atteinte dans sa santé psychique. S'agissant du ton et des termes employés par B.________ dans ses courriels, l'enquêtrice a relevé que s'il était inacceptable de traiter une collègue de travail "d'adolescente attardée", un tel débordement était toutefois resté isolé; par ailleurs, les réactions intempestives de B.________ faisaient écho à celles de A.________, qui ne l'étaient pas moins et qui procédaient notamment de l'absence de communication voulue par elle.  
 
A.c. Par décision du 1er avril 2019, la Commune, prenant acte du rapport d'enquête du 19 décembre 2018, a constaté une atteinte à la personnalité de A.________ de la part de B.________ et a réservé le volet disciplinaire à l'égard de ce dernier.  
 
A.d. Dans le délai au 12 avril 2019 qui lui a été imparti pour faire valoir son droit d'être entendu sur le principe et les motifs de la sanction envisagée par la Commune à son encontre - soit un blâme -, B.________ a conclu à ce que la procédure soit classée sans suite. Par décision du 19 juin 2019, la Commune a prononcé un avertissement à son encontre. Statuant le 25 février 2020, la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève (ci-après: la Chambre administrative) a admis le recours de B.________ contre cette décision, qu'elle a annulée. Par arrêt du 27 octobre 2020, le Tribunal fédéral a admis le recours constitutionnel subsidiaire formé par la Commune contre ce jugement, l'a annulé et a confirmé la décision du 19 juin 2019 (cause 8D_4/2020).  
 
B.   
Dans l'intervalle, A.________ a recouru auprès de la Chambre administrative contre la décision de la Commune du 1er avril 2019, en concluant à la constatation d'un harcèlement psychologique de la part de B.________ (A/1898/2019). Ce dernier a également recouru contre cette décision en concluant à son annulation (cause A/1724/ 2019). 
 
Par jugement du 12 novembre 2019, la Chambre administrative a joint les causes A/1724/2019 et A/1898/2019, a rejeté le recours de A.________ dans la mesure de sa recevabilité et a admis celui de B.________; elle a annulé la décision de la Commune du 1er avril 2019. 
 
C.   
A.________ forme un recours en matière de droit public contre ce jugement, en concluant à ce qu'il soit constaté qu'elle a été victime de harcèlement psychologique de la part de B.________. 
 
Tant la Commune que B.________ concluent principalement à l'irrecevabilité du recours, cela également si celui-ci devait être considéré comme un recours constitutionnel subsidiaire, et, subsidiairement, à son rejet. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. La cause relève du droit public, de sorte qu'en principe, la voie ordinaire de recours est celle du recours en matière de droit public (art. 82 let. a LTF). Cependant, en ce qui concerne les rapports de travail de droit public (et sauf s'il se rapporte à l'égalité des sexes), le recours en matière de droit public est subordonné à la double condition que la décision attaquée concerne une contestation pécuniaire et que la valeur litigieuse atteigne au moins 15'000 fr. (art. 83 let. g LTF en corrélation avec l'art. 85 al. 1 let. b LTF). Même si le seuil requis de la valeur litigieuse n'est pas atteint, le recours est néanmoins recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (art. 85 al. 2 LTF).  
 
1.2. Dans le cadre de cette procédure, la recourante a seulement pris des conclusions en constatation de droit. Tout comme devant la cour cantonale, elle ne fait pas valoir de prétentions pécuniaires. Par conséquent, la voie du recours en matière de droit public n'est pas ouverte. Seule l'est la voie du recours constitutionnel subsidiaire pour violation des droits constitutionnels (art. 113 et 116 LTF).  
 
2.  
 
2.1. Selon la jurisprudence, l'intitulé erroné d'un recours ne saurait nuire à son auteur, pour autant que toutes les conditions formelles de la voie de droit appropriée soient remplies et que la conversion du recours soit possible (ATF 138 I 367 consid. 1.1 p. 370; 134 III 379 consid. 1.2 p. 382).  
 
2.2. La qualité pour former un recours constitutionnel subsidiaire suppose un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 115 let. b LTF). Les intérêts que la recourante invoque doivent être protégés soit par une règle du droit fédéral ou du droit cantonal, soit directement par un droit fondamental spécifique (ATF 136 I 323 consid. 1.2 p. 326; 133 I 185 consid. 4 p. 191 ss), par opposition à des droits constitutionnels non spécifiques, tels que l'interdiction de l'arbitraire, qui ne peut être invoquée que si les normes visées accordent à l'intéressée un droit ou servent à protéger ses intérêts prétendument lésés (ATF 145 I 239 consid. 5.3.3 p. 247; 138 I 305 consid. 1.3 p. 308). Indépendamment du point de savoir si la recourante est légitimée sous l'angle de l'art. 115 let. b LTF à remettre en cause une décision sur le fond, elle peut faire valoir la violation de ses droits de partie équivalant à un déni de justice formel. Mais elle ne doit alors pas invoquer par ce biais, même indirectement, des moyens qui ne peuvent pas être séparés du fond (ATF 136 I 323 consid. 1.2 p. 326 et les arrêts cités).  
 
2.3. En l'espèce, la recourante n'invoque aucune norme dont elle pourrait déduire une position juridiquement protégée, raison pour laquelle les intimés soutiennent que son écriture, même convertie en recours constitutionnel subsidiaire, serait irrecevable. On peut toutefois se passer d'examiner cette question dans la mesure où la recourante se plaint de plusieurs violations de son droit d'être entendue (art. 29 al. 2 Cst.), que ce moyen est recevable dans le cadre d'un recours constitutionnel subsidiaire et que, comme on le verra ci-après, l'un des griefs est bien fondé et conduit à l'annulation du jugement attaqué.  
 
3.  
 
3.1. Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 p. 170 s.; 142 III 48 consid. 4.1.1 p. 52 ss; 140 I 285 consid. 6.3.1 p. 298 s. et les arrêts cités). Le droit d'être entendu est à la fois une institution servant à l'instruction de la cause et une faculté de la partie, en rapport avec sa personne, de participer au prononcé de décisions qui lèsent sa situation juridique (arrêt 4A_364/2015 du 13 avril 2016 consid. 2.2, non publié in ATF 142 III 355; ATF 126 I 15 consid. 2a/aa p. 16; 124 I 49 consid. 3a p. 51, 241 consid. 2 p. 242 et les arrêts cités). Le droit de s'exprimer sur tous les points importants avant qu'une décision soit prise s'applique sans restriction pour les questions de fait.  
 
Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (ATF 144 I 11 consid. 5.3 p. 17; 137 I 195 consid. 2.2 p. 197). Selon la jurisprudence, sa violation peut cependant être réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen (ATF 145 I 167 consid. 4.4 p. 174; 142 II 218 consid. 2.8.1 p. 226 et les arrêts cités). Toutefois, une telle réparation doit rester l'exception et n'est admissible, en principe, que dans l'hypothèse d'une atteinte aux droits procéduraux de la partie lésée qui n'est pas particulièrement grave (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 p. 226). 
 
3.2.  
 
3.2.1. La recourante invoque tout d'abord une violation de son droit d'être entendue au cours de la procédure administrative devant la Commune, ce que la cour cantonale n'avait, à tort, pas retenu. Cette violation consistait dans le fait qu'avant de rendre sa décision, la Commune n'avait pas pris connaissance de ses observations du 31 janvier 2019 ni examiné les arguments qu'elle y avait soulevés. Preuve en était que la Commune faisait mention des conclusions après enquête du 31 janvier 2019 et de la réplique du 22 février 2019 déposées par B.________, tandis qu'elle soulignait "l'absence de nouvelles observations de Madame A.________". La recourante précise encore que la remise effective de ses observations à la Commune ne faisait pas de doute vu le courrier de celle-ci du 6 février 2019 qui les transmettait au conseil de B.________.  
 
3.2.2. Les juges cantonaux ont considéré que la recourante avait eu maintes occasions de faire valoir son point de vue durant la procédure administrative. Elle avait pu faire entendre ses témoins et son mandataire avait assisté à toutes les auditions. En outre, elle avait eu la possibilité de transmettre des conclusions après enquête. Contrairement à ses allégations, toutes ses écritures figuraient au dossier, y compris ses observations du 31 janvier 2019. Par ailleurs, la Commune n'avait pas l'obligation de se prononcer sur la totalité des arguments avancés.  
 
3.2.3. Il ressort de la partie en fait du jugement entrepris qui résume les arguments des parties que la Commune a considéré les observations de la recourante du 31 janvier 2019 comme ayant été transmises hors délai et qu'elle n'en a pris connaissance que "bien plus tard dans la procédure". En tout état de cause, même à admettre une éventuelle violation du droit d'être entendue de la recourante à cet égard, cette atteinte a pu être réparée au cours de la procédure devant la cour cantonale, qui dispose d'un plein pouvoir d'examen en fait et en droit selon l'art. 61 al. 1 de la loi cantonale genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA; RS/GE E 5 10). Le grief doit donc être rejeté.  
 
3.3.  
 
3.3.1. La recourante se plaint également d'une violation de son droit d'être entendue en instance cantonale. B.________ avait recouru contre la décision du 1er avril 2019 tout comme elle-même, mais alors que son propre recours cantonal avait été transmis au prénommé pour détermination, l'inverse n'était pas le cas. Ainsi, elle n'avait pas été invitée par l'instance précédente à se déterminer sur le recours de B.________ - ni d'ailleurs sur les observations de la Commune à ce recours - et n'avait appris la jonction des causes A/1724/2019 et A/1898/2019 que lors de la notification du jugement qui rejetait son recours et admettait celui de B.________. Au surplus, la recourante reproche à la cour cantonale d'avoir refusé la production du dossier concernant son licenciement qui a été prononcé ultérieurement.  
 
3.3.2. En l'espèce, par décision du 1er avril 2019, la Commune a constaté une atteinte à la personnalité de A.________ de la part de B.________. Saisie d'un recours des deux intéressés contre cette décision, la cour cantonale, après avoir joint les causes, a admis celui de B.________, en ce sens qu'elle a annulé ladite décision, et a rejeté celui de A.________, qui tendait à la constatation d'un harcèlement psychologique. Il ressort du dossier cantonal que seule la Commune a été invitée à s'exprimer sur le recours du premier nommé, tandis que ce dernier a eu l'occasion de répondre au recours de A.________. La procédure suivie par la cour cantonale a donc manifestement privé la prénommée de la faculté d'exercer son droit d'être entendue avant qu'un jugement à son détriment ait été rendu.  
 
Cette violation ne peut pas être réparée devant le Tribunal fédéral, qui dispose d'un pouvoir d'examen limité en lien avec l'établissement des faits (cf. art. 118 al. 1 LTF). La cause sera par conséquent renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle rende un nouveau jugement après avoir octroyé à la recourante la possibilité de répondre au recours de B.________ ainsi qu'à la détermination de la Commune y relative. Le recours devant être admis pour les motifs qui précèdent, il n'y a pas lieu d'examiner l'autre grief de la recourante en relation avec le refus de la cour cantonale d'ordonner la production du dossier de son licenciement. 
 
4.   
L'arrêt sera rendu sans frais (art. 66 al. 4 LTF). En revanche, vu l'issue du recours, il y a lieu d'allouer à la recourante une indemnité à titre de dépens, qui sera à la charge de la République et canton de Genève compte tenu des motifs qui conduisent à l'admission du recours (art. 66 al. 3 LTF par renvoi de l'art. 68 al. 4 LTF). 
 
 
 Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est matière de droit public est irrecevable. 
 
2.   
Le recours constitutionnel subsidiaire est admis. Le jugement du 12 novembre 2019 de la Chambre administrative de la Cour de Justice de la République et canton de Genève est annulé. La cause est renvoyée à l'autorité précédente pour nouvelle décision au sens des considérants. 
 
3.   
Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
4.   
Une indemnité de dépens de 2800 fr. à la charge de la République et canton de Genève est allouée à la recourante. 
 
5.   
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Chambre administrative de la Cour de justice de la République et canton de Genève. 
 
 
Lucerne, le 3 février 2021 
 
Au nom de la Ire Cour de droit social 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Maillard 
 
La Greffière : von Zwehl